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Gipiiu i fi i
LÀ^»
V . ** fat/g,
/ t'ÉVANGI'
JU JL-i
ANALYSÉ,
SELON LA CONCORDE.
TOME QUATRIEME.
L'ÉVANGILE
ANALYSÉ,
SELON
L'ORDRE HISTORIQUE
DE LA CONCORDE,
Avec les DiiTertations fur les lieux
difficiles.
Par le R. P. Mavdvit ^ Prêtre de l'Oratoire.
TOME QUATRIEME.
&-s)Mfc4*
f Ci
tf^^ise
A TOULOUSE;
Chez Dupleix & Lap orte, Libraires/
acquéreurs du fonds de feu M. BirofTe,
rue S1. Rome , à la Bible d'or.
M. DCC. LXXII.
Avec Approbations & Privilège du RcL
fee2 3ttS9
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C^Sà
ANALYSE
D E
L'ÉVANGILE
SELON
LA CONCORDE.
QUATRIEME PARTIE.
CHAPITRE CXXVIII.
QUATRIEME PASQUE.
Cène pafchaU.
Pascha.Ce-
E Jeudi fuivant arriva le ** »a*cam.
vrai 1 4. de la lune , fupputé
fur la conjonction avec le
Ufoleil, & la veille de Pâ-
que , où Ton devoir, félon la loi,
immoler l'Agneau pafchal. Je dis,
Tom. IF. A
C A PU T
CXXVIII.
A. i«. B. 14.
C 11.
i Analyse
A.1ÉB.T4. félon la loi, parce que, félon la tra-
c-11' dition , les Juifs avoient transféré
la veille au lendemain Vendredi , &
la fête des Azymes au jour du Sab-
A. i6.Vr\- bar. Ainfi le premier jour des pains
m.Utuemdie fans levain , félon les Evangélittes , eft
Azymorum , , r • \ 1 •
c. in quans- le jour , au loir auquel commençait
ceffe cratoc- pufage de ces pains : au lieu que
adiPalcha. . & i> r 11 1 •
laint Jean 1 appelle le jour avant
la fête de Pâque , parce qu'il parle
de cette fête , félon que les Juifs
la firent cette année. On peut con-
fidérer dans ce Chapitre , I. la prépa-
ration de l'Agneau Pafchai. II. La
manducation.
I. Comme toute la ville de Jéru-
falem étoit pleine de Juifs étrangers,
qui y étoient venus de toutes parts
pour célébrer la Pâque , ôc qu'après
Tordre des fouverains Prêtres pour
arrêter Jésus, on ne pouvoir pas
fe fier à toutes fortes de perfonnes,
A.Acceflc- Pierre ôc Jean demandèrent à Jésus
xuntdifcipuli \ -t i ■> iiA 1 '
ad jefum di- OLl l* vouloir qu on al!at lui préparer
cemes : b. ce qui étoit nécellaire pour manger
mus? & pa- la Pâque. Il les deftina eux-mêmes
rcmus tibi ut pour faire cette préparation qu'ils
manduccs l ' /*' o *i 1
Pafci.a ? avoient propoiee , ce il les envoya
Et miteit Jans Ia Ville chez un tel , dit faint
duos ex difei- \ * * • r • r
puih fui», c. Matthieu , en lupprimant ion nom ,
de l'Evang. Ch. CXXVIII. 5
parce que ce Difciple vivoic encore petrum &
îorfqu'il écrivoit fon Evangile, & Joannem, di-
qu'il ne voulue pas l'expofer lui Se fa J^i'Sg
Emilie à la fureur des Juifs. Selon PaYcha ut
feint Marc Se fa% Luc , Jésus ^duA""in£
die a ces deux envoyés qu'en entrant ^ixcruntru-
dans la Ville , ils trouveroient un œuJj parc
homme chargé d'une cruche d'eau, Etdixkad
qu'ils n'avoient qu'à le fuivre îufques eos.: B- Iteia
dans la maiion ou il entreroit , oc c. ecceincro-
qu'ils diroient de fa part au maître euntibus- b,
de la maiion , qu îldevoit raire chez bis homo ia-
lui cette Pâque avec fes Difciples : |cnaîn a4u*
\ v r ,] bajulans,fe-
oe pour excuier l anticipation qu il quimini eum
failoit du jour de la Pâque marqué Ç 1,ld°»ura,
par la tradition des Juirs, il ajouta trat ; b. &
qu'il étoit preffe du temps de fon dé- ?uocura<iuc
part , comme s il diloit qu il ri avoit cire c. pam-
pas le loifir d'attendre plus lone- familias do"
> i • i i mus,
temps. Qu'alors il leur montrera dans
un haut étage une grande chambre magiftèc "a!
toute préparée , c'eft-à dire , meu- TemPus me
blée de tables Se de lits ( car alors apuîT^fadÔ
on mangeoit couché fur des lits ) p,arrcl,a1 cum
èe que la ils préparaient ce qui etoit \&t b. ubieft
nécelTaire pour faire la Pâque. 11 'eh<?!°mea-
c ii • J B, j i c C-ub»cft di-
ralloit avoir du courage ce de la rer- verforium ?
meté pour obéir à cet ordre , Se ubl ,Pafch*
pour recevoir même Jésus en la lu meisman-
maifon. Les Difciples néanmoins d;
Aii
luceni ?
4 Analyse
a.kj.b. 14. allèrent dans la Ville : ce qui mon-
c. ii. tre qUe JESUS n'y éroic pas. Ils
b. Et ipfe trouvèrent toutes chofes comme
vobis démon- t i * ' v o 1 1
ftrabic cœna- Jésus les avoit prédites j & dans le
cuium gran- temps preicrit pour cela, qui étoit
de.ftratumi ■ ll • . l , r ■ • r >\
&ii!icpara:c depuis trois heures du loir juiqua
nobis. fix 5 ils préparèrent , félon Tordre
Er abierunt Je JESUS tout ce qu>[[ falloir
jus ,& vene- pour la Paque : ce qui conhltoit a
runt in dvi- ruer ['Agneau , à l'habiller, & à
tatem: Se in- . A . o ' '
vencrunt fi- le rôtir. Car pour la recherche de
eut dixerat ja confompncm du pain levé , c*é-
toit 1 artaire de 1 hôte qui leur pre-
& parave- •/-•/•
runtPafcha, toit la mailon.
A.ficutconf- \\t Sur le foir Jésus fe rendit à
fus. ' la maifon avec le refte de Ces Difci-
b. vefpere p]es . & l'heure étant venue , qui
autemfado, V • \ r l *1 L' m\ r ^
venit cum etoit a loleil couche , il le mit a ta-
duoHecim.c. D}e en \em difant qu'il avoit tou-
Et cum ratta . a i r i
effet hora, jours eu un extrême dehr de man-
difeubuit, & ger avec eux certe pâque avant que
duodecim A- » è j r^-rr •
poftoli cum de louiînr. "0)/££ la JJiJJcrtatwn
co- XXIX. La raifon qu'il en donne
Etait iliis: q. qU'j[ n'en mangera plus défor-
Defidcno de- .T. r >\ r
lîderavi hoc mais , jufqu a ce que cette figure
Pafcha man- fa £- ± & fo accompliire_
ducarevobii- f
cum ante- ment dans le Royaume de Dieu. Il
quampatiar. apreHe ^g fe ^ granJ chef_
pico enim d'œuvre de fa puiffance & de fon
vobis , quia . j- * p / i \rr J
ex hoc non amour , je dis 1 etablillement dy.
de l'Evang. Ch. CXXVIII. 5
myftere adorable de l'Euchariftie , manducabo
c'eft-à-dire, que c'étoit la dernière «llut|* f°"c
... ,> r r^vr impleatur in
Paque qu il dut manger avec les Dii- regno Dei.
ciples avant que d'accomplir l'agneau
figuratif par le véritable qu'il alloit
fubftitner en fa place.
Après la manducation de l'Agneau Et acce?zo
pafchal , il prit, félon la coutume, calice gracias
i • ' i * M'J* eeit &c dixic:
une coupe pleine de vin mêle d eau , &l??iK &
& ayant rendu grâces à fon Père de diridiceintec
ce que le règne des ombres & des vo* :
figures étoit palTé , il en goûta le
premier par cérémonie , &c il la fit
palier dans les mains des Diiciples
pour en boire chacun à fon tour :
Prenez j leur dit- il, cette coupe _, 8c Hîcoenïmro.'
t -t ti 1 tT bisquodnon
la vuide^ entre vous. Il les ail ura tibam de ge-
qu'il ne boiroit plus du fruit de la neratione rî-
• . r ,\ L i i r^' tis , donec
vigne juiqu a ce que le règne de Dieu regnum Dci
fut arrivé, ou, ce qui eft la même venia:*
chofe , que c'étoit la dernière fois
qu'il buvoit du vin , avant que le
règne de Dieu parût. C'eft ainfi qu'il
appelloit le changement miraculeux
du vin en fon fang , comme étant
un des plus grands effets de l'empire
de Dieu fur les créatures. Ce n'eft
donc. pas ici l'inflitution de l'Eucha-
riftie ; ce n'en eft que la promette
exprimée prefqu'en mêmes termes à
A iij
6 Analyse
D. ij. l'égard de ces deux parties , & qui
ne tardera guère à s'accomplir.
s
capitt CHAPITRE CXX1X.
C X X 1 X.
d. m- Lavement des pieds.
JLotlo pedumt
Aint Jean feul rapporte les préli-
minaires de l'inftitution de l'Eu-
ehariftie , qui ont été omis par les au-
tres Evangéliftes ;&ony comprend ,
1. les vues 8c les motifs de Jésus dans
ce grand établiflement. 11. La pré-
paration des Apôtres à la rece-
voir.
I. Les motifs fe prennent, i. de la
circonftance du temps , qui fut un
jour avant la fête de la Pâque Judaï-
D. ij. An- °lue' V°ye\ la Dijjertatlon XXX. Je-
« cticm fcf- sus ne pouvoit pas attendre plus long-
tum Pafchz , \ • n- c C
feiens jefus, temps a mitituer ce Sacrement5 ia-
quia venit chant que l'heut e étoit venue où il de-
hora ejus, uc . l . i j
tranfeâc ex voit partir de ce monde pour retour-
hoc mundo ner j fon Pere.
ad Patrcm j ^\ r j r
2. Ils le prennent de ion amour
pour les fiens qu'il lailïbit dans le
monde , orphelins & privés de fa
préfence, expofés à tous les périls.
<um dilexif- Comme donc des le commencement
de l'Evang. Ch. CXXIX. 7
de fa million il leur avoit témoigné fctfuoi^fic-
... . ° ., ranc m raun-
ion amour en mille manières 5 il do , in finem
voulut le fignaler encore plus à la fin dilexitcos.
de fa vie , & leur en laifler un
monument éternel dans ce Sacre-
ment , qui ne refpire que fon a-
mour.
3. Ils fe tirent de la circônftance
des perfonnes, c'eft-à-dire , de (es
ennemis ; car à la fin du fouper , lorf- fadt?c c^
que le diable avoit mis dans le cœur diabolus jam
de Judas la réfolution de le trahir, & "^ J*
que les Pharifiens altérés du fa«g de dereceumJu-
Jesus traitoient avec lui de fa liberté uLto*?*
& de fa vie , il redouble fon amour
par cette opposition , Ôc il donne
aux hommes , & en particulier à
Judas, fa chair à manger & fon fang
à boire.
4. Ils fe tirent du pouvoir infini
qu'il avoit entre (es mains pour exé-
cuter ce myftere , puifqu'il falloir
changer en un moment une créature
dans une autre. Aulli il fe fouvient,..
-, , , f fciens quia
que Ion lJere lui a donne la toute- omnia dcdic
puifïance , & la difpofition abfolue ei Patcr in
a u r o » > r • manusv ' &
de toutes choies ; & qu étant lorti quia à Deo
de Dieu, auquel il retournoit, rien Dcumvadit^
ne lui étoit impoflibîe. Toutes ces
chofes confidcrécs, il fe réfolut en-
Aiv
8 Analyse
D-jî* fin à l'exécution de Ton deflfein ; Se
comme il falloit commencer par pré-
parer fes Difciples à recevoir un fi
grand Sacrement,
furgit àece- II. 11 fe leva de table pour leur
n*> laver les pieds, c'eft-à- dire , pour
faire au fond de leurs âmes ce qu'il
alloit faire fur une partie de leur
corps, pour purifier leurs affections
dont les pieds font la figure , &
pour nettoyer leurs confeiences de
toutes les taches qu'ils avoient con-
& ponit ver- tractées. 11 quitta fa robe de deflus ,
cimenta fuaj jQm ja }ongUeur auroit pU l'embar-
raffer , ou qu'il auroit pu falir ; il
te cùm acce- fe ceignit d'un linge pour effuyer
pifTec tinte- }eurs pieds ; & ayant verfé de l'eau
um, pra:cm- r 7 . J ,
»itfe:d«inde dans un baiiin, il le mit en état de
micma.iuara fa-re cec humble office. On y peut
capit lavare coniiderer, 1. la necellite delà purih-
pedes difa- catjon intérieure. II. Sa funSfance.
pulorum ,oc , ... , i r • i i
extergerc lin- 111. L'utilité & le fruit du lavement
«'rLInôuV" extérieur.
venk ergo *• La neceiiite paroit en ce que
ad simonem J e s u s s'étant adreiTé à Simon Pier-
dicir ei Pe- re Ie premier , comme étant le plus
trus : Domi- proche de lui , cet Apôtre le refufa
ne, tu mihi St r j r\ • -C • J- i
lavas pedes ? u abord : Ç>#oz j Seigneur j dit - il ,
HcfpomîïtJe- vous me laverie? les pieds ! Jésus
fm , & dixit i ' i • S • j- >i r
ci : pour le réduire lui dit qu il ne iavoit
de l'Evàng. Ch. CXX1X. 9
pas encore ce que figninoit l'action %**&
que lui J e s u s ailoic faire , ni pour- modo , fcies
quoi il la faifoit ; mais qu'il fauroit a«emPoftea.
bientôt l'un & l'autre ., c'eft-à dire , .
la néceflué de cette pureté intérieure ,
que marquoit le lavement des pieds ,
éc la dignité infinie de la commu-
nion de fon corps de de fon fang,
qui étoit la raifon de cette pureté.
Ainfi il attribue le refus de Pierre à
fon ignorance touchant une chofe 11
néceuaire.
Cependant il ne fe rendoit pas DicicerPc
* .- ,.. , , r . trus: Nonla-
pour cette railon qu il ne penetroit vabis mihi
point, & il protefta qu'il ne fouffri- F^esinster-
roit jamais que Jésus s abbaiisat die ci jefus :
jufqu'à lui laver les pieds. J e s u s si non lav,era°
{ . 1, ,.. r . te, nonha-
lui répondit que s il ne les lavoit pas, bebis parte
il n'auroit point de part avec lui. mecuau
C'eft ainfî qu'il exprima la commu-
nion de rEuchariftie ; & il vouloir
dire que, comme dans cet état, il
n'étoit pas encore difpofé à recevoir
fon corps & fon fang , s'il ne le
lavoit pas , il n'y participeroit point.
Il faut l'entendre ainfî , à moins que
de faire de ce refus refpectueux un
péché mortel , qui l'eût éternellement
féparé de Jesus-Christ: ce
qui n'eft point vraifemblable. On
Av
io Analyse
D'1)- pour tourner cette raifon en cette
forme. La communion de mon corps
&. de mon fang vous eft nécefîaire
pour le falut j or , la purification in-
térieure , & le lavement extérieur,
qui en eft le figne , vous font nécef-
faires pour recevoir la communion
de mon corps 6c de mon fang. L'une
&: l'autre vous font donc néceifaires
pour le falut.
II. La fuffifance paroît; car , quoi-
que Pierre ne comprît pas encore de
quoi il s'agiilbit , il conçut néan-
moins que ce lavement étoit myrte-
rieux , & qu'à le refufer il y alloit
pour lui d'être retranché de J e s V s
Dicit ei Si- ^ a 1 *l
tnonPetrus: en une certaine manière. Alors il
Domine, non lui offrit à laver non- feulement les
tantùmpedes j i * o 1
mcos , fcd & pieds , mais encore la tête cV les
mauus,&ca- mains. J £ su s, qui parloit toujours
rut. Dicic ei r i , , • / l , .' «
Sefus : Qui lelon la vente , marquée par le la-
locutui eft , vement extérieur , lui répondit qu'il
JJfc ut f èdei fuflSfpit de laver les^ pieds à celui
l*ret , fcd qUi avoit déjà été lavé , parce qu'il
cil mundus / • . i- i
totus : étoit net tout entier ; au lieu que la
poufîlere s'attache toujours aux pieds
qui touchent la terre , Se elle a befoir*
de temps en temps d'être nettoyée ,
c'eft -a dire , que quelque jufte que
foit une ame , elle a toujours befoin
de l'Evang. Ch. CXXIX. 1 1
que la grâce , comme une eau vive ,
purifie ion cœur des ordures qu'elle
contracte dans le commerce du mon-
de. Or, (es Apôtres étoient purs par &vosmundî
I r> * o \ C ' •fT eltis, fednoii
le baptême, <x par la roi agiilanre omnes : fcis-
qu'ils avoient en lui, quoiqu'ils ne ba^ enj.m
\ r rc >-i • qiiifnameflec
le rulienr pas rous : ce qu il ajouta, qui tradcrec
parce qu'il connoiiïoit celui qui le eum;pr°pte-
trahiffoit. 11 laiiïa à fuppléer la con- Non cftii
clufion , qui eft qu'ils n'avoient be- muncli om-
foin finon qu'il leur lavât les pieds.
Après avoir achevé cette humble céré- Poftquam
monie, il reprit (es habits , & fe re- jrgo laYitPoc-
, . r deseorum, Se
mit a table. accepit vefti-
III. Avant l'inftitution du Saint Sa- "!cnca fua :
•11 r -il- 1 • Cum recu"
crement , il leur ht recueillir les un- buiflet ùe-
lités ôc les fruits de cet office exté- rum '
rieur , en les faifant réfléchir fur l'ac- 4ixice.\s i.Scî"
,., . r . us quid fece-
non qu il venoit de raire. rimvobis ;
Le i. fruit eft l'imitation de fon
humilité , qu'il preffe par cet argu-
ment du plus au moins. Il établit fa vosvocatîs
qualité de Maître & de Seigneur en- %'%*&*".
j o oc Domine i
vers eux , & il approuve ces noms & bene di«-
honorables qu'ils lui donnent ; en ^^^ £tc"
quoi il n'y a ni arrogance, puifqu'il
les pofïede à jufte titre, ni vanité,
puifqu'ils font encore infiniment au-
defTous de ce qu'il eft en effet. Si donc,
tout Maître qu'il eft pour les inftruire, hv/pcSe/v?
A vj
12 Analyse
D15. & tout Seigneur qu'il eft pour leur
fhos qomi- commander, il n'a pas laine de leur
ïfteVffc^ *dver ^es V1Qds > ne dcivent-ils pas à
<ieberis aiter plus forte raifon , eux qui font égaux
KCpci;eSs!aVa emr'eux > fe rendre les uns aux autres
cet office d'humilité ? parce que des
Ixemplura r^.r . , . . r • 1» 1
cnimdedivo- Dilciples doivent iuivre 1 exemple
bis,uttqUem- je jetir Maître , & faire envets leurs
admodum r >-i r • i
ego fed vo- rreres ce qu il a rait le premier envers
ficiad&V°SeUX-
Cela ne s'entend pas feulement de
la cérémonie corporelle , mais cela
s'accomplit fpirituellement lorfque
nous pardonnons au prochain nos of-
fenfes , &c que , par nos prières , nos
confeils, nos corrections fraternelles,
enfin par toute la fuite d'une vie édi-
fiante, nous avons foin de purifier les
affections les uns des autres.
. 11 confirme la raifon tirée de fou
Amen amen r
dico vobis , exemple , parce qu un lerviteur n elt
^?? efLff£ Pas plus grand que fon Maître, ni un
VU6 major r Ar oj ~1 ' ;
domino fuo , Apôtre , c eft - a - dire , un Envoyé 3
SC ma°ofr n'eft Pas.de Pluf grande condition
efteoquimi- que celui qui l'envoie. Si donc le
Maître s'eft abbaiffé jufqu'à rendre
à fes ferviteurs & à fes Apôtres un
aulïi vil & humble office qu'eft celui
de leur laver les pieds , comment
ieroit-il poffible que les ferviteurs Se
de l'Evang. Ch. CXXIX. ij
les Difciples refufaflent de fe le ren-
dre les uns aux autres, & s'en cruf-
fent déshonorés / Il en conclut que sî hxc CdJ
s'ils comprennent bien ce qu'il leur tis, beau erî-
dit, & ce qu'il vient de faire, ils *« fecetiti3
feront heureux s'ils le mettent en pra-
tique.
Il excepte Judas de ce bonheur , 3c ï00 *0
i . ' omnibus vo-
par conléquent de cette corujoiiiance bis die©: Ego
& de cette a&ion. Il déclare que ce *ioquosei«,
qu il dit la , il ne le dit pas d eux
tous. Il fait qui font ceux qu'il a
choifîs pour le bonheur éternel. Que
s'il en fouffre quelqu'autre en fa
compagnie , & même à fa table , c'eft: J^ISr fcri£
qu'il faut que cette parole foit accom- tura :
plie ; Celui qui mange avec moi j ducatmecum
lèvera le pied contre moi. Il a accom- panem, Uva-
i- • r >• • i ■ t j • biteontrame
ph julquici la part qui le regardoit caicaneum
dans cette prophétie, en donnant du frum.
pain à Judas j mais il va encore
fiorter plus loin fa bonté , & pour
ui amafïer des charbons de feu fur
la tête , il lui va donner fa propre
chair à manger. L'original porte
lèvera le talon j comme c'eft: la der-
nière partie du corps , il repréfente
le dernier coup que Jud.is méditoit
de lui donner en le quittant, &
comme pour lui dire adieu, qui étoit
14 Analyse
D- '* de le livrer entre les mains de fes en-
Amodè di- nemis. 11 fait remarquer aux autres
rovobis, pri- r>r , / in- r
ufquam fiât : A^nciples cette prédiction , ann que
uc cùm foc- Ja chofe étant accomplie , ils fe fou-
tum fuînc , • ni, . r , ,. „ ,.,
crcdariSjquia viennentqu il 1 avoit prédite, & qu ils
ego fum. reconnoiflent ce qu'il eft , c'eft-à-di-
re , le Fils de Dieu , & la fageiîe du
Père. 11 parloit de la trahifon pour
les empêcher de croire qu'il eût été
furpris y mais ils ne comprirent pas ce
que vouloient dire des termes fi gé-
néraux.
Au refle , fi faint Jean n'a point
écrit l'inftitution de l'Euchariftie ,
c'eft qu'il la fuppofe atfez marquée
par les trois autres Evangéliftes. Il
ne laiflfe pas néanmoins de rapporter
le lavement des pieds comme une
préparation à ce divin Sacrement.
C'eft au moins le fens le plus raifon-
nable qu'on puiflfe donner à cette
cérémonie , & à tout ce qui la pré-
cède.
Le x. fruit, qu'il ne relevé pas,
mais qui fe tire clairement de la fin
de cette cérémonie, regarde les Mi-
nières de fon Eglife i Se comme il a
lavé les pieds à fes Apôtres pour les
difpôfer a la communion , il leur re-
commande aufïi de s'offrir volontai-
de l'Evang. Ch. CXXIX. 15
rement aux fidèles pour les purifiée
de leurs péchés par le facrement de
Pénitence , avant que de leur diftri-
buer les facrés myfteres. A cet égard yidefup.p:
il leur dir qu'il leur a donné l'exemple Xi*» lt ir-*
qu'ils doivent imiter.
Le 5. qui regarde les fidèles, efl:
qu'ils doivent conferver , comme les
Apôtres , la pureté & l'innocence de
leur Baptême j ou fi , avant que de
s'approcher du corps du Sauveur , ils
apportent quelque matière au facre-
ment de Pénitence , ce ne foit que
cette pouffiere qui s'attache à la plante yi<kfup.p;
des pieds , c'eft- à-dire, ces défauts lé- iîz> i%
gers , qui font inévitables dans le
commerce du monde , de non cette
perfidie que Judas y apporta.
CHAPITRE CXXX. ca,.cxxx.
A. 16. B. 14.
Eucharijlie.
C. ix. D. i).
£uchénftia<
APrès ces paroles Jésus infti-
tua l'Euchariftie j & dans cette
action nous pouvons confidérer tou-
tes les circonftances qui l'accompa-
gnent. I. A l'égard de la consécra-
tion du pain, II. A l'égard de celle du
iC AtfALYSÎ
C. xi' D ,4'. V^ ' ^Ul ^0nC ^eS ^eUX Par"es ^e CC
' myftere.
t. Confc- it Consécration du Pain,
(ratio partis. J
a. i6. cœ- !• La première circonftance eft
nantibus au- qvl'A l'inftitua après la manducation
de l'Agneau pafchal , & lorfque le
fouper duroit encore , afin de faire
fuccéder dans un même repas la vé-
rité à la figure. D'ailleurs il voulue
finir , par ce Sacrement , le dernier
repas avec fes Difciples , pour l'im-
primer plus profondément dans leur
mémoire,
uccepit Jefos La 2, efl- ciu*il prit entre fes mains
panem, , r i * r »-i >
du pain lans levain , parce qu il n y en
avoit pas d'autre fur la table, ni dans
toute la maifon : cette forte de pain
étant ordonnée pour la manducation
de l'Agneau pafchal.
La z. eft, qu'il rendit grâces à fon
CcC. gratias ] \ 1. ,.., . B , ,
egic, Père du pouvoir qu il lui avoit donne
de diipofer de Terre des créatures ,
pour les faite feivir a fes myfteres. 11
employa cette action de grâces avant
les deuxeonfécrations du pain & du
vin.
A. benedixie, La 4. eft , qu'il bénit, par quelque
gefte fenfible , le pain qu'il tenoit ,
de l'Evang. Ch. CXXX. 17
pour y rendre fes Difciples attentifs ,
Ôc par cette bénédiction efficace Ôc
route-puiftante , il le changea réelle-
ment en fon propre corps. Voyc\ la.
Dijjertation XXXI.
La 5 . eft , qu'il rompit ce qu'il ve- ac fregïcj
noit de bénir &c de changer , ÔC qu'il
en fit treize pot tions , autant qu'ils
étoient de perfonnes à table , ou peut-
être il les fit à mefure qu'il les diftri-
buoit , en rompant à chaque fois
une partie de ce qu'il tenoit entre les
mains. Fraccion d'autant pius rifée ,
que les pains azymes étoie c fort
plats.
La 6. eft, qu'après avoir pris pour
lui la première portion ôc l'avoir
mangée , il diftribua les autres à (es deditquedîf.
Difciples fans en excepter Judas , en cipulii fuis ,
leur difant : Prene^ & mange^_y cejl ^\ *& "£
ici mon Corps qui ejl donné pour vous ; medite :
» 1 • c C. Hoc eft
ce qu on peut expliquer, qui lera corpus me-
facnfié à la croix pour vous ; ou qui um » , ^u,oti
n t J-n. t_ ! r> provobisda-
vous elt prelentement diltribue. Ce[Ur:
fécond fens eft conforme à cette le-
çon de faint Paul , félon l'original ,
qui vient d'être rompu pour vous le
donner. . c . .
t a »-t 1 j hocfac,re ,n
La 7. elt , qu il leur commanda meam com-
de faire la mcme action en mémoire nçe™toratio*
i8 Analyse
a. i<5. b. 14. de lui. Commandement qui s'étend
" jufqu'à la fin des fiecles, félon le
même Apôtre , qui nous apprend
que toutes les fois que nous mange-
rons de ce pain, & que nous boirons
de ce calice, nous repréfenterons la
mort du Seigneur jufqu'à ce qu'il re-
vienne.
à. Confie- 1. Confécration du Vin,
(ratio vini»
similitcrA. \\ La ï circonftance de la confé-
6c accipiens , . ,
calicem , cration du vin , eit qu il prit de même
c. poftquam le calice après fouper. Saint Luc ayant
.omis cette circonltance de remps avant
la confécration du pain , il l'a remife
ici pour avertir que la cène légale
étoit paffée, & que l'Euchariftie fut
inftituée en fa place.
La 2.e(l, qu'il répéta l'action de
A. gratias e- grâces & la bénédiction , pour faire
git \ àc dédit p rr »i 1 • j
Siis , dicens : volr c[ue * e"ec cl11 " devoit produire
fur le vin étoit diftinct ' de celui qu'il
avoit produit dans le pain.
om^s" hÎc La,3 • eft , qu'il en but le premier ,
eftcnim fan- & qu'il invita tous fes Difciples à en
ftS;; boire après lui, en leurdifant: Cefi
ci , qui oro ici mon Sang j le fans du Nouveau
mulris efuin- t n ■ r / / \ » /-> •
detur in re- * ejtament qui Jera répandu a la Lrozx
miflîoncm pour pluf.eurs en la rémijfion de leurs
peccatoruru.
de l'Evang. Ch. CXXX. i9
péchés. A quoi il faut joindre les pa-
roîes qu'ajoute faint Luc , & qui ,
fans doute, furent aufli prononcées :
Ce calice efi le Nouveau Teftament dans p« H»c cft
f, J , i i- n r Calix,novum
mon oang _, lequel calice ejt prejente- Tdiamen-
ment répandu pour vous. Exprelîion tum in fan"
par le prêtent , ielon 1 Original , qui qui pro vobis
fait voir clairement que le Sang du fandetur.
Nouveau Teftament étoit réellement
dans le calice , ôc que l'erTufion pré-
fente du calice dans la bouche des
Aoôcres, étoit un vrai facrifice. Koye^
la Dijfertaùon XXXIL
La 4. eft , que tous les Difciples , B- Et bibe*
lans excepter Judas, en burent dans granei.
le même calice.
La 5. eft, que Jésus les aflura que,
comme c'étoit la premiete fois qu'il
buvoit fon Sang avec eux, ce feroit
auffi la dernière jufqu'après la réfur- A. Dîcoau-
__JEL! 17 . tem vobis :
rection. ht pour exprimer cette pen- nonbibama-
fée il les a(ïura qu'il ne boiroit plus modo de hoc
dr • j 1 • / » n. ^ j* eeni'mine vi-
e ce rruit de la vigne (celt-a-dire fis ufquc jn
de fon Sane , parce qu'ainfi qu'il le diem j""".»
di i-in.1- \ • r cùm illud bi-
îra plus bas , il elt la vraie vigne ) jul- bam vobif-
qu au joui ou il le boira tout nouveau cum novum
11 1 r n ia regno pa-
avec eux dans le règne de Ion Père , triS n^i,
c'eft-à-dire , tout renouvelle par fa
réfurrect-ion , qui eft l'effet du règne
& de la fouveraineté de fon Père.
20 Analyse
a. te*, h. Voyez la Differtation XJXIII.
c. 11.D. 13. r^]C' » * c >r ~
Cela rait voir qu après la returrec-
tion Jésus a célébré i'Euchariftie
avec fes Difciples , comme il eft clair
par l'hiftoire d'Emmaiïs , fi ce n'eft
qu'alors il ne confacra que le pain ,
pour montrer que la communion, fous
les deux efpeces , n'étoit pasnéceflai-
re. Ainfi il ne faut pas confondre ces
paroles avec celles qu'il dit après la
coupe légale. 11 les a dites deux fois :
la 1. pour avertir qu'il ne boiroit plus
de vin , jufqu'au règne de Dieu, qui
étoit l'établiirement de I'Euchariftie.
La 2. pour donner un fécond avis
qu'il ne boiroit plus fon Sang avec {es
Apôtres jufqu'après fa refurrection ,
qui eft encore le temps du règne de
Dieu.
ca.cxxxi. CHAPITRE CXXXI.
c! t*.D. rj! Désignation du Traître, & fa
Notatio,& fortie.
tgreflus prodi-
tons.
I. Traître marqué.
d. 13. Amen A Vantque de changer de difeours,
amen dico h\ -i i j ' 1 i •
bis ; Qui ac- M -L " leur dcclara que celui qui rece-
DE l'EvàNG. Ch. CXXXI. 2 1
voit un de fes Apôtres le recevoit lui- ciPîc fi <luem
A l i • • « mifero , me
même ; mais que celui qui le rece- accipit i
voit, comme ils venoient de faire par
temme
la communion, recevoit celui qui 1 a- iuiaV
voit envoyé, ceit-a dire, ion rere, pit eum qui
dont il étoit l'Apôtre. rae mifu*
Il n'avoir parlé de la trahifon qu'en
palTant , &c d'une manière dont il n'y
avoit peut-être que Judas qui eût pu
s'en appercevoir. Il en reprend ici le
difeours, i . pour toucher ce miférable,
s'il en étoit encore capable , & pour
lui faire quitter ce deflein, envoyant
qu'il étoit découvert, i. Pour ôter
tout lieu aux autres Difciples de croire
que Judas l'eût trahi à fon infçu, ÔC
de conclure de cette entreprife que
toutes les fuites de cette trahifon
avoient été , à fon égard , involon-
taires ôc forcées. I. 11 découvre clai-
rement la trahifon. II. Il défigne feu-
lement en fecret la perfonne du traître.
III. Il l'oblige à fortir.
I. Lorfqu'on étoit encore à table &c . c^ hxc
, l r - dixiflcc Je-
qu on mangeoit, pour raire mieux fus , curbatus
éclater l'indignité de l'attentat, & eftrPiritu: &
1 accompliliement de la prophccie , il e/i .- b. i4. &
fe troubla foi-même tout d'un coup ; <*ifcumbenti-
Qr ] ' c li jt bus cis> &c
ce il témoigna ion trouble, en dilant manducanti-
qu'il voyoic à table avec lui un hom- bus * aic *
12 Analyse
A. i*. b. 14. me qui le trahilïbit; & il les aflura,
qu un d entr eux le trahiroic. Les Dii-
rumtamcnec- ciples tour troublés , ne fâchant de qui
cemanustra- [[ parloir , prirent divers moyens pour
demis me , , r ^ r / r
niecum eft in le connoure.
menfa:D.A- lo^ jjs £Q reeardoient les uns les
mpn . dlCO O
men ,
vobis , quia autres , en partie de la lurpriie qu<
unus ex vo- jeur caufa cette nouvelle, en partie
bis , b. qui * • F ■ 1
manducat pour oblerver s 11 paroitroit iur le
^D^radet v^age ou dans ^es paroles de quel-
le. Afpicie- qu'un d'eux, quelqu'indice de la rra-
bantergo ad hjfon ^[^'ls cornme Judas faifoit fans
invicem dii- f "
dpuli , hacfi- doute l étonne plus que les autres ,
di«rct!e <1U° ^s ne Purent r^en connoître par cette
voie.
a. Et con- 2°. Tout affligés de cette perfidie ,
triftativaide, ^ priei:em J Es y s de dire tout haut
cœperunt un- r /
guli dicere: qui c'etoit ; 3c pour l y obliger, cha-
goTâfDo: cun lui dit à fon tout : Eft- ce moi >
mine» Seigneur /'Jésus, qui vouloit gar-
der l'honneur du coupable , & laitier
accomplir la prophétie , n'avoit gar-
Ati feref- ^e ^e ^es ^tisfaire. Il exagéra feule-
pondens , aie ment l'énormité du crime. Un de
«duodeUcimS, mes <*ouze Apôtres , dit-il , un hom-
a. qui imin- me qui met la main au plat avec moi ,
SanuminpT- m? «***" &c me livrer à mes enne-
rofide , hic mis ! Cette marque étant commune
me tta et. ^ tQUS j£s ^ouze ne déflgnoït auCUll
ïiliusdui- en particulier. Il ajouta, i°. La rai-
de l'Evang. Ch. CXXXI. 2$
fon pourquoi il ne le nommoic pas dcmhomînis
publiquement , qui etoit f obeuiance fcriptum cft
aux ordres de fon Père , qui l'obli- dc iUo :
geoit d'aller fon train, fuivant ce
qu'il étoit écrit de lui. iQ. Le fup-
plice du traître : que cette foumif- v*autemho-
(ion n'empcchoit pas que le malheur nûaiilli,pei
1 T c*' 1 A' 1 y 1 1 <luem Flhu$
éternel ne hit deltine a celui qui le hominis tra-
trahiroit , & qu'il auroit mieux valu delur : b.°"
. . , \ r . num erac ci ,
pour lui, qu il ne rut jamais venu au fi nauis non
monde. [^ez homo
Comme Jésus dit ces paroles, avant
que tous eulfent achevé de lui deman-
der chacun a fon tour fi c'étoit lui ,
Judas, pour ne fe pas découvrir par Refpondenc
r r\ iii- autem Judas,
ion hlence , ne manqua pas de le lui qui n-adidie
demander après les autres. Il eut l'im- eum • £ixit '■
. 1 1 • i- 1 Numquid e-
pudencede lui dire comme les autres : gofum.Rab-
Efl-ce moi , mon maître ? Jésus lui ÎL1 ! jizJni :
ht entendre par un ligne de tcte, que
c'étoit lui-même , ou s'il le lui dit , ce
fut fi bas qu'aucun ne l'entendit: ce
qui étoit en effet alfez difficile dans
une table environnée de treize perfon-
nes.
*°. Rejettes encore de cette voie , -."".-
ils prirent celle de l information , & c<rperunc
les principaux Difciples ( fur -tout qua^ere m~
I r r v v ter le , quis
Pierre ) commencèrent a queftion- effet ex ds ,
ner les autres , & peut-être avec ^^j^0*
/
24 Analyse
a. is.b. 14. quelque dureté, pour voir fi quel-
" qu'un ne fe couperoit point dans fes
réponfes. Ils n'avancèrent pas plus
par cette voie que par les autres ;
& ce qui les éleignoit de ioup-
çonner Judas étoit la confiance que
Jésus lui avoit témoignée, en lui
commettant la garde des aumônes :
ce qui demandoit un homme fi-
dèle.
II. 4. Enfin Pierre impatient de
découvrir ce fecret, profita de l'a-
vantage que lui donnoient la place
de Jean de la fienne. Ils étoient tous
deux aux deux côtés de J n s u s qui ,
étant couché fur le côté , tournoit
D.ïrater- le dos à Pierre, 8c le vifage vers
KuCsC«d£ Jea» > qui étoit ainfi dans le fein de
cipuiisejusin Je s u s , c'eft-à-dire , dans la place
queîn dilige- qu'on nommoit le fein du Père de
batJefus. famille ; fur quoi voye^la Differta-
innuit ergo tion XXXIV. Pierre donc fe levant
Pcrrusf&dl1-1111 Peu derrière Jésus, fit fi-
xît ei: Quis gne à Jean de lui demander de qui
cftdequodi-^ parioit# Ce Difciple appuyant fa
itaquecùm tète contre l'eftomac de Je s u s , lui
recubuiffec dit tout bas , Seigneur j gui ejl-ce ?
iile fupra pe- T i • / 1 • j a
ans jefu, di- J e s u s lui répondit du même ton ,
xitei:L>omi- mais avec défenfe d'en parler, que
»c#*iu"e • c'^toic celui i qui il alloit donner
un
de l'Evang. Ch. CXXXÏ. 25
un morceau de pain qu'il avoir „ Répondit
/ 1 1 ar 1» ^efus : lllc
trempe dans le plat , 6c 1 ayant eft , cui ego
fait , il le donna à Judas. Cette totinôump*
dilhndtion éloigna encore plus les xero. u cùm
foupcons qu'on auroit pu former innnxi<r"ec
contre lui. Il mangea ce morceau , jud^simonis
&" aufîi-rôr Satan entra dans fon nrcanoJfù
. r . , _ Ec poil buc-
cœur pour lui taire exécuter Ion ceiiamincroi-
deiTein. Ainfi Jean ne rendant point ln in eura
de reponle a Pierre , celui-ci de-
meura malgré lui aufii incertain qu'il
étoit.
III. J e s u s voyant Judas con- Et dixitej
r / 1 C n. t 1 Jefus : Quod
hrrne dans cette runeite relolunon, faC£S ^ faccj.
lui dit doucement qu'il fe hâtât de tius-
faire au plutôt ce qu'il avoit réfolu
de faire. Ce n'étoit pas lui com-
mander le crime, mais lui marquer
fa difpofition à mourir. Aucun Hocautem
néanmoins ne connut pourquoi il "5mo ,fcivic
. , • * t 1 /~< clifcumben-
avoit donne cer avis a Judas. Corn- tium ai quid
me il porroir la bourfe , les uns diXcnz C1-
croyoïent qu'il lui avoir ordonné Quidam e-
acherer ce qui etoir nccellaire banc, quia lo-
pour la fête , qui par conféquent culos habe-
r w • ^ r , ^ bac Judas ,
n croit pas encore commencée pour quèddixiffec
les Juifs: les autres , qu'il donnât eiJefus:Eme
1 A A 1 ea <\ux- °pus
aux pauvres quelques aumônes de funenobisad
l'argent qu'il avoit en dépôt. Quoi dk-m fcftum •.
; I V . N - t -, aut ege is ut
qu il en loit , après ces paroles & aliquiddaret,
fom. IV, B
iy Analyse
a. i6. b. 14. Je morceau qu'il avoit mangé , il
c. ii. . 13. fort^t lorfqu'il écoit déjà nuit.
Cum crgo l '
acccpifTetille
buccilam , c- 2# Sortie de Judas.
xivit coiui-
nuo : crat au-
tcmnox. Après fa fortie Jésus voyant fa
s. Egrefus paflion ouverte par une démarche
Cûm crgo q^i fervoit d'engagement à toutes les
exifTec , aixit fuites , s'écria dans la vue de fa ré-
^«ifica^uT furredion qui en et oit la principale ;
cil Filius ho- qUe jufqu'ici le Fils de l'homme
ScusS clarifia avoit été glorifié par les miracles &
catus eft in par fa doàrine j & que Dieu avoit
co* été glorifié par lui. Mais que s'il
si dcus da- ■ eiorifié Dieu ,, déformais Dieu
îihcatusettin . 5 .x r . A
eo, & Dcus alloit aulii le glonher enloi-meme,
clarificabac comme il le lui avoit promis dans
euminlemet- • r • 1 r J'
ipfo -, & con- le 1 emple par la voix qui deicendit
S?6eUrifi" ^u ciel> & Clue daI1S PeU il sac.cluit"
tera de fa promette, en le glorifiant
par fa réfurrettion.
#
de l'Evang. Ch. CXXXII. 27
CHAPITRE CXXXII. ca,ut
CXXXII.
Conteftation , renoncement A- ig- B- «*
' C.11.D. x5.
prédit.
* Ccntentio ,
prad:6iio ne-
/. Seconde difpute touchant gatUmù.
la primauté. ,. s^w*
CEpendant les Apôtres , quiJiolorum de
lorique les trois ou quatre
principaux faifoient l'information
touchant le traître, n'avoient fongé
qu'à fe difculper d'un fi horrible
attentat , furent bleiïés de cette au-
torité qu'ils s'ctoient donnée fur eux,
& réveillèrent pour la troiiiemefois c. zz.Fac-
a queition delà primauté , comme & concencio
d'un droit qu'aucun ne prétendoit inccreos,quis
dr r • 1 eorum vide-
er lur loi a quelque autre que ce retureffenw-
fùt. jor.
Pour les appaifer Jésus fit deux
chofes. I. Il leur expliqua la nature
des Charges de fon Royaume pour
cette vie. il. Il leur promit dans le
ciel toute l'égalité qu'ils pouvoient
fouhaiter dans les honneurs & dans
la félicite.
I. 11 leur répéta ce qu'il leur p^aute»
fiii
vos autcm
18 Analyse
a. 16. b. 14. avoic déjà dit dans une autre occa-
lion , qu 11 y avoit cette différence
gentium do- entre les dignités du monde & cel-
minantur eo- [qs fe (Qn fa^ ■ eft f £ yç
rum j & qui . 1 O »
potcftatcm que les Rois des JNanons gouver-
habent fuger ne ieurs fujets aVec empire , 8C
eos , bencnci / . •* 1
vocaïuur : que les peuples les traitent de
bienfaiteurs & de Pères , lors mê-
me qu'ils exercent fur eux leur do-
mination. Mais qu'il n'en fera pas
«oc fie, fed ainfi parmi eux, parce qu'il y doit
ri njajor & jj égalité d'efprit 8c
in vobis, nat t> t> ^i
ficut minor i de mœurs , que celui d entr'eux qui
«florUeftFrfi- ^era ^e P^US §ran<i > doit devenir
cm miniftra- comme le plus petit, 8c que celui
qui gouverne doit fe confidérer
comme le ferviteur de tous les au-
tres.
Nam quis 11 le démontra par fon exemple j
major eft, qui & j| Jeur demanda qui eft }e plus
recumbic, an , i. . r
qui minif- conliderable de celui qui eit a ta-
trat? nonne ^ j celui • |e f^ jj ^
qui recum- ' 1 ,
bit ? ngo au- pondu pour eux que c elt lans dou-
tc"îinmr^te celui qui eft à table. Or quoi-
veitrum lum, u A J m
ficur qui mi- qu'il fut leur Maître 8c leur Sei-
mftrat : gneur , il étoit au milieu d'eux
comme un domeftique qui les fer-
viroit.
vos aurcm II. Il reconnoîr leurs fervices,
narîStam*» ^ ^ ^ewr en Promet ^ récompenfe.
de l'Evàng. Ch.CXXXII. 19
1. Il avoue qu'ils ne l'ont point cum *■ ten*
; i r '-loJ tacionibus
abandonne dans les périls ce dans meis.
fes peines , qu'il appelle fes tenta-
tions ; mais que toujours ridelles
ils s'étoient inviolablement atta-
chés à lui : voilà leur mérite. 2.
Q'aufli pour récompenfer leur Etegodif-
fidelité, il leur avoit deftiné le me- Pono v?bis >
Rr n . . . lient clllpo-
oyaumeque ion lJere lui avoir ruîrmihi Pa-
préparé , & qu'il parrageroic avec ter mcus res*
eux la rehcite & la gloire ; la féli-
cité , en les faifant féoir à fa table ut edatis &
bo j r bibatis furec
oire & manger dans ion menfam 4.
Royaume j fa gloire , en les faifant a™ in r=c-;o
/*/ r 1 <\ . meo , 6c fe-
leoir lur douze trônes pour juger ^eatis ruper
les douze Tribus d'Ifrae'l : c'eft ainfi thronos judi-
>\ m 1 xt cantesduode-
qu il appelle toutes les rsations cim tribusic-
chrétiennes. Qu'ainfi leur contefta- «"*!•
tion touchant la primauté écoit en-
tièrement frivole , 6c leur jaloufie
fans fondement.
Mais afin qu'ils ne fe fifTent pas
un grand honneur de leur fidélité ,
il y met deux terribles exceptions.
La I. pour eux rous en général.
La II. qui regardoit Pierre en par-
ticulier.
I. H prédît à tous que cette nuit- a. i*. Tune
là même ils prendroient de lui , de fa] 'omnH
de ce qui lui devoir arriver , une vos fcandaiû
n ••• patieminl i**
30 Analyse
a.is.b. i4. occafion de chûre & de fcandale,
Chute prédite par le Prophète ,
meiniftano- _ • r^ r 1 r» r
ae: fcripcum cim porte que Dieu rrappera le Pal-
eftenim.Per. teur, Se que les brebis du troupeau
cutiam pafto- r i- r r> a • r 1
rem, & dif- leront diiperiees. Ainli que leur pe-
pcrgentur o- ché ne feroit pas tant dans leur fuite,
Vcs gregis. 1 1 • • 1 r •
que dans le principe de cette ruite ,
qui étoit un amour excellif de la
vie , Se une extindion de la roi Se
de l'efpérance qu'ils avoient en lui.
Poftqaam u ajouta pour les confoler qu'il les
autem relut- U , . r • n ,•. . • il
rexero, pra:- rallembleroit , Se qu il iroit les at-
ccda.nvosin tendre dans la Galilée , qu'il leur
Cailla:*!». . . \ r
donnoit pour rendez vous après la
réïurre&ion. Les Apôtres louffri-
rent humblement ce reproche de
leur lâcheté.
rofidftâ. *• Prkre de JESVS ?our !a f°l de
Madatumno- Pierre. Commandement nouveau.
vum.
Refpondeni II. Mais Pierre eut du chagrin
autem .I,c de fe voir mêlé avec les autres
' dans la même caufe de foibleffe
ttfi omnes Se de lâcheté : il s'en voulut dif-
fcandali2ati n. ~ J
fucriaclntc tlngu^r , en proteltant que quand
ego num- tous les autres prendroient de lui
nrau>r^an a" Jésus un fujet de fcandale Se de
~ .. fuite , il ne le prendroit jamais.
C. Ait au- ' t >
tem Doa^i- Jésus pour rabattre un peu cette
de l'Evang. Ch. CXXXII. 1 1
fierté , lui répondit que Satan "us- sîmon »
• i j/Ni>' ? Simon, eccc
avoit demande a Dieu le pouvoir fatanascxpe-
de les tenter tous, afin de mettre nv[cvos» "c
\ i,/ i cnbrarec h-
a 1 épreuve leur courage &c leur eue niticum>
fidélité , & qu'il s'étOlt vanté de 'goaucemro-
i gavi pro ce m
les féparer les uns des autres , com- ut non defi-
me le vent fépare la paille & le £acficlest":
r r cctuahquan-
bon grain \ mais que dans cette de- do conVertus
route il avoit prié pour lui en par tres^uoi/""
ticulier , afin que fa foi demeurât
toujours ferme , & ne tombât
point en défaillance : feulement
qu'il devoit fe fouvenir après fa
converfion de confirmer dans la
foi & dans leur devoir fes frères ,
encore tout ébranlés de leur difper-
fion.
Enfuite laiflant fonger Pierre au
fens de ces paroles qu'il ne péné-
troit pas bien , il s'addrelTa à tous
pour les confoler de la difgrace
qu'il venoit de leur prédire , &
les traitant par careife de fes pe- d. 13. Fi-
tits enfans 3 il leur donna deux '
avis.
Le 1. qu'il n'avoit plus que peu adhuc modî-
de tems à paflfer avec eux , & qu V cum vrobif"
v •, r t -i 1 1 * 1 cum fum -
pres 1 avoir perdu , ils le cherche- qmretisme,
roient pendanr (on abfence par le
regret &par la uifteffe. Mais qu'il & ficuc dixî
Biv
32. Analyse
a. i.6. b. i4. leur répétoît ici ce qu'il avoit dit
C. a. D. 13. , fc 1 , .
Judsris, quo aUX jUlh ' 4Ue danS/CeNt Ctat /de fo1"
cgo vado , bleffe &: de timidité où ils étoient,
uftis^Tnke • ^s ne p°u voient pas venir avec lui
où il alloit.
te vobis dico Le 2. eft , qu'il leur commandoit
modo : Man- , 1 1 > > •
datum no- tout de nouveau de s entr aimer ,
vum dovo- comme il les avoit aimés , c'eft-à-
bis , ut dih- j. ,, r . . .
gacis invi- dire , é un amour tout ipirituel , oc
cem,ficutdi- jufqu'à préférer , comme il avoit
lcxi vos , ut >c . * . r '
&vos dihga- rait, le ialut de leurs frères a leur
ns javicem. pl0pre vie • & que c'eft à cette mar-
in hoc cog- que de leur amour réciproque qu'on
nofeent oui- a vit r
nés, quia d-if- reconnoitra qu ils iont vraiment les
cipaii mcî ef- Difciples.
tis , iî dilec- l
tionem ha-
bueritis ad *. Préfompticn de Pierre.
invicem. ' J x
s.rrafump- . ,
ùo Pétri. Pierre qui entrevoyoït dans ce
difeours quelque chofe de lugubre,
& mortifié d'ailleurs de ce que
Jésus n'avoit pas compté fur fa fidé-
lité , même après l'afïurance qu'il
lui en avoit donnée 5 voulut appro-
fondir ce qu'il venoit de dire qu'ils
Dicit ei Si- -1 ,, \
mon Petrus : ne pouvoient pas 1 accompagner ou
Domine, qu6 j] all0it ; & il lui dit : Où alle%-
. vous donc Seigneur ? Jésus lui
RcTpondit , , ,-i 1 • j- \
jefus : Que répéta ce qu il leur avoit dit a tous,
T*a° y que préfentement il ne pouvoitpas
tzo
de l'Evang. Ch. CXXXIÎ. 33
jores me
le fuivre, mais qu'il le fuivroitdans nonJ?c_
r «>• i ■ i r modo lequi ',
Ion tems. Pierre roue plein du len- fequêns au-
timent de fa bonne volonré pour temPoftea-
Jésus , mais qui ne fenroir pas WdteiPe-
encore la roiblelie , ni combien non poirum
l'amour de la vie étoir plus enra- » fcciui m°-
i r \y i doîC.Domi-
cme-^n Ion cœur que 1 amour de ne, tecumpa-
fon Maître, lui die hardiment , racus fuin&
Pr . in carcerem ,
ourquoi ne puis-je pas vous Juivre &inmo:tem
à prêtent? Seigneur . je Cuis prêt ire* D- ani"
» mam mcam
a aller avec vous en prifon & à la ponam pro
mort. Je donnerai ma vie pour CCj
vous.
4. Prédiction du renoncement. 4. Pradïe-
tio negcuïo-
Vous donnerez votre vie pour Refpondit
moi ? répliqua Jésus , Pierre , eijeîus: Ani-
j > 1 > 1 r marn tuam
je vous déclare qu avant la Jin pro me po.
du jour , & dans cette nuit me- «es ? Amen.,
y / ■ amen dico ti-
me j vous m aure% renonce trois bi c.Pecre,
fois avant que le coq ait chante' pour n°n canubit
I r j r • il r J* hodie gallus,
la Jeconde jois. 11 ne le rendit donecterab-
pas pour une prédiction fi précife : ne&es nofrc
,1 /• a • 1 r 1 1 me.: B. quia
II loutint de plus en plus ce tu hodie, in
qu'il avoit avancé. Quand il nodc_ ,hac »
/• , , . . « . priufquam
audroit > dit -il _, mourir avec vous , gaiius vocem
je ne vous renoncerai jamais. Les bls dedenc ,
rA.r . . J , / , ter me es ne-
autres Dilciples, pour ne le céder gaturus.
pas à Pierre en courage & en .Aci,lleam"
B V batur :
34 Analysé
A. t*. b. 14. fidélité , ne manquerenc pas de faire
C.11.D. 13. 1 * n. • j 1
tous la même proteitanon,dont ils
A. etîamfî r \ - c
oporrueric turent, comme lui , fort mauvais
me mori te- garants dans l'occafion.
cum , non te
negabo. Simi-
liier&onmes c. Prendre fbn fac , Ce munir
difeipuli : di- J ,/ J, ,J
*«runc. « ^e *p^.
/. SacculuS
ptra y gUdius JESus voulut donc leur appren-
dus. cre de quoi 11 s agidoit a le luivre,
ôc qu'il n'y avoir plus déformais de
itdmtcis: fLirecé pour eux. Pour cela il les fie
Quando nnh r
vos îïne fac- fou venir du tems qu'il les envoyoït
cuio.&pcra, en mjflîon fans argent , fans fac, &:
& calcearaen- ri- -i i 1 C
tis, numquid fans foulters \ Se il leur demandai!
fuïï^vobfs6? ^ans certe Réparation il leur avoir
At iin dixe- manqué quelque chofe. Rien , lui
mm : Nihil. dirent -i ls , parce que ceux qui lui
étoient affectionnés les avoienc
reçus avec joie dans leur maifon., &
leur avoient fourni toutes les chofes
neceffaires.
Dîxit efgo Mais il les alTura que dans cette
eisrSednunc r i r> ■ u/ i t r
quihabetfac- 'econde feparation I état des choies
ctiium toiiat, étoit bien changé Que celui qui
peram : & avoit une bourie ce une belace de-
<jui non ha- VOlt s,en fervjr & que poul- fe dé-
bet , vcmftic c . , 1 / • 1 T • >
tunicam fu- rendre dans le péril , celui qui n a-
am, &cmat vojt pomc d'épée devoit vendre
juiqu a ion manteau pour en acné-
de i/EvAKG.Ch.CXXXII. 35
ter une. La raifon en elt , que la P.ico enîra
r» , / • , i j * a vobis, quo-
Prophetie qui porte qu il doit être niam adhuc
rnis au ran^ des fcélerats , & toutes J?oç ^u°d
3 . , fcnptura elt ,
les aurres qui le regaidoient, etoient oportec im-
furle point de s'accomplir: c'eft-à- Pleri inmne.:
,-i -a / / ^C cum îni-
dite , qu'il alloit ctre exécute corn- quis députa-
nte un voleur 5 & comme les corn- g^î *J£
plices des voleurs font traités corn- funt de me
me eux, il leur fait entendre que le J^J™
même fort qu'il va éprouver les re-
garde. Cette menace n'étoit pas
vaine , les Pharifiensavoient donné
charge de prendre avec lui les onze
Apôtres , pour étouffer tout d'un
coup cette nouvelle fecte _, dès fa
naiHance , & pour ainfi dire dans
fon berceau. Les Apôtres dirent à At illi df-
Jesus qu'il y avoir là deux épées. «mnt: Do-
r» n éi l'j / 1 ' mine, cccc
C ejt a}}£\ parle de cela^ leur repon- duo gladii
dit il. hîc- At ilic
T r -, > 1 1 j dixireis: Sa-
Le conieu qu il leur donnoit ùsefl.
n'avoir lieu que pour le tems de fa
mort j en cas qu'ils voulurent fe
retirer chacun chez foi , & pour-
voir à leur fureté. Ainfi ce n'eft
qu'une vive expofition du péril où
il le trouvoient à le fuivre. Pierre
néanmoins prit ce confeil au pied
de la lettre , & il fe munit d'une
cpée à tous évenemens , bienré-
Bvj
3^ Analyse
a.i*.b .14. f0iu ae défendre fon Maître s'il
etoit attaque.
'ca,ut CHAPITRE CXXXIII.
CXXXII I.
D.I4. Sermon après le dernier
Sermo poft foiipe.
ccenam.
i.Confoia- i, Confolatïon des Apôtres.
tïo Apojîolo-
rum.
CE qui refle du difconrs de
Jésus jufqu'à fa prière , & qui
occupe les trois Chapitres fuivans,
fe peut divifer , I. en confolation ,
II. en exhortation , III. en diverfes
déclarations du préfent & de l'a-
venir.
Il confola fes Apôtres en trois
manières. I. En dillipant leurs er-
reurs & leurs foupçons. II. En leur
promettant le Saint-Efprit. III. En
leur laiflfant fa paix pour adieu.
I. Plusieurs raifons leur don-
noient de juftes fujets de trouble ;
mais rien ne les alarmoit davantage
que
i. L'impuiffance de le fuivre
qu'il leur avoit dénoncée à tous ,
& mcme à Pierre le plus brave Se
de l'Evang. Ch.CXXXIII. 37
le plus intrépide de leur troupe.
Ils craignoient de le perdre pour
toujours , & avec lui le fruit de
leurs travaux 8c leurs plus douces
efpérances. 11 commence par les d. 14. No»
ra(îurer contre ces erreurs ; & com- turbetur coc
11 1 , , , / veltrum Crè-
me elles venoient de ce qu us s e- ditis in De-
toient accoutumés à le reeatder um,&inme
1 .. P crédite,
comme un pur nomme , il les ex-
horte à croire en lui, comme ils
croyent en Dieu même , 8c à at-
tacher les yeux de leur efprit fur fa
Divinité , 8c fur la fermeté inébran-
lable de fes promelTes , parce que
c'étoit le feul remède à leur dé-
fiance.
Le 1. fujet de crainte pour eux,
étoit qu'ils ne fuflTent prévenus par
d'autres , qui occupaient la place
qu'il leur avoit promife ci de(ïus
dans fon Royaume & à fa table. Il
leur répondit que dans la maifon „ *.n dom*
de Ion rere il y avoit plulieurs mandoncs
rangs , & pour le dire ainfi , plu- ^ ~£
iieurs appartemens , qui étoient dixiffem vo-
diftribués félon le mérite des per- $0^^
fonnes , 8c que les uns n'occu- bh Iqcu»,
poient jamais la place des autres.
Que s'ils ne l'en croyoient pas , il
les en auroit aifément perfuadés ,
33 Analyse
»• H- en leur témoignant qu'il le cîevoît
bien favoir , lui qui alloit leur pré-
Er fiabie- Parer ^a place, il les aflura que
ro, &prazpa- îorfqu'il feroit parti , tk qu'il leur
C"m H- *urolt Prép^é la place qui leur
rum venio, étoit deitinée ( il fdloit parler ainu*
vosa^imciu" Pour s'accommoder à leur porcée)
rum, ut ubi il reviendroit les prendre avec lui,
ium ego & > i i • 1 • J1
rosiitis. ce qu il entendent du jour de leur
mort j & qu 'ils demeureroient éter-
nellement dans le même lieu où il
feroit.
Comme ils fe figuroient encore
une idée fort groiïiere de ces rangs
& de fa demeure , il leur donna
Itquoego lieu de l'interroger , en leur fuppo-
vado , feiris. fant ce qUi n'étoit pas , qu'ils fça-
«c viam ici- fl » ^ 1 n o 1
tiS. voient lans doute ou il alloit, oc le
Dicit ci chemin qu'il falloit tenir pour y ar-
Thomas : river. Thomas prit cette occafion
Domine, nef- j i j j >-i^
dmus quo "e *U1 "ire aU nom de tous Cl11 "S
vadis.k quo- ne favoient où il alloit , 8c qu'ainiî
moio poilu- I y • è ' la
mus viam fei- 1,s n en pouvoient pas lavoir le
■»J chemin.
Dicit ei Je- Jtsus commença par fatisfaire
îu'/^vcrT d fa demalîcie j & il lui répondit
us, ôcvitaj qu'il étoit la voie , la vérité , Se la
vie. Ce qui peut fignifier qu'il eft
la voie véritable de vivante , ou la
voie qui par la vérité conduit in-
dï i/EvANG.Ch. CXXXIÏI. w
failliblement à la vie. Et enfuite
joignant enfemble la voie & le
terme , il ajoura que nul n'alloit â ncmo vcnU
ion Père , qui etoit le terme de ion ad patrem ,
voyage , que par lui qui en étoit D™ pcr m6#
la voie tant à Ton regard , puif-
qu'il eft retourné à Ton Père par fa
Paiîion , qu'à notre égard , puif-
qUe nous n'arrivons à Dieu que par
lui j c'eft-à-dire , i. en croyant fa
doctrine j 2. en fuivant fes exem-
ples j 3. en nous appliquant Ces
mérites.
Enfuite il marqua l'origine de
l'ignorance de Tes Apôtres à l'égard
de (on Père y c'eft qu'ils ne le con- vifreiisme",^
noiffoient pas parfaitement lui-mê- Patrem me-
i-i/ ., 1 urn iitiquc
me en tout ce qu 11 ecoit , &c dans cognovifle-
fa nature divine. Car on ne peut ti$ :
connoître le Verbe , la parole , la
fageiTe , & la fplendeur du Père,
qu'on ne counoifle le Père , dont
il q'1 le Fils , la parole &" la fplen-
deur. Mais il fe promet que comme & amodo co-
lis l'ont déjà connu par fjs miracles, gno,cetis ; Ç
dans peu ils le connoitronr plus par- cis eum.
faitement par la defeente du Samt-
Efpric. . .„,.
Philippe le pria de perredtion- iiPpUs : i>0.
ner dès-lors cette connoiirance con- œine> ofteu*
■
4° Analyse
d. i4- fufe , en leur montrant clairement
de nobis Pa- le Père ; ôc comme ils le connoif-
fidtnobi$?f" ^°ient déjà lui-même , rien ne leur
manqueroitdececôté-là.
Comme il ne s'agifToit point de
la claire vue , qui eft réfervée pour
le ciel , mais de la créance ou de la
DîcitcïJe- connoifTance parla foi, Jésus leur
fus ^rTavl° reprocha que depuis tant de tems
trmpore vo- r , . 1 Y
bifcumfum, qu il etoit avec eux , ils 1 avoient
noviiîis me8? men Peu connu. Philippe deman-
doit à voir le Père j c'eft-à dire à le
connoître avec certicude. Jésus le
lui montra par deux argumens in-
vincibles.
Philippe , i°. En fa perfonne. Car qui voit
*8£?Uf2 le Fils volt le Pere > c'eft à-dire,
«cm. quiconque fait certainement que
Jésus eft le Fils de Dieu , fait avec
la même certitude que Dieu eft le
Pere de Jésus : puiîque les corre-
latifs font inféparables dans leur
Quomodo nature & dans leur idée. Sur cela il
** J*** 9r in fuite en quelque forte à Philippe,
Patrcm ? & il s'étonne comment il ofe de-
mander qu'il lui montre fon Pere,
c'eft à- dite qu'il lui prouve qu'il a
,. . un Pere.
non creHius .. , r . . -
quia ego in * . H le lui montre dans (es pa-
Pauc , ôc Pa- roies j ^r illui demande s'il ne
de l'Evang. Ch. CXXXI1I. 41
croit pas qu'il eft dans fon Père , &: ter in me eft?
fon Père dans lui. Il le lui prouve eg" aioquor
au moins , parce que les paroles qu'il y°,.bis » à "*c"
r., ,A l *■ . ipfo non lo-
prononce , il ne les prononce pas de qU0r : Pater
lui-même ; c'eft le Père qui en eft autem in ™e
t, rr 1 • 1 r «anens jpie
1 auteur aulli-bien que de toutes les fade opéra,
actions.
3 °. Il le lui montre dans (es œu-
vres j Se Ci les Difciples ne l'en
croyent pas fur fa parole, il les prie non crc(lî-
au moins de croire par les mira- tis , quia ego
clés prodigieux dont ils ont été p1^""*,^
fpectateurs , qu'il eft dans fon Père, eft? Aiioquin
& fon Père dans lui , par L'unité de [n^crcS*
fa nature &c des opérations exté-
rieures.
4°. Car il leur promet avec fer- An}en » a"
~ \ men dico vo-
ment que celui qui par les œuvres bis: Qui cre-
miraculeufes qu'il a faites le croit dit*n me' °"
*■ 1* . pera quac ego
Fils de Dieu , en fera de pareilles, fado.&ipfe
& même de plus grandes , foit facict * J*
dans la iubitance du miracle , ioit rum fadet :
dans la manière , parce qu'allant p^^ado.
s'affeoir à la droite de fon Père , & Et quodeum-
prendre polTeilîon de fon empire Ç£JSÎÎ
fur toutes les créatures , il leur ac- mine meo ,
cordera comme Fils de Dieu, & hoc fâciaœ;
fera même par leur main tout ce
qu'ils demanderont à fon Père en
fon nom , afin que le Père foit glo-
4i Analyse
*>• T4- rifié par le Fils , lui qui étant le
ut giorificc- premier auteur des miracles a don-
tur Pacer m r , r . r r..
Filio: siquid ne tout ton pouvoir a ion rils , ce
pecicricis me autorjfe tour ce qu'il fait. Mais ne
in nomme r * . cr » a
mco,hocfa- iera-t-il pas permis auiii aux Apo-
oam. tres ^e s'^^relfer immédiatement
au Fils ? Oui fans douce \ & il
leur promet que s'ils lui demandent
rjuelque choie en fon nom , il le
era.
fie
i.Spmtus *• Efprit de vérité. Amour
ventaiis. Di- obéi (Tant,
kxio. M an- M
data.
Le 3. fujet de terreur pour les
Apôtres , étoit Fabandon où ils fe
voyoient réduits par la perte de leur
Maître , expofés fans fecours & fans
confolation à toutes les attaques du
monde.
II. 11 leur ôte cette inquiétude par
deux promettes pleines de confola-
si «iiîigitis tion. La I. eft > que s'ils l'aiment
mca^t^c1 & ^nl marcluent cet amour parl'ob-
itcgo roga- fervation de fescommandemens,il
i°uPm rC^'ra& Priera fon Pere de leur donner un
ciyrum dabit autre confolateur que lui , c'eft-à-
vo » dire l'Efprit de vérité , ou le Saint-
Efprit , avec des circonftances très-
favorables.
ut mancat
um in
DE i/Evang. Ch. CXXXIII. 43
La i . eft , qu'au lieu que lui , qui
eft leur premier conlolateur _, eit vobifc
obligé de les quitter quant à la pré- aucrnum.
fence feniible \ le Saint-Efprit ne les
abandonnera point, mais il demeu-
rera toujours avec eux.
La 2. eft , qu'au lieu que le mon- spîritumve-
de ne peut recevoir ce divin Efprit, r»ca»s,4uem
r ,.. . . . 1 mundus non
parce qu il ne le voit point par la poccA accipo-
Foi , ni ne le connoît par la raifon , r*j <luianon
-, , a \y o p Vldct eum>
ils le connoitront en 1 une & 1 au- necfciteumt
tre manière , & de plus par le goût vo<autemco-
mexplicable de la douceur : parce um, quia a-
qu'il ne demeurera pas feulement j^itV0SôTin
chez eux , comme un ami chez fon vobis cm.
ami j mais au fond de leur cœur,
comme l'Efpnt de leur efprit , &
l'Ame de leur ame. Comme cette
promelfe ne diffipoit pas encore touc-
a-fait leur frayeur.
La II. achevé de les rafïurer. C'eft Non relîn-
que lui- même il ne les lailfera point <3"am TOS fr-
!• r • j V , a phanos : ve-
orphelins j mais que dans peu , c eit- niam ad vos.
à-dire dans trois jours il reviendra
à eux , de qu'en cela il mettra une
infigne différence entre eux & le
monde. Dans peu les hommes du Adhucmo-
monde , qui l'ont vu jufqu'icicon- ^Sdat' J»
verfant familièrement avec eux , ne jam non vi-~
1 i x m • det : vos au-
le verront plus jamais.Mais pour eux tcœ yi<ictti
44 Analyse
Bi,4* ils le verront s parce qu'il vivra de
g"o 'vivo3 & nouveau après (a mort; &: que pour
vos vivctis. eux , loin de mourir avec lui , ainiï
qu'ils appréhendoient , ils feront
„ • ,. encore tout pleins de vie ,& en état
I» illodie j . » A>
voscognofce- de le revoir ;<x ils connoitront alors
tis , quia ego ce qu'^s avoient maintenant tant
fum in Pâtre , J . v ,.. -
meo, &: vos de peine a croire, i. Qu il eit
m me, & c- dans fon pere par punité d'une mê-
Çomvobis. r.
me nature. 2 . Qu lis iont dans lui
par l'unité des membres avec leur
chef. 30. Qu'il eft dans eux par
l'influence du chef dans fes mem-
bres.
„ . , . PourlareconnoiflTancedecesdeux
Qui habet . r v-r- -\ ■> jj
mandata mea îniignes bienfaits , il n exige d eux
& fervat ea , autre chofe finon qu'ils l'aiment;
îlleeltquidi- ,..,., . * . . '
ligic me : oc qu ils lui témoignent leur amour
par l'obénTance à (es commande-
mens. Et afin d'accabler encore leur
. reconnoifîance par deux nouveaux
qui autem di- i • r • ■ i i i •
Sgic me , di. bienraits , il leur promet que celui
îigetur à*Pa- qU[ l'aime j i°. Son Pere & lui qui
trc meo ; & ^ « . , • i l
ego diligam parle lui rendront amour pour
eum & ma- amour. 2°. Que de (on côté il fe dé-
nircitabo ei . v , . r . -....,
meipfum. couvrira a lui lelon la divinité.
DidceiJu- Judas frère de Jacques & coufîn
?ras'-n°n,.llc de Jésus lui demanda d'où venoic
Dominc,quid cette différence 11 grande entr eux
faûum efl , & je inonde ^ qu'il ne dût point fe
de i/EvANG.Ch. CXXXIII. 45
découvrir au monde, mais feule- quiamanifei-
v itaturus ei
ment a eux. nobis teip-
Jesus lui répondit que la rai Ton *um,[&non
de cette différence etoit 1 amour des Dr ,.
* a , • • Refpondic
Apôtres pour lui , & la haine ou Jefus , & di-
l'indirrcrence du monde. Parce que 5m-!Ï! Siquis
/ r cliLigit me ,
l'amour produifoit l'obeillance à les fermonem
paroles , Ôc que cet amour obéilTant ^UI^fePravCer
dans quelque fidèle que ce foit, foit meus diligec
Apôtre , foit (impie Difciple , lui c»2 ' vtu-
attiroit l'amour du Père Ôc le fien : mus, &man-
Q>-i /* j ' r fionem apud
u ils ne le decouvnroienr pas leu- cum fa^ic.
lement à lui, mais qu'ils viendroient mus.
tous deux à lui par un nouvel ac-
croitfemenc de grâces & de béné-
dictions , & qu'ils établiroientdans
lui leur demeure jufqu'a une par-
faite perféverance. Qu'il en eft tout Qui non di~
au contraire du monde ôc de fes llglc mc' fer"
.r ,~ . . mones meos
partilans. Que celui qui ne l'aime non fervar.
point, ne garde point fa parole; & J^Hg
comme fa parole , je dis celle qu'ils noneftmeus,
entendoient actuellement, n'étoit ^fame ?2
pas de lui, mais du Père qui l'avoit tris,
envoyé _, en méprifant fa parole de
lui Jésus, ils méprifoient celle de
fon Père.
4^ Analyse
». 14-
3. Parade- $m Efprit-Saint tnfeignant toutes
tus omnid. do- „t r
aurus.Pax. Ckojes.
Hacc locu- Voilà ce qu'il a jugé à propos de
tus fum vo- i •« i j-i / •
bis,apudvos leur dire pendant qu il ecoit encore
niancus. Pa- avec eux , laifTant le refte à dire à
"m7 spiricus l'Efprit-Saint Confolateur , que le
fan&us , pere Jeur devoit envoyer j qui leur
qucm mittet r . i r o 1
Pater in no- enieignera toutes choies, oc qui les
mine mco, fera fouvenir de tout ce qu'il leur
ille vos doce- ,. *
fc.it omnia, & aura dit.
fuggeret yo- \\\% Le 4. fujet de crainte de de
bis onima , 1 , / • 1 > 1 11 •
qujtcumquc douleur etoit la perte qu ils alloient
dixerovobis. faire en fa perfonne , de leur Pere ,
de leur Pafteur , de leur Maître j
& ils en furent vivement touchés ,
Pacem m- lorfqu'en leur difant adieu , il leur
Jinquovobis, fofa j • nQn s |ft pajx Ju
paeem raeam r ' r r
do vobis : monde , rauile , fragile, extérieure,
non quonio- ternporelie • mais la fienne , c'eft-à-
do muudus 1 ? . , . ;
dat , ego do dire une paix intérieure, véritable,
robis. éternelle : ni en la manière que le
monde la donne , par des paroles
fktteufes , ou des fouhaits ftériles
& inefficaces ; mais par des fou-
haits folides & durables : enfin
non pas telle que le monde la fou-
haite , dans la fan té , dans la lon-
gue vie > dans les autres biens ten>
c
»r l'Evang. Ch. CXXX1II.
poK bu-ns fpirituela
ciel le bonheur cter-
loire.
A cet adieu h touchant les Ap<
ae pui Etait leurs larme
1 os les pria de troubler v. ,
oint, ni de s allarmer comme s il cm cm vcf-
abandonnoit pour toujours. Il SJijî
les coafola ,
i. Par la promptitude de ion re-
our cela il les ht iouvenir de
ce qu'il venait de leur due qu'il ne *v »■«« *J
s'en alloit que pour revenir a eux
dans peu de teins.
l\ir l'avantage qu'il y avoir
kf lui . oc qui leur
devroir donner de ia joie , l'ili l'ai ':ct*
nioient lincetemenc oc Uns intérêt ; di uu^uc
puifqi; a l'on \\ le qu'il s'en ,aJ
alloit, a celui qui l'aimoit unique-
doQI il ctoit toute la com-
plailai
5. Par la jultice de te départ,
puii'que (on P« ic plus grand q«u 1
l'on humain:
raifoanable que l'intérieur a..
ICO • Uài qui .isgiand que
lui.
4. Enfin par l'avis me me qu'il
1 1 i ; riuf-
kur donnoit de Ion depatt. Lai t ^
4^ Analyse
•• T4- s'il n'a pas voulu les quitter fans
gj f™ ies avertir , & fans leur dire adieu,
tis. ce n'a pas été pour les affliger par
la nouvelle de fa mort ; mais pour
leur en faire tirer ce fruit , qu'ayant
tout prévu , & leur ayant tout pré-
dit , ils croiront que rien ne l'aura
furpt is , & au même-tems que l'ac-
complifTement des chofes les affli-
geta par {qs fouflfrances , il les af-
fermira dans la foi par la confor-
mité des évenemens avec la prédi-
ction.
En ce même moment , Jésus
jam non voyant en efprit que tout fe pré-
multa loquar ' . « A .. , -1 , L .
vobifcum: paroit chez Caiphe pour le venir
venic cnim prendre } dit aux Difciples qu'il
Princeps * . 1 • i
mundihujus, ne leur parleroit plus guère, parce
que le Prince de ce monde le de-
habentmquiin m«n venoit contre lui. Ce n'ell:
quam : fed pas , ajouta-t-il , qu'il ait aucun
ut coenofcat r •
mundus,quia pouvoir fur moi : mais quoique je
diligo Pa- puide le repouffer , afin néanmoins
tiem , & fi- i jri •> ' ~
eue manda- °iue 'e monde lâche que j aime
tum dédit mon pere , Ôc que je veux jufqu'à.
mihi Pater , ( x •• ' i-t *
fie facio , *a mort accomplir ce qu il m a
furgite , ea- commandé , levez-vous , fortons
mushinc. j'lci ^ &• allons au-devant de mes
B,,f:*chy™" ennemis. Tous fe levèrent , ÔC
runt in mon- après avoir chante le rieatime
WOUvarû. d'action
de i/Evàng. Ch. CXXXIV. 49
d'action de grâces, ils allèrent au
Mont des Oliviers. Voye\ la Dïjfer-
tation XXXV.
CHAPITRE CXXXIV. cxxx^v.
CONTINUA-
TIO SlKMO-
IS.
D. if
Continuation du Sermon.
i. Jesus-Christ véritable vigne ,N
& nous fes branches. "'cUi/tu,
vitis , nos
II. TUfqu'ici Jésus a confolé patmitci-
J fes Difciples , ôc il les a ar-
més contre le premier effet de fa
mort qui étoit la douleur. 11 les
prévient maintenant par fes exhorta-
tions contre d'autres abus bien plus
dangereux, qui étoient, I. L'in-
conftance dans la foi 11. Le refroi-
difTement dans la charité. 111. L'en-
nui & l'impatience dans les perfé-
cutions.
I. Il les exhorte à fe tenir même
pendant fon abfence étroitement unis
à lui par la foi , & par l'amour.
Pour cela il fe compare à un fep de d. ij. Ego
vigne , fon père à un vigneron , & faT v& paYter
fes Difciples aux branches. Il fe meus aguco,
nomme la vraie vj^ne , parce qu'il a c
influe plus véritablement dans les
Tome IK C
50 Analyse
v. xj. fidelles qui font les membres de fou
corps , que la vigne dans (es bran-
ches. 11 faut qu'une branche de vi-
gne , i . demeure arrachée à fon fep.
2. Qu'elle ne foit pas ftérile, mais
qu'elle porre du fruir. 3. Et qu'elle
en porte abondammenr.
omnem pal- 11 en elt ainfi des Chrétiens qui
:S;t™ tom «**& à tut par la foi. Les
fruûum,toi- branches qui étant dans lui ne por-
tent aucun fruit de bonnes œuvres,
le Père les retranchera de fon corps,
comme des farmens inutiles , & c'eft
ce qui arrive tantôt pa,r l'héréfie 6c
le fchifme , où Dieu permet que
ces Chrétiens tombent , 8c tantôt
par la mort qu'il leur envoie. Celles
&omnemqui qUi portent déjà quelque fruit, le
purgabitcum 1 ere les taillera pour les purger de
ut fructum tout le fuperflu , afin qu'elles en por-
tent davantage : & cette purgation
ne fe fait pas feulement par les inf-
pifarions intérieures j mais par les
adverfirés de cerre vie, & par les
perfécutions qui épurent les bonnes
âmes , de qui les délivrent de tout
ce qui leur fert d'amufement.
j3m vosmû- Jésus appliquant cette compa-
di eltis piop- r \ r r\- r • \ *
terfermonë, raiion a les Ditciples , reconnoit
quim locu- qu'ils font déjà des branches tail-
rus lum vo- • / > n\ j- t j
bis. lees> c elt- a dire purgées de toutes
de l'Evang. Ch. CXXXIV. 5 1
les fuperfluités du monde, comme
il leur a dit en leur lavant les pieds.
11 ne leur relie plus qu'à porter beau-
coup de fruit. Le feul moyen eft de
demeurer inviolablement attachés à
ui , & lui a eux. C eft a quoi il me & cg0 in
les exhorte , en leur représentant vobis :
trois grands avantages qu'ils en tire-
ront.
Le 1. fera une fécondité abon-
dante; car comme une branche fépa- f;cut PaImcs
ree ne peut par elle-même porter ferre frac-
aucun fruit , mais qu'elle doit être JJJ» J fe™e:
attachée au fep : aufîi ne peuvent- manferît in
ils en porter j s'ils ne demeurent en ™e :nifin{£
lui par une vive & ferme foi j puif- me manferi-
qu'il eft la vigne, & eux les bran- ^ futn vî_
ches ; & qii'ainlî il n'y a que ceux tis, vos pal-
gui demeurent en lui par une vive m"n" jnmL"
toi , &c lui en eux par une conti- Stegoineo,
Un 1 V • hic terc fruc-
e influence de la grâce, qui tummulcurai
portent beaucoup de fruit , en met-
tant à profit tous les momens de
leur vie, au lieu que fans lui & fans JJ^^SJ
le lecours de fa grâce ils ne peuvent faccre;
rien faire, ni dans les autres, ni en
eux -mêmes. Or il n'influe cette gra-
ce féconde de fructifiante que dans
ceux qui font unis à lui. Il explique
cela par le contraire. Car li quel- si quîs inm«
qu'un ne demeure peint en lui par no:1 maLlfc"
C ij
52 Analyse
D- '*• la foi & par les fruits qu'elle doit
faïmcs'Ta- Porre^ il fe™ retranché de Ton
refcet,& col- corps, comme un farment infruc-
lieent eum , „ \ rr \
& in igaem tueux ? on Ie ramaliera pour le
mittenc , & joindre à d'autres pécheurs de fon
caractère, on le jettera au reu éter-
nel, & il brûlera fans jamais fe con-
fumer.
Le 2. avantage fera l'accomplifle-
si manferitis ment de toutes leurs prières. Car s'ils
b^mca'I"" demeurent en lui, & que ces paroles
vobismanfe- demeurent en eux , non-feuiemenr
tint : qaod- r r J l
cumque vo- Par un iouvenir ndele , mais par un
luericis pcte- amour obéilTant Ôc religieux , ils de-
vobis. manderont a L>ieu tout ce qu ils vou-
dront , c'eft-à-dire, tout ce que doi-
vent louhaiter des fidèles j & leurs
demandes ieront accomplies,
inhocclâri- Le $. avantage eft la gloire que
^mcut'u; reçoit le Père de l'abondance de
frua.un plu- leurs bonnes œuvres, &: de les voir
rimùm affe- 1 • r> J ' ' C
raris &effi- devenir par cette recondite les vrais
ciamini mei Difciples, puifque le Chriftianifme
n'ell pas feulement une fecle d'opi-
nion , mais une école de pratique
de d'actions conformes aux fenti-
mens.
•1. Perfevc- 1. Perfévérer dans la Charité.
tan lum in
Charuate.
Le 11. abus ou ils pouvoiem torn-
de l'Evang. Ch. CXXXIV. 53
ber par Ton abfence étoit le refroi-
difTement de la charité, i°. A fon
égard. 2°. Envers le prochain.
i. 11 les exhorte à demeurer fer- sicut diIexît
i r r p I me Parer , ôc
mes dans Ion amour , iur i exemple ego dilejî
de fon amour pour eux : tout de me- Tss*..,Ma?ece
, , , r t r i' i in duectioae
me qu il les a aimes iur 1 exemple mea.
de L'amolli que fon Père a eu pour
lui fon Fils. Après l'exemple il leur £*£;*£
préfente pour modèle de leur amour, "ôs, mane-
^Ia ■>■{ /* n bitis in dile-
celui qu il a pour ion Fere j car corn- ftioilt; mea .
me il lui a témoigné fon amour en *»cut & ego
i /* \- r r r^ Pacris mei
obiervant religieulement les Com- prxceptafcr-
mandemens , ils demeureront aufli vavi> & ma-
dr '111 BCO >n eJUS
ans ion amour , s ils gardent les diledione.
fiens. Il leur en parle ainfi pour deux
raifons. iQ. Afin que la joie qu'il "*c loKcurus
1 / 1 fumvobiSjUC
reçoit d eux foit durable & conitan- gaudium
te. i°. Afin que la joie qu'ils cmtJSg^jf-
de lui appartenir, croiife ôc fe per- gaudium vc-
fedionne jufqu'a la fin. ftnupiibpléa,
2. Il paffe a l'amour du prochain, Hoc eft prae-
& il leur fait un commandement mcuîtTutdi-
particulier de s'entr'aimer les uns Ugatis invi-
l ri j i j p cem, ficuc di-
les autres, iur le modèle de 1 a- jexi vos Ma.
mour qu'il a eu pour eux. Or il les j°rem hanc
/ . r > \ i r • dilcctionem
a aimes julqua donner la vie pour nemohabec,
eux , comme il eft tout prêt de le ut aninfam
£• * « - i \ rc fuam ponac
aire, ce qui elt le plus grand erret quisproann<
de l'amour qu'un homme puiffe a- cis fuis-
voir pour fes amis. Auffi, i°. Il les Vos ^^
C iij
54 Analyse
D- m- a traités, & il les regarde encore
mci cftis , fi comme (es amis intimes , pourvu
fecericis aux >-i y cT »-i i
eço Pr*cipio ^u "s accomplilient ce qu il leur
robis. commande touchant cet amout mu-
jam non di- tuel & les autres devoirs» i. Il leur
cam vos fer- en donne je nom & ja qualité , par-
fervus nefeit ce qu il leur a déclare comme a les
quid facuc am- c ce »-| appris de fou
Dominas e- 1 rr . ,
jus : vos ;u- Père, lit il ne les a pas traites com-
iem dm ^ mQ £QS ferviteurs auxquels le Maî-
wuos , quia 1 .
oir.nia qu*- tre ne confie pas les delieins oc iqs
Clinique au- /' p><î
divi à Pane *ecrera.
meo , non Mais afin qu'ils ne fe falTent pas
feci vobis. ttn ^ujec je vanjt£ du rirre glorieux
Non vos me je fes amis ^ [es fait fouvenir que
eïc£iicis : ied . ,, , • r
egoclegivos, ce n eit pas eux qui 1 ont choili pour
6c potui vos s'attacher à lui: mais que c'eft lui
fruaum atfe- qui les a prévenus par ion choix , oc
rkris,&fruv • jes Jeftinés pour aller ( il ne
étus veltet ]. i 1
maneac : dit pas encore par tout le monde >
de quoi ils n'étoient pas encore ca-
pables ) & pour porter du fruit qui
m quodeum- dure éternellement, afin que par cet-
quepeticritis ce abondance de fruits &c de bonnes
wmiwmeo, ouvres, ils acquièrent cette coiifian-
det vobis. ce , que tout ce qu'ils demanderont à
fon Père en fon nom ôt par fes mé-
rites, leur fera accordé, il termine
Hscc mando cec endroit par le Dpmmanderoenc
vobis uc diii- qu'il leur répote de s'entr'aimer , ôc
gam iavi- jej*e donner mutuellement en toutes
Ifllli
de l'Evang. Ch. CXXXIV. 55
occasions toutes les matques d'une
amitié fincere , jufqu'à mourir les
uns pour les autres.
3. Monde ennemi des fidelles. ^.Mundusfi-
dclium hoflis.
Le III. abus à éviter étoit la crain-
te excelîive des perfécutions. Il les
arme contre cette timidité, &>les
encourage par trois puiilantes confi-
dérations.
I. Par fon propre exemple. Car simundus
fi le monde les haït , ils doivent con- vosodic,fci-
rj, l 1 ,, 1 .. 1 • toce quia me
liderer que le monde I a haï lui- priorem vo-
meme avant eux , tout innocent & £is .odio h**
tout bienfaifant qu'il a été. Or qui
ne feroit confolé dans fes peines, en
voyant qu'il les foufrre après lui Ôc
avec lui ? Ils fe doivent fouvenir de
ce qu'il leur a dit autrefois, que le Vlde l±* p'
ierviteur n eit pas de meilleure con-
dition que fon Maître. Si donc les. ride inf- L
Juifs l'ont perfécuté , s'ils ont tendu "1%
des pièges à. toutes fes paroles , [es
Difciples doivent bien s'attendre
d'en être auiii épiés, obfervés, per-
ecutes.
II. 11 les fontient par les caufes
mêmes de la perfécution , qui feront
étrangement înjufles. Il en marque
trois , tant prétextes que caufes réel-
les. C iv
56 Analyse
D- m- La i. eft leur féparation du mon-
si.ck mun£,° de. Car s'ils étoient du monde , &C
mundus qu ils rutient demeures dans le mon-
quod fuum ^e comme ils en étoient autrefois ,
eratdi Iiscrcr;
quia veio dé le monde n'auroit que de l'amour
mundo non p0ur ce qUj \ul appartiendroit : mais
eftis , fed ego r J ff 1
elegi tos de parce qu Ils ne lqnt plus du monde,
mundo, pro- depuis qUe fon choix les en a fépa-
pterea odit , r 1 . r
vos mundus. tes , le monde les a pris en aver-
Memcntote gou Qr l'injuftice de ce prétexte
mei , quem elt pour eux un iujet de le conloler ,
&° dM l„voâ & de s'armer d'un courage intrépide
bis : Non elt . rr
remis major pour en foufîrir tous les eftets.
(domino fuo.
Si me perfecuti funt , 6c vos perfequentur : fi fermonem meum
fervaverunt , ÔC veftrum fervabunt.
sed hic ona- La 2t eft Ignorance des perfécu-
nia racieni ° • ,-p ' • •
vobi^propter teurs , qui ne connoili.int pas celui
nomen quj pa enVoyé , les pourfuivront à
mcum -, quia -1 J \ r r •
nefciunteum toute outrance a Ion lujet; cette
qui mifît me. ignorance pourroit en quelque forte
Si non venif- » r • . 1> ^-i w
fem,&iocu- excuier ces 1 yrans înjultes , s il n e-
tus fuiflem ton ponn venu , félon la promeuve
eis , pecca- - r . * ,.. , *■ .
tum non ha- des Prophètes , & s u n avoit point
berent:nunc prouvé aux Juifs fa million par (es
aurem excu- ' _ r .
fationetn difcours 8c par les miracles. Mais
n*n habent apr£s fa venue & fes prédications ,
fuo. leur incrédulité elt entièrement m-
excufable , & c'eft un fujet de con-
fiance pour fes Difciples.
La 3. eft la haine aveugle & opi-
Quimcodit,n^tre des Juifs contre lui, & par
de l'Evàng. Ch. CXXXIV. 57
conféquent contre fon Père, jufqu'à & pa»e» ,
. ^ \ rr i rr meum odm
les porter a erracer les împreliions
que (es miracles dévoient naturelle-
ment faire dans des efprits raifonna-
bles. Et il eft vrai que s'il n'avoir ? °Lera °OQ
- . ." * . feciilem in
pas fait devant leurs yeux des mira- eis,quae ne-
cles tels dans le fond & dans les ^roali"' f!'
, , . cit , pecca-
circonitances j qu aucun autre n a ja- tum non ha-
rnais faits avant lui , leur haine con- bcrentr
rre lui auroit quelque lieu d'excufe.
Mais ils ont vu de leurs yeux ces nunc autem
merveilles prodigieufes, 5c ils n'ont fc vider une
i rr> i i i ■• i ■ o r n oc oderiint 8c
pas lailie de le haïr lui oc ion Père, me, 8c Pa«
qui agilToit par fes mains. Il ne faut trem meunB*
pas s'en étonner : il falloit que cet Scd ut a1im-
• i i l i a f l pleatur(ermo
article de leur loi eut Ion accom- qui in iegc
pliiTement : Ils m'ont haï fans fujet. cor«ra ferip-
iii n 1 1 tus eft .Quia
111. Il Aqs encourage par la pro- 0di0 habue-
melfe du Saint- Efprit à ne céder ranemegta-
pas à la perfécution. Il leur prédit cùm àurem
que cet Efprit de vérité qui procède vencrir Para*
du Père , oc qu il leur envoyera de la ego miuam
part, oppofera fon témoignage aux vobis .a.Pa"
■ . ITT 1°J ' "«■•» Spintum
calomnies des J uirs , colorées du pre- veicatis, qui
texte du zèle de la gloire de Dieu. * patre .p.ro"
TJ , i- r • cel,t ' llle
Il témoignera en diverles manières tcitimonium
que lui Je s u s eft le Fils de Dieu, Pleerl;ibcbudc
par la voix de fes Difciples , par
les miracles qu'ils feront , par la
converfion d'un grand nombre de fes
58 Analyse
**• ffm ennemis , qui en feront convaincus.
& vos «m- ^ux m^mes ^es Apôtres qui ont été
monium per- les témoins de [es adtions , & les au-
h,b^,u1:* lS'r-rt direursde tes difcours depuis le corn-
mecum eïlis. mencement de fa million , ils ren-
dront aufîi témoignage à la Divinité
& à ion innocence.
4. Prxditlio 4. Prédiction des perfccuùons.
perJecut:o- ^
num. f
Après ces confédérations u puif-
fantes pour les armer de zèle & de
p. i5. h*c courage , il leur prédit les perfécu-
locutus ium. . © ' r, r
vobis , ut rions qu ils dévoient fournir, de
non fcanda- e ue jes éprouvant contre leur
luerai. ri r
attente, cette lurprile ne les jettac
dans le trouble & dans le découra-
Abf^uefyna-oement. 11 en réduit le détail , i°.
eogis facient ° • j i t • f
vof j aux excommunications dont les J uirs
uferont pour les charter de toutes les
«^.TriLÎIîS Synagogues. 1. A la mort; mais il
ta ut omnis j o © . • #
qui imcificit leur adoucit un peu cette idée , en di-
tretur^obfe- ^ant °IUe ^ans PeU ^eS J11^ qu> ^eS
quium fc feroient mourir, s'en feront un mé-
It*h«cDfa- rite > & regarderont leur mort com-
cient vobis, nie un facrifice agréable à Dieu 11
q\iia non no- . / /* ■ ^
vcrunt Pa- ajoute néanmoins polinvement , que
trcm, neque 'es Juifs les traiteront ainfi , parce
locucus fum Llu îlsneconnoiHoient ni quel elt Ion
vobis, ut Père, ni lui qui eft fon Fils. Mais
cùm vcncrit > i i i r
horacorum, 4U " leur en parle par avance > ann
cum eram.
de l'Evang. Ch. CXXXV. 59
que ce tems de perfécution étant reminîfca-
1 '\ r r • » i i miniquia ego
venu, ils le iouviennenr qu il leur a dixi vobis.
tout dit. Que s'il ne les en a pas Haf: a"re.m.
n t a , n , r vobis ab îni-
înltruits plutôt , c eit qu ayant enco- tio non dixi ,
re du tems à demeurer avec eux, il J^fJJ^*
n'étoit pas nécetfaire de les eftrayer
avant le tems.
CHAPITRE CXXXV. cxx'xv.
U« I 6 .
A L T E B. A
Seconde fuite du Sermon. SftiSw
TIO SER.MO-
NIS.
i. Confolateur promis. »• Promifio
J £ Paracleti.
IL leur annonce donc qu'il s'en Etnuacvado
xi- • t> /ai eum qui
retourne a celui qui 1 a envoyé j mifn mCj
& pour les divertir un peu de la
douleur qu'ils en reffentent , il leur
repréfente ce départ comme un (Im-
pie voyage , &: il s'étonne de ce que , & ncmo ex
r i 'i j -i vobis imcr-
lelon la coutume des amis, ils ne rogat me t
s'informent point de lui, ni à quel <v*6 vadis î
deflein il l'entreprend, ni ce qu'il
fera chez [on Père , ni quel avantage
il en recevra; Mais qu'au lieu de fcd quia hsc
Cette louable curioflté, ils fe laiffent vobi^ttm-
abattre à la douleur par la première tia implevit
n î r j / r\ cor vcftruni»
nouvelle de Ion départ. Un ne peut
afTez admirer la douceur & la bonté
du Seigneur qui allant à la mort fe
C vj / . .
Co Analysh
D- l6- donne le foin d'égayer la triftelTe de
fes Dirciples.
Sedegoveri- \[ Jeur montre qu'il leur eft <Je
robis : expe la dernière importance qu il s en
dit vobis ut alue par is raifQns#
ego vadaau t r i a
La i. les regarde eux-mêmes.
Comme l'efFufion du Saint- Efprit
fur les hommes doit paroître, ainfi
qu'elle l'eft, le fruit de fa mort &
abfe^Pa^. l'ef*et de fa réfurredion , s'il ne s'en
detus non va point , le Saint- Efprit ne defeen-
SieniutcinVOa- dra P°nit fUr eUX > aU ^ieU ClUe S ^
biero, mit- s'en va, il le leur envoyera. 11 eft
tam eum ad donc dg -^ j^^ ^^ ^ aiUe>
Etcùmvene- La 2. regarde le monde , & ce
guet^munV" que le Saint- Efprit doit faire contre
dum de pec- lui. Il le convaincra de trois cho-
$5rfi* * fes , du péché , de la juftice , & du
de judicio : jugement, i. Du péché 3 que les
de peccato '* ■ r •
quidem,quia J^urs ont commis en ne croyant point
non credide- en [ui & en portant leur incrédu-
iunt in me: |. / . r >\ i m r'
lice julqua la cruelle perlecution
qu'ils lui ont faite, & jufqu'à lader-
de juftitia niere extrémité, i. De fa juftice ôc
Id°Pairemia de *°n innocence de lui Jésus,
vado.ôcjam par une preuve auffi évidente qu'eft
,»n yidebici. fon ^^ ^ fon pere & f(m rf-
de judido cenfion glorieufe. 3. Du jugement
phncep'slhu* du rnonde j car (i le Prirîce du mon*
jusmundi dç eft déjà condamné , c'eft-à dire,
liTeiL K fi par la juftice de J t s u s il doit
m l'Evang. Ch. CXXXV. 6ï
être dépouillé de l'empire qu'il exer-
ce fur les hommes , 8c être précipité
dans l'abîme ; à plus forte raifon le
inonde , qui lui eft atfujetti par le
Î>éché j doit-il être enveloppe dans
a condamnation de fon Prince. Ces
confidérations fi glorieufes à J esu s
n'obligent pas feulement fes Difci-
ples à confentir qu'il s'en aille, mais
même à hâter fon départ dont elles
dépendent.
La 3. raifon regarde encore les
Apôtres , & elle fe tire de leur foi-
bleffe & de leur ignorance qui a-
voient befoin de remède. Car il Adhucmulr*
1 1 1 f x habco vobiâ
auroit encore beaucoup de choies a <iicere . fe(j
leur dire : mais l'état de leur foi- non poteftis
1 1 rr ir > • poccare xno-
bielle prelente n en pourroit pas por- £0.
ter le poids. 11 elt donc obligé par
un ménagement charitable de les
leur diflimuler pour un tems. Mais £eu™ricaJ{"m
lorfque l'Efprit de vérité fera venu spimusreri-
pour eux , il les revêtira d'une force yfros ora-
& d'un courage à toute épreuve , Se nem vema-.
il leur apprendra toutes les vérités ,
comme a des gens qui en feront ca-
pables. Il femble que ces hautes vé-
rités font la Trinité des perfonnes
dans une feule nacure , Penfimte-
ment d'une Vierge , l'abrogation de
la loi, ia réprobation des Juifs
tem.
6l AtfALYSI
jufqu'à la fin du monde , la voca-
tion des Gentils.
11 ajoute pour autorifer le témoi-
Noncnimlo- gnage du Saint - Efp.rit , id. Qu'il
nieripfo* Ced fera "ès-véritable : parce qu'il ne
quaecumque parlera pas de lui-même j mais qu'il
audict lociue- i i >i
tur, &cqu£ ne leuI" révélera que ce qu il aura
vencura func appris, ôc qu'il leur annoncera 111-
annuntiabic r -ni \ 1 L r x
yobis. humblement les choies a venir.
2°. Qu'il lui fera très - glorieux
illemeclan- ^ juj JESUS non- feulement parce
ncabir quia . *
dcmeo* acci- qu'il le rendra célèbre par toute la
nanriaWtvô" terre > mais Parce <lu'!1 recevra de
bis. fon fonds , tout ce qu'il leur annon-
cera : ce qui fait voir que le Saint-
Omma aux _r . . l , i i • x V •
cumque ha- clpnt procède de lui. Mais pour ne
bct Pater, rien déroger à fon Père, il s'expli-
mea funt : °, l
proptereadi- que en ajoutant que tout ce que
xi , quia de p0(rede fon Père jufqu'à la Nature
meo accipi- r... n\i^ o » • r *i
er, se an. divine eft a lui } & qu ainli il peut
ïuiuiabitv°- dire que le Saint - Efprit prendra
bis. r c i i ' • '
dans Ion ronds toutes les ventes
qu'il recevra du Père pour les an-
noncer.
£$S2& *• ^omeffe de la joie éternelle.
Modicum, ïl |eur dit adieu de nouveau , Se
ce jam non -\ \ rr j "11
Tiiebirismej il les allure que dans peu ils ne le
«ciurum verroient plus, mais que peu après
Tidcbiùsmej ils le reverroient encore : 1 un oc
de l'Evang. Ch. CXXXV. 6t quîava(J<)a(j
l'autre, parce qu'il s'en alloit a fon i'atrem.
Père. Il entendent le premier de la g6 ex difci_.
mort, 8c le fécond de fa réfurrec- puiis ejus ad
invicem :
HOU. ^ Quidefthoc.
Comme cette expreflion étoit ob- quoJ dicic
fi rvf • i -r i i nobis:Modi-
cure, les Lhiciples, le demandèrent cum, & Vi_
tout bas les uns aux autres, ce que dcbitis mc>
• ..••■ i • i £citerummo-
vouloit dire ce peu de tems qui de- dicum , ôc
voit précéder fon abfence & fon re- n.on videbi-
1 , . . tis me : K
tour. Jésus qui ne les avoit pas quiavadoad
entendus, prévint leur demande, & Patr«m? Di-
l i r • J i i cebant ergo :
leur marqua le lujet de leur doute. Quidefthoc,
Mais de peur de les affliger il ne leur <luo,d âio{z >
expliqua point la mort clairement. 11 nefeimus
fe contenta de leur dire touchant fon <luld lolul-
abfence , que dans peu ils pleure Cognovitau-
roient de douleur, Se répandroient tem JeiJus
. f quii vole-
qqs larmes ameres j pendant que le bant eum in*
inonde triompheroit de joie : & Jf^ST^,,
pour fon retour, que dans peu leur De hoc qua-
trifteiTe fe tourneroit en une joie in J^-JJ" Jfr
comparable. xi , moii-
cuin , &. non
Yidfbitis me ; 6c iterum modicum , Se videbkis me- Amen amen
dico vobis : quia plorabiris & flebiris vos , mundus autem g.m-
debic : vos auicm contriltabimini , fed triftiria veftia vertetur ia
gaudium.
Il exphque ces deux états par la Muiicr cùm
r f l ., r l parie triititia
comparulon dune femme en cou habet, quia
che. Lorfqu'elle enfante, elle eft vcnir hora
. \ h <r f ejus:cumau.
dans la triiteile , parce que Ion ter- tempepereri*
me eft venu. Mais lorfqa'elle eft P«roœ* j«"
.,. , , r c .1 r r non menimit
delivrce de ion fruit , elle ne le lou- prdlur* juo.
^4 Analyse
D- "' vient plus de Ces douleurs palîées, à
rtcr Cau- caufe de la joie qu'elle a d'avoir mis
dmm : quia r 1 » i 1 i
natus cil ho- un enranc au monde. La douleur de
mo in mun- l'enfantement eft paftagere. La joie
qui le fuit eft ferme & durable. Tel-
le vos igicur le fera la douleur & la joie des Apô-
trifth?am"h™ tres- ^s ^eronr accablés de triftefte
betis: en le voyant mourir, ôc comme en-
fanter les fidèles par les douleurs
tem wdebÔ ^e f°n agonie. Mais peu après il les
▼os : & gau- verra de nouveau _; leur cœur en fe-
debiteorvef- i i / j o • ~
trum,&gau- ra comble de joie, 6c cette joie ne
dium vcf- leur fera jamais ôtée; elle fera im-
trum nemo n ' r 11 •
toiiccàvobis. niorrelle comme la nouvelle vie ,
comme l'homme nouveau.qu'il aura
le in iiio die reproduit dans le monde. Alors
me non roga- 1 1 r r 1 • i«
bicis quid- voyant les choies h clairement expli-
quant quées par l'événement, ils ne fon-
geront plus à lui faire des queftions
touchant ce peu de te ras qu'ils ne
comprenoient pas.
4. Promifio 3. Promeffe des faveurs du Père»
heneficentix
Pairs.
Amen, amen Enfin il leur promet que tontes
dico vobis : 1 >•« ■/• r
fi qui:! perfe- 'es prières qu ils feront en Ion nom
ritis Parrem à fQn Père feront accomplies. Il leur
in nomine r ■ • 1 > 1 »
meo , .iabic *aIC un doux reproche qu ils n ont
vobis ufque encore ofé rien demander en Ion
modo non ti 1 • • \ c ■ \> >
peuftis quid- nom. 11 les invite a raire l épreuve
quam in no- Je fa promeffe , ôc à demander à
Dune mco : * '
de l'Evang. Ch. CXXXV. £5
Dieu quelque chofe , afin d'avoir la petite, & ae-
. • , • a r • i • cipicus j ut
joie pleine oc parfaite de recevoir gaudium ve-
l'efFet de leurs demandes. num?fitple"
Jufqu'ici il leur a enveloppé fous h*c in pro-
diverfes paraboles les chofes qu'il verb*is locu-
i r x>f • i 1 ' J- tus fura vo*
leur expliquoit. Mais il leur prédit, bis:venk
i°. Que l'heure vient qu'il ne leur h°ra • ncû£
ii ii -i 'artt non ,m
parlera plus en paraboles comme il proverbuslo-
a Suc jufqu'ici ; ma1S qu'il leur pat- fô'^Zfa
lera clairement Ôc fans figure de fon Parrc annoa-
Pere. C'eft ce qu'il a Sut pendant £&,$£
les 40. jours qu'il, a paffes avec eux nomme mco
après fa réfurrettion. 2. Qu'alors , JondiJo *o-
c'eft-à-dire après (on afcenton , ils bis^uiaego
feront a Dieu des demandes en fon ™g^ ^e *^_
nom. Qu'au refte il n'a pas befoin bis.Tpfeenir*
di j- > 1 • l r n Pater amat
e leur dire qu il priera ion lJere vos t quia
pour eux , parce que fon Pere les ai v°s me ama-
1 > i ,» ' o »'i ftis , ÔC credi-
me de ce qu us 1 ont aime , oc qu ils ^^IS qui3i
ont cru qu'il étoit forti de Dieu. ego à De©
£r \ 1 r exivi.
nhn pour commencer a exécuter la Exivi à Pa-
promeiTe, il leur déclare fans meta- trc> & ,vcni
* , 3x cl r 1 r\- '•! mmundum:
phore, qu il elt iorti de Dieu, qu il uerumreiin-
efl venu dans le monde , qu'il ciuitte Suo I"un~
1 1 0, »-i , l v dura, fie va-
le monde, & qu il s en retourne a doadPacrè.
fon Pere. C'eft ainfi qu'il exprime fa
naiiTance éternelle, fon incarnation,
fa mort prochaine, & fon afeenfion
future.
Les Difciples lui avouèrent alors plaint eidif.
qu'il parloic clairement ôc fans para- £CPcc '
îpuli C)l
nunc
66 Analyse
D. i<r. \>o\q y qu'ils recohnoiffent mainte-
palam loque- nanc qu'il favoit ronces chofes , ÔC
veVbiumnd" ce^^s même qui fe palToient dans
lum dicis. TeTprit des hommes, 6c qu'il n'écoit
Nunc feimus i r ■ j iv
quiafeisom- Pas beloin de l incerroger _, parce
nia, ôc non qu'il pénécroit le douce , & préve-
opus eft tibi • i>- i ' r
utquistein- noiC * interrogation par la reponie,
terrogee : in comme ils venoienc de réprouver.
hoccredimus r\ *\ -i • >-\
quia à Dco VLl a cecte marque ils croyoïent qu il
exiitf. écoit forci de Dieu , c'eft-a-dire ,
qu'il étoic fon Fils , qui comme fon
Père connoilïoit coûtes chofes.
Refponditeis J e s u s leur fçut bon gré de ce
Jcfus: Modo , , 5 ° ...
crcdiiis» que dans cet ecac encore tranquille
ils le croyoient tel qu'il écoic. Mais
il leur prédit que cecce croyance ne
Ecce venir dureroic pas long-cemsj que l'heure
hora, &jam venojr ^ étoit déjà venue qu'ils
venit,usdif- ,..-.*. , > r A \
pergamini s enruiroient chacun de Ion cote, oc
unu^aifque j laifrercient tour feui ; ouoiqu'a-
w propna, -i /* ri
& me folum lors même u ne ieroit pas ieul , parce
ftua"um Clue ^on ^ere l'accompagne toujours ,
folus , quia & demeure toujours avec lui. Que
Parer mecum ^y ^ ^ ^ ^ ? ce ^ ^
pour le leur reprocher ; c'eft au
H*c locurus contraire pour les exciter a fonder
fum vobis , en lui la paix &z le repos de leurs
ur in me pa- * i /* J
ccmhabeacis. âmes j parmi les traverles de cette
vie, en confidéranr que comme fon
Père eit toujours avec lui , il fera
in muido toujours avec eux. Il ' les avercit
he l'Evang. Ch. GXXXVI. £7
qu'ils fouffriront de grandes perfé- pretfuram
1 ■ 1 1 ? ••11 habebitiî ;
cutions dans le monde : mais 11 les fed confiai»;
exhorte à prendre courage. Car fi egovici mun-
ie monde leur ennemi eft plus fort
?|u'eux j lui qui les défend eft pius
ort que le monde , puifqu'il en a
remporté la victoire.
CHAPITRE CXXXVI. caput
CXXXVI.
Prière de Jefus avant pûno
r r\ rr Chiusti an-
la raliion. te passio-
HEM SU AU.
1 . Oratio pro
1 . Pour J a propre glorification. fua giorifiCa-
LOtfque Jésus eut fini ce dif- d. 17. Uxc
cours , il leva les yeux au ciel , J°fuSri!s&efu.
de fit cette admirable prière â fon blevarii ocu-
Pere. Il la diviia en trois parties, a^^1^
La I. pour lui. La IL pour fes Apô-
tres. La 111. pour tous fes Elus. Il
la prononça tout haut pour l'inrtruc-
tion des premiers , 6c il l'a fait écri-
re par fon Evangélifte pour la con-
folation de fon Èglife.
I. Il demande pour lui, félon (on ?iter ' 7^
I -, X , 11 hora» cîarifi-
numanire, non-leulement la gloire ca filium
de fa réfurrection , mais encore la tuun1,
gloire de fon nom par toute la terre.
II le prie que l'heure étant venue
6% Analyse
r>-17» où il va palfer pour le plus grand
de tous les fcélérats , il le relevé
de cette infamie , & qu'il le faiTe
reconnoître pour ce qu'il eft. Il l'y
engage par trois puiflans motifs.
ut fillus tmia Le i. eft tiré de la gloire qui en
clarificec te: • j n ~ *~t /*
reviendra au rere même. Le 2. le
fout dedim prend de la félicité ôc de la vie éter-
eipotefta:em nene qu'j] donnera à ceux que fon
ut omne Père lui a loumis ; comme s il diloit :
S\ocld«diiiî Si vous glorifiez votre Fils, votre
vitam «ter- Fils vous glorifiera à fon tour. Car
Ha^' eft au- vocre gloire confifte à être reconnu
te vira «ter par les hommes le feul véritable
gnofcalittc Weui Se la mienne confifte à être
foium D.-um reconnu feul pour le Chrift que vous
quen?inihfti av^z envoyé dans le monde. Or M
jefum chri- en me reiïufcitant vous m'avouez
pour votre Fils ôc pour le Chrift, je
donnerai aux hommes que vous m'a-
vez donnés le moyen infaillible d'ac-
quérir la vie éternelle, lequel con-
fifte premièrement en cette double
connoiftance. Et par mon moyen, je
dis par la gloire du Mellie que vous
m'aurez fait rendre , ils vous con-
noîtront pour le feul vrai Dieu.
Ainfi ma gloire réjaillira fur vous,
& fera pour vous une fource îné-
puifable de gloire.
Ego te clati- Le 3. motif eft la reconnoiflance
de l'Evang. Ch. CXXXVI. 69
que ion Père doit à la gloire que lui ficavî ruPet
5 . J o 1 * r * cerram : opus
J e s u s lui a rendue oc lui a tait c©nfummavi
rendre, comme à l'auteur de fes mi- <iu°tl deciiftî
, , / , • i r mihi ut ta-
racles , par la prédication de ion dam j
nom, & par la consommation du.
grand ouvrage de la rédemption des
nommes donc il l'avoir chargé , 8c
qu'il regarde déjà comme accompli.
Fondé fur ces trois motifs il prie ion & rnunc cIa-
Pi / J r 1 r i rihca me tu ,
ère de répandre iur lui par ia re- patcr apuci
furrection & par fa féance à fa droi- temetipfum,
r i ri ■ i \ * claritate
te lelon ion humanité, la même quam habui,
gloire qu'il avoir dans lui avant la p"ufquam
° , ^ j j o J i r • mundus ef-
creation du monde, oc de le raire fet,apud te
reconnoître par tout dans le tems ,
ce qu'il étoit dès l'éternité , vrai
Dieu , & vrai Fils unique de Dieu.
Gloire incomparable, dont il a en
quelque forte été dépouillé par fon
incarnation , & par la bafTelTe de la
chair qu'il a bien voulu prendre..
2. Pour le falut de fes Apôtres, V Oraùopr*
J J r falut eApoJio-
lorum.
II. Il prie enfuite fon Père pour
fes Apôtres qui lui dévoient fuccé-
der dins le miniftere de la prédica-
tion. 11 commence par faire leur
éloge. Après qu'il leur a manifefté Manifeftavi
1r l J /* n y n. nomemtuum
e nom perlonnel de ion Père , c elt- homiuibm
à-dire , après qu'il leur a prêché
70 Analyse
d. i7« comme Père , celui qu'ils croyoient
déjà le feui vrai Dieu du ciel de de
la terre , il les relevé ,
quos dedifti i. Parce que le Père, a qui ils
«lihide mun- apparrenoient par la création , les a
do:tuierant, A l , , l , Jv .,, ,
& mihi eo$ iepares du monde des l éternité par
dediftts & l'élection, & les lui a donnés à lui
lermonem T ^ ,
tuum ferva- J e s u s-Lhrist par la vocation,
verunc. pour leur prêcher fa parole qu'ils
ont gardée, & pour les conduire à
la vie éternelle.
2. Parce qu'ils ont répondu aux
Nur.e cogno- foins qu'il a pris pour eux. Car ils
oS ' q« r°rU très-PerrUadés » & Par la foi &
, itediftimihi, par leur expérience , que le Père eft
absteàuu: [;auteur je toutes fes avions & ae
toutes (es paroles j qu'il produit en
quia verba , effet vifiblement dans lui. Et cette
quçe dedifti perfuafion vient de ce que leur ayant
mihi , dedi r , _ i n 1
cis:&ipfiac- annonce la doctrine que le rere lui
ceperunt, & avoit confiée, ils l'ont reçue avec
cognoverunc r r • '
ycrè quia à une ferme roi, entretenue par une
te exivi, & j^jelle pratique _, & ils ont reconnu
quia tu me iincerement qu il etoit venu de la
mififu. t ju pere ^ fc ^ue |e pere l'avoit
envoyé. Ainfi ils l'ont connu vrai
Dieu, unique Fils de Dieu, & vrai
homme.
igo pro eis Ce font ces avances de falut dans
'io°mundon les Apôtres qui le portent à prier fon
»ge , Pere pour eux. Il ne prie point pour
de l'Evang. Ch. CXXXVI. 71
le monde qu'il a réprouvé. 11 prie
pour les Apôtres à caufe de ces trois
confidéranons.
La 1. eft que le Père à qui ils ap- fcd pro hîs
1 1 • 1 » k r <luos dedifti
parnennent les lui a donnes. Amn mihi , quia
le Père recevra favorablement des tui iunc »
prières pour des perfcnnes qu'il a 11
hautement distinguées. Quoiqu'il &me*omnil
ajoute par une efpece d'explication 3 cuameafunc4
que le Père qui les lui a donnés ,
ne laifte pas en les lui donnant de
garder toujours le même droit fur
eux , parce que tout ce qui eft au Fils,
eft aulîi au Père, & qu'encore que
le Fils en fa nature humaine les aie
reçus du Père , ils ne laiiîent pas
d'appartenir toujours au Père, parce
que tout ce qui eft au Père eft aulîi
au Fils en fa nature divine.
La 2. confidération eft, que les fie clarifies-
Apôtres lui ont fait honneur par ™s fum I:i
TobéilTance qu'ils ont rendue à [qs
paroles , lorfqu'en quittant toutes
chofes ils fe font attachés à fa fuite.
La 3. eft j que par fon retour vers £* iam nen
fr. \ ^ 1 r • • 1 *um in mun-
On rere _, il va deiormais quitter le do, & bi ia
monde ou ils doivent demeurer en- mundofunc,
] r l 1 1 n. j & ego ad ce
core pliiiieurs années. 11 eit donc venio.
jufte qu'il les remette entre les mains
de fon Père, de qu'il le prie de les Pater fante;
conferver, & de leur rendre les me- n"^0^11
7i Analyse
qu<^' dJdifti mes am^ances qu'il leur rendroit
aiiii, lui- même ., sJil ctoit encore avec
eux.
11 demande pour eux plufîeurs
chofes donc les unes regardent leurs
perfonnes j & les autres leur emploi
Apoftolique.
«cfincunum, ^ jj demande pour eux refprit
d unité , c elt-a-dire , qu il les ren-
de entr'eux une même chofe d'ef-
prit, de cœur, & de volonté, fans
chifme & fans divifion , comme fon
Père & lui font une même chofe
dans la nature ; ce qui eft une com-
paraifon de reifemblance , & non
d'égalité,
cùmeffem i. \[ demande pour eux la perfé-
ftr^abameos vérance jufqu'à la fin dans l'état de
in nomme grâce. Tant qu'il a été avec eux il
diftimîhi,cu- les a fi fidellement gardés en fon
ftodivi -, & nom & par fon autorité ,- qu'aucun
nemo ex eis i, > n J 11 >
periit,nififi- d eux ne s eit perdu. Il n y a que
îius perdiiio- [e f]|s je perdition , le perfide Judas
wra impica- qui eft péri , afin que 1 tenture qui
tur- a marqué la punition de fon crime
Nunc autem fS y i- l >* • 1
ad te venio : rut accomplie. Maintenant donc que
Jésus retourne vers fon Père , il
met fes Apôtres fous fa protection ,
afin que ce malheur ne leur arrive
pas , mais que le Père continue les
foins qu'il a pris de les conferver
jufqu'à
de i/Evang. Ch. CXXXVI. 73
jufqu'à la fin. C'en; ce qu'il témoigne & hxc I(>*
' t . r x j p quor in mua-
en leur preience avant que de ior- do, uchabc-
tir du monde, afin que la joie qu'ils ant gaudium
. r ■ . r *• • r r nieum împle-
ont eue de le voir julqu ici lous les tuminfemec-
ailes, foit aufli pleine 3c parfaite iPfls*
après fon départ comme aupara-
vant.
3. Il demande pour eux la victoi-
re fur le démon &: fur le monde au
milieu de fes perfécutions. Pour s'ou- Ego dedî d$
vrir la voie à cette demande, il dit [ur™n;ra &
qu'il leur a confié la parole év la do- mW« eos
arme de fon Père, pour la répandre odio habai:'
dans tous les lieux , de que la créance
qu'ils lui ont donnée leur a attiré la
haine du monde, l'ennemi juré de
cette fainte parole , parce qu'ils ont quianonfuat
1/ 1 / V • »-i > / de mundo .
déclare , par cette roi , qu ils n e- ^cat &. eg{^
toient point du monde , comme lui- non fum de
* > / • 1 1 1 1 mundo.
même n en etoit point. 11 ne demande
/ v r r» »•! 1 Non rogo
pas néanmoins a ion Perequ il lesre- Ut collas eos
tire du monde, leur ennemi, comme pd J"11"^0 »
la chofe fembloit l'y conduire , mais eos à nuio.
qu'il les garantiflTe tellement du pé-
ché parmi les tentations du démon Se
les perfécutions du monde , qu'ils de-
meurent victorieux des unes & dos
autres.
4. Enfin il demande la faveur Se
la bénédiction du Père fur leur mi-
niftere Apoftolique. 11 prend Pocca- De round
Tom. IF. D
74 Analyse
t>«'7. (ion de cette demande de ce qu'il
ïionfunc,fi- vient de dire, qu'ils ne font point du
eut & ego > "i r. ,
non fum de monde , non plusque lui j mais qu il
mundo. jes en a réparés pour les employer à la
sanaifica prédication. 11 prie donc fon Père de
eos in verita- { r ^ c j i l • l « a. \
te. les lanctiner dans la vente, ceit-a-
dire , de les deftiner tk de les confa-
crer lui-même à l'emploi d'annoncer
vedcTeu!"5 au monde la dodiine delà vérité , &
fa parole , qui eft la vérité elle-mê-
me. 11 le prie de les rendre , par l'on-
ction intérieure de fa grâce , dignes
sicut tu me £un fi faint miniftere , parce qu'il les
mundum,&: envoie dans le monde pour la meme
ego mifi eos fin quefon perel'y a envoyé lui-mè-
jn mundum. i J J ,
icprocisego me, pour y publier aux hommes la ve-
fanâificome- • é & j paro[e ju pere> Et afin de les
îpfun^uctmt r .
& ipfi fanai- coniacrer plus rehgieulement a cette
wk? m Ven" v^nt^ ? ^ ^e confacre lui- même au fa-
crifice, il fe dévoue à fa paflion.
j. Oratio
rum.
Nonproe- ni. Il pa(Te des Apôtres à tous les
is , autem ro- t-i j i / • j r 1
go tantùm -, klus > clul 5 dans la luite des hecles ,
fedôcprocis, doivent croire en lui , par le minif-
qui credituri . \ i 1 1 i i
funtperver- tere de leur parole. 11 demande pour
bum eorum eux Jeux grâces incomparables , l'u-
in me : ° . ,, l • r
ne pour cette vie > 1 autre pour leiie-
cle à venir.
ut omnes u- T „ s
numûnt,fi- La i. eft un meme cœur oc un
de l'Evàng. Ch. CXXXVI. 75
même efpiit , par l'unité d'une me- cur ru> **"
r • /, i, l a | ■ / m me , ôc ego
me roi & d une même chante , par jn re , Ul <sc
la fuite du fchifme qui blette la cha- 'lPfi in rRohn
, 0 PL' T J- T 1 f * unura fint >
rite , ce de 1 hereiie qui diviie la roi.
Il demande pour eux cette unité en
l'honneur & fur le modèle de l'unité
du Père avec le Fils , & du Fils avec
le Père , afin que cette unité invio-
lable de fentimens & d'amour dans
les Fidèles , foit une démonftration ut crecUc
l J ' C J rr.undus,quu
convaincante pour le monde înhde- tumcm12jE
Je , que le Père l'a envoyé dans le
monde , étant impoiïible que tant
de peuples difrérens putfent convenir
dans les mêmes fentimens, fi con-
traires à ceux de la nature corrom-
pue , s'ils ne les avoient puifés dans
la même fource de la vérité.
11 ajoute que , pour produire cettç
• / j y- j 1 i> îtego cU-
unite des rideles, comme 1 image ritatem ,
de l'unité des perfonnes divines , il <iua™ <led»fti
i c ■ i r i- • • / i niihi. dedie-
leur a rait part de la divinité par le is t ut fine u-
myftere de (on corps 8c de fou fane, num> ficut.&
/. r • i • i r»- t t » nosunuiniu»
qui ne raitde tous les rideles qu un mus.
même corps , parce qu'ils ne man-
gent tous que d'un même pain. Car H°'mc'is»
V l r r , . 8c tu m me ,
étant en eux par la propre chair,
de le Père étant en lui par la nature
divine , qui eit unie à fa chair d'une
imité perfonnelle ; le Père fe trou-
vant dans tous les Fidèles par le
Dij
j6 Analyse
D^7- moyen du Fils , & tous les Fidèles
ut une con- unis au pere ar Je p^Jg feront col,_
fummati m f , r . ;
unum : & lommes dans 1 imite. Le monde en
3du"auia rirera *ncoré un Sr™d argument ,
cumcmiafti, que le Pere a envové fon Fils, &c
^ffi^f ^quiUaimé les Fidèles qui font Tes
me dilexifH. membres , comme il aime fon Fils
lui-même.
SSm'Ju. La *• gra« qu'il demande à fon
voio uc 'ubi Pere pour les Fidèles , eft la gloire
âSTfîlt me- éternelle, ou qu'ils foient éternelle-
cum; ment dans le même lieu que lui ,
c'eft-a-dire, dans le ciel; qu'ils jouif-
.. fent de la vue, de la gloire &c de la
ut videant j • , , n ¥ • j
dadeatem divinité que le Pere lui a donnée ,
y?.1?? c*u,am & qu'ils y coniiderent avec admira-
quia diiexifU tion & avec joie 1 amour inhm &
mcanteconi- fans Dornes qlie }e pere a eu pour lui
■mudi. avant la création du monde. C eft une
raterjufte, merveille inconnue pour le monde
non1 cogno- clu^ ne connoît point le Pere. Mais
vie, lui qui eft. fon Fils le connaît , & fes
ego autemte Fidèles connoiffent au moins que le
coguovi : & pere pa envoyé , en attendant qu'il
lu cognove- / . ' . \ .
runc , cjuia leur découvre tout ce qui les doit
tumemiû-fti. rendre heureux.
Et notum Parce qu'il leur a fait connoître
mcntuum, & fon nom , c'eft- à dire , fa bonté Ôc
notum faci- ]es entrailles de fon amour & de fa
j.. A. miféricorde ; & il les leur fera con-
ut dilcûio, *.. J | 1
quâ dilcxiûi noure de plus en plus , ahn qu ecant
DE I/EVANG. Ch. CXXXVI. 77
réellement en eux par fon efprit , & ™e » }n î?1}*
r r i • o r r .. ht , Scegow
fur-tout par la chair & ion iang , ils ipfls.
foient les objets du même amour
dont le Père l'a aimé lui-même,
puifqu'il n'aime les hommes qui
CSLvJk de (on Fils , ou plutôt qu'il
n'aime que ion Fils dans les hom-
mes.
CHAPITRE CXXXVII. caput
C XXXVII.
Jardin des Oliviers. a. is. b, 14.
C. zi. D. 18.
1. Trtàeffe de Jésus. Hortus'
Chrijlu
CErte prière ayant été achevée d. ig.Hxc
en chemin , Jésus pafla avec CTU™ dixifcc
les Dilciples le torrent de Cedron cftcumdifci-
oudes Cèdres, qui coule le lonç des puhs fuis
11 j-t' ri ^ ••-.' %r\ transt°rrea-
murailles de Jcrulalem du cote d (J- tcmCcdron.
rient ; & , félon fa coutume , il mon- c. ix. Eté-
ta le Mont des Oliviers , & vint dans g^Sj*"
un village qui y e(t fîtué, nommé confuecudi-
Gs r 'il p T J" nem in mon-
etntemani. Il y avoit la un Jardin tcm oiiva-
planté d'arbres , où il entra avec fes rum : recu«
Dilciples , <k ce rut la première de- }num & dic-
marche qu'il fit vers fa Paffion. Il cipuli. a. ztr.
Tune venir
:ne qu
en a voulu ménager en telle lorte jefuscum ii-
toutes les circonftances , qu'il parut, lisinvUiam,
1 »*i r <r 1 • > l11* dicituc
1. qu il lourrroit volontairement oc Cethfeiaaai,
Diij
7$ Analyse
c'ii'd* lt **ans conrrainre- II. Qu'il fourTroit
D. ubi 'L[ innocemment de fa part. III. Qu'il
hortus , in foufrroit par amour envers les hom-
TiUteTpfcn,rr°i mes' H n'a rien omis pour a(Turer ,
difcipuli s- dans tout le cours de fa Paflion , fa li-
,us' berté , fon innocence & fon amdtir :
mais comme les preuves en font ré-
pandues par tout , on ne peut pas les
réduire chacune fous leur chef; il
fuMira de les remarquer à mefure
qu'elles fe rencontreront en notre
chemin.
tem&jîi7«[ *• Quant à la liberté, il fe rend
qui cractebat volontairement dans un lieu où il
eum, locum : >/ • r i r t-\"r ■
quiafrequcn- s etoit iouveiît trouveavec les Dila-
ter jw-fuscon- pleSj &par conféquent fort connu
venerat îll -:c jtj • » t_<r • il
cum difcipu- de Judas qui le tranilioit. Il va ex-
âisiuis. pres l'attendre où il favoit qu'il le
devoit chercher , pour lui épargner
la peine d'une plus longue recher-
che. On doit considérer ici , I. ce
qui précéda la prife de Jésus.
11. Sa prife même. III. Ce qui la
fuivit.
I. Les circonstances qui précédè-
rent fa prife, furent, I. Son trou-
ble. II. Sa prière. III. Le fommeil
des Apôrres.
A îc f;i:::t I. Lorfqu'i! fur entré , il dit à huit
difcifuli* fu- de fesDifciples , qu'ilsdemeuralfent
bîc , doacc la en repos , & qu us le millent en
.cum ;
de l'Evang. Ch. CXXXV1I. 79
priere,depeur de fuccomberàla ren- yadamîlluc;
* . ' c r , 'l il & otem: C.
tation future, pendant qu il alloit Crace ne ia-
s'avancer plus avant dans le Jardin ueds in tcn"
pour prier audi de Ion cote. Par un
fage ménagement de leur foiblefle ,
il leur épargna la vue du trouble où
il alloit entrer , de peur de leur don-
ner un fujet de fcandale, qui les eut mifpftcrum
affoiblis. 11 prit pour l'accompagner ôcjacotmm,
Pierre , Jacques de Jean , qu'il jugea * J
plus capables de porter cette épreu-
ve , & audi- tôt il le livra au trouble
qui le faille.
Il s'y voulut affujettir , i°. pour
prouver qu'il étoit vrai homme com-
me nous. 2°. Pour porter la peine
des péchés qui le commettent dans
le cœur par les pallions , comme il
devoit expier par les tour mens du
corps, les péchés qui fe font par le
corps. 3°. Pour fouffrir tout entier &
dans les deux parties de (on huma-
nité ; dans fa chair par les douleurs
qu'il devoir éprouver j dans fon ame
par les pallions, comme par des
bourreaux domeftiques qu'il excitoic
contre lui. 40. Pour confoler les Mar-
tyrs qui, en fourTrant pour lui, au-
roient regardé comme des péchés
cette horreur naturelle de la morr ,
& les mouvemens qu'elle devoir ex-
Div
8o Analyse
a. te. b. 14. cirer Jans je cœur : Quoiqu'il y ak
enrr eux & lui cette grande diffé-
rence, qui les a excités volontaire-
ment en lui - même, ôc qu'il leur a
marqué les bornes de leur violence
ôc de leur durée j au lieu que les
Martyrs les ont éprouvés par nécefîi-
té , Ôc comme des fuites naturelles
de leur infirmité. 50. Pour faire voir
combien fa Paflion , dont il voyoic
en efprit toutes lescirconftances, de-
voit être cruelle.
Il fouleva donc en fon cœur trois
parlions très- violentes j la 1. fut une
crainte horrible. La 2. une profonde
trifteiïe. La 3. ne fe peut mieux
nommer qu'une défolation , qui eft
l'état d'une ame qui voit un malheur
prêt à fondre fur elle , ôc qui, de
quelque part qu'elle fe tourne, ne
. . voit aucun moyen de l'éviter. L'ima-
ic cccpit pa- /
vere , ge menaçante a une mort cruelle, que
i'efprit de Jésus propofa à fa chair ,
la frappa d'une terreur qui rappella
tout le fan^ auprès du cœur. Mais la
comriftari, relolution ferme de la volonté a la
fourrrir, la fit regarder comme déjà
préfente , ôc par cette certitude chan-
gea la crainte en une trifteiTe incon-
fc. lUcf* folable. Enfin l'une ôc l'autre paflion
fe joignant enfemble cauferent la de-
de i/Evang. Ch. CXXXVII. 8 1
folation de route fon humanité fain-
te. Je dis de fa chair par la nécelîité
de mourir , & de fon ame par la part
qu'elle prenoit dans la douleur de fa
chair innocente.
n, \ r • tv r • Tune ait iî-
temoigna a les trois Uilci- \-li: Triftiseft
pies le trouble intérieur qu'il fentoit : anima mea
Mon ame _, leur dit-il, ejl plongée mortem:fuf-
dans une trifleffe mortelle: demeure? tinetehk,8c
. . c -i, > vigilate me-
ici _, & veille^ avec mou cum.
2. Jésus priant & agoni fane. i.Chrjftuso*
£ ° J rans Angélus.
Agonia.
H s'avança hors de leur préfence Ecprogref-
à la portée d'un jet de pierre , pour ^^
leur cacher à eux - mêmes , quoique ab cis quao-
x C CL
plus forts que les autres, ce combat Ja^us.1
qu'il alloit éprouver , Se qu'ils n'au-
roient pu voir fans fcandale. Il fe
mir à eenoux , î °. pour expo fer a fon EtL VoCn'ls
n I J r J r L genibus ora-
Pereles delirs delà chair innocente , bac, dîcenss
qui demandoit d'être exempte d'une Pater>fiv«»
r r n r»r» i • rr • i "ansfer cah-
mort ii hinefte. 2°. Pour lui ortrir le cem iftum à
defir de fa volonté raifonnable qui me>
fourneteoit à fon bonplaifir celui de
la nature. Mais 3 ajoute- t-il, eue verumramen
, / r • r ' c i non mea vo~
votre volonté Joit jaite j & non pas la îunras , fed
mienne. tua fiac*
Un Ange vint du ciel pour le for- r APParuîÇ
. ~ o r , autem illi
riher. i. Par la gloire munie que Angcius de
pieu en devoir recevoir, i. Par la CŒ!° "m""
»$s eum.
D v
Si Analyse
c.'^a'g; gl°ire qui lui en dévoie revenir â
lui-même. 3. Par le falut d'une in-
finité d'ames que fa more dévoie ra-
itB.proci- cherer. 11 fe profterna néanmoins le
di: iuper ter- ■ r ' ,
ram, a. in Vllnge contre terre, 8c pendant ce
facieitj fuam combat entre la volonté raifonnable
orans j Se G. • i n ,
faitus in ago- q111 acceptoit Ja mort , oc la nature
nia proiixiùs qui la refufoit , il prioit encore avec
orabat, B. ne a, ,,• a ,.. , . n,,
fi rL- ri portée, Pius d inttance, que s il etoit poiuble
cranfirci ab cette heure pafsât fans nuire à fa
vie : Mon Père j difoit-il , routes
'ba fel^' vous font pojjlbles , éloigne^
Si pombiic de moi ce calice. Faites- le palTer fans
eft , ttarïfeat _ • i i r • /
àmecalixif- (\UQ Je *e boive; mais j aires en cela
te : B. omnia ce qu il vous plair , & non ce que je
tibi po/Tïbilia 1 r 7 J
funt,transfcr Veu-X.
caîiccm hune Cette condition , s'il efl voffible j
a me : fed j > j j» j i ■ j
nonquodec;o dependoit d accorder , avec la vie de
voio , fed J e s u s , 1. toutes les figures qui
fluod.m. ■ r "r
marquoient la mort. 2. 1 outes les
prophéties qui Tannonçoient. 3. Tou-
tes les prédictions qu'il en avoit fai-
tes lui- même à fes Apôtres & aux
Juifs 4. Le décret éternel de fa mort.
5. L'économie du falut de. tous les
Elus attaché a la mort du Rédemp-
teur. Il s'amfïoit d'allier tout cela
avec l'exemption de la mort de
Jésus. Cependant il comprend tout
cetalfemblage dans cettepropobtion
univerfelle : Toutes c ho fes vous font
de l'Evang. Ch. CXXXVII. 8$
pojjibles. On peut fur ce fondement
fe former une jufte idée de la toute-
puiflance de Dieu.
Alors la violence du combat inté-
rieur, qui fe palïoit en lui, fut fi
grande, que le cœur généreux re-
pouffant avec force aux extrémités le
fang que la crainte avoit ralfembié
autour de lui , les pores s'ouvrirent c:Et faôa*
par tout le corps , ce îliortit, avec çlcut glK'taï
la fueur , des eouttes de fanç fi pref- fa!1gu>nis de-
iees , & en h grande qumtire, qu el- terram.
les découlerentjufqu'en terre.
3. Apôtres endormis. *£***
3. S'étant levéde la prière, il vint Etcùmfur-
à fes Difciples qu'il trouva abbattus ration"* &
de fommeil , par la trifteffe dont ils vcnifTer ad
:/ / / / /->> n. » ' ' difcipulos fu-
etoienr pénètres. C eit qu ayant ete 0s, invenice-
long-tems attentifs aux chofestriftes os dormien-
d° -, 1 1 tes pra: cciili-
ont 11 les avoit entretenus , la na- tia.
ture épuifée cherchoit à fe réparer
par le fommeil II leur reprocha leur Etaitiilîs,
pefanteur , Se leur commanda de fe 9JlcI rdormi-
lever & de le mettre en prière, pour orate , ncin-
n'êrre point furpris par la tentation ucns in ten"
qu ils alloienc éprouver. Puis s a-
\ rr v n \ I / • 1 j B. EtaitPe-
drelianta Pierre le plus intrépide de tro t Simon-
tous : Ouoi . dit- il , Simon, vous dormis? A.fic
/ •>! m • /* non potuiflis
aormei ? hit- ce ainli que vous accom- uaà hoù vi-
D vj
$4 Analyse
A.16.B.J4. p^ffez ces magnifiques promefTes?
c. xi. d. 18. r , b i r
„.,„„ /^c^j « ave? r>a veiller une heure
guarc me- x x
cum ? Vigila feulement avec moi ; veille^ j votf.?
In tentario- combe r à /a tentation qui Je prépare.
Sri» qui- V^TiX ^ ^"^ ^ ^*VÎ PGUr
dem promp- s'oflrir à la mort, quand le péril eft
lutcm'infi^ éloigné, & qu'on ne voit encore
ma. rien à craindre \ mais quand on eft
au milieu du danger , & que la mort
eft préfente , la chair 3 quifentfajoi-
blejfe j défavoue bientôt la bravoure
B.itircrùm de l'efprir , & l'entraîne malgré lui
abkns ora- dans fa foibleîTe.
vit . eumcîem 1t !• J 1
fermonemdi- 11 retourna au lieu de la prière ,
cens: a. Pa- fa ]\ Ja recommença en mimes ter-
ter mi, h non ,- „ \- \ r t-
potefthicca- mes : Mon Fere 3 dit-il, Ji ce calice
hx tianhre ne pCUÎ paf[er fans que je le boive . que
nifi bibam £ , < r r rr ti \ r
ilium , fiât votre volonté Je Jajje. 11 revint a les
îrountasrua. Djfciples qu'il trouva encore endor-
Ic venir ue- 1 r o LU
rùm,6c inv« mis, les yeux appelantis & abbattus
nie eos dor- je f~0 m m e i 1 . 11 leur dit quelque cho-
mienres : e- r . , v i •
rant enim o- le pour les préparer a la tentation
cuii eotum qui s'approcnoit. Mais comme ils
gravaa : B. "1 . i rt ,
&c ignora- ne lavoient que lui repondre, il les
bantquidre- j j^ dormir, & retourna faire la
{pondèrent fc '
ei. même prière pour la troilieme rois.
a. Et rchc- Cependant comme Judas, avec fon
•rumabiir, & elcorte, etoit prêt d entrer dans le
toravit terriô, Jarcjm x\ revmt i fes DifcipleS :
etimi em ter- •> ■. ' M —
monem du Dorme? maintenant j leur dit-il , il
cens.
de l'Evang.CL CXXXVII. 85
vous pouvez, & prenez du repos. B\EtTemJ
C etoit un reproche de leur parelle , difcipuiosfu-
accompagné d'une piquante ironie. ?*.' B_& a!c
Puis leur parlant lerieulement j C eji te jam, &re-
<z//^ «to/rair., dit- il , l'heure eji venue Jgg* ;e_
o# /d /z/j ^e L'homme va être livré nizhor a : ec-
£/2rr£ /ej- /7Zûi/2j ^<rj méchans. Allons > ^^ll"jJ^
/^V^-VOZ/Jj Ce/tfi ^tti /72é trahit eji tur in manus
,.,,,, «,-^^A^ peccacorum.
tout proche. £urgice^ ea.
mus:eccequi
4. Acceffus
II. Il parloit encore lorfque Judas %**"*
d'ifcanot entra dans le Jardin, à la B.Etadhuc
ai» j ' 1»' eoloquente,
tête d une grande troupe armée d e- A eCcejudas
pées & de bâtons , de précédée de b. ifcariotes,
0 1 n 1 rn ' unus de duo-
lanternes oc dehambeaux. hue etoit decim.
compofée d'une cohorte Romaine D.cùmac-
• / • 1 • cepinec co-
toute entière , qui etoit de cinq cens hoaem, & à
hommes, & d'un grand nombre de Pomificibus,
lerviteurs des fouverains Prêtres & miniftro$,ve-
des Phanfiens qu'ils avoienc en- nit ill"c » A#
' O I \/T A & CUm CO
voyes , eux & les Magiitrats , en cas turbamuka,
que les Difciples de Jésus , ou ceux "?l|.,l^1l,* •
, r- 1 r r • r &ruftibus,D.
du peuple qui le ravonloient , le Cum ïamcr-
miitent en état défaire réfiftance, & ?" » & faci~
J 1 J'f J 1 ' bus, 8t ar-
de le détendre par les armes. mis. a. Mif-
Comme les Romains ne connoif {j a Ç^f
# bus baccrao-
foient point Jésus , & que les 1er- tum , a. &
viteurs mêmes qui Pavoient fouvent fS^n?-'* c"
vu , pouvoienc le tromper dans les
S6 Analyse
à. ts.ft. 14. ténèbres , en prenant quelqu'autre
c. ii. d. 18. r . . 1 1 ,
pour lui , qui lui auroit donne Iieti
de s'échapper , on éroir convenu ,
Dedcrarau- i°, QL1e le Traître leur donneroic
tenu traditor r 1 1
ejus fi^num un ligne , pour ne pas tomber dans»
cm, dkcns : cette erreur , & que ce figne ne fe-
rott pas de le montrer au doigt , ce
quiauroit encore été fujetà quelque
équivoque ; mais de le joindre de fi
près qu'on ne put s'y méprendre.
Qucmcum- C'ejl celui de la troupe j leur dit ce
«jue «tfcula- rçaîcre qu€ je baïfcrai : faififfer-
Ceeil 5 ceatcc vous de lui j 6* / emmené^ fort sure-
eum, &du- ^^ • proteftant qu'après Ion indice
il n en repondoit plus, avis qu il ju-
gea nécefîaire à caufe de ce qui étoit
arrivé à Nazareth. Que comme ils
avoient ordre de prendre avec lui
fes Difciples , les foldats fe dévoient
rendre maîtres de la porte, afin qu'-
aucun ne s'échappât à la faveur de
la nuit qui éroir déjà bien avancée,
ïtcùm vc- Judas donc fe détachant delatrou-
teitfLc , C. an- > 1 1 • \ / »,
«cccdcbat e- Pe s avança vers le lieu ou etoit Je-
"•*■ sus, avec les trois Difciples qui
A. Et con- l'accompa^noient. Il le rencontra
fcitim acce- • ro , 1 1 • ti >
àeas ad Je- qu* venoit au dtvanr de lui. 11 s ap-
fum b uc procha de lui pour le baifer , & il
ofcularetur r ,,. . i i • i i
cura, a dixic -Lit l impudence de lui dire en le
Av. Kai.i , : ^1jfanr . je vous ra[ue mon Maître.
CC orcu utils r i • 1- 11- xjr
cft cuai. vi- Jésus lui dit en le plaignant : Mon
de i/Evang. Ch. CXXXV1I. 87
ami , à quel deffein ètes-vous venu jîtqueiljiJé»
iciT comme s 11 lui diioir, quel écran- adquidveni-
ee ufage faites-vous ici de votre fer- ft*? f'^îî
vice tk de votre accès auprès de mor hominis «a-
Juias j vo^j tivrtr donc le Fils de dis *
V homme par un baïfer ?
5. /a//} renverfés par terre. /• JudxU*-
dentés in ter~
ram.
Cependant le Tribun avec fes fol-
Jars toujours occupé à garder la por-
te , avoir fait peu d'attention à tout
ce qu'avoic fait Judas. D'ailleurs
Jésus ne voulant pas que fa prife
parût un effet de fa trahifon , fe J^£h
débaraffa de lui s 6c fâchant par- omaia qu*
f* 1 • 1 venturaeranx
alternent tout ce qui lui devoit arn- f eu
ver , il alla vers les gens de guerre, proceffit ,
lorsque Judas étoit déjà retourné à
eux pour fe plaindre de ce qu'on ne & dkkdti
1 avoit pas luivi , <x que par leur tjs> Refpon-
faute ils n'avoient pas exécuté fon deruntei:Je-
4 1 t« y^k • 1 rum Na2are-
projet. Jésus leur dit : {Jui cher- nwn,DicitcM
cher-vous ? Jésus de Kararerh , J-fus : ES°
, «■ .. -, ,->, n . f fum. Saoat
lui dirent-ils. L eft mot , leur re- amem ôc Ju-
pondit-il. A ces deux mots pronon- <J« , qui tra-
' 1 \r \ a rv 1 debat eum'
ces par le Verbe de Uieu , toute la cttmipfis. ux
•troupe avec Judas même s'en alla à ergo dixie c-
r is: Ego fum-,
la renverie , ce ils tombèrent tous abiemne re-
par terré. ircrium , &
11 leur ht éprouver ce léger eliai tercam.
88 Analyse
a. i<?.b. î4. de fa toute- puilfance. 1. Pour les
C. xi. D. 18. , pr 5
avertir de 1 attentat horrible qu ils
alloient commettre en fa perfonne.
2. Pour leur faire voir que les armes
& la violence étoient fort inutiles
contre un homme qui pouvoit les
renverfer d'une feule parole , du feui
fouftle de fa bouche. 3. Enfin que
s'ils ne laifloient pas .de fe faifir de
lui, & de le charger de liens , ils ne
dévoient attribuer fa prife & fa cap-
tivité ni à leur force, ni à leur grand
nombre , mais à fa pure volonté.
Ils fe relevèrent fans faire aucune
icerùm er- de ces réflexions j & J e s u s leur
goinurroga- fct de nouveau : Qui cher cher -vous
vu cos: Qu- T c 1 a ' r
cm quxririsc? donc f ils hrent la même reponie,
m. autemdf- qU'[[s cherchoient J e s u s de Naza-
xcruiu : Je- 1 J > \ j- V
fumNazare- rerii. Je vous ai déjà du j rephqua-
num. Ref- t J £ £ eft m0l. m^me% \\ leur
pondu Jefus: ' 7 , J ;
Dixi vobis , reprochoit ainli leur împuiliance a
cuiaegofum: f r autre chofe contre lui que ce
li ergo me t . , j
qujericis , fi- qu'il leur permettoit. <Si ctjt donc
nue hos a 1- mQ- ^ ajoura-t-il, que vous cherche^
laifie^ aller ceux-ci en paix. Ces
ut impie- paroles furent une défenfe efficace
querii dî^h aux Soldats, de mettre la main fur (es
Qjia^uosde- Apôtres , & il accomplit ainfi ce
di.ti mihi , >■ i j- j r >i
non pcriiii '-l11 " avoit dit dans la prière , qu il
ex eis quem- n'avoit perdu aucun de ceux que fon
quam. peïe ^ avoir donnés : ce qui s'en-
de lTvang.CIi. CXXXVII. S9
tend de la perte éternelle , parce
qu'alors telle étoit la foibleffe des
Apôtres , que, pour fauver leur vie,
ils euffent renoncé Jesus-Christ ,
& que ce renoncement peut-être ne
la leur eût pas fauvée.
6. Oreille coupée. c.Auricui*
abfcijja.
Alors les foldats s'approchèrent de A. Tune ac-
Jésus, de s'étant jettes fur lui ils ceflermu , &
1> *. ' manus inie-
arrêtèrent f cerunc in je-
Ceux qui étoient avec lui voyant fam > & ce-
. i A . . i*i i nuerunteura.
ce qui devoit arriver, lui demande- c. Video.
rent s'ils fe défendroient à coups tes auteiî1 hi*
j" ' o, r j i r SUI circa !P"
d epee : &: ians attendre la reponie, fum erant,
Simon Pierre , qui avoit fait la de- <iuod fut""
i i ^ • x ,,/ / 0 rumerat li-
mande, mit la main a 1 epee, & en xerunt ci:
frappa un des ferviteurs du Prince Domin.c » fî
des Prêtres, dans le deiiein de lui ingiadioîD.
fendre la tête. Mais dans cette foule 5,imon .Acr&°
quelqu un 1 ayant poulie par halard , nus ex his
le coup gauchit un peu, & il tom- f ;eranccurn
ba lur l oreille droite qu il lui COU- densmaamn,
pa. Ce ferviteur fe nommoit Mal- SS^ruw-
chus. & percuciens
La demande Se le coup font attri- £$£«££
bues par trois Evan^éliftes indéter- tum, d. ab-
* î * * „ \ 1» j "Tv r ' 1 feidic auricu-
minement a 1 un des Uilciples, parce jam cjUS(jcx.
que Pierre vivant encore lorfqu'ils teram. Erac
/ a ri aurcm nomen
ecrivoient, on eut pu> iurleurrap- fcrvo Ma|,
chus.
5)0 Analyse
a. i6. * T4 porc ]e rechercher de cette révolte
9.1&.D. i*. lia- xx r •
contre la Jiutjce. Mais comme laine
Jean écrivit fon Evangile environ 29
ans après fa mort , il ne crut pas
nous devoir cacher cette marque de
fon courage intrépide , qui lui avoic
fait défendre tout feul Ion Maître ,
contre une cohorte Romaine, com-
polée de 500 hommes, fans comp-
ter les gens des Piètres qui Paccom-
pagnoient.
c.Rpfpon- Jésus arrêta cette première fougue :
jffus aU>m ^eifc\* dit-il, & ne pajfei pas plus
simte'ufque avant ; fk comme il n'étoit pas en-
huc. Ercùm core lié , il toucha l'oreille de cet
tengiflct au- , . A
rkuiamejus, nomme qui tenoit peut-être encore
ftiuvic eum. un p6ll par l'exrrêmité , & il la gué-
rit. Mais parce que cette bravoure à
contre- temps pouvoit donner cette
opinion que Jésus s'écant fait dé-
fendre par fes Difciples , avoir fuc-
combé fous le nombre de fes enne-
mis , elle faifoit tort a fa liberté , Se
D.Dîxiter- fa patience en fut bleflee. 11 com-
fo Jefus Pe- r , y n. j r , ,
tto : mitre manda a Pierre de remettre ion epee
giadium tu- au fourreau , de quoi il lui donna
um m vagi- , r . 1 ^
nam : pluneurs râlions.
i. Parce que tous ceux qui pren-
A. omnes , , , / x 1 • j I
tnim qui ac- nent 1 epee, comme lui de leur auto-
erpenne gia- VUq privée, pour répandre le fane
diu n , gladio . ' *ï v v, , ,?
pcribuuc. numam, périront pa* 1 epee, ou de
DE i/EvANG.Ch.CXXXVII. 9t
Dieu ou des hommes: ce qui, à Té-
gard des hommes , marque toujours
le droit ou le mérite , & très-fouvenc
l'événement.
2. 11 n'a pas befoin de fon fecours , An putas ;
& s'il vouloir il n'auroit qu'à en de <luia non Pof-
mandera ion lJere , qui , pour douze patrem me.
hommes qu'ils étoient , lui enverroit um » & exhLi:
x pi 1 a i j j î ' beb,c m,hi
a 1 heure même plus de douze légions mode pluu
d'Anges de 6ooo chacune a pour le qy^duode-
défendre. Mais il n rturoit garde de Angelorum y
s'en fervir , ni de retracler par une
nouvelle prière l'engagement volon-
taire où il s'étoit mis de fourTrir la
mort.
La $.raifon fe tire de l'intention
de Pierre, qui en le déçacreant des
mains des loldats , l'empcchoit d'o-
beir au commandement de Ton Père.
Comme s'il difoit , eit-ce que vous D.Calicem
prétendez, a quelque prix que ce ^ Pacer-
ïcir , m'arracher des mains le calice nonbibajniU
de ma Paffion que mon Père me pré- um
fenre maintenant à boire j & n'avez-
vous point horreur d'un crime auflî
grand qu'eli la réfiftance aux ordres
de Dieu ?
La 4. fe tire de l'Ecriture par ce A.Quom*-
•r 11 r \r 1 &b ergo im-
railonnement. Il raut ablolument picbu.uur
que les Prophéties , qui predifent Scripcurae,
r r» iv u1 r r • quia fie opoc-
la Paiiion & la mort, ioicn: ac-;ctfic£ii
92. Analyse
c 15*d lf comP^es 5 ^ faut donc , pour les ac-
" complir, qu'il iouffre & qu'il meu-
re.
d. 18.C0- Cependant le Tribun avec fa co-
hors ergo , Se 1 0,1 ' 1
uibunus , & norte & ies gens envoyés par les
miniftri Ju- Juifs s'étoient déjà faifisdej esus,
comprdien- & ils ^e lièrent. Mais après la cor-
derunc Je-re&ion de ce zèle indiferec de fon
gaverunt e- Difciple , il la fit aux Princes des Prè-
um* très, au Magistrat du Temple, &
aux Sénateurs du peuple , qui étoienc
venus en perfonne , pour ne Ce fier
qu'à eux-mêmes de la conduite d'u-
ne fi grande entreprife, 6V pour Pau-
torifer par leur préfence contre les
partifans de Jésus qui voudroient s'y
oppofer.
jr. B*m- -. Reproches de Je fus aux Juifs.
bravo Chnjti 4 l ■ J
in Judaos.
a initia Jésus leur reprocha, i°. qu'ils
horadixkje- étoient venus le prendre armés d'é-
quî^S Pées & de bâtons > comme pour
ad fc , Prin- prendre un voleur public : sûretés
do"mSaCe& f°rt inutiles contre un homme qui
magiitratus ne fe défendoit point, z. 11 leur re-
fen^ores': piocha leur foiblelTe , lorfqu'enfei-
quafi ad la- anant dans le Temple , il femettoit
tronem exif- Va i o, »*1
tis cum gia- » ui-mcmeentre leurs mains , &quils
diis & fufti- n'oferent l'arrêter , quoique toujours
bus A. corn- r / i i * r
prehendere traniportes de la même rureur con-
de l'Evang. Ch.CXXXVlI. 9 5
tre lui. *. Il les avertit qu'ils ne metquoddie
J i r •/* apud vos le-
devoient pas regarder la paie com- dcbam dô-
me un effet de leurfrrata^eme ni de "l15 !J tem"
,? plo, &: non
leurs armes \ mais qu ils dévoient me ccnuifti*.
l'attribuer au décret de Dieu, qui , 3 Scdh*f
... ,- • i eit hora vei-
pour accomplir les tentures , leur «a , & po-
avoit donné cette heure & cette puif- îefta* tenS"
lance d accomplir leur deliein de te- uc impiean-
nebres. ™r Scnptu"
111. Tout cela arriva en effet pour A.Hocau-
accomplir les Prophéties. Alors tous SÎS? «
les Difciples l'abandonnant , fe mi- adimpieren-
rent en fuite, & Pierre, auffi-bien ^S"*
que les autres , qui juftifia malgré lui rum. B.Tunc
1 ' l' JX' J T N 1 11 diîcipuli ejus
la prédiction de Jésus , a laquelle reIinfm'es
ils'étoittant oppofé touchant la dif- eum, omnes
perfion des Difciples. Mais ce ne uscrunc"
fut pas fans un miracle fenfible de la
Providence , qu'onze perfonnes puf-
fent échapper à 5 ou 600 hommes ,
quiavoient ordre de les prendre, &c
de les amener prifonniers avec Jé-
sus.
L'Evangile en rapporte une preu-
ve bien particulière : Un jeune hom-
me du village de Gethfemani , fans
doute affectionné à Jésus , s'étanc
éveillé au bruit de tant de gens de
guerre qui paffoient fous fes fenê-
tres, foupçonnaeeque c'étoit : il fe
leva auiîi-tôt, & leur marche pré-
94 Analyse
A. te. b. 14. cipitée ne lui donnant pas le loifir de
C. ii. D. 18. r , r , ,. .. / . r
prendre les habits, 11 le couvrit leu-
Adolefcens i J r 1 • i o r • • i
autem qui- ornent de ion linceul , & luivit J e-
damfequeba- sus pour voir où on le menoit. Les
tureum,ami- 11 r
&us fidone garçons de la troupe le tournant cou-
fupet nudo ; rurent après lui , ôc l'attrapèrent par
Se tenuerunc r r 1 -i 1 1 • rr r
•uni. Aciiic ion linceul; mais il leur lailia lage-
rejeaâ fin- mentfon linceul entre les mains , Ôc
done , nudus -i > r • j 1 r -r
profugit ab " s enfuit tout nud dans la mailon.
ds* Ils avoient encore plus de facilité de
fe failir de tous les Apottes enfer-
més dans le jardin. S'ils ne le firent
pas, c'efl que Jésus, en leurdéfen-.
dant de les arrêter , leur avoit lié les
mains , avanc qu'ils euflfent lié les
Tiennes.
cCxxxvin. CHAPITRE CXXXVIIl.
A. 16. B. 14.
c. ii.d. 18. kxamen oc Jugement de
Examen & r^ .. 1
judiaum Cai- v^ a îp ne .
i.jefusdu- 7. Jefus mené chc\ Anne- & che^
dus ad An- /"• •• z.„
nam & Cai- Cdiphe.
A Près que Jésus a donné des
marques alïurées de fa liberté
dans fa prife , tk par conféquent dans
tout le cours de fa Paflion qui n'en
fut qu'une fuite , il va faire triom*
©e i/Evavg. Ch. CXXXVÎIT. 95
pher fon innocence dans les trois tri-
banaux où il a para. Le L fac celai
de Caïphe où il fut condamné. Le
IL celai d'Hérode où il fur renvoyé
abfous. Le 111. celui de Pilate où il
fut abfous Ôc condamné tout enfem-
ble.
1. D'abord on mena Jésus chez d. i&. Et
Anne , comme étant le beauperede eUmJXaeju^.
Caïphe le Grand-Prêtre de cette an- namprimum;
nee-la, de ce memeCaipne qui avoir cet Caïpha,
fuggérc ce confeil aux Juifs , qu'il quieratPon-
/ • > r i i tifex anni il-
etoit avantageux qu un ieul nomme lius< Erat au<p
mourut pour tout le peuple. Mais ^™ caïphas,
1 < ■ "il j qui confilium
on ne le mem a ce vieillard, que 3eaecac ju-
fon grand âge difpenfoicd'allifter au <*a:is : Q"ia
r -1 \ i r j expédie u-
conleil a une heure li incommode, nlfni homi-
que pour lui donner en palfant la nem m°ri
r C n.' J t * ' Pro populo.
latisracuon de voir Jésus arrête. r r r
Delà on le conduidt chez Caïphe, a. i*. At
qui demeuroit peut-être dans le me- LH tenences
i C Jeium, duxe-
me Palais que Ion beaupere. Corn- rum ad caï-
me la fête prochaine , l'occafion fa- £^™DJt
vorable, le penl du délai les prel- tins, ubi b.
foietit . & qu'il n'y avoir point de ZlZâtt.
temps à perdre, laie trouvèrent déjà ba*, &fenio-
aflemblés les Prêtres , les Doéteurs r
de la Loi , & les Sénateurs du peu-
ple , qui avoient envoyé leurs gens
avec la cohorte Romaine , &: qui
auendoiem chez Caïphe lefuccès de
neiauc.
5>6 Analyse
a. 15. b. 14. cette expédition. Le refte de la nuit
rut employé a raire le procès a Jésus,
dont les trois parties furent , I. l'exa-
men cV l'information. II. La con-
damnation générale. 111. Les prélu-
des de l'exécution par toutes fortes
d'outrages.
t. Alapa. 1, So uffle t,
fexDergonii!- *• Le Grand - Prêtre interrogea
terrogavit Jésus touchant fes Difciples Se tou-
cipuUsdfu1sif; chanc la do&rine; deux points qu'il
&c de doan- voulut diftinguer , dans l'efpérance
na CJUS* qu'il lui échapperoit quelque chofe ,
fur quoi on pourroit l'accufer. 11 lui
demanda par quelle autorité ilaffem-
bloit des Difciples , & quelle étoic
la doctrine qu'il leur enfeignoit :
mais viiîblement ces deux points re-
viennent à celui de la doctrine ; car
fi on n'enfeigne que la vérité , il n'y
a point de loi qui défende de faire
des Difciples. Cela obligea Jésus
à réduire la queftion qui regardoit
les Difciples , à la queftion touchant
la dodfcrine, & à renvoyer celle de
la doctrine aux témoins. Il répondit
que ce n'étoit pas à lui à qui le
Grand -Prêtre devoit faire cette de-
mande.
1. Parce
DE L'EvANG.Ch. CXXXVII1. 97
i. Parce que dans cet examen, il
ne s'agifîoit pas des fentimens qu'il
avoir alors , & dont il ne devoir
rendre compte à perfonne ; mais de
la doctrine qu'il avoir prêchée , afin
de l'en punir (i elle étoit mauvaife.
Cr toute l'aflurance qu'il pourroit
leur donner qu'il n'avoir enfeigné
qu'une doctrine faine & orthodoxe,
ne les perfuaderoit pas , parce qu'en
effet un Accufé n'eft pas recevable
à dépofer en fa faveur. C'eft donc
aux témoins qui l'ont écouté , de
non à lui-même , qu'il faut s'a-
drefler , pour favoir ce qu'il a en-
feigné.
Mais peut-être qu'il n'a dogma-
nie qu en lecret , pendant la nuit , ÔC
à des Difciples afridés.
2. 11 répondit au contraire , qu'il Rebondît
avoir toujours parle en puDhc , & palam locu-
à tout le monde; qu'il avoit toujours tusfumn^n-
<v L / i . À ', do i ego fem-
preche dans la synagogue ce dans Pcr docui in
le Temple , où rous les Juifs ont îynag°ga,fc
accoutume de s aliembler , oc qu il quo omnes
n'avoir rien dit en fecret , qu'il ne JuciaTIConv5-
voulut bien qu on publiât , comme occulto îocu-
étant conforme à ce qu'il avoir envï™{ lum m~
feigne & publié. Pourquoi donc le
Grand-Prêtre qui pouvoir interroger interroga
autant de témoins qu'il avoit eu
Tarn. IV, E
me
$ î
5>8 Analyse
a. i& b. 18. d'auditeurs , c'ett-à-dire qu'il y avoit
C. ix. D. 18. , 1 r 2 1 i-k •
des j uirs dans toure la Province , s a-
vifoit-il de l'interroger, lui dont les
réponfes ne fer voient de rien pour
r.ibfoudre , ni pour le condamnera
JF^XS' Que n 'interroge- t-ii ceux qui l'ont
ruacquidio- entendu .<*
«tusfimip- Mais QÙ ira_c„on les cherchera
Le tems preflTe , &: on n'a pas le
loifir de faire de fi longues informa-
tions.
5. Pour lui épargner la peine de
les chercher bien loin, il lui en mon-
eccchifciunt tra dans Talfemblée : Voilà dit-il,
quae dixeiim devant vos yeux des gens qui favent
cs°* ce que j'ai prêché.
Rien n'étoit plus raifonnable ni
plus dans l'ordre que cetee réponfe.
Hscautem Cependant après ces paroles d'une
unus affiitcns genereule liberté , un des Omciers
Miniftrorum qui croient- la , donna à Jésus un
dédit alapam 1 r m >i 1
jcfu,diccns: grand iourrler qu il accompagna de
sic refpondcs ce reproche infolenr : h il- ce ainfi
Poutiiàci î r , c, • n d' 1
que tu répons au souverain Jrretre :
comme cet homme juftifioit cet ou-
trage p.ir la faute prétendue dont il
l'accuioir , Jésus qui eut gardé le
Refpondic fîjence pour l'iniure , répondit à Tu-
ciJefus: o \ i> rr r
ne & a 1 autre pour aiiurer ion 111-
simaièiocu- nocence. Il l'avertit donc que s'il
tus fum , te- . , 1 / , / \ 1 •
ftimoiiiuHi avoit mal parle , c etoit a lui qui
dïl'Evans.CH. CXXXVIIL 99
i'accufoit de le faire voir , & de mar- FerJ»be de
• -, • • i / i r r> ma'° î " au-
quer en quoi il avoir viole le relpect rem benc,
dû au Souverain Pontife. Que s'il *ukl me c«-
n avoir rien dir que de jjutte & de eum Armas ii-
bon , il avoir rorr de prévenir en le &ac.um aci
r , 'XL* J r r Caipham ,
frappant , la conviction de la raute Poncificem.
& la condamnation des Juges.
3. taux témoins. jieSt
L'interrogation caprieufe n'ayant
pas réulli , ils fuient contraints , fé-
lon l'avis de Jésus , de recourir „ . .
, , _ ., A. Pnnci-
aux témoignages contre lui \ & ils pes autemsa-
n'eurent point de honte d'en cher- cerciocum,ôc
, 1 r • rr omne conci-
cher par tout de taux , qui eullent Hum , quz-
néanmoins affez de vraifemblance Sebantrt. fal"
.... lum ccltuno-
pour colorer la calomnie par une ap- ninm courra
parence de droit. Mais ce qui elt Jefi"?weœn
1 . a morn crade-
convainquant pour 1 innocence de rem :& non
Jésus , quoique plufieurs faux té- ,:^cncrunc >
. r *• , i Çp ., cura mulri
moins fe prelentaflent , ils ne pu- faifl teftes aè-
rent jamais trouver contre lui des cciniïcnt-
charges qui allalfent à la mort. Ce c Muicje.
n'eft pas que plufieurs ne dépoiallent nûn teftimo-
contre lai , pat exemple , qu'il avoit tcV^Z-
violé le fabbat, qu'il avoit condamné veii'us eum,
1 t J \ A "C I IL C & convenien-
la Loi de Moite; mais leurs dépoli- da tcftiœonia
tions n'étoient pas funSfantes pour le n on crant.
faire mourir.
On en peut juger par deux faux a. Novir%
Eij
ioo Analyse
a. i6. b. 14. témoins , qui s'étant préfentés les
C.zi. D. 18. , • j>1 r >l 1 •
derniers, depolerentqu ils lui avoienc
jnèautemve- .•• »■ >-i w • 1
mrunt duo oul dire » 4Ll ll pouvoir détruire le
faiiï telles , temple de Dieu , ce qui étoit une
B. &. fuisen- • - 1 1 0,1 t_A^- J
tes, falfum lmPiete > & *e reDatir dlMS trois
teftimonium jours , ce qu'il ne pourroit que par
ferebam ad- r j ■ • \ C '
verfus eum art magique : Je détruirai , lui rai-
dkentes: foient-ils dirent, ce Temple bâti de
Quoniamnos , • / ; c j ..„ •
audivimus >-a main des hommes _, cy dans trois
eum dicen- jours j'en rebâtirai un autre où la
tem: A. Pof- / . ' y , y j
fum deftrue- main des nommes n aura point de
re templum par£,
trid'uum re*- C'eft: cette prédiction obfcure qu'il
ditîcareiiiud aVoit.£iite trois ans auparavant , tou-
B. Egodiiîol- . , ,.,/, j .
vam templum chant lii mort qu ils lui dévoient
hoc manu fa- donner, Se à laquelle ils travail-
ôum , Se per n h /-» '
triduum a- loient actuellement. Ce témoignage
liudnonma- néanmoins étoit doublement faux ,
nu hi&um x- T^ , . ,..,,.
dificabo. i°. Dans les paroles qu îlsalteroient.
Car Jésus ne s'étoit pas chargé de
la deftruction du Temple, mais feu-
lement de la réparation de celui qu'ils
auroient détruit.
1. Dans le fens ; ce qui étoit la
principale falsification. Car ils attri-
buoient au temple matériel ce que
Jésus avoit dit de fon corps , com-
me du temple de la Divinité. Mais
Et non état quand il eut été vrai, il n eut pas
conveniens été fuffifant pour le faire condamner
teliimoniura \ % \ 1 / \ • • • .«
iiiorum. a la mort j la déclaration vraie ou
de lTEvang.CH. CXXXV1II. lot
fau(Te que chacun fait de fon pouvoir,
ne fait tort à perfonne.
Comme Jésus ne répondoit Et exurgeû$
point , le Grand-Prêtre qui ne vou- fummus Va-
loir pas perdre le fruit de ces témoi- 4^' toter-
gnages qu'il méprifoit lui-même, fe rogavk Je.
leva brufquement , tk lui demanda ^^ rèfponl
s'il n'avoit rien à répondre aux faits des qaid-
dont on le chargeait. Mais Jésus ^tibiob-
n'oppofa que le filence à ces accufa- Hciuntut ab
• j- j / r t?'1 his • Ule mu-
tions indignes de reponie : ht il tem tacebac ,
lailTa Caïphe , & tous fes autres Ju- & n'^ «f-.
ges dans toute la liberté de les po1
faire valoir autant qu'il leur plai-
roit.
On pourroit s'étonner pourquoi
les Prêtres $c les Phariliens 5 qui dès
long-tems avoient réfolu , à quelque
prix que ce fût , de perdre Jésus ,
n'ayent voulu le faire que fur des
dépofitions de témoins , qui ne fuf-
fent ni ouvertement fauffes , ni en-
tièrement frivoles; puifque tout pré-
texte étoit plus que fuffifant pour des
gens comme eux qui avoient juré fa
perte.
Deux raifons les obligèrent à cet-
te formalité. La i . fut le foin de
leur honneur qu'ils avoient à ména-
ger , & la crainte de paffer plutôt
pour les bourreaux de l'innocence
Eiij
îoi Analyse
A.itf.B.14. opprimée, que pour les juftes ven-
*.n,D.iS. rr 1 1 ^D i- • util • r
geurs de la Religion. 11 fallut ainli
couvrir leur haine d'une fautfe ap-
parence de Jugement ôc de procé-
dure juridique. La 2. fut que pour
fe difculper de fa mort devant Dieu
3c devant les hommes, ils ne vou-
lurent point le faire mourir par eux-
mêmes. Us déférèrent volontiers
cette commirTion à Pilate , avec tout
le crime devant Dieu, & toute Phor-
reur devant les hommes que cette
mort leur devoit attirer. Or ils pré-
voyoient bien que Pilate ne condam-
neroit pas à la mort un homme aufli
fameux que Jésus , fur des accusa-
tions frivoles j il lui falloit quelque
caufe plusfolide que des accusations
tirées de leurs traditions & de leurs
cérémonies.
Le texte de faint Luc nous donne
lieu de croire que le confeil des Juifs
ne pouvant rien avancer centre Jé-
sus , chacun fe retira jufqu'au ma-
rin , pour fe donner quelque repos,
& le loifir de lui drelfer quelque
nouvelle batterie ; & peut-être que
pour être plus prêts à rentrer dans le
confeil , ils palferenr chez Caiphe le
relte de la nuit , arln de terminer au
plutôt cette grande affaire qu'ils
DE l/EvANG.Ch.CXXXVllI. I05
avoienr lailfée imparfaite. Ils aban-
donnèrent cependant Jésus à la merci qui 'ceneba;u
des valets , qui lui rirent fourTnr tou- wwa , UU*-
, 1 l , 1 -1 deban;ci,cse«
tes les indignités , dont ils purent aen:cs . &
s'aviser. Ils le frappèrent d'abord à vgfaKom
, rrr . r . eum&percu-
coups de poing', eniuite pour le jouer tiebanc fa-
de ia qualité de- Prophète , ils lui çiemejus, &
banderenr les yeux avec un mouchoir, banc cum, di-
te en lui donnant des fcmfflets ou des c?nt" : Pro"
r 1 r n l -r Phetlfa Su,s
coups iur le vilage : Fropnetije- eft quiteper-
nous . lui difoient-ils , qui t'a frappé. CXXÏY ' ^J1*?
IT « . 1 ,- 1 • . mulca blal-
Jls lui dirent enhn toutes les injures, phcmantes
& vomirent contre lui tous les blaf- cllcebanc in
ph'mes que le démon leur put fug-
gérer.
4. Examen & condamnation 4. Examen
Ào loCr & condemna-
de JeJUS* tio.
Le jour commençant à paroître , Et ut fac-
iès Sénateurs , les Princes des Pic- convenu «ne
très & les Docteurs de la Loi fe raf- fcniorei p!e-
r Ll o ' T bis , ôc 1-rin-
iemblerent , te ayant mené Jésus ci ' Saccr_
dans leur confeil , ils lui dirent d'à- Awinu , &
bord familièrement pour le faire par- duxcfunt u-
ler; Si vous êtes le C lui fi , dite?- le lum in con-
, . ii 1 •/■ 1 cih'.im fuuin,
nous clairement. Us s avilerenr de dicences : si
cette demande à laquelle ils jueerent tueschriâuc
,•1 x 1 / 1 du nobii.
qu il ne manqueroir pasdeiépondre,
te dont l'aveu leur furîiioit pour le
condamner.
Eiv
104 An A LYS!
e.' x^.'d! \t. . Si je vous l'avoue j leur répondir-
ïtaitillis: *1j vous ne me croireipas _, & fi je
sivobisdixe- yeux vous le prouver par les quef-
ro , non cre- . r • »
«letis mihi : fi ^o/?j que je vous rerois a mon tour ,
aurem & in- rowJ ^ prendre? pas la peine de me
terrogavero , , - r l l j /» ■
non refpon- répondre j & vous ne m elargire^
debicismihi, ^j pour cela : il efi donc inutile aufïî
neque dimic- £ F. ; n 1 r •
tetis. que je vous reponde. II les acculoit
par-là de ne chercher dans cette ques-
tion , qu'un prétexte pour le con-
damner ; aufli il leur répondit en
cette manière qui les lailToit encore
en fufpens , . pour ne pas donner lieu
de croire qu'en donnant cet aveu
fans néceffité , & fur une interro-
gation familière , il cherchât de
gayeté de coeur i'occaiion de mou-
rir.
Cette réponfe néanmoins en di-
foit allez pour les obliger à n'en de-
. - - . meurer pas là. Aufli Caïphe ne lai(Ta
A.EtPnn- Y Y
cepsSacerao- pas échapper cette occalion de le
%£££ F°u|Ter '» mais »| s'efforça par cette
& dixit ei: interrogation juridique de tirer de fa
P«DdeLm°vI! bouche une confeiïion plus prccife ,
vum , ut di- Je vous ordonne , lui dit-il _, par le
cas nobisfî tu t-x • • j j-„, /; *+*~
es chtïitus Dieu vivant , de nous dire Ji vous-etes
niiusDei.B. [t Chrijl le Fils de Dieu. Etes-vous
FUiusDd bc- le Chrijl , le Fils de Dieu éternelle-
nedtâi ? A. ment béni ? Vous l'avez dit 9 lui ré-
Dicic illi Je- i- t c j t 1 H 1
fus: Tu dixi. pondit Jet us , & dcjonnais Le tus
de L'EvANG.Ch.CfXXXVHI. 105
de l'homme fera affls à la droite de la ai e- lxho*
•rr j n- A iC É auteme-nh-
puijjancede Dieu. Aulii-tot tous en- iiUS hominis
femble prirent la parole , & pour lui fedens à dcx*
c . rr r f 1 / tns vircucis
taire confirmer cet aveu , ou iuppleer Dci. Dixe-
ce qui pouvoit manquer à cette ex- ruQt Luceni
rr * rr * j 1 ■ J' omnes.Tuer-
preiiion : Vous êtes donc , lui dirent- g0 es Filins
ils 9 le Fi/s de Dieu ? Fous l'aver dit Jeiï<*ui.a.it!
1 J* -1 • 1 r • JE Vos dlcms*
encore y leur dit- il 3 je le Juis en effet, quia ego
Il efl; vrai que l'état où je fuis n'a au- fura*
cune proportion avec cette dignité
infinie. Mais je vous le répète : Un a. Verum-
jour vous verrez vous-même le Fils tamen dico
de l'homme afîis a la droite de Dieu d6 videtmii
tout-puiirant , Se venant dans les FiHum ,homi-
, l , • 1 Ti 1 • 1 • | nis lederuem
nuées du ciel. 11 parloir du jour du à dcxcrisvir-
Jueement , où ces Juçies injuftes ™ns . Dei *
comparoitront ians doute, & le ver- jn nubibus
ront de leurs propres y eux. Il oppofoit cccl1,
l'état de fa gloire à l'état de fon hu-
miliation , Ôc le jugement qu'il
exercera fur eux à fon tour, au juge-
ment in j ufte qu'ils ufurpoient fur
lui. 11 a rendu cette confelîion , pour
fervir d'exemple a tous les Martyrs ,
r ,-, n r , J TuncPnn-
puilqu il eit mort le premier pour cepsSaccrdo-
îa même vérité qu'ils ont confeiTée, tumfcidicve-
. . ni J '1 itimentafua,
oc pour laquelle us ont donne leur dicens : Biaf-
\\Qt phsmavit ;
j ~ r- j n * J'u- r » ^uid adhuc
Le Urand-rretre déchira les vête- egemus cefti-
mens de coleie , en fe donnant bjs lic.e
j.r rjiJTr rr mme audiius
diipenie de laderenie exprelie que
E v
io6 Analyse
à. zen 14. lui en faif0it la Loi. Il s'écria : il a
L. i 1. 1). 18.
blafohemi- blafphcmé ! Quel befoin avons- nous
am:quidvo- déformais de lui confronter des té-
isvidetur? mo-}ns p Vous venc% d'entendre le
Ar iin ref- blafphtme contre Diea , dont il fe
pondencesdi- ,. ",' t ,. , . „/ . ,
xerunc : Rcus ciitlerils : contre le Chrut , donc
cft *H^tw ; il ufarpe le nom <Sc les droite. Apres
C Qtiil ad- *■ -T
hue defïdera- cela que vous en femble î Ils opine-
mu s teitimo- rent rous a Ja mort ; Pourquoi s di-
nium î iph 7 , :
enim audivi- rent-ils , chercher d autres témoigna-
mus de orée- ^j? /2o^j venons d'entendre fon cri'
jus. B. Qui ^ •*
omnes con- rae ^ fa propre bouche. Et far cela
demnaverunt
eum effet ré-
uni morcis mort.
ils jugèrent tous qu'il méritoic la
f. Sputa ,
colaphi y uiu- ^ § Crachats _, foufflets ^ outrages.
A. Tune B. ai -t j -il
cœperuiu Alors ils n eurent point de honte
quidam conf- d'in^er l'infolence de leurs valets.
puere. , T 1
a. in fa- Les uns lui crachèrent au viiaçe.les
ciemejus, b. autres iuj donnèrent des coups de
6c velare fa- r,
ciem ejus ôc poing par la tête , les autres lui ban-
coiaphis es- ^rent les yeux , 8c lui donnant des
clere : A. Ain / '. .
aurempalmas foufTletS , US lui dlloieilt .' Cnritt ,
!" 5acilcm„ V prophétife-nous qui eft celui d'entre
iusdedcrunr, I * . } I
dicences : nous qui t a rrappe : les valets le me-
nobis chrif- lant avec leurs maîwes dans ce jeu
te, o;uis efl inhumain , lui donnoient des fouf-
Et! b. &mi- ^ecs ^ans Par^ei% comme pour le jetter
niihi alapis d; ns l'erreur par cette diviiion } s'il
eum C£ue- « 1 j
banc. eLt voulu deviner.
de l'Evaug. Ch. CXXXIX. 107
11 ne faut pas confondre ces outra-
ges du matin avec ceux de la nuit.
Car ceux ci font attribués aux gens
qui tenoient Jésus : Viri qui tene-
bant ïllum. Et ceux-là aux Juges
mêmes qui venoient de le condam-
ner : Et cxperunt quidam confpuerc
eum. D'ailleurs faint Marc diilingue
dans les féconds outrages la part des
valets de celle des maîtres \ lorf-
qu'après avoir dit que quelques-uns
commencèrent à le falir de leurs cra-
chats , il ajoute que les valets lui
donnoient des fourllets.
CHAPITRE CXXXIX.
Renoncemens de Pierre.
1. Premier Renoncement.
IL faut retourner fur nos pas juf-
qu es dans le Jardin pour rappor-
ter l'hiftoire de ce qui arriva a Pier-
re. Après avoir remis fon epeedans
les mains de quelque autre, il fui-
voit Jelus de loin , par un mouve-
ment mêlé de l'amour qui l 'animoir,
& de la cm m te de la mort qui le
retenoit. 11 fe joignit à un autre Dif-
E vj
14.
18.
Camit
CXXXIX.
A. 16. B.
C. il, D.
Kegationcs
VetrL
1. Prima
negatio.
Perrus au-
tem fcqucba-
tur eum à
longé ,
D. 6c alius
i©8 Analyse
a. i6. b. 14. eiple , qui éroit connu du Grand-
difdpulus. i ietre y & clul a la raveur de cette
Difcîpuius connoiirance entra avec Jefus dans
ET" notu; la faile de fa maifon. Lorfqu'il fut
Pontifici , & entré , la portière qui ne connoifïoic
je^Tn'aai- P*s Pierre , lui ferma la porte, & il
um Ponttfi- demeura dehors , attendant qu'elle
cis. » 1 > r
s ouvrit par quelqu autre occalion ,
Petrus au- qui lui donnât lieu d'entrer. Ce pre-
temftabatad mier Difciple s'appercevant que
oitium tons. . » r *, . . r . x ,
ixivic crgo Pierre ne l avoit pas iuivi , lortit de
aiicipulus a. ja fa|[e pour parier a }a portière , ÔC
hus, qui erar r . r r
notus Ponti- lui ayant rait ouvrir , Pierre entra a
oftiar^dlX& ^a con^dération , & s'avança jufques
iutroduxit dans la falledu Grand Prêtre.
Petrum. Qn n£ f^ p0jnr ^ul £to{: CQ £)j{l
ciple introducteur. On en peut feu-
lement affurer ces trois circonftan-
ces j i°. Qu'il n'étoit point du nom-
bre des douze , puifqu'il étoit connu
chez le Grand- Prêtre , &c qu'il en
étoit même confédéré. 2. Que parla
même raifon il étoit Difciple fecret,
autrement il eût couru le même péril
que Pierre. 3. Qu'il devoit être une
perfonne de marque par fa qualité
ou par fes richeflTes. Quel qu'il foit,
il rendit quoiqu'innocemment un
mauvais office à Pierre , qu'il mit
dans Toccafion de renoncer trois fois
fou Maître. Ses renoncemens allèrent
m l'Evang. Ch. CXXXIX. 105?
toujours en enchériiïant l'un fur
l'autre. Le 1. fut un fimple menfonge.
Le II. y ajouta le ferment. Le 111.
ajouta encore au parjure un nouveau
poids , ôc ce fut une horrible impré-
cation contre lui-même. Voici com- d. dîxîc
roent la chofe fe pa(Ta 3U *£
I. La fervante qui fit entrer Pier- fia b. unact
re , fut frappée d'abord de l'ait de ZfZZZ
fon vifage qu'elle crut reconnoître , tis. d. Num-
& lui dit en partant , avec quelque Jj^te «
doute : N'êtes vous point des Difci- hominis ifti-
ples de cet homme ? 11 pafTa fans lui aU4m f^u!
répondre comme s'il ne l'eût pas tus eft eum
entendue , & entra dans la falle du \.nl fattoîm
Grand- Prêtre. Cependant les gens atrium fum-
ai • l j « r -i mi Sacerdo-
e ceux qui etoient dans le conleil tis. D Sca.
firent un feu dé" braife au milieu de bant auceai
1 r 11 ••! r *r *1 C *J o lervi & mini-
la ialle, parce qu urailoit rroid , & ftri àd ptunag
s'étant allis à l'enrour , ils fe chauf quia frigus e-
foient en attendant leurs maîtres. facicbant fe.
Pierre fe trouva au milieu de cette c- Accenfo
, , n- 1 r auremignein
troupe ennemie , & s étant aliis il le medîo ami
chauffoir comme eux , pour voir & circumfe-
,, . ir- .. . . l j dentibus u-
quelle îlluc ou quel tram prencroit ijs , erat re-
cette affaire. Ainfi il faut remarquer "usinmedio
, T , l . corum A. uc
que pendant que Jésus eroit avec les viderct fi-
Prêtres & tout le confeii dans une nem,B.&fe-
1 L L r» t u dchac cura
chambre haute , Pierre etoit en bas minifiris ad
dans la première falle qui donnoit jsjem ; & cra*
. r 1 leraciebac le.
ûanslaCour. Etcùmeffet
no Analyse
a. KîB.14. La portière y avoit fuivi Pierre ,
c. ix.d. 18. ,, r c\, , s ,.r y y
D.r. a f ex 1 ayant conlidere tout a loinr a la
Petrus A.fo- 7
nsB. inatrio lumière du reu , elle le conhrma
acccffiTad c- ^ans ^on °pini°n> & dit à tous ceux
umunaancil- qui étoient là: Cet homme étoit avec
vidiiïl-? Cpï> ^' > ^ s'adrellant à lui-même , elle
trum c fc- lui foûtint qu'il avoit été avec Jtsus
tST& dejÔaWte 11 n'y eut pas moyen de
fuifTec intui- {d>ïç encore femblant de n'avoir
cientem Xe point entendu : il fallut néceifaire-
c. dixù . Et ment répondre j mais comme il n'y
hic cum i!!o 1 1 > 1
erat A.Ectu avoir point de preuves , le parti qui!
cum jefuGa- put fut de niertout , Femme _, dit-il,
lilxo etas. • p • • 1 r t\ • r • 1
je ne Juis point dejes Dijciples , je ne
gavit coram & connoïs pas même _, cv j e ne fçai
omnibus, en- abfohmentce quevous me voulez dire.
ce n si O . Non * . . *•
fum.c.Mu- Comme il le vit découvert , il crai-
Kf!l«noan?* snit Ja fuite, & perfuadé qu'il ne
▼nllum, B. p l n 1 -i r
neque fcio, railoit pas bon la pour lui , il lortit
nequ,- novi ^Q |a falle dans la cour nom s'en aller,
■quitHicas.Et y» a 1 1 r
exiirfoiasan- <x auln-tot le coq chanta pour la pre-
teaii.im,,* mieref0js.
gallus canta-
vir.
2. Secundo. 2. Second renoncement.
negatio.
a. Excnntc H, Mais maiheureufement pour
AUtem îi.-o ja- 1 r . r,
miam vMh lui , une autre tervance entroitdans
cumaiia an- la folle commeil en forroir ;& Pavant
ci 1 la &. J
bis qm erant bien remarqué , elle du à c jux qi i y
ibi: ôc hice- étoient. que cet homme là avoit -été
rat cum Jefu T 1 vr 1 /^
wazareno. avec Jésus de JNazareth. Ce contre-
de i/Evang. Ch. CXXXIX. I I I
tems lui fit changer de mefure ,
& l'obligea de rentrer pour ne pas
faire paroître qu'il eût voulu fuir
après certe aceufarion *, car il crai-
gnoir que la portière qui i'avoit re-
connu refufât de lui ouvrir la porte ,
& que cependant fa fuite ne le fir
palfer pour convaincu. Il fallut donc D. Eratau-
r il tem Simon
le remettre avec les valets , comme Petrus uans,
pour fe chauffer . de faire bonne &caletacicns
r • fe-
mme.
Il n'y fut pas long-tems , qu'un c. Etpoft
de la troupe lui dît : Fous êtes donc p^nTn *~
de ces gens-là ? Les autres fe joi- um , dixit :
gnirentà lui , &c dirent à Pierre : ^V^ufxï
A\OUC{ la vérité : N'ête^-VOUS pas runc ergo ei :
dunomèredefes DifcipUs ? H le nia î^^
de nouveau , & p joutant le ferment pulisejuses?
r -\r j • i • > B. A il le i cc-
au menfonge, Aon , dit-il , je n en rum n^gavic
fuis j^oint j & je n - cannois nullement a. cum jura-
cet homme. Il fe paffa depuis cela Sdlxir'Ndb
environ une heure., comme pour lui f"T-".A. Non
di t -.- i i a novi homi-
onner ie loilu ce rentrer en lUi-me- mm . r. f.0fl.
me , & de refléchir fur ce qu il venoit F,,,':!,,in . f •
j ,• , \ r j inr '• illo fa-
de dite ; mais dans la frayeur dont a0 qtuiï ho-
il étoit troublé , il n'en étoit plus «»»*«»,
capable.
T roi fie me renoncement. *: 7Vm*
negatio.
III. Un autre du nombre des fer- alius quidam
in Analyse
cl Îi.'d. \t. viteurs du Grand-Prètre entra dans
d. ex fervis la falle y c'étoit le coulm de celui à
Pontificis co- qUi Pierre avoit coupé l'oreille , qui
gnatus cjus , f. , . r a rr '
cujusabfcidit dit tout haut en le voyant : A\jure-
Petrus aun- mcnt cet homme-là étoït avec lui ,
culam C.af- . a , ,
firmabat , di- car il ejt de Gaulée, Pierre le ma :
cens: veièôc Mon ami , lui dit-il » je ne fcais de
hic cura îllo . JJ. Ai r
«rat,namôc quoi vous me parle^. Mais il ne le
Gahiaeus eft. rjnt pas bien réfuté par cette défaite:
Iterum ergo K f ,.. C, . '
negavic , c. il lui louant qu il 1 avoit vu avec
& au Pecrus: J^ ^ans Je Jar(|in . & }eS autres
Homo, nef- . i>- n-
cio quid di- quittant leurs places 1 invertirent :
cis. Dieu ei : Certainement , dirent- ils , vous êtes
Nonne ego ce J t '
vidi in horco de ces gens-là j car déjà vous êtes
Rurfus A.?ac- ^e Galilée _, & votre langage vous tra-
ceulrunc oui hit malgré vous. Alors il commença
dfxenîiu Pe- * ^tUre d'horribles imprécations con-
tro : Vlm-c & rre lui-même , & à jurer qu'il ne
nam êî GaH- connoilloit point celui dont on lui
laeus es, A.parioit } de pendant qu'il parloit
loquela cua i i i r j
manifeftum encore le coq chanta pour la ieconde
refacic.Tunc fois.
cœpir der^'f- \ r ' r i
tari , b. ana- ^e leigneur le retournant regarda
themati'are, Pierre d'un œil de miféricorde ( car
A. &c jurare , -i • i * i
quia non no " ne pouvoir le voir des yeux du
vijTec homi- corps ; ) & aufli tor Pierre fe fouvint
nem , B.quia i S I r i •
nefeio homi- de la parole que Jésus lui avoit
nem iAum dite , qu'avant que le coq eût chanté
quem dicicis , r • *i i • • r ■
ii ttatim c. deux rois , il le renonceroit trois rois.
adhuciiiolo- il fortjt <je ia faue & je ]a majfon
quentcB gai- . , o 1 i
Ju« iccuiHi pleurant amèrement > & il repara
de i/Evang. Ch. CXXXIX. 113
par tes larmes le tort qu'il avoir cantavît. c.
•T. . r l x ,,. Et convenus
tait par les renoncemens a 1 in- Dominusref-
nocence de Jésus , dans l'efprit de Pexk D p5;
. , CM >'] / trum > B' ^
ceux qui eroienr perluadesqu netoit recordatus
fon Difciple. e\ . Petru*
â n ■ i r 1 • n • verbi quod
Au refte il raut diftinguer ces re- dixerat ei je-
noncemens par les divers tems où fus : J™?;*
Pierre fur attaque , & non par le cantct bis,
nombre des paroles qu'il prononça, {,"/*£, £et8£
Or les fervantes ou les valets revin- grefTus foras
rent trois fois à la charge contre lui, PI!™| flevlt
C? . alllaXCi
& on ne peut douter qu'a chaque
fois, il n'y ait eu plufieurs réponfes
de part & d'autre.
CHAPITRE CXL. cai. cxl;
A. 17. B. if.
Jésus livre à Pilate. Mort de c- m-'d. i».
T'irise Jefus Pila-
Juua5, ro traduits.
Mors Juda.
1. /e/I'j transféré devant Pilate. 1. Chrifim
ad Pilatum
A Près que le confeil des Juifs eut ^"J*
aflouvifa vengeance fur Jésus,
ils confulterent enfemble, le matin, A.i7-Mane
, , -i 1 r autem iatto
par quelle voye ils le reroient mou- COnfiiium
rir. Il s'en préfentoit deux. La 1 . inierum om-
' • J 1 J ri 1 r • nés Principes
etoit de le condamner ielon la Loi sacerdocum „
à être lapidé comme blafphcmateur. B.cumfemo-
La 2. etoit de le traduire au bis, & uni-
ii4 Analyse
A. 17- S- if. Tribunal du Gouverneur de la
C. ij. D. 18. n o j i r
Province, ôc de le taire mettre en
▼erfo concî- •
lio,A advcr- crolx«
fusjcfum,ut Ce qui favorifoit ia première eft
traderenc. 4ue * exécution le remit d autant plus
furement , fi elle dépendoit d'eux,
que le Gouverneur n'en connoîtroit
point. Au lieu que s'il en prenoit
connoilTance, comme il devoir, félon
les nouveaux Reglemens des Ro-
mains, les informations traîneroient
en longueur , ôc cependant les amis
de Jésus remueroient ciel Ôc terre
pour le fauver.
Mais plufieurs autres confédéra-
tions l'emportèrent fur celle-là. i . Le
droit de vie ôc de mort leur avoir
cre ravi par les Romains. Ils pou-
vaient condamner à 40. coups de
fouet, & à quelques peines de moin-
dre conféquence. Mais lorfqu'il s'a-
gilloit d'un crime digne de mort ,
s'il étoit contre les Loix générales,
le jugement ôc l'exécution en étoient
réfervés aux Romains : s'il étoit
feulement contre la Loi de Moïfe,
les Juifs en pouvoient juger , mais
ils ne pouvoient exécuter leur juge-
ment fans le confentement du Gou-
verneur de ia Province. Ils ne pou-
voient donc fe difpenfer de cette
de l'Evang. Ch. CXL. 11 j
règle , en faifanc mourir Jésus-
Christ de leur propre autorité ,
fans s'expofer à erre châtiés févére-
menr par Pilace , ou à être cités par
lui devant l'Empereur , comme s'é-
tant rendus les Juges de celui dont ils
étoient les ennemis déclarés.
2. D'ailleurs , comment pouvoir
exécuter en public un homme re-
connu , au moins pal tout le peuplej
pour un grand Prophète , eux qui de
peur d'ctre lapidés , n'avoient ofé
l'arrêter, lorlqu'il prêchoit d.ins le
Temple? La voie de Pilate n étoit
point fujette à cet inconvénient. Le
peuple ptompt à s'émouvoir feroit
retenu dans la foumifl;on par l'au-
torité du Gouverneur &. par la gar-
nifon Romaine.
3. C'écoit même un moyen fur de
purget leur pourfuite de tout foup-
çon de haine & d'envie ; puifqu'un
Juge étranger, à qui les deux partis
étoient indirlérens , autoit jugé de
Jésus comme eux , & l'aurou fait
exécuter publiquement. Après tout
il l'exécution faite venoit à être
condamnée de tout le rrc;nde , il leur
feroit aifé de fe difculper devant le
peuple , en remettant toute la raute
lur Pilate, fur l'autorité duquel fe-
n6 Analyse
c x7'd T ro^ent f°ndés le jugement de mort 3c
" rexécution.
4. Quelle infamie ne feroit-ce pas
pour eux , fi un jour on leur pou-
voit reprocher qu'ils auroient fait
mourir eux-mêmes leur Roi , leur
grand Prophète , leur Meflie , celui
qui leur étoit promis, & qu'ils atten-
doient depuis tant de fiécles ? Au
lieu que du côté de Pilate , c'étoit
feulement le fupplice d'un homme
qui affectoit l'Empire, & fequalifioit
le Roi, des Juifs. Cette caufe de fa
mort , le Tribunal d'où fon arrêt
feroit émané , le genre de fon fup-
plice qui étoit la croix , dévoient le
faire paiTer pour un fameux criminel,
obfcurcir toure la gloire qu'il s'étoit
acquife jufqu'alors , condamner fon
nom & fa mémoire dans tous les fié-
cles à venir ; ce qui étoit quelque
chofe de plus doux à leur haine, que
fa mort même.
5. Enfin ne devoit-on pas compter
pour quelque chofe , que s'il y avoit
quelque péché dans cette pourfuite,
comme cela étoit fort poffible , Pilate
lesendéchargeroit heureufement de-
vant Dieu, pendant qu'ils jouiroient
à leur aife du fruit de fon injuftice ;
étant défaits d'un homme , dont la
be l'Evang. Ch. CXL. 117
cenfure leur étoit formidable. Il eft
aifé de voir par la manière dont ils
reçurent la facisfaction de Judas , que
c'étoit là leur fentiment à l'égard de
Pilate.
Tant de confîdérations l'empor-
tèrent. Il ne reftoit plus qu'à remé-
dier aux deux grands inconvéniens
de la longueur du procès , & de la
brigue des amis , que Jésus avoic
même parmi eux , de jufques dans le
Confeil. Pour y remédier , il fut ar-
rêté , ie. Que tout le Confeil fans
exception 8c fans délai iroit le con-
duire chez le Gouverneur , & deman-
deroit fa mort. 2 °. Qu'on ne fe don-
neroit aucun relâche qu'on ne l'eût
obtenue , ce qui difficilement pou-
voit être refufé à leur grand nombre
ôc à leur autorité.
Après cela tout le Confeil fe leva , c- *!• E*
o„ 1 • ' T >l furgens om-
et ayant lie Jésus , qu ils avoient niS muhiui-
laifré fans liens pendant fon examen. do eorum,B.
i • , . il- vincientes Je-
comme pour lui donner plus de h- fumA.addu-
berté de fe défendre , ils le menèrent xcruvnt eum
de chez Caïphe dans le Prétoire , ou m prxcori-
dans le palais du Gouverneur > de ils um].\ Al &c
I . >■ . •in tradiderunt
le muent entre les mains de Ponce roncioPUaro
Pilate. C'étoit le matin du Vendre- lrxCldi' D-
01 auquel ils avoient transfère la veil- manè.
le de Pâques tu des Azymes. Ec
1 1 S Analyse
A.V17 . b. iç. comme le foir du même jour ils de-
C. 13. D. 18. . -, . ri r l 1 -i
voient manger 1 Agneau Paichal , ils
Et ipfi non _» ° • 1 i r» ' • i
introierunc n entrèrent point dans le Prétoire, de
in pr^to- peur de fe fouiller , & de fe mettre
xium , utnon 1 j> ' i m /i t r»*
concamina- nors d etac de célébrer la Paque ; ce
rentur fed qui n'étoit néanmoins qu'une tradi-
ut manduca- r>i r • x r ■ i
rem Pafcha. tlon Pnarifaïque. Mais en demeurant
dehors ils firent conduire Jésus par
quelqu'un de leurs gens dans la falle
du Prétoire.
1 . Mors 7«- 2 • Mort de Judas.
. _ Cependant le malheureux Judas
A. Tune . , » . . ,
vidensjudas, qui etoit toujours aux écoutes j ap-
cui eum cra- prjr que celui qu'il avoit trahi étoit
fhdit, quod r n ^
damnatusef- enrin condamne. Il avoit toujours
fet# efpéré t qu'ainfi qu'il avoit fait plu-
sieurs fois j il fe iauveroit par mira-
cle. Mais fruftré de cette efpérance ,
que Jésus lui avoit déjà ôtée dès le
foir précèdent par ces paroles : Le
fils de V homme fuit le cours de ce qui
a été ordonné touchant lui • il fut
accablé de cette nouvelle , comme
d'une montagne qui fut tombée fur
lui, & elle le porta tout d'un coup
au défefpoir.
11 répara fon crime autant qu'il
put par les trois parties d'une péni-
tence fort infruàueufe. 1?. 11 en
de l'Evang. Ch. CXL. I I 9
«oncur une hoiteur épouvantable , PoenîtentU»
qui lui décrurent li comcience p.,r
mille remords. 2°. Il rit fatisricrion retulir rrï-
en relhtuant aux Princes des Piètres £^»rSfST
& aux Sénateurs les trente pièces bus sacerio-
d 'argent , qui étoient le prix de fa tum '
trahifon. Il eft apparent qu'il le leur ôcienioribus,
rapporta chez Caiphe où ils étoient
encore alfemblés : & que fur le refus
qu'ils rirent de les recevoir , il les
alla jetter dans le Temple, où elles VHt infrâ
devenoient un argent facré , auquel f*3t9'
nul autre que les Prêtres ou les Lé-
vites n'eut ofé toucher fans facri-
lége.
3°. Il confelfa publiquement qu'il diccns : Pec-
/ i , i \ r • cavi traden*
avoit pèche , en livrant le lang inno- fanguincm
cent; de par cette confeiîionil ren- juftum.
dit à Jefus l'honneur qu'il lui avoir
ravi en le trahifTant j il répara le tore
qu'il avoir fait a ion innocence, en
donnant lieu aux Juifs de; croire qu'un
de fes Difciples , qui le devoir bien
connoitre , s'étoir cru obligé de le
mettre entre les mains de la Juttice.
Mais Judas aceufa de tout cela fou
avarice devant les Princes des Prê-
tres & les Sénateurs j il ie donna
tout le tort du contrat infâme qu'il
avoit fait avec eux , & par le même
aveu il les condamna à relâcher leur
ni Analyse
A. i7. b. if. priformier. Car s'il lui étoit défendu
C. 13.D.1S. s « , ., , /
de le vendre , il ne leur etoit par per-
mis de Tacheter. Ils furent néanmoins
alTez aveugles pour n'en voir rien , Se
pour lui répondre : Que nous im-
At 'Si -'j porte que vous ayez fait ce crime :
xeruntîQuidÇ,, ^ /
ad nos ? ^tu C ejt-la votre affaire. (^ elt comme
videos. s*ils difoient : Que nous importe
que vous ayez commis une perfidie
que nous avons follicitée , payée ,
approuvée , & dontnous pourfuivons
les fuites jufqu'à la mort. Elle ne
nous engage nullement devant Dieuj
c'eft-là votre affaire , & non pas la
nôtre.
Mais a toutes ces actions de péni-
tence , il manqua tout ce qdietoit
nécelïaire pour les rendre utiles &
falutaires. La foi en Jésus comme au
Sauveur , l'efpérance en fa miféri-
corde , l'amour de Dieu & de
JesusChrist qu'il avoit ofFenfé :
fon innocence au contraire , la mort
cruelle qu'il alloit fourïrir , la dou-
ceur qu'il lui avoit témoignée , .&
la noire trahifon dont lui Judas l'a-
voit reconnue; tout cela fit une il
furieufe imprelîion dans fon aine ,
it pro- qu'au lieu de la douleur d'un péni-
jeûis argen- tent \\ conçut le défefpoir d'un
teis in cem- , / ■* 1» 1 / 1 • C '
pio , recef- damne , ôc pour le délivrer une rois
des
de l'Evang. Ch. CXL. 121
des remords de faconfcience,il s'alla {"*> & *}%**
. laqueo le fuf-
penare. pendit.
Après la mort de Jésus , les Prin- Principes
ces des Prêtres mirent en délibéra- Jj™*™ Sacet"
.... aocum accep-
tion quel uiage ou quel emploi us ris argenecis ,
dévoient faire de l'argent qu'il ayoit No"îkeVços
reftitué. Comme il avoit été tiré du miccere in
tréfor du Temple pour prendre celui "**££'„
qu'ils contidéroient comme l'ennemi fangainis dt,
du Temple ck de la Loi , il fut con-
clu d'abord qu'il ne devoit pas être
remis dans le tréfor j parce que le
fang dont il étoit le prix , l'avoit
fouillé. Ils agirent ainfi pour fe con-
former peut-être à la Loi , qui dé-
fend de recevoir en offrande le prix
de la fornication, Deut. 23. iS. ou
plutôt à la défenfe que Dieu fit à
David de lui bâtir un Temple , par-
ce qu'il avoit répandu le fang hu-
main. Mais par cette même raifon
ils fe condamnoient à n'offrir plus
jamais de facrihee , eux qui avoient
les mains encore teintes d'un fang
innocent.
Ayant donc confulté enfemble , ils cônfilïoan-
acheterent de cet argent un champ *"£*££
hors de la ville, (itué au midi , der- lis agtumfi-
riere le mont de Sion , célèbre par le ^*
nom du champ du potier , parce
qn'on en tiroic de l'argile propre à
Tom. IF. ï
ni Analyse
c'i7' d'Ïs ' ^aue ^es vaitfeaux de terre. Ils le
in fêpuku- deitinerent à la fepulture des étran-
ram pcrcgri- gers , Cv furtout des foldats Romains,
norum. qUj jusqu'alors n'a voient point eu
d'autre fepulture que le commun des
Juifs j ce qui paroiiîoic à ceux-ci une
"Propter hoc grande abomination. Ainfi le prix
getili^Ha" 3^ £*ng de Je sus-Christ fut
ceidama,hoc employé au profit des Gentils, Se le
eft, ager fan- i J il'
guims, ufque champ ayant depuis cet achat change
in hodier- de nom , fut appelle le champ du
iang.
Alors fut accompli ce qu'avoic
Tune im- prédit le Prophète Zacharie , au lieu
$3«to duq«el le no!" de Jéremie s'eft glilfê
etï per Jere- dans le texte de laint Matthieu. Les
phcumfdu Grinces des Prêtres ont reçu de Judas
centem : Ec Us trente pièces d* argent ^ qui éioient
acceperunt , j / • j . ^ » .a. • *>
trigiata ar- *-c fnX ^e ce<-UL dont la tctC dVOU etQ
genuos pre- taxée à cette Comme , & dont les Prè-
cii'm appre- / * j o,
tiati , quem tres soient convenus avec Judas; es:
appretiave- Hs /es 0nt employées dans l'achat du
runt à filiis , , r t i> j
ifrael: ôc de- champ du potier _, jelon l ordre que
derunt eos n{en a donné le Seigneur. C'eft le fens
guli , ficut de cette Prophétie que 1 fcvangile a
conftituiemi- abre°ée.
hi Dorainus. &
•«&
^
de l'Evang. Ch. CXLI. 115
CHAPITRE CXLI. cap.cxli.
A. 17. B. ij.
Jésus accufé devant Pilate.
C.13.D. 18.
Jefus apud
1. Jefus accufé. %£ -
Pllare eut la complaifance de s'ac- accufatus.
commoder au vain fcrupule du d. 18. Exi-
Confeil des Juifs , & étant lorri fur vit «p>KJ*-
, r 1 1 r tus ac*eos rô-
le perron en rorme de plateforme ou ras & dûit ?
de pont, fur lequel étoit fon tribunal, i?'jam acc""
r 3 1 * lationem ar-
11 leur demanda quelles charges ils fertis adver-
apportoient contre cet homme qu'ils ,us hommcm
1 ' r / 1 -1 nunc *
lui avoient amené , & de quels cri-
mes ils l'accufoient.
Ce fut à eux à établir leur qualité
dans ce procès ; &; d'abord ils jugè-
rent à propos de prendre celle de Ju-
ges fouverains , pour ne pas expofer
l'exécution de leur jugement à l'in-
certitude des informations de Pilate.
lis lui répondirent en général _, que ru*cfp£nd£
fi ce n'étoit pas un méchant ils ne xerunc ei : si
Teuifent pas mis entre fes mains , & m°a"ef^corhlc
qu'il les offenfoit de révoquer en non rit» cra-
doute les crimes d'un homme, à qui ulml cmU5C"<
des gens fages & religieux comme
eux avoient fait le procès.
Pilace vit bien qu'ils le prenoient
ii4 Analyse
a. 17. b. iç. non p0Ur le Juge de la caufe , mais
C. 13. D. 18. rt, » j 1 r o
pour 1 exécuteur de leur ientencejoC
il fe piqua de ce qu'ils ne daignoient
pas lui expliquer les raifons fur quoi
ils l'avoient condamné. 11 ne voulut
pas en uler de même , fans avoir
pris connoiflfance du fait, i°. A caufe
delà haute réputation de Jésus, donc
on lui avoit conté les actions mer-
veilleufes. 20. A caufe de l'envie tk
de la haine implacable qu'il favoit
que les Prêtres & les Docteurs
avoient conçue contre lui. Comme
néanmoins ils pouvoient prétexter
que c'etoit des crimes contre leur
Dîxît erg© Loi qu'il n'entendoit pas , il leur
Accipic^eum permit de lui faire fon procès félon
▼os,ôcfccun- leur Loi , à la charge de rendre
dùm leeem j 1 ' j ^ o, j>
vcftramjuJi- compte de leur procédure, ex: d en
cate eum. répondre en leurs propres noms. Ils
Dixerimt % r i '
ergo ei ju- s excuierent de cette exécution, parce
daù : Nobis que les Romains leur avoient ôté le
non licet in- \ . , _ , ri
terficere droit de vie oc de mort iur les cou-
quemquam : pables : cv' par cette réponfe ils mi-
fu impkre- rent les choies en état d accomplir la
tut , quem prophétie de Jésus , touchant legen-
dixit, figni- J f ,..J. r -o.
ficans qui re de lupplice qu il devoit lourrrir ;
morte eiïèc ^j- jes Julfs ne l'eulïent pu condam-
ner lelon la Loi qu a la lapidation ,
ni Pilate qu'à la croix.
Lors donc qu'ils virent le Gou-
de l'Evang. Ch. CXLI. 125
verneur fermé a leur prétention , ils
quittèrent la qualité de Juges ,& pri- perCunJ^em
rent celle de dénonciateurs. Et dans iiiumaccufa-
trois charges différentes , dont les re '
unes venoient comme au fecours des
autres , ils l'accuferent de plufieurs
chefs , qui n'étoient que des men-
fonges impudens , ou des vérités en- djcentes :
R , l Hune inveni*
venimees. mus fubver-
La I. étOlt la féducUon du peu- tenrem gen-
! , , . r temnoftram,
pie par des nouveautés dangereu-
£es.
La 2. étoit l'oppofition au tribut
que l'Empereur levoit fur les Juifs :
deux menfonges très - impudens ,
puifqu'il étoit de notoriété publique
qu'il n'avoit prêché que la pénitence & prehiben-
&ir J r\* o >-i • tem tribut*
la Loi de Dieu , & qu il avoit dareCaïfari,
décidé qu'on devoit rendre à Céfar
ce qui étoit à Céfar.
La 3. efl: qu'il s'étoit attribué la & ai<
icentera
qualité de Chrift : & pour expliquer fe chrirtuna
1 r> 1'- 1 regem clic.
au Gouverneur 1 importance de cet
attentat , ils y ajoutèrent le nom de
Roi , pour faire voir qu'il sJagi(ïoit
de l'affectation de. ia royauté, crime
capital chez les Romains , lorfqu'on
fe l'attribuoit fans le consentement
de l'Empereur.
Fiij
n6 Anaiysë
A. 17 B. it.
C.z3.D. iS. T , -.,
i. Interroge par Pila te.
to tnterroga-
«*• Pilare connut d'abord que toutes
ces charges n'étoient que des calom-
nies , & il fe mit tout de bon dans
l'efprit de le délivrer. Il y employa
trois moyens bien differens. Le I.
raisonnable & innocent. Le II. infi-
niment honteux. Le 111. cruel jus-
qu'à la barbarie.
Le 1. fut l'information juridique
des crimes prétendus de Jésus , qu'il
fit d'abord par lui-même , & qu'il
fit faire enîuite par Hcrode. Des
trois premiers chefs d'accufation , il
ne fit pas grand fond fur la fédu-
éhon , qu'il ne crut pas de fa com-
pétance , ni fur l'oppofition aux tri-
buts , dont il n'avoit jamais entendu
parler , ni reçu de plaintes de la
part des Publicains ; mais il s'ar-
rêta à la qualité de Roi , fur la-
quelle il n'y avoir rien à négli-
ger.
d. introi- H rentra, dans le Prétoire, & fit
vit icerum i.i • T j i t i
pra-torium venir Jésus devant lui. Jésus les
Piiatus,&vo- mains liées de cordes parut en poftu-
cavit Jefum. i • • i i t #~i
a. i7. je- rede criminel devant le Gouverneur
fus autem fie- qmluidit : Vous êtes donc le Roi
tic arueurarii- * - . r ^ « ,
dem: &. i*- des Juijsi Jésus n avoir pu enten-
de l'Evang. Ch.CXLT. 127
dre du Prétoire , où il croit , ce que terrogavic e-
,• , ■ x k umprafcsdi-
les Juils avoient dit contre lui a lJi- Cens : Tu es
late. il iui demanda donc , comme Rex J"d*°-
. . ru in :
s'il ne le favoïc pas , s'il lui faifoic
cette queftion de lui-même pour D.Refpon-
l'examiner , ou fi c'étoit une accufa- du Jefu.s: A
tio.i de les adverlaires, a quoi il eut hocdids.an
à répondre : infinuai» par là que dans j£j *^at
la première fuppofîtion , il n'était
pas pour Satisfaire la curiohré , (ur
tous les points dont il ne s'agifïbit
pas.
Cette réponfe déplut a Pilate, & Refpondit
il lui demanda brutquemenr s'il le ^Tllarus : ,
. . ,l . . ,, r Nuraquid e-
prenoit pour un Jair, qui dut lavoir go judsus
que les Juifs artendoient un Roi fum ?a Gen3
> 1 • -r v tua , 5c pon-
qu ils nommoient le Mellie , & a tifices tradi-
qui ils attribuaient les caractères de Jerunt te mi-
la royauté. Il lui ht donc entendre
que cette queftion ne venoit pas de
lui : mais que les grands Prêtres à la
tête de toute fa nation l'avoient mis
entre fes mains , comme u fur pan t
cette qualité , & qu'en général il lui 1uid fecifli?
demandoit ce qu'il avoit fait,pour en
juger.
Jésus , pour ôter d'abord tout lieu Refpondit
à la jaloufiede l'Empereur , & à l'in- Jefu$;
quiétude de Pilate , lui expliqua , 1 .
La nature de (on Royaume. 2. La
nature de fa Royauté.
F iv
n8 A N A L Y SE
a. 17 b. m. j . u l'affura que (on Royaume n'c-
C. 13. D. 18. . ^ j » n. v j-
toit point de ce monde , c elt-a-dire,
um^noîTeft^dê Semblable aux autres qui partagent la
hoc mundo : terre , terreftres , vifibles , & qui fe
foutiennenr par les armes. De toutes
r . les preuves qu'il pouvoir lui en don-
u ex hoc r *j r 1111
mundo efTet ner , il choilit la plus capable de le
uTT ÎT rirer de Peine & de Soupçon. C'eft
um > miniftn r . ■ 1 s *
mei utique qu il auroit (ur pied des troupes &
ucnoîftrad^ °*es Officiers, qui combattroient pour
r.cr judffis: lui , & qui ne le laifferoient pas à la
merci des Juifs. Comme donc il ne
paroifïoit rien de tout cela , c'étoit
une marque que ion Royaume n'é-
toit pas d'ici ; mais que c'étoit un Ro-
iiunc autem yaume tout fpirituel , & dont lésâmes
iegnum me- étoient les fujers volontaires.
um non eit . '. v A iy
hinc. 2. Pilate lui répliqua aulii-tot qu a
Dixititaque ce compte il étoit donc Roi , puif-
ÎLn™^,1»" Qu'il avoit un Rovaume. Jésus ré-
goKexes eu» 1 J
pondit a cette înltance par 1 explica-
tion de fa royauté , afin de prévenir
tous les ombrages dans une matière
fi délicate. 11 lui avoiia qu'il étoit
Refpondit r> • '"1 ' J 1 J
jefus : Tudi- Roi , qu il etoit venu dans le monde,
cis , quia rex & qu'il étoit né expreflfément pour
ijThoc°natus en ^he ^es fonctions , inf muant qu'il
fum , Se ad l'étoit avant que de prendre une naif-
hoc veni in r n 4 x ' \ C
mundum, lance temporelle. Mais que la ron-
chon de cette royauté ne devoit point
faire de jaloufîe à Céfar j parce
de l'Evang. Ch. CXLI. 129
«u'elle confiftoit à rendre témoigna- ottefHmcmfc
*i 1 / • / i r>i- * 1 um Peihlbc*
ge a la vente de Dieu , en prêchant am Yeriuù ;
ion vrai culte aux hommes , & la
vraie Religion qui conduit à lui. Ce
témoignage fe fait au dehors par la
prédication , & au dedans par les
infpirations fecrettes. Qu'ainfi tout omn,'s quj e^
homme qui fe trouvoit dans le parti ex veruace ,
dt , ■ / , r • r audic vocem
e la vente ecoutoit la voix , nonleu- meam.
lement celle qui frappoit les oreilles,
mais celle qui touchoit les cœurs.
Qu'ainfï les fujets de cette royauté
étoient les cœurs & les volontés ; les
ordres abfolus , c'étoient les attraits
efficaces de la grâce; & l'obéilTance,
c'étoit la perfuafion 8c le confente-
ment.
Pilate , pour pouffer à bout la DiciteiPi-
difficulté , lui demanda ce que c'é- latus ; Quid
/ • / • eft veriras ?
toit que cette vente : mais comme lz cùm hoc
il ne voyoït là rien a craindre il ne dixiflêt , ite-
r \ 1 1 -r J> J rum exivitad
le donna pas le loihr d en entendre juda-osc. ad
la réponfe , & il fortit de nouveau Principes sa-
r .. t r >-i • cerdoi.um,&
pour dire aux Jmrs qu il ne trouvoit turbas -y D.
aucun crime dans cet homme. On Jf^fJM'V
voyoït en lui un Juge qui plaidoit la Vemo caufa;
caufe de fon jufticiable devant fes ac in hoc borai*
r a r ne«
cuiateurs j & , ce qui eit lurprenant,
unpayen qui faifoit l'office d'Avocat
pour le Roi des Juifs , devant fes pro-
pres fujets.
F v
i$o Analyse
c'-d II' l*' ^lors ^es P«°ces des Prêtres
a x/^a«h & les Docteurs delà Loi propoferent
A hr eu m . _ r T
aceufareturà leurs fécondes charges, tk ils l'acca-
s^oJum, lièrent de nouveaux chefs d*accufa-
& feaioribus non , dont faim Luc rapportera plus
A. "nihU ref- ^aS une parfie > ta refte ayant étéfup-
yondic. primé par les autres Evangéhftes.
B. Pilacusau- Pdate fit venir Jésus fur le perron
Incérroeatic P^Lir les lui raire entendre , & 1 ex-
eum» dicens: horta à y répondre : N'entende?-
A.Nonaudis 1 ■ j i / j
quanra ad- vous pas j lui dit- il j combien de
verfum te di- chofes ils dépofent contre vous ?
cunr tellimo- %r , t l / ^
nia ? P. Non ^v* répondez-vous rien a tout cela :
rcfpondcs Confiderer en combien de chefs ils
quidquam ? "J *-, x- . T c J ,
Tide in quan- vous accujent. Mais Jésus terme dans
tis te accu- |e (}|ence ne répondit à rien de tout
autemampU- ce qui lui fut objecté par les Juifs.
fr :inni ref- p J ,te en étoit dans 1 étonnement •
j)on lit A et . . - ,, *
ad uiiumvet- de voir un homme lage cV éloquent,
bum ; ira ut artaqué par de puifiTans ennemis, fa-
toifaretttt >' -> J r T J
pr*t-s vehe- vorile même de Ion Juge , prendre
néanmoins fi peu de foin de fa vie,
u'il aimoit mieux fe livrer à leur
ureur en Te taifant, que déparier
pour fe défendre.
On doit regarder ce lilence de
Jésus comme une preuve de la vo-
lonté toute libre avec laquelle il
s'offroir à la morr , & cette faveur
de P 'are comme une preuve illuftre
& fou innocence. Mais ce lilence ne
i
de l'Evakg. Ch. CXLT. i x i
doit furprendreperfonnejEsu Savoie
fair ce parcage dans les queltions
qu'on lui feroit j que C\ c'étoit des
vérités odieufes & fufpecles, il les
avoueroit , parce qu'elles pouvoienc
avancer fa condamnation , en les
purgeant néanmoins de tout le venin
dont les Juifs les empoiionnoienc.
Que fi c'étoient des calomnies , il
n'y répondroit point du tout , mais
qu'il laitferoir ce difeetnemenr àfaire
à fon Juge , qui avoit plus d'intérêt
à ne pas condamner un innocent ,
qu'un innocent à défendre fa vie.
Qu'enfin fi c'étoient des chofes qui
ne regardoienr point le fond de ia
caufe , il leur garderoit le même
filence.
x . Renvoyé devant Hé; ode. f « Ai He-
y rodem m.jhs*
Saint Luc feul nous a appris quel- c. At illi
les furent ces nouvelles inftances. Les ET!?* SSL.
Prêtres & les Docteurs redoublèrent tes: Commo-
leurs efforts contre Je, us ; & iU3£K£*
l'accu'erent qu'il foulevoit le peuple niverfamJa-
1 r o. J ~ 1 dsam « inci—
par les diicoors , & que depuis la iens \ Gali-
Ga'ilée où il avoit commencé à pa- «a uf^ue
roitre , julques dans toute la Judée, il
avoit prêché la fédnion & la révolte
contre lespuhTauces.
F vj
132. Analyse
C.ij. D. i
Pilare , qui n'avoit jamais entend»
parler de cerre fédition prétendue
ne fit pas plus d'état de cette accufa-
Pilatusau- tion que des autres. Mais apprenant
Galilaam, que Jésus eton Gahleen , il jugea
incerrogavit lacement que le crime de rébellion
il homo Ga- " i ■ i i»r-
lii*us effet. ne regardent plus 1 fcmpereur , mais
Ecutcogno- Hérode Tétrarque de Galilée dont
vit quod de T , r • o r •>»'•' ï
Herodis po Jésus etoit iiijer,cV qu ainii c etoita
tertate e(u-t , jm \ en fajre l'information. Ravi de
remifit eum f , , c . t> . r ..
adHerodem, le deraire a un jugement h odieux ,
qm& ipfcje- ji ie renvoya avec toutes les informa-
rofolymis c- . . J , ,
rat mis die- tions de ion procès pardevant rie-
bus* rode , qui étoit alors à Jérufalem pour
y célébrer la Fête de Pâque.
r^r°Jrl tp" Hérode témoigna beaucoup de joie
tem vifo Je- . • i i r i • 1 •
fu, gavifus de voir Jésus , il le louhaitoit depuis
mc Venimcu- long-tems , à caufe des chofes mer-
piensexmui- veilieufes qu'il en avoit oui dire,&
vîdere^um* ^ efpéroit de lui voir faire quelque
eo quod au- miracle. 11 le queftionna donc fur
dierat multa \ r L r 1 '"t
de eo, &fFe planeurs choies , par exemple , s il
rabat fignum éroit Jean remuante , ou quelqu'un
aliquod vide- j n L 'I
reabeo fieri. ces anciens Prophètes , comment il
avoit reçu une puifTance fi merveii-
interroga feufe ; s'il ne feroit pas bien à fa
bat auti-m e- r j ' • i i • i r ^
um multis conlideration tel ou tel miracle, ht a
ferinonibus. toutes ces demandes inutiles Jésus
At ipfe ni- , v r \ r
bil iiii ref- ne répondit que par un prorond 11-
pondcbat lence Cependant les Princes Se les
Srabant au- r>> n • n r • • j i
tcm pnnci- Docteurs qui 1 avoient iuivi devant le
î>e l'Evàng. Cri. CXLI. i * 5
Tribunal de ce Prince , craignant Pes Sacerdo-i
qu îlne lui rut favorable, l accuioient b* conftan-
toujours avec une véhémence infati- ter accu(an-.
gable , tantôt de blalpheme , tantôt
de difcours féditieux , & fur-tout de
la qualité de Meflie.
Hérode indigné d'un (îlence qu'il Sprevïtau-
ij / i tem illum
prenoit pour le dernier mépris , le Herodes cura
traita de fou & d'infenfé avec toute exercitu fuoj
fg-^ • r i r &c illufic in-
a Cour , qui pour le jouer de la ducum vefte
royauté lui fit toutes fortes d'outra- alba> & ^c-
•k r - i raine ad Piia-
ges. Mais pour marquer mieux le cum.
jugement qu'il en portoit , il le ht
couvrir félon l'Original d'un vieux
manteau de couleur éclatante, qui
témoignait que fa royauté étoit plus
digne de rifée que de crainte , &c
dans cet équipage il le renvoya à
Pilate. Cette retenue du Gouverneur amLf^Hcro^
pour ne pas entreprendre fur la Ju- des&Piiatus
rifdiction d'Hérode , les réconcilia !nnarrJp aanjeâ
l'un avec l'autre ; car ils étoient inimiejeran*
b-ii / r li s r * ad inyiccm.
rouilles en(emble,a caule peut-ctre
de l'attentat que Pilate avoit commis
fur l'autorité de ce Prince , en maifa-
crant de pauvres Galiléens {es fujets
au milieu de leurs facrifices j & il
voulut par le renvoi de Je;us pu-de-
vant Hérode lui en faire une efpece
de réparation.
Pilate, au retour de Jésus, tira pii«U5«u:
ï 5 4 Analyse
£ lr"5' ll' en fa faveur le fruit qu'il devoit de
C. 13. D. 18. j • f T r .
ces deux informations ; & ayant bit
temco'ivoca- ï 1 r> j r» * c
tis Principe approcher les Princes des Pierres &C
bus sacerlo- les Magiftrats du peuple , il leur die
tu m , ôc ma- » • ï ï • / r > i
gidratibus , clu "s iul avoient preleiite cet homme
& plèbe , dl- comme un féditieux ,qui détournoit
xic ad illos : • 1 J 1 > 1 ' /T »*I J
obcuuaismi- IS peuple de l obeitiance qu il dévoie
b\ huic ho- aux PuiGTances. Que cependant , i°,
averrentem *ra^ I information qu il en avoit raite
populum , ôc devant eux, il ne favoit trouvé at-
ecc~ ego oo- ., j L f
ra.n vohisinv teint ou convaincu d aucun des chers
terrogans, dont l\s \e chargement, i. Qu'Héro-
nu um eau- . t -ï i r
fam invenio de auquel ll les avoient renvoyés
in homme if- après l'examen qu'il en avoit fait .
to ex his , m r *' , i ' i • ï
quibus eum en avoit juge comme lui , & que la
accu -ans. Sed mamere dont îl !''.vo r traité ne mar-
neque Hero- ■ , A
des : nam re- quoitpas qu ll méritât la mort. Lom-
mifivosadil- me né inmoins il les avoit orfenfés
lum , & • cce
uni! lignum par fes prédications trop libres , ii
"ft"e Emen" ''en &«>" châtier Vàt Tes lldeUfS ,
nil
m<
éit ci j-iin.il- -
darum ergo pour leur e ii faire fatisfaChon , afin
2r d'mit" clu'ils n'eulTent pas le chagrin de l'a-
voir acculé inutilement.
0)Vg£*
^
DE i/EvANG. Ch. CXLII. 13 J
CHAPITRE CXLII. cap. cxliî,
A. 17. B. ij.
C. ij. D. 18.
& I*.
Barrabas- Flagellation.
Condamnation.
harrabas»
. T> L >r , k 7 r Flagtliatio.
1. 15 an ab as prejere a Jejus. Condemna-
tio.
E fur ce qu'il eut d'abord en vue- 1. Barra-
Mais comme il lui parue inhu bas , LhnJl9
prajertur*
C
main de puni:* un homme innocent,
pour avoir eu le malheur de dcpl .ire
à des gens 'uperbes,il changea bien-
tôt de defTein , loriqu'il fe îouvinc
qu'il étoit obligé par une vieille cou-
tume autorifée des Empereurs, de leur c Neccf^e
délivrer un pnfonmer avec Cjsdeuxauum habe*
circcnOanceSj i°. Qu'ils pouvoient bar ^^5"!!
demander celui qui leur plairoit. fcitum , u-
2°. Qu'il devoit être élargi ce ,out-!à ™ Aquv£
tri''me fans délai, en mémoire de la voluiflent.
délivrant d'Ifracl , du glaive de
l'Ange exterminateur, 6V de la fer-
vrude de l Lgvpte. Ce qui prouve
en p liant que ce jour là ctoit pour
les Juifs la veille de Pâques , puif-
qi e ce fut la veille de cette fête que
le peuple Hébreu fur délivré du
g'a.vede l'Ange & de la pour fuite de
tharaon.
i$£ Anaiyjï
/V.17-B. if. Pilate periuadé que les Princes
C. ij. d. 18. , n A r , * . i
des rretres n avoient mis Jésus entre
fes mains que par une baife & hon-
teufe jaloufie, feréfolutde ménager
l'occafion que cette coutume lui pré-
fentoit pout délivrer Jtsus. Pour
cela il referra la liberté qu'avoit le
peuple de choifir indifféremment fur
toute la troupe des pnfonniers , & il
ne leur donna le choix que de deux,
dont Jésus feroit l'un , afin de gar-
der au moins dans ce petit nombre
la forme de leur privilège , & qu'on
pût dire qu'ils avoient ihoifi. Mais
afin défaire tomber le fort fur Jésus,
il alla prendre dans fes prifons le
plus fcélerat de tous ceux qui y
étoient pour le lui oppofer,dansl'ef-
pérance que fi les Juifs confervoient
encore quelque refte d'équité & de
reconnoiffance , pour les bienfaits
dont Jésus les avoit comblés , ils fe
determineroient pour lui. Ce fut le
II. moyen qu'il prit pour lui fauver
la vie.
Habebatau- Il y avoit alors dans fes prifons
tem tune vin- Un iniigne voleur nommé Barabbas ,
nem, quidi- qui y etoit arrête avec d autres mu-
cebatur Bar- tms pour avoir fajt un meurtre dans
l'a DU *> *^
D//8.Erat une fédition. Pilate trouva cet hom-
b«eniiaBcrrra me ^'autant plus propre à fon delTein,
de l'Evang. Ch. CXLII. 137
qu'il étoitl'horreur du public: au lteu Jv<luî. cuià
* - . - . l j feditiouserat
que le prilonnier , dont on deman- Vin&us, qui
doit la grâce , devoit être diftingué [n fedjw°n.e
© o feceracfcomi-
des autres par quelque circonltance cidium.
favorable , qui le rendît digne de
compaffion.
Le peuple fit les acclamations or- Etcùm af-
dinaires pour demander au Gouver- fend,{ïe.ttur-
1 j> t • »i ba cœPlc,ro-
neur la grâce d un prilonnier , qu il gare , ficuc
avoit accoutumé de leur accorder [e,Tp- î f- f acT
oat llilS. A.
toutes les années. Pilate les ayant congregatis
atfemblés devant lui , leur dit qu'il JJ5dl^£
ne trouvoit rien en Jésus qui méri- dixit a. PUa-
tât le dernier fupplice, & qu'il pou- ^m iave°-
voit le relâcher de plein droit. Qu'il nio in c»
' ' 1 • • r 1 caufarn.
etoit néanmoins bien aile qui leur
fût redevable de la vie : Et comme *ft au.tem
.. . • i> 1 1 • confuetudo
ils avoient une coutume qui lobh- vobis ut u-
eeoit à leur donner la vie d'un cri- nuin ^DÏ}"
minel dans la rete de Paque , il leur Pafcha : vul-
donnoit le choix de Jésus ou de Ba- tl-ctcam vobis
rabbas : Lequel des deux _, difoit-il, RegemJuda;-
voule^-vous que je vous délivre j de oruA1.îQUem
Barabbas , cet homme féditieux & vuhis dimic-
homicide , ou de Jefusque la voix du *%£%£
public appelle le Chrifl ? fum , qui di-
r\~ : T * ~ J citur Chrif-
yJti voit combien ce moyen de tus?B.sciebat
fauver Jésus lui étoit honteux; puif- eniir» quocl
» 1 1 rr rr ' *i r ■ j Per invidiam
que s il reuiiiiloit , il leroit redeva- tradidi(Tent
ble de la vie aux crimes de Barabbas; eum /ummi
&>•!/• i_ • i Sacerdoces,
que s îliuccomboit dans cette cou-
138 Analyse
a. 17. B. if. cucrence , il auroir paru moins die-
ne d? vivre que le plus grand de tous
les fcélerats.
Dans ce moment- là , Dieu donna
encore une nouvelle preuve de l'in-
'em^iîio nocence ^e ^on Fils* Pilate étant aflis
procribunaii, fur fon Tribunal , fa femme lui fit
mihc ad cura Jjre par un Je fes gens citl'il ne fe
dicens.-Nihii meiat point dans la caule de Jésus ,
imV&iuil0 Pat deux raifons : L'une » de Rell~
gion , parce que c'étoit un homme
multa cnim jufte . L'autre de crainte , parce
pafia lum ho- ' , , . • 1 1 rr 11
•Uepcrvifum qu elleavoitete errroyablement tour-
propter eum. mentée à caufe de lui, dans un fon-
ge plein de terreurs, où on lui mon-
troit les malheurs dont Pilate étoit
menacé s'il l'abandonnoit à la fureur
des Juifs. 11 e(t fans doute que ce
fonge venoit de la part de Dieu , non
pour délivrer Jésus , mais pour faire
éclater fon innocence par une per-
fonne , qui n'avoir aucun intérêt à
autem^ace" parler pour lui. Au moins il confirma
dotum, &fc- le Gouverneur dans la volonté de
nioresB.con- r r
citavcruat lauver Jésus.
turbam, Pendant que cet Envoyé s'acquit-
A. ut pete- j r - rr 1 n
rcnc Bana- roit de la com million , les Princes
bjm , Jefmn des Prêtres & les Sénateurs corrom-
\"jvo perde- 1 , a 0jr
rent Refpon- pirenc le peuple par eux -mêmes oc
dens amena par leurs émiifaires , & lui petfua-
lis : Qucm dereiu de demander la grâce de m-
DE i/EvANG.Ch. CXLII. I j 9
rabbas , ôc la more de Jésus. Etlorf- vukU votlt
que Pilate leur propoia lequel donc dimhti ? c.
des deux ils vouloient qu'il leur ac- ExdaMyk
A .. ,, . ^ auceiii limul
cordât , ils s écrièrent tous : toint mrirerfa tur-
de cet homme . maïs donnez-nous Ba- 5.a,j. d,,ce:is :
J *• Toile hune ,
rabbas» & dimitte
nobis Barra-
r bam.
i. Clameurs des Juifs contre 2.cUmo-
JeSUS. ks J" l*orum
adverfus /c*
fum.
Le Gouverneur toujours ferme _ _M
J i i (<" • i r t s\ B- P»Iatus
dsns ledeîleinde iauver Jésus : Que autemkerùm
voulez-vous donc t leut dit- il ., que K-[?4^femc9
je fajjè de celui que vous ave% appelle roless dimfo
vous même le Roi de Juifs ? ( il "rcr Je/um:
parloïc ians doute de la cérémonie de vultis raciam
fou entrée, ) & qui ordinairement Re&1 Jïaïo:
' *■ rum , A. qui
ejl nommé le Chrijl. Il vouloir les dicicur ciui-
touchei par ces noms de Chrift &c de ^s ? .^^
Roi «jes Juifs , qui leur dévoient clamaverunr,
être fi précieux. Mais il n'y trouva £uctfgCemcseI
aucun fenriment de tendre(Tej6<: ils um. nie au-
> / j *■» « tem tertio
s écrièrent tous de nouveau : Cruu- diAkadiiios:
J. er-te _, crue /fier -le. Pilate tenant Q"»d enim
i a* • /7 i mali fecit if-
tou;ours bon : Mais enfin , leur tc . Nuuam
dit-il pour la rroifieme fois, quel caufammor-
/ «f r • i *t • tisinvenioin
mcla-t-ll faitt A0« , y* /Z<? rrcav* eo:corripiam
r c/2 é/i /■? c^a/^ £\v/ <f£//i à /# raorr , /£ ^ê0 iHum,CC
, / . r n r i \ oimittam.
le jerai fuftiger _, ks> je lerenverai après a ac illi
le châtiment. Ces dernières paroles î"asis dania-
/ j, c o r \ banc c- VOC1'
prononcees d un ton rame oc reiolu bus nwgnis,
140 Analyse
a. 17. b. iç. excitèrent de tous côtés de redou-
" blemens de cris & de voix confufes,
postulantes • i j t iTA
ut crucifiée- °lul demandoient que Jésus rue cru-
mur , & in- citîé , Se qui en cas de refus fem-
voecs corum. Ploient erre les preiages d une icdi-
tion prochaine.
latio FCoro- $ * Flagellation, Couronnement.
natio. niufio. Outrages*
Alors Pilate fe relâchant de la fer-
meté qu'il avoit fait paroître juf-
qu'ici , reprit le III. moyen qu'il
avoit rejette j Se jugea qu'il falloit
compofer avec ce peuple inflexible
& rebelle. Il demandoit la mort de
Jésus \ il lui en accorda une partie ,
en ne lui laiflant qu'autant de vie ,
qui lui en pourroit refier après une
cruelle Se fanglante flagellation. Pour
le fauver de la mort , il le condam-
na à une peine , qui fans lui ôter la
vie appaifât la fureur des Juifs. En-
tre les deux extrémités de le faire
mourir comme ils le fouhaitoienc ,
Se de le renvoyer abfous à pur Se à
plein _, comme il le vouloit, il fut
contraint de prendre ce cruel tem-
pérament , dont il efpéroit que les
Juifs fecontenteroient. Horrible in-
juftice , cruelle miféricorde , de ren-
be l'Evang. Ch. CXLII. 141
dre un innocent miférable , pour
farisfaire la fureur d'un peuple in-
fenfé.
11ht prendre Jésus par fes Li- D. i9#Tunc
(Sieurs , qui l'ayant dépouillé & lié à erg° appre-
une colomne de la falle du Prétoire, tus^efuin, se
lefoiietterent.On peut juçer combien flagciiavir.B.
„, „ n 11 c \\ o Militcsaurem
cette nagellation tut cruelle, r. par A. pnriïdis ,
la qualité des exécuteurs, qui étant fufciPiemes
1 • l r Jefum in
payens ne gardoient aucune meiure prjetooum ,
dans ce châtiment , mais qui l'exer- B- «luxerai*
^oient adilcretion. 2 . Parlann que umprsioiii ,
le Gouverneur s'y étoit propofée , qui
étoit d'amollir les cœurs barbares des
Juifs pour Jésus , à quoi n'eût pas
fuffi une flagellation ordinaire. 11
fallut donc le mettre dans un état ca-
pable d'infpirer quelque compailion,
& d'arracher quelques larmes à ces
cœurs de pierre.
Les foldats ne fe contentèrent pas
de cette inhumanité. Mais foit de
leur propre mouvement , foit par a. & congre-
les ordres fecrets du Gouverneur , & gavêmnc ad
di 1 1 • 1 • 1 rr eufn univer-
ans la vue de lui plaire, ils aliem- çzm C0hOr-
blerent autour de Jésus toute la Co- tem : & exu-
h,>. 0 ■• j r entes eum,
orte Prétorienne j ex au heu de les chiamidem
habits , dont il étoit dépouillé, ils le coccincam
,, l .,/ circumdede-
couvnrent d un vieux manteau d e- runc ei : &c
carlare , peut-être le même qu'il avoit pie&entesco-
F 1 1 il' 1 o lonamdefpi-
rapporte de chez nerode ; oc ayant ais , pofu«;
142. Analyse
A. 17- b. 15. fait une couronne d'épines entré-
es 13. D.i?.i rpi -111 r 1 *
laliee , ils la lui mirent lur la rete ,
«nr^in?crc& & une canne à la main en guife de
put ejus , oc o
arundinemin fceprre. Alors, pour jouer fa royauté,
dexcera ejus. «j \ 1 1 \ r
D. Et vente- ^s venoient a lui chacun a Ion tour,
bancadcum: Se mettant un genou en terre devant
A. ôcecnufle- 1 1 j 1
xoaiueeum/ul > comme pour lui rendre leurs
illudebancei. hommages , ou faire entre fes mains
rûnc falacarc ^e ferment de fidélité , ils lui di-
cum, A.di-foient : Salue au Roi des Juifs ; ÔC
cemes : Ave 1 • il t 1 •
Rex judaro- pour lui payer le tribut , les uns lm
rum. d. Et doniioient des fourriers de toute leur
dabanteiala r 1 1 • 1 j 1
pas ; b. & rorce , les autres lui donnoient de la
percutiebant canne par la tète pour enfoncer fa
capuc ejus a- l o 1 r 1 •
îundine ; & couronne , ce les autres enhn lui
confpuebanc ayant défiguré le vifage de leurs cra-
nente's genua chats , faifoient femblant de l'adorer
adorabant e- £ aenoux.
um. °
mo.
4.Ecceho- 4. Voilà V homme.
d. Exiv'it Avant que d'expofer aux yeux des
ergo iceiùm Juifs ce fpeftacle pitoyable , Pilate
Pilatustoras, r r J J
& dicic eis:les prévint pour les. y préparer. Il
Ecce adduco jeur £lt >^ venoit encore le leur
vobiseumto- . . * ■.
ras , ut cog- produire , pour leur protelrer qu il
nofcans,quia ne crouvoir en lui aucun crime diçne
nullam inve- ^ £>
nioineocau- de mort. Jésus fortiten meme tems
er«>* Ejèfùs t0Ut déchiré de coups , portant la
portanscoro- couronne d'épines fur fa tête , & cet
vn fpwcam habillement de pourpre fur fes épai*
DE l/EvANG. Ch. CXÎ II. I45
les. Ce fpectacle étoit un aveu que &p«rpu«uni
Pi r • r • a r -a. h • veftimcncura
îlate raiioit de ion injultice, en rai-
fant crairer h cruellement un homme
qui n'avoir point d'autre crime que
d'avoir déplu aux Grands- Prêtres ;
d'où il leur laifloit à conclure , que
s'il y avoit trouvé quelque crime ef-
fectif, il ne Tauroit pas épargné. Pour
les toucher de compalîion il leur dit, T ,. . .
. . f . • r- ' Etdiciteis;
en le montrant de la main : Voila
,3 r 1 1 > il • r- Ecce horao.
/ nomme dont il s agit j il leur înli-
nuoit qu'il étoit dans un état plus
digne de leur pitié, que de leur hai-
nCj &: que s'il leur reitoit encore quel-
que Gentiment d'humanité _, ils dé-
voient lui laifler ce peu qui lui refloic
de vie.
Mais ce lâche Juge ne tira point
de ce moyen barbare le fruit qu'il
en avoit elperé. Comme il avoir lâ-
ché le pied jufqu'à leur accorder une
partie de ce qu'ils lui demandoienr,
il s'étoit arToibli pour leur refufer
le refte. Le Prince des Prêtres , ÔC
leurs gens reçurent cette condefcen-
dance de Pilare, comme un engage-
ai r ■ rwî 1 »*i • Cùm ereo
ment a la luite. Des iorsqu ils virent vidiflenceum
paroitre Jésus fur le perron , crai- Pomifices ac
1 > 1 • 1 miniitri , cla-
gnant que cette vue 11 attendrit le mabant , di-
peuple pour lui , ils commencèrent ce™cs: Cru*
les premiers, pour en donner l'exem- c\&p cum.
144 Analyse
c' *7'd* Y' P^e * * cr*er ; Crucifîel-k j crucifie^-
' le. En vain Pilate en colère contre
latS • Accipi- une fl grande brutalité , leur du :
te eum vos , Prenez-le vous-même _, & fi vous
egoenimnon l °M -» crucifieriez pour moi je ne
invenioineo trouve en lui aucun crime. Cette op-
pofition ne fervit qu'à leur flaire
avancer leur III. charge qu'ils
avoient fupprimée jufqu'ici , dans la
crainte qu'elle n'eût un effet tout con-
traire.
Pour éluder la raifon du Gouver-
neur , que félon les Loix Romaines ,
dont il devoit fans doute être inftruit,
Jésus n'avoit rien commis qui mé-
ritât le dernier fupplice , ils le remi-
Nos kgem favoit pas , &: ils lui alléguèrent que
ficundùm £ félon une de leurs Loix il devoit
gem debec mourir , parce qu'il s'etoit fait palier
mori , quia i r -i j fv- > i /
fîiium Del fe pour le rils de Dieu : ce qu ils pre-
fecit. tendoient être un blafphême qui in-
troduifoit deux Dieux dans le mon-
de j puifque le Fils de Dieu devoit
être Dieu comme fon Père , & un
Dieu tout différent de lui.
cùm ergo A cette parole Pilate , quines'in-
audiffet pila- commodoit gueresde la pluralité des
tus hune fer- ç , r
monern , ma- Dieux , rut trappe d une horreur le-
gisumuic. cretre> qu'il n'eût traité le Fils de
quelque Dieu d'une manière fi bar-
bare»
de l'Evang. Ch. CXLIÏ. 14$
bare. Il joignit cette accufation à tous
les miracles qu'il avoit faits j à cette
indifférence pour la vie , à cette pa-
tience dans les tourmens , qui ne s é-
toit pas laifTé échaper une feule pa-
role de plainte j à ce lilence furnaturel
dans les queftions les plus favorables :
toutes chofes impodibles au commun
des hommes; il foupçonna dans Jésus
quelque chofe de divin, 8c au-deflus
de l'homme , dont on lui faifoit un
crime.
f. Secunîa.
5 . o econde interrogation de Ptf*ti muno.
Pilate. ëano'
Pour s'en éclaircir , il rentra prom- Er îr.greiïus
ptement dans le Prétoire , & s'étant îr%*co.riT
m 1 L C 1 U I II j Oc
fait fuivre par Jésus , il lui demanda àixïi ad je-
doùilétoit;c'e(tâ-dire d'où Ùti-*™; Ullde
roit fon origine , de quels parens ,
de quelle famille, qui étoit fon père
& fa mère : car il iavoit qu'il étoit
de Galilée, 8c il ne lui demandoit
pas ce qu'il favoit. Jésus ne fit à T r
r 1 Jefussorem
cela aucune reponle , 1 . Parce que refpomum
cette queftion étoit inutile à la déci- nou dedu Cl'
fion du fend de la caufe. 1. Il y avoit
déjà furHtamment répondu , en lui
difant,que fon Royaume n'étoit pas
de ce monde , & qu'il y étoit venu
Tom, IF. G
146 Analyse
A. 17.B. ij. parla nailfance. Pilaten'étoit pas ca-
pable d'une plus ample inftruction j
elle ne pouvoit fervir qu'a fa déchar-
ge , & il ne vouloit rien faire pour
conferver fa vie.
Dicit ergo Pilate s'offença encore de ce filen-
mihi non io- ce. Vous ne me parle^ point , lui dit-
l^oilt,^" ^en colère , à moi ? Ne faver-vous
ftatcmhabco pas que je puis vous faire attacher à
te & pocei- une croi:c j °^ vous renvoyer abjous f
tacem habeo Cette vanité de Pilate obligea Jésus
dimitteie te î 1 1 • / j >•! >
RcfponditJc- «e lui repondre , qu il n auroit pas
fus? Non ha- Heu d'exercer ion pouvoir fur lui, fi
berespotefta- • > a / / / l ' j 1
tcm adver- cela n euc ete rnenage de loin par
fum me ui- une difpofitioii fecrette de la provi-
lam , niu* ti- , f- . •,/•/•• 1
bi datum cf- dence divine , qui s etoit lervie des
fcc defuper. pallions de des vices d^s hommes
pour le faire tomber entre fes mains,
6v pour le mettre lui Pilate dans la
Proptcrea néceflité de le l'user. Qu'aufii , pour
qui me cradi- .. . 1 r v r J' 1
dictibi, ma- dire quelque choie a la décharge ,
jus peccatum c'eft ce qUl aggravoit le péché de
habec 71 , , &P . . . r , ,
ceux qui le lui avoient livre , beau-
coup plus que le fien. Car ceux là
avoienr mérité , L-s uns par leur ava-
rice , les autres par leur envie j les
autres par leur orgueil infolenc , que
Dieu le fervît d'eux pour le faire
fouffrir , lorfque contre leur con-
feience , ils Tavoient dé^cié comme
un fcélerac à fon Tribunal 7 au lien
, Ch/CXLH : i"
que Pilace n'ci il foc loi b Ju-
nfdiâion , que par l'obligation que
lui cri impoloit la charge de
: Je la Province , qui dev
la j n il 1 ut le momie. (Quelle
admira.
d'une
manière li injure cv II bai. n . de
[Oeiaoe iorte ion apolo-
Dèslorsl << paroirr: aux Juirs Et c
qu'il c-
la:u\ di
oie abfous il -»^ra
naimoit point Cclar ; car ce n eit : si
pas aimer C ctar que de pardonn.
I . » « . non c»
1 »n ennemi. Or quiconque le tait c*f«
Roi comme Jesui , le déclare 1
nemi il; l . Le malheui ir* Ju
cotnba fou
.appe d'un coup
de foudre. 1 \j% t
l'amour pour la ju le foin :
D boni Ion aurai te
ItC en un momen
yeux. Il i plus qu'i I ibère
M plu i lia les ii , ,
& a la mal u
q ne pas de nt ce
Pi d'avoir fauve la vie au Roi
G il
14S An A LYSE
A. 17. B. iç.
C. 13. D. 19.
6. Jésus livré à la Croix.
6. Chriftus
îrj.d.tur cruci-
jisendus. H fe donna néanmoins le loifïr
dans un fi grand trouble , de faire
un dernier efiort pour fauver Jésus
par ce IV. moyen aulîi inurileque
Pilatusau- les autres. Il le fit forcir dehors, &: il
tem cùm au- s'atfît dans fon Tribunal , élevé fur
diflet hos , , , , . .
fermonesid- un perron pave de pierre. C etoïc le
duxit foras jOLir c[e ja parafée ve ; c'eft-à-dire ,
dicproaibu- de la préparation a la raque , qui
caii, inioco fe fajt }a veille , & il éroic environ
qui dicitur , r , , , a
Lkhoftroros , la lixieme heure du jour, c eit-a-
Hcbraïcè au- ^ire entre onze heures & midi.
tem Gabba- * . , A ,
tha. Eracau- IL les prit de tous cotes pour les cou-
tem parafée- cher
ve Pafch*, A , ,
horâ quafi i. Du cote de 1 amour qu ils
fexta i avoiênt pour leur Meffie, 8c de i'hu-
manité pour les miférables , en joi-
gnant l'un & l'autre dans la per-
se dkit Ju- fonne de Jésus , Voilà _, leur dit-il j
Rcxvcfter!" en ^e ^eLir montrant > vo/Ai votre Roi
dans cet homme le plus miférable
de tous les hommes. Où elt votre
amour pour votre Roi ?■ où eft votre
compaiîion pour la mifere de vos
illi autem femblables f Mais il ne reçut point
ToUe^oiie d'aucre réponfe que ces cris cumul-
ciuciiïgc c- tuetix : Otc^-lc j ôte^-lc } crucifie^
dï l'Evang. Ch. CXLÎI. 149
2Q. 11 les centa du côté de la con- ., Dîcît cîs
r • ni • 1 -il >\ Pilatus : Re-
icience , ce du crime horrible qu il gem veitmm
y auroic dans cette exécurion. ^ «uafigam ï
Dieu ne plaife _, dit- il , que je com-
mette un aujjl grand parricide que de
crucifier votre Roi ! Mais les Grands- Refponde-
Prêtres qui crurent que ce cas de ruru Ponufi'
confeience les regardoit , & que
c'étoit à eux à y répondre , prirent
la parole au nom de tous , la défa-
vouerent hautement pour leur Roi ;
& procédant qu'ils n'avaient point Noa babe-
d'autre Roi queCéfar , ils renonce- m[l* *egcm
rent aux promettes que JJieu leur
avoit faites de leur envoyer le Mef-
fie.
3°. Rejette de ces deux épreuves, a. videns
o. 1 • 11 1 aurem Pilatus
ot voyant que loin d avancer , le tu- quja nihii
multe croilfoit de plus en plus , il proficeret ,
1 r j j h 1 T\ 1 • fed magis tu-
les ionda du cote de la crainte , en muhusfieier,
leur repréfenrant le fupplice épou-
vantable qui étoit attaché à cet at-
tentat : pour les en toucher plus vive-
ment , il y employa la cérémonie ;
il fe fit verfer de l'eau fur les mains, accepta aquâ
& en fe levant il protefta devant tout J^™™
le peuple , qu'il avoit les mains pures lo , dicem :
du fang de ce Jufte , & qu'il étoit [™S-
innocent de fa mort ; qu'ils y prilTent ne Jufti hu-
_, j_ »/ • \ \ / jus : vos vi-
garde, que c etoit a eux a en repon- 'demis.
dre. Tout le peuple moins fetupu- Etrefpondenj
G iij
1 5 « Analyse
a. 17. F. iS. leux que Pilare , confentit qu'à Pé-
C. 15. D. 1^. 1 j 1 \ r
gara de la vengeance , tout le lang
univerfuspo- j_ t. 1* ri r
puiusdixk: de Jésus ne rombac pas ieulement Iur
leurs mains pour les teindre , mais
Sanguis ejus r . A r 11 j 1
fupemos, & tur leurs têtes, & iur celles de leurs
nXos fiIlOS enfaDS-
Voilà dans ces trois actes le fonde-
ment de la réprobation des Juifs juf-
qu'à la fin dus lîécles , i°. Ils ont
procuré la mort du Meflie que Dieu
leur a envoyé. 2°. Ils l'ont renoncé
pour jamais , en ne reconnoiifant
point d'autre Roi que Céfar. 30. Ils
ont engagé leurs âmes 6c celles de
toute leur poftérité à la vengeance
éternelle de Dieu.
b. Pilatus Enfin Pilate pouffé à bout de tous
ZStoûZ côcés donna au PeuPle toute la fatis-
facere,c. ad- faction qu'il demandoit. 11 leur ac-
î?P«h£JeM cocha ce Barabbas qui étoit arrêté
eorum.Dimi- pour les crimes de meurtre ôc defé-
Cn autemillis i • • o "1 1' T A^-^
cum,quiPio-dition; & il livra Jésus pour être
pter homici- crucifié , ainfi qu'ils le vouloient,fans
dium & fedi- n / • \ a il
tionem mif- renouveller néanmoins la nagella-
fus fueracin cion qUi précédoit toujours le der-
circerem , -ri- >1 i» * J '•
«juem pete- nier iupphce , parce qu il l avoir déjà
bant : a. je- foufFerte. Voilà où fe terminèrent
fjm autcm < ,rrt i rvi !
flagciiatum toutes les reliitances de rilate, qui
G. tradidit au jjeu Je fe fouvenir qu'il avoir en-
'olumati eo- , . »* i \,r
, a. ut tre les mains le pouvoir de 1 tmpe-
vo
rum
crucih-ete- reur pour foutenir la juftice & Tin-
DEl/EvAtfG.Ch.CXLllI. 151
nocence, immola lâchement à fa for-
tune l'une Se l'autre dans la person-
ne de Jésus , pour n'avoir ofé le fau-
verque duconfentement defes mor-
tels ennemis. 11 devoir s'expofer à
tous les hazards de l'indignation de
Tibère , & des Juifs , en laiffant au
Giel le foin de l'en délivrer , parce
qu'il n'elt pas petmis de faire un mai
pour en empêcher plufieurs autres.
Ses infrances néanmoins pour déli-
vret Jésus n'ont pas été inutiles ; Ci
elles n'ont rien fait pour le difculper
devant Dieu , elles ont mis l'inno-
cence de Jésus dans un jour , que fa
condamnation ne fait que relever da-
vantage. 11 n'y eut jamais d'aceufé
plus innocent , que celui qui eft ab-
fous par le Juge meme qui le con-
damne.
CHAPITRE CXL1ÏI. cap.cxlm.
Crucifiement & Mort. *•£»;*>-
Crucifixio
1. Portement de la croix, &Mors'
1 . Cruel i
LE refte des fouffrances de Jésus bajuiado.
fe réduit ; 1. A la douleur. II.
A la honte. La douleur fe fit fentir
G iv
i $1 Analyse
A. 17.B.1J. fans le portement de la croix , &
dans le crucifiement : de la honte rut
caufée par la nudité j &c par les infui-
tes que lui firent toutes fortes de per-
sonnes , Juifs , Gentils , Grands- Pre-
D-;^s^- très, larrons & foldats.
ceperunt au- ' #
cem Jcfuni j Les foldats fe faifirent de Jésus, Se
Jiîiufîrî: l'ayant dépouillé de ce vil habille-
mntei, exue- ment d'écarlate dont ils l'avoient
purpura*, & couvert , ils le revêtirent de fes pro-
e- près habits , foit pour ne pas perdre
"■sl :a" le droit qu'ils y avoient , ou pour
& educune ie rendre plus reconnoilïable. Ils le
Wwn,utcru- firent fortir du Prétoire pour le me-
cineerent e- . r _ a
um D.Erba- ner cruciher. ht comme ceux qui
juians fibi étoient condamnés à ce fupplice ,
vit in eum, etoient obliges a porter eux-mêmes
S"| dîcitut la croix a laq-uelle ils dévoient être
Calvaria: lo- . , 1 1 1 r -i
cinn,HxLra- attaches; pour garder la rorme , ils
ïcè aurem chargerentjEsusdelafienne.il mar-
cha fous ce poids jufques hors de la
ville , vers le lieu nommé en Latin
le Calvaire , à caufe desoflTemens de
ceux qu'on y faifoit mourir } &c en
Hébreu Golgotha , qui a le même
fens. Mais comme ils vouloient lui
épargner le tourment de porter fa
croix jufques fur la montagne , Se
n'ofant de peur de caufer du tumulte,
contraindre aucun de tout a peuple
qui fuivoit , à un minif.ere ^ue; >~us
DE l'EvANG. Ch. CXLIII. 15.3*
eftimoient abominable ; heureufe- tC. 15. it
. ' . ... cumducerenc
ment ils rencontrèrent hors la ville un eum, a. in-
païfan étranger, qui venoit delacam- veneru°t B»
r & » 1 . practcreua-
pagne _, nomme Simon , de la ville tem quem-
deCvreneen Lybie, le père d'Ale- ?iam Ar'h°-
1 1 r» r 1 ^i » • minera Cyre-
xandre&deRurus, deux Chrétiens naeum,nomi.
illuftres , en faveur defquels faint îcJivao"™
t % r r -il B.venicntcm
Marc a marque dans Ion hvangile la de villa, pa-
part que leur père avoit eue dans le ^s^ufT*
portementde la croix. Les exécuteurs
r a rr _ A. Hune
arrererent ce patient , ce avec une in- angariave-
folence foldatefq ne le forcèrent à por- ru"c' ut B'
• r r i1 r> i ■ i ■ i tolleret cru-
ter julques lur le Calvaire lacroixde cem ejus^c,
Jésus qui marchoit devant lui. On & impofuc-
^ runt il 1 1 cru-
ne peur guère attribuer cette huma cem pcmare
nue des ibldats envers Jésus , qu'aux folt Jcfum»
ordres que Pilate leur avoir donnés
de traiter favorablement un homme ,
qu'il n'avoit condamné que par force.
2. Larmes & regrets des femmes. ?■• MuluTet
D J plangentcs.
Il étoir fuivi des Prêtres Se des
Docteurs , qui pour ô:er tout lieu au
Gouverneur de leur donner le chan-
ge , 8c de fubftituer quelqu'aurre en
la place , s'étoient fait une affaire de
politique de ne le point quitter,qu'ils
ne l'eulfeiuvii expirer fur ta croix.
Avec eux venoit une grande foule sequebami
j \ a r P r • aurcm illum
de peuple, & iur-rout deremmesqui muica mrfc
G v
154 Analyse
c* i7.'d [l] ^e P^euro^enr avec de grandes mar-
' ques de deuil & de déïblation : ( car
populi , 5c i „ î > r> \ i
niiîlierum, ies nommes n auroientote devant les
qux pUngc- Grands-Prêtres donner aucune mar-
mencabtuur que^de criftefli. }
€um. Cette compaflion , quoique pure-
Converfus 1 » ■ ii-t
ain- m ad il- ment namaîne obligea Jésus , qut
lasjcfus, di- éroir déchargé de fa croix, à Te tour-
xic : Fi lis Je-
rufaifm,no- ner vers elles , & à les prier de mé-
lice flcre fu- nager-mieux les larmes qu'elles ré-
par me 5 fed c , . r i • it i
îup.rvosip- pandoient inutilement lnr lui. 11 leur
fasflere, «c repréfenra que dans la prévoyance
veilros. des malheurs qui dévoient venger la
mort , elles dévoient les employer
pour elle - mêmes & pour leurs enfans.
Il leur jultifia ce confeil par la
ruine future de la ville de Jéru-
falem.
Quoniam i °. Dans la part que celles de ces
ccce vemcnt fernmes qUi feront encore vivantes
dks, in qui- 1
bus dicent : dévoient prendre comme routes les
Bearac ften- autres dans les maux & dans la more
les, &c ven- . ■
très qui non de leurs enrans , qui leur lont d or-
ruUberr?qua? dirtaire plus fenfibles que leurs pto-
non îaciave- près maux , & qui leur feront eftimer
heur-enfes les femmes (renies, qui au
moins ne feront miférables que dans
leurs perfonnes , & de leur propre
mifere.
Tune incî- 2°. Par le poids infuppombledes
*icnt dicerc n • r i r i
Koacibus ; malheurs qui fondront iur tous les
de i/Evàng. Ch. CXLIII. 1 5 5
Juifs, & qui leur feront fouhaiter que Caditf faf*e
les montagnes les ecralent par leur bus : opemc
chute dans les cavernes où ils fe ré- nos*
fugieront, & que les colines s'abî-
ment fous leurs poids, &c les englou-
tiflent tous vivans.
3°. Par la comparaifon de ce qu'il Quia /î in.
fourîre avec ce qu'ils foufFriront.Car ^dunT
fi on traite ainn* le bois verd , que la aridoquid
fera-ce du bois (ne ? Il fe compare
au bois verd , les Juifs au bois fec ,
& le fupplice au feu. On nedeftine
pas au feu le bois verd , à caufe de fa
fécondité & de fon humidité j le bois
vif n'eft pas bon à brûler , parce
que d'un côté il eft encore en état de
porter du fruit , & ce feroit une per-
te ; & que de l'autre il eft humide ,
& il y auroit de la peine à lui faire
prendre feu. Au lieu que le bois fec
eft de ces deux cotés une matière
fort combuftible. Si donc tel eft Té-
tât déplorable où les Juifs ont réduit
l'innocence & la fource féconde de
toute fainteté , pour laquelle les pei-
nes de la juftice n'ont point été éta-
blies j a quel excès de mifere en cette
vie, & de malheur éternel dans le
fiécle à venir, la juftice de Dieu
réduira- t-elle des parricides comme
eux ?
G vj
156 Analyse
A 17. B. iy.
. ^or/ $. Premier breuvage. Crucifiement.
prima. Crità- Pardon demandé.
Pater
dimltte.
_ , On menoit auffi deux criminels *
Duccbanrur 1 r r i 11 »
âurem alii charges ians douce de leurs croix _,
duo nc-4Mam !elon |a coutume , pour les faire mou*
cum .0 , uc 1 1 , > r '
interficcren- rir avec lui. Lonqu on rut arrive
tur B.Ecper- <uv\t Calvaire , on lui donna à boire
durant -Hum £ M, ,,
iu Golgocha c un vin rumeux, mêle d une myrre
locum, quod çoï\ air.ere. On en uioitainfi envers
cjtinterprcca- . , \ r
cum ca:va ceux qu on execiuoit , pour leurror-
n« locus. riher le cœur contre les douleurs de
A. Et dede -,
runc ei vi leur lupphee , & pour en amortir le
mimbib.reB. fentirr<enc par les vapeurs decebreu-
myrrarum , r J
A. cum l'a. e vage. Jésus en goûta pour obéir a
niiftum : & jaCoutume; mais comme il vouloir
oc cum gui- ri rr 1
taflet, noluit ïourrrir fans adoucmçment la mort
bibere. ^e ja croix ? armée de toutes (es
douleurs , il n'en voulue point boi-
re.
B.iratau- Ils le crucifièrent lorfqu'il étoit
S" ^?r»!î" la fixieme heure du jour ou midi ,
fixerunteum, & avec lui ces deux criminels , 1 un
Siot luo" c° à droite , l'autre à gauche , & Jésus
larron: s ; u au milieu. Le texte de faint Marc
Su*, & ahe- Porre que ce^a *~e ^C a la troifieme
ron A unir, heure : fur quoi voyez la Dijjertation
tris , D me- -.. y y prr
Jefttm. Et alors fut accomplie la prophé-
B. Et im- ,,ir .. • • -> 1 ' A
picca cit tie d Haie , qui portoit q» il a ete
de l'Evang. Ch. CXLIII. 157
mis au ranidés fcélerats. Cependant Scr«ptur* »
J. v r 111 quaedicic : Ec
es us pnoir Ion père de leur pardon- Cum iniquif
ner: Ôc pour les excufer en quelque «pucatuseft.
manière , 11 allcguoit leur ignorance, tem dicebac :
ôc qu'ils ne favoient ce qu'ils fai- Pa«>> dimic-
- . ^ T. te îllis i non
lOienC. enim fciunc
quid faciunc.
4. Tare de la croix, 4- Titulus
cructs.
Pilate , pour faire dépit aux Grands- d. scrSpfît
Prêtres ôc aux Dodeurs , fit dretfer ^ *£
un écriteau pour le mettre fur la tus; & pofuic
croix de Jésus au-de(ïus de fa tête. ÇcZ\r,CAt
11 contenoit fon nom , fa patrie, Se tem b. mu-
la caule de fon fupplice en ces ter- -.™ "^* &
mes : Jefus de Nazareth Roi des impofucrunc
/• r t r^ 1 »i ' i » fuper caput
uifs. Le Calvaire n étant éloigne ejL,s caufcnl
de la ville qu'environ de deux ftades , »Pfîus fcriP-
ai l tam : nie elt.
e deux cens cinquante pas, plu- d. Jefus Na-
fieurs Juifs de tous les pais du monde "rf™s Rex
ia , ii- Judarorum.
lurent avec beaucoup de chagrin ce Hune «go cl-
titre écrit pour cela en Hébreu , en tu!,um mulci
r^ o 1 • • 1 ' 1 • Judsorum
Grec & en Latin , qui les renuoir îegerunc :
la fable de tous les peuples , l'op *ui.a ProPe
. . . 1 , r civi:acem e-
probre de toute la terre , Ôc ! 1 honte rat Locus,abi
de l'univers, en les aceufanr d'avoir 5rï iU3 eft
v » Jefus. Eccrac
attache a une croix leur propre K01 , fcripeura Hè-
le Medie que L):eu leur avoit pro- b^£^è>
mis , de qu'ils attendoient depuis
tant de fiécles. Les Grands- Prêtres
qui croient fur le Calvaire , outrés
î5$ Analyse
à. 17. b. m. de cet écriteau , envoyèrent prier Pi-*
late de changer ce Roi des Juijs^ovit
g?ICebpil7co ces mots foi difant le Roi des Juifs.
Ponrificesju- Mais Pilate demeura ferme dans fa
li (ccibcre , première penlce ; ce qui ejt écrit ejt
Rex fumju- écrit , leur dit il fièrement \ & il eut
décorum. Rc- 1 • r J 1 ~
fendit Pila- "eax railons de le concevoir en ces
tus 1 QuoH termes.
^crip i, icnp- ^ 1. e(r , que n'ayant plus rien à
craindre du côté de Tibère ^ il fut
bien aifederendreà Jésus l'honneur
qu'il lui avoit ravi par fon arrêt , en
lui ailurant la qualité que fes fe6ta-
teurs lui avoient donnée.
La 2. eft , que pour fe venger de
la violence que les Juifs lui avoient
faite, il fe fit un plaifir de couvrir toute
la Nation de honte Se d'infamie pour
tous les fiécles à venir , par un mo-
nument éternel qui portoit qu'ils
avoient fait mourir leur propre Roi.
Une j. au-delïus de la portée de
Pilate , eftque , félon les prophéties,
le Roi des Juifs devoit foufTnr la
mort de la croix ,, & qu'ainfi la vraie
caufe du coté de Dieu pourquoi
Jésus étoit attaché à la croix , eft
qu'il étoit réellement le Roi des Juifs.
Aulîi Dieu qui lui avoit infpiré ce
titre , ne permit pas qu'il le chan-
geât.
DE L'EvAtfG. Ch. CXLI11. I59
f/y /• /. Sors fu*
5 . Vttemens au Jort. per veJles% J
Après que les quatre foldats l'eu- Milites er-
1 ri 1 1 eocùmcruci-
rent crucih-e , chacun attachant en fixuTenccum
même tems avec un cloud le pied
ou la main qui lui étoit échue , ils
prirent Tes vêtemens, qui confiftoienr "^mcnSc-
en une robe & en une tunique ; car jus,
il paroît affez que le manteau étoit
demeuré chez Caïphe. Ils couperenr ^^^pa"!
la robe par les coutures en quatre tes , unicui-
> 1 ' • i> / que militi
parties , autant qu ils croient a exe parteni & tu.
cureurs : & comme ces quartiers neni"m,
pouvoient pas erre égaux , pour évi b. mitrentej
ter querelle ils les jetterent au fort , r?rrem ,UPC'
1 1 . .' eis, quisq^uid
pour déterminer la part qui devoit toiicret.
échoir à chacun. Mais pour la tuni- d. Eratau-
que, qui étoit fins couture, & d'un tem /un,ic*
? 1 \t J IL • C » L inconfutilis
ieul tniu depuis le haut jutqu au bas., defuper con-
ils jugèrent bien qu'étant coupée, texca Per lo~
elle fe défiieroit peu à peu , & ne Dîxerunt
feroit d aucun u^^e : fans donc la erS° ad invI*
. D r v ce m : non
couper _, ils jetterent au lort a qui /dndamus e-
des quatre elle appartiendrait. Ce am' Çe(! r?,r"
C 1» \ rr 11 1 ' namurrteilla
rut 1 accomplilîement de la prophe- cujus fit.
tie de David , qui fan dire à Jésus „■££££
d. ns le Pfeaume 11. Ils ont partage dkem : Par-
_ . j -1 c. ■ 1 ,. titi funi vef-
tntreux mes vetemens > & //j o/?r tjim.ma mea
jette ma ro. e au fort. Voilà ce que fibiiôc tnve-
firent les foldars. Et enfuite s'étanc ftcm mcartt
i£o Analyse
c. i 7 d If" a^s * terre ' ^s ^e gardoienr > f°ît â*e
peur que Tes Difciples ne vinrent le
miferunt for- j / l 1 t • i a a
tem. Ec min. détacher de la croix j ou pmtot ce qui
tes ^quidem eft plus apparent, pour empêcher
a. eÏ feden- °iue ^es Juifs n'arrachalfent le titre du
tes fervabanc haut de la croix , tk n'aioutaifent par
cura. • j r • J v
voie de hut de nouveaux outrages a
(es douleurs.
#. BUf- ç% Blafphêmes & inCultes.
pnemiœ ç? ir- J£ J
rifiones.
Cette crainte étoit d'autant mieux
fondée , que les Juifs voyant l'objet
de leur haine dans l'état où ils le
fouhaitoient , eurent encore l'inhu-
manité de lui infulter en plulieurs
Pnrtereun- manières, i. Quelques-uns parlant
biafpkem""1 devant ^a croix ^ le maudilïoient en
banreummo- branlant la tête , & vomilfoient des
fuaC& dlcc" inJuies contre lui. Ils i'appelloienc
tes : vah qui un destructeur du Temple de Dieu ,
détruis cem- ■ / j i >
pium Dci,& °iul pretendoit le réparer en trois
in triiuo il- jours. Aveuglement prodigieux de
cas; lui reprocher le crime même qu ils
commettoient actuellement contre fa
falva trjmet- perfonne ! Ils ajouroient qu'au iieu
ipfum : :ï Fi- , / , ...r ' I t- i i r
Uni Dci es, de ce retablitlement du 1 emple il le
defee ule de faavâr lui-même , & qu'il defeendît
de la croix ^ s'il étoit le Fils de Dieu,
c. Er ftabat comme il s'en étoit vanté, i. Tout
Eu, &£*- ^e peuple prenoit un plaifir fingu-
DE i/EvANG. Ch. CXLI1I. itfl
lier à repaître Tes yeux d'un fpe&acle debant eum;
qui faifoit toute fa joie , il fe mo-
quoit de fa nudité & de fes dou-
leurs.
Les Princes des Prêtres > les Do- a. similiter
deurs de la Loi & les Sénateurs fe * pyn«P"
divertilïoient audi enfemble , en lui Mudentes
reprochant la faulTeté de fes mira- ttoX'û*
cles , & fon impuilTance à f e déli- dicebamiA-
vrer. Ils prenoienc cette impuiifance cit^fdpfam
prétendue pour une conviction de non poteft
FaulTeté de toutes les guérifons & de £}"■ iiCC'
toutes les réfurre&ions qu'il avoic
faites. Qui le croiroit ? Ils lui en
firent même un défi folemnel , Ôc
ils lé piquèrent d'honneur, i. Par fl^xr irrffel
Ja qualité de Koi d liraci qu il s etoit de cruce , ôc
(aillée donner, i. Par le nom de credimus ci :
Chnft choifi de Dieu , qu'il s'étoit fJl^lZ
attribué. 3. Par le titre de Fils de cft chriftui
Dieu qu il avoit pris oc avoue dans B# defcendac
leur Confeil. 4. Par la confiance nunc de cru-
»i • r\- r tri ce , & creda-
qu il a voit en Dieu > comme ion rils , mus .
qu'il ledélivreroit. Ils le défierentpar a. confiait in
tous ces motifs de fe délivrer foi-mê- Deoi jibe;cc
r . . . . nunc, fi vulc,
me , de delcendre de la croix en leur eum} dixkc-
préfence , & d'une manière il vilîbîe S? : Q.u'*
qu ils n en puilent douter , oc ils s or- fum.
frirent de croire en lui a cette con-
dition.
Les foldats toujours infolens lui c.illudebant
\6i Analyse
A.iy.B.ij. firent infulte à leur tour, lorfqu'enlni
offrant du vinaigre , ils lui difoient :
Sus accf- Sit* es U Roi des Juifs ,, fauve - toi
dentes.&ace- toi-même. Mais le détail enferarap-
tum ofFeren- 'IL
tesei;diccn- pOUe plus bas.
tes : fi tu es
Rex Juda:o- t/ .
rum falvum 7- VoltUTS.
re fac.
7. latrones. Les voleurs mêmes qui étoîent
A.idipfum crucifiés à fes cotés , lui faifoient les
autem ce la- h i i> •
noncs qui mêmes reproches & 1 outrageoicnc
IZ'rfuL *T auiîï de paroles : Si fa <u /* Chrift ,
impropera- lui difoit un des deux en le blaiphê-
bamei. rnnnt >fauve-toi de la mort ^ & nous
c. unusau- avec t0l% Le blafphème confiftoit. en
tem de his, r r >» ' 1 #^L n.
qui pende- ce que iuppolant qu il eroit le Chrift
busrbUf°hc* &IeFiIs de Dieu Tout-puitfant ,
mabat eum il l'accufoit de folie ou de foiblefTe
dicens: suu d'efprit , ou de perte de fens & de
es Chriftus , t -» r^
faivum fac mémoire , de s être lame attacher
no$.pfuni> * la croix » & dV ètre demeuré juf-
qu'alors. Comme fi Jésus avoit ea
befoin que ce confeil le fit fouvenir
qu'il avoit entre fes mains le pouvoir
de fe délivrer , ou qu'il lui reprochâe
comme une folie , de ne s'en être pas
fervi.
Refpondcns Mais enfin fon compagnon éclairé
pour ainli dire par les ténèbres qui
commencèrent peu après le crucifie-
ment, & touché des autres prodiges,
DE L'EvAKG.Ch. CXLIII. 163
rentra dans fon devoir. 11 s'oppofa
fermement au blafphèmateur ^ & de
la même fuppofuion que celui - ci
avoir faite que Jefus étoit le Chrift ,
il en infera rout d'un coup que fa
Paflion ôc fa Mort n'étoient ni une
fuite de fon imprudence ou de fa
foibleffe , ni un effet de la haine des
Juifs ; mais un arrêt du Confeil de
Dieu & de l'amour de Je su s. increpabat e-
Quoi donc, lui dit-il en le repre- um,dicen$:
«, , ■£» • Ncque tu tl-
nant : 1 u ne crains non plus Dieu mts Dcum ,
que les autres j en blafphêmant com-
me eux celui qu'ils blafphèment , toi <iU0(1 în e*-
. j * , , r A dem damna-
qui étant engage dans la même co/z- tione es î
damnation que lui > devrois au moins
être plus ftnflble à fes maux par le
fentiment des tiens? 11 eft vrai que
dans cette égalité de fupplice il y a
une différence infinie dans la caufe ; , „„,„„•
' Ec nos qui-
car nous ne recevons ici que la jufte dem juftè j
punition due à nos crimes j au lieu £aa6mis re^p*
qu'il n'a fait aucun mal. Puis s'a- mus : hic ve-
dreiTantà Jésus , comme pour répa- ge^Jhl1 mat
rer les blafphêmes de l'autre : Set- m ,. ,
..'.... r Ecdicebatad
gneur y lui dit-il j Jouvene^-vous de jefum : Do-
7770/ , votre compagnon de croix & minc » m.c"
, r • i. A- B . mento mei ,
de lupplice, lorjque vous aure\ pris cùm veneris
pojfejjion de votre règne. Paroles qui "ùurarcfinum
contiennent, i°. Une charité & un
zèle intrépide , qui prenoit la dé-
i ^4 Analyse
A. 17. b. ij. fen[e de JESUs dans un rems où fes
c. 13. D. i<>. , 1 / l '
ennemis etoient déchaînes contre
lui , & où il étoit abandonné de fes
amis.
i°. Une liberté généreufe envers
l'autre voleur , qu'il reprenoit de fes
hlafphemes. 30. Une humble ck fin-
cere confeiîion de (es crimes à la vue
de tout le monde. 40. Une accepta-
tion volontaire de Ton fupplice en
eiprit de pénitence , qui changeoit
la punition de fes excès en un Sacri-
fice d'expiation 50. La ferme efpé-
rance du pardon qu'il avoiioit ne mé-
riter pas. 6°, La foi de l'innocence
& de la divinité de Jésus , lorfque
tout le monde letraitoit comme un
fcélerat. 70. LJattente du règne fu-
tur de Jésus, dans un tems où il étoit
foulé aux pieds comme un ver de
terre.
Jf.sus récompenfa la foi & la con-
felfion du larron au-delà de fon
tStâfâS* efpérance. 11 lui promit , pour le
djcoribi: ho- fouvenir qu'il lui demandoit , que
erh iapaïï ce jour-la même il feroit avec lui
cUfos dans le Paradis, c'eft-à dire , qu'il
jouiroit avec lui de la gloire & de
la félicité éternelle. Ainfi du haut
de fa croix , comme de fon Tribu-
nal , il fit l'office de Juge entre ces
de l'Evang. Ch.CXLIII. i6"5
deux voleurs. 11 délivra le larron fi-
dèle & pénitent, ôc condamna le blaf-
phêmaceur.
8. Parole de Jésus à fa Mère. s. Je fus ad
Jlfatrcm.
Cependant on vovoit auprès de la De Srabanc
l. T x /r ■ r • a-'tem juxta
croix de Jésus Marie la mère , qui crucem Jefu
en le fuivanc depuis Jéruialem avoic œater eJus >
fait paroirre dans une douleur infi-
nie l'ardeur d'une foi Toujours vive
ôc ardenre , & une fermeté d'ame
inébranlable. Avec elle éroienc Ma- & foror ma-
rie de Cléophas fa Coufine, & Marie trisre.Jus^a-
r > naCleoph*,
A^adCiailie. &MariaMa-
Jesus ayant apperçu auprès de fa jjjjg; erg™
Mère ce Difciple qu'il aimoit il le Jeiusmarrem
donna à fa Mère pour lui tenir lieu ^£**m
de fils en fa place ; & il donna fa quem diiige-
Mere à ce Difciple pour lui fervir maaccr- {^]
de mère , en les déii^nantl'un àM"lier»ecce
i> j r j k * rN\ filius cuus.
1 autre par deux lignes de tête. Des Demie dicic
lors Jean qui étoit ce Difciple bien- difcipulo:ec
/ • i r • x* • xi ce mater tua.
aime, retira chez loi Marie Mère Ecexiiiaho-
de Jésus , & pour exécuter ce tefta- ra «cepkc-
.,,.',. , , . amdifcipulus
ment , il lui rendit tous les devoirs in fua.
&c tous les foins qu'un nls doit à fa
mère. Cet échange d'un coté infini-
ment inégal , & de l'autre extrême-
ment honorable à Jean , fut la jufte
cécompenie de fon courage & de fa
166 Analyse
A. 17. b. iç. iidélité. Car lorfque tous (es con-
' l?' frères fuyoient , ou fe cachoient de
honte & de crainte , lui feul eut la
hardielfe de paroitre auprès de fa
croix avec fa Mère ., de de ne l'a-
bandonner point jufqu'au dernier
foupir.
<». Tenebr*. 9. Ténèbres. Eli. Eli.
£U. Eli.
c. Eratau- Jésus fut crucifié un peu avant mi-
eemferehora ,. « , » , ,
&x«. di 5 oc depuis cette heure la plus
claire du jour , dans un jour du
mois où l'éclipfe du foleil eit impof-
fible , puifque c'étoit le 15. de la
lune , lorfque les deux aftres font en
Ettenebra: oppofition : le foleil néanmoins fut
faaacfuntin obfcurci , comme s'il eût refufé fa
univerfam , ' i • i i L
tsrram ufque lumière pour éclairer le plus norri-
in horamno- D|e fe tous les parricides , & les té-
aam : &obf- , r l , ■ •
curatus eft neores le répandirent par toute la
fo1, terre jufqu'à la 9. heure du jour ,
c'eft-à-dire jufqu'à 3. heures après
midi. Ce fut alors que Jésus s'écria :
hotam nS ^on Dieu j mon Dieu y pourquoi
nam clama- rnave^vous abandonné ! C'elt le
JJJ™ ,Tai! commencement du Pfeaume 2 1 . qu'il
cens: eh,e- prononça de vive voix , pour faire
fabaahamin- voir que c'efl: lui oui y parle dans
•hoc eft , De- tout le refl;e jufqu'à la fin , non dans
us "meus,- ut un langage de parole, mais de chq-
»e l'Evano. Ch. CXLI1I. 167
fes & d'actions , qui eft le langage de <lu!c}. dereIÎ-
. , . , • ° ° quiih me ?
la vente.
Jésus prononça ces mots en Syria-
oue : EU , £7/ lamma fdbaclhani • & Quidam au-
I1 t • C i y J " ^ tem il!ic ftan-
es Juirs étrangers qui n entendoient tes ^ & au-
pas cette langue , crurent qu'il ap- dientes dicc-
pelloit Elie à fonfecours ., 6c le di- V0Cat iik.
rencaffez haut pour être entendus des
foldats.
10. Vinaigre, Mort. t». Ace~
tum. Mors.
Dans le même-tems , Jésus fa- d. roftca
chant que prefque tout étoit accom- fcicns J-fus >
,. i l x • . quia omnia
pli , pour accomplir encore un en- confummaia
droit du même Pfeaume 21. dit qu'il ^unt»"tcon.
r . r .. r * . fummarecur
avoit loir, comme il ne le pouvoit saipcura^i-
autrement dans l'épuifement de fon *1C : sicio>
r q j 11 j c * as er2° crac
iang , ce dans la violence de les aceco pie-
douleurs. Auilî-tôc un des foldats nu?'E
pour donner au Prophète Elie le daaàcurrem
loifir de venir , voulut retarder de unus ex eis *
quelques momens la mort de Jésus
qui s'abailfoit viiiblement , & ayant accepram
rempli de vinaigre une éponge qu'il ipongiamim-
• l 1 i,° L ° 1, plevit aceto ,
mit au bout d une canne ou d une & impofuiç
tige d'hylfope j il courut la lui ap- arundini ,
pliquer à la bouche , au nez, Se aux
temples , pour empêcher fa défail-
lance , ou pour l'en faire revenir.
Les autres foldats. qui ne favoient Tcr6 ' die"
1 68 Analyse
c.xJ.'d. Il] Pas **on defTein 5 craignirent que le
Prophète ne vint pas , tandis que
ce foldat feroit auprès de la croix ,
ou du moins que Jésus ne mourût
avant qu'il fut arrivé. Ils crièrent
donc au foldat qu'il fe retirât de là:
ytàLmusn\nLaiIfe-;i0US vè*r* difoient- ils , fi
veniac Elias Elie viendra le délivrer. Mais lui qui
liberanseum. • i 1 t
A. Ecdabac avolt en vue de prolonger les mo-
eibibere, b. mens de Jésus : Lai (fer-moi faire ,
dicens : Sini- i / j- -i n
te, vidcamus leur repondir-il , nous allons voir
fiyeniatElias fi £['u viendra à fon fecaurs» C'eft
ad deponen- . r 3 . . J J ,
«iumeum. ainh qu on doit arranger les cir-
conftances de cette action , qui ont
été féparées par les Evangéliftes , &
dont chacun a rapporté quelqu'une
pour marquer i'accomphflement
de l'Ecriture touchant la foif de
Jésus.
TD. Cùm er- t n »*i 1 *i
go accepifTec Lorfqu il eut pris le vinaigre, il
Jefusacecum, s'écria que tout étoit confommé,
dixic : Con- , n v j • 1 n L '
fummatum c elt-a-dire , que toutes les Prophe-
t&% ties qui regardoient fa vie ik fa
mort _, 6c tout ce que fon Père lui
avoit commandé de faire & de fouf-
frir étoit accompli : Et aufli tôt fur
le point de mourir , pour faire voir
qu'il mouroit par amour & avec li-
it A. ite- berté , &c non comme les autres , de
rùm ciamar.j défaillance ; i°. Il jetta un grand
m" c. naif : cri , en difant : Mon Père j je re-
mets
de i'Evang. Ch. CXLÎI1. 1 6$
mets mon efprit entre vos mains. 2°. Pater * in ma*~
ii l -te \ i * • nus tuas
Il bailla volontairement la tête, qui commendo
dans les autres mourans tombe de fPiritumrac-
. . ,, - uni.
ion propre poids. 30. H rendit 1 ei- Eih*cdi-
prit _, ou plutôt il le remit entre les censD. inciî-
mains de Ton Père, au lieu que dans ^ad^"^!!
les autres hommes , la mort chatte tuum.
avec violence l'âme de fon corps.
La mort de Jefus ayant été ainii
av2ncée de quelques momens , il
fallut réparer cet endroit par où les
Juifs l'auroient pu calomnier de
fuppofition.
11. Prodiges. Centenier. Femme. .'*:Pro*r
o gia. Lentuno.
Mu liens.
La 1. réparation fe fit par les pro-
diges. Car 1. Pour montrer que Ton
humanité , qui _, comme un voile
couvroir fa divinité , avoit été divi-
fée en deux parties , & que le che-
min du ciel , véritable fanctuaire ,
qui depuis le premier péché avoit
été fermé aux hommes , leur étoic A r..
déformais ouvert ; le voile qui le- vélum rempli
paroit les deux fanduaires du Tem- [ïf"™^.?
1 1 u a s j- a r 1 c s ^
pie rut déi luré depuis le haut juf- à fummo uf-
qu nu bas , ahn qu on ne pur attri- çum.
buercet efret i aucune vertu humaine.
2. L<i terre trembla , comme té & rerramo-
moignant qu'elle ne pouvoit fuppor- taeft;
Tom. IV. H *
170 Analyse
a. î7. b. rj. rer je poids de fOI1 Seieneur , mort
C 15. D. 19. r l . O »
lui une croix.
& petr« 3. Les rochers Te fendirent com-
iciilaj lunt ; J j 1 r 1 /
me de douleur , pour fuppleer au
défaut de celle des Juifs, dont les
cœurs écoient plus durs & plus in-
icnhbles que les rochers.
&monumen- . Les tombeaux s'ouvrirent pour
ta aperça r ■ ■ , , , r
fuutj raire voir que la mort des hommes
éroïc détruite par la mott de Je fus ,
&: que cette mort étoit le principe
de leur vie. Ils ne s'ouvrirent pas
& mulracor- en vain : car après fa réfurrection
pora fantto- 1 ,- r • L t 1 1
rum , qui piulieurs saints dont les corps dor-
dormieratu , moient encore dans la poufliere, fe
furrexerunt. 1 t r V» • 1
le exeuntes relevèrent par une reiurrechon gio-
dc mono- neufe Se femblable à celle de Je-
mcutis poil r r . .
refurreftio- tos \ u en iortant de leurs tom-
nem ejus , beaux ils entrèrent dans la ville fain-
fanétamcivi- te ( c elt ainii que iaint Matthieu
taccm,&ap- nomme Jérufalem après fa Paillon )
parucpjnt ir 1 r
roulds. 8c apparurent a piuueurs.
La II. réparation de l'avance de la
mort , le fit par un commencement
de pénitence , que les prodiges catir
ferent dans plusieurs perlonnes. 1.
Dans le Centemer. 1. Dans les foi-
dats. -$. Dans les Juifs.
B. Vi4cnsau- 1. Le Centemer confidérant tout
Cenco- ce qU[ çe pa{f0ir & ful-cout ce grand
no,<pii ex .11- . 1 3 r >
vcifo itabac , cri qu il. avoir jette en mourants
©i l'Evang. CK. CXLÎÎÎ. 171
contre l'ordinaire de tous les cruci- £*r , c. qaod
r , 11 j 1 r factura fue-
fies, auxquels la perte de leur iang rat t b. quia
ote peu à peu la voix de la force , flc . c,a.m*ns
juiqu a ce qu ils rendent 1 ame de gîorificavic
pure défaillance: cet ofïïce , dis-ie , Deum * <U-
* j. , • r< .. ' , cens : Vcrc
rendit gloire a Uieu , en avouant de- hk homo ju-
vant tour le monde que cet homme SuV2,rI B-
ctoit vraiment jutte , qu il etoitven- moFiiiusDei
rablement le Fils de Dieu. €rar'
2. Les cent foldats qui fervoient a. Et qur
fous lui pour prêter main forte à c''^j:e™nt;
.1 L cuitoaieiues
l'exécution , Ôc pour garder Jésus , Jefum , vifo
voyant le tremblement de terre Se &hfsq™rfic:
le refte des prodiges , furent frappés kanc, rimue-
une horrible crainte , & avoue- aicenres: Ve-
rent qu'il étoit vraiment le Fils de re f«Hus d«
Dieu. ""i,ie-
3. Toute cette foule de Juifs ( on c Etom-
ne parle pas des Grands-Prêtres ) n,ï curba 5S"
qui alnftcient a ce trille Spectacle, mui aderant
que la haine , ou lacuriofité , oulafd CpaaÀica,'
*, • 1 r • / Jummud,&
réputation de Jésus y avoient attires, videbanequ*
de persécuteurs devinrent pénitens ; emi^ntes Pcc-
car effrayes par tant dJévenemenspro- tora fua re-
ligieux , ils s'en retournoient en fe sraban^au-
frappant la poitrine de douleur & de rem omnes
regret noti cjus à
icgieu. ^ longe, &mu-
Ceuxquiétoient de la connoifian- lieres qui fe-
^ J 1 o ! r • p curae cum e-
ce de Jésus , oc les femmes qui 1 a- raru à Gaji>p
voient fuivi depuis la Galilée , étoient Jf a » hic v»-
Li • il- dentés : B. in-
i qui regardoienc de loin tout ceterqU
Hij
ias eiar
i7i Analyse
a. ij.ft. iç. nUi fe patToit. ( Nous avons vu que
c. 15. d. 19. 1 ;. X/f v , . j j 1
w . w Marie la Mère etoit au pied de la
Maria Mag- ,. Jt ..
daiene , & croix. ) Entre elles etoient Marie
Maria Jacobi Maçdelaine , Marie Mère de Jacques
Unions , & ^ . o c l î J J
jofcph ma- le Mineur , & Salome mère des deux
■cr,& saiome £j j Zebedée.lefquelles le fuivoienc
A- mater fi- > t
liorumZ:be- dans les millions , loriqu il ecoit en
*?**■ Galilée , & contribuoient de leur
b. Et cùm bien à Ion entretien. Il y en avoir
dGTet inGaii- encore plufieurs autres qui étoienc
jur cum, ôc venues avec lui a Jeruialem , oc donc
jpiiùihabant \es noms ne fout pas venus jufqu'à
ci : &: aliaî * ., •*
mulra , quaî IIOUS,
iîmul cum eo
afeenderant ^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^
j'erofoly- ■"—■—• . .
ma m.
cap.cxliv. CHAPITRE CXL1V.
A. 17. B. if. 1
c. 13. b. xp. Côté perce. Sépulture.
Latus. Se-
r . Juâ*i
1. Requête des Juifs.
"dT" T a 1VL réParâtion fe fir Par !'in-
dxi' Ip ergô Lj formation du Juge. Ce jour- M
(quoniampa- ^toit |a veille & la préparation du
raiceveerat ) , c . , V I i>>. • J r»*
ut non rema- grand Sabbat , oa la tête de Paque
nerentincru- avojt fe£ transférée ; deux circon-
fabbato(erac ftances qui le rendoient le plus cèle-
*Ét--î$?b kre & *e P*as ^aint ^e toute l'année.
bat». J Elles obligèrent les Grands-Prêtres
^ ne fourTrir pas que les corps foit
juorcs o\x vivans derneuraiTenc à 1$
de i/Evàng. Ch. CXLIV. 173
croix jufqu'au jour du Sabbat donc la
fête commençoic après le coucher du
foleii.
1. De peur que la fainteté du
jour ne fût fouillée par le funefte
fpectacle de trois corps pendus. 2. De
peur que le jour du Sabbat ne hic
violé par le travail de ceux qui les
dttacheroient de la croix , 6c leur
tendroient tous les devoirs de la fé-
puirure. 5. Pour obéir au précepte
du Deucéronome,c. 11. 22. qui por-
te que les corps des criminels ne de-
meureront point la nuit à la croix :
mais qu'ils feront enfevelis le jour
même avant que le foleii fe cou-
che.
Ils vinrent donc prier Pilate de per- rogaVertta*
mettre qu'on leur rompit les jambes Sî^itiî
pour avancer leur mort , & qu'on eorumcmra,
les otat de la , ce qu il leur accorda. :ur#
Il étoit déjà environ la dixième heu-
re du jour , qui répond à nos quatre
heures du foir.
1. Jofeph (TArimathie. 3. Jofeph al
Arïmathéta.
Peu après qu'ils furent fortis d'à- Pofthxcau-
vec lui , il vint un noble Sénateur & cum }2Lm
nommé Jofeph . homme jufte de de fcrôcflicfac
dt • / 1 1 • 1 » 1 > * tum , quia
e probité, de la ville d Arima- Crat paraW
H iij
174 Analyse
' i7- b. if. thiedans la Tribu de Juda , qni n'a-
X3 j a v°ic point confenti à leur confpira-
yc , quodefl r. K
ante fabba- tion ni a leur entreprile contre J es us,
tumA. venir mals c,uj attendoit comme beaucoup
quidam ho- i r» i r^- i
Eiodives, c. d autres le Royaume de Dieu. Il en-
fe^B. nol tra aiment chez Pilate , de il lui
biiisdecurio, demanda le corps de J e s u s , dont
fc k!ftu?hic ^ ^ro*r Difciple j quoique la crainte
non confen- des Juifs l'eût empêché jufqu'alors
hoT &°aa|: d'f n feire profeffion ouverte. Pilace
bus eorum -, s'étonna qu'il fût déjà mort , parce
th*a ^ïvka- °lue *e ûipplice lent de la croix laif-
te juda: , qui foit quelquefois vivre deux jours ceux
expeftabat &c > • 1_ ' r* >
ipfe regnam C1UI 7 etoienr attaches. Pour s en în-
*>«- former il rit venir le Centenier de la
Hic acceflit» r iT A • ;/ • i
B.&audaûer rortereiie Antonia 3 qui etoit proche.
innoivit ad Afin de ne rien accorder qui fûteon-
co qùia efïci ae  exécution de 1 Arrêt , il lui de-
difcipulusjc- manda ii Jésus étoit déjà mort ; &c
àuuin prop- i ayant îu , il donna ion corps a Jo-
ter mecum fçph,
JudcEorumB. *
petiit corpus
Jefu. Pilacus aucem mirabatur Ci jam obiifTet : & acoerfito cen-
turione y interrogavit eum fi jam mortuus elfet. Ec cura coguo-
jriflcc à cencuriojiL-, donavic corpus Jofeph.
iral:laurh 3 • Ouverture du coté.
La IV. réparation fe fit par le coup
de lance qu'un foldat donna à Jésus
Vencrunt après la mort. Les foldats exécuteurs
r;:!rai!iq": revinrent fur le Calvaire fuivis des
'de l'Evang. Ch. CXLIV. 175
Juifs ; 8c ayant couché par terre les <*cm £r'Z{'
croix des deux larrons, us rompirent akerius qui
d'abord les jambes au premier , qui crodfiaw.eft
, . ' 1 • 1 1 j cumeo;
etoit apparemment celui de ladroite,
8c enfuite à l'autre crucifié- 8c ils jet-
terent 8c les corps 8c les croix dans la
vallée des corps morts.
Quand ils vinrent à Jésus, comme aci jefumau.
ils le trouvèrent déjà mort , ils ne «m cùm re-
* • • 1 niflent , ne
lui rompirent point les jambes , ce Viderunteuni
qui eut été une exécution inutile. ^B»mortuum
> x • i 1 • »*f » * non frege-
Mais dans la crainte qu 11 n y eut ri,ntejUSCru-
encore quelque refte de vie caché, un ra : fed u,nus
/» t 1 \ >r \ • i j militam lan-
loldat dchanc lui donna un coup de Ceà latuseju»
lance dans le coeur, 8c par confé- ap««"j
quent dans le côté gauche , ahn de
mettre fa mort hors de doute. Mais
ils n'eurent point le loifir de jetter
{qi\ facté corps dans la vallée , parce
qu'avant qu'ils euifent achevé leur
office fur les deux voleurs , Jofeph
d'-Arimathie arriva fur îe lieu avec les
ordres du Gouverneur.
Audi-tôt que le coté de Jefus fut & continua
ouvert , il en fortit deux ruiffeaux «»vicfangm$
trcs-diltincls , Pun de fang, 8c l'autre
d'eau.
11 y eut «en cela , 1. Un miracle
inoiii , puifque le fang fe gelé d'a-
bord dans les corps morts , 8c que
e humeur , qui ejl renfermée dans-
H iv
Ij6 A N A L Y SE
e! Il, Dkîli ^ Pericarde s n'a rien ni dans la cott-
" leur ni dans te goût > qui reflTembiei
de l'eau naturelle.
i. Il y eut un myftere de reli-
gion. L'eau marquent le Baptême qui
nous régénère pour la vie de la gra-
ce^ le fang repréfentoit l'Euchariltie,
qui nourrit la vie nouvelle que nous
avons reçue dans le Baptême : &c
c'eft en ce fens que comme Eve eft
fortie du côté d'Adam 3 TEglife a été
tirée du côté percé de Jésus-Christ^,
parce que la matière des deux plus
grands Sacremens , dont l'un la for-
me , & l'autre la nourrit , en eft for-
tie par un coup de lance. Audi pour
confirmer le myftere , faint Jean
s'attache à prouver le fait du mira-
cle.
Il l'appuie , i. Sur Ton témoigna-
it qui vîdit oe, H vit donner le coup de lance y
perhibuit : se il en vit couler le lang oc 1 eau , 6c
▼crumcfttef- jj déclare qu'il ne témoigne que ce
j.as. qu il a vu } & qu ainfi Ion témoi-
gnage eft véritable. Mais comme
on lui pouvoit objecter qu'il avoic
cru voir ce qu'il ne voyoit point , il
répond qu'il fait que fon témoi-
itiilcfcit gnage eft vrai , & digne d'une en-
^uia vera di- tiere créance , fondée fur ce qu'étant
«cdatis. près de la croix , il etoit a portée de
■
t)E L'EvANG.Ch. CXLlV. I77
voir tout ce qui fe paiToit dans la per-
sonne de Jésus.
2. Il l'appuie fur l'Ecriture. Il re- Fa£la ruHt
marque que ces deux circonftances , rt»imh«c,û|
je dis de n avoir point eu les jambes pier£tur ! 0s
rompues, & d'avoir eu le coté ou- tfon comhtf-
vert d'un coup de lance, arrivèrent nuetls ex eo'
au corps de Jésus pour accomplir
deux oracles de l'Ecriture 5 l'un de
l'Exode, c. 11.46. qui porte, qu'on
ne brifera point les os de l'Agneau
Pafchal, pour figurer que les os der
Jésus vrai Agneau de Dieu , ne fes-
toient point rompus à la croix. L'au-
tre du Prophète Zacharie, c. 12. 10. ,Et irerùm'
/ i- ' 1 1 -r ri' alia Scriptura
qui prédit que les Juirsconlidereront dieu : vide-
attentivement celui qu'ils auront per- buntinquem'
, ,., , 1 f l transhxe-
ce , pour voir s il n y paroitra aucun rUm.'
figne de vie.-
4. Nicomede. Sépulture. 4. tiïcodcï
mus. Sepul*
Le V, moyen de reflource fut la
fépulture. Lorfque les loldats eurent D Venitr
£aic leur devoir , Jofeph qui avoit ergo(jofeph)
acheté un linceul blanc de fin lin , J^SSE^*
vint le premier , 8c en détacha de la venitautem'
croix le corps de J e s u s. Nicodeme & Nkodc--
r • %:t- 1 • ' mus, quive--
vintenluite : ce JNicodeme qui etoit nCrat ac{ Je--
venu autrefois vifiter J e su s pendant fum rioJ*®'
k, r T l r primiim , fe-^
•mue , lorique Jésus commença Ion reas mixtu--
liv
17S Analyse
C. i3. D. i?.
B- *»■ miniftere;& il apporta environcent
livres de myrrhe ôc d'aloës mêlés en-
ram mkikx fembie pour l'embaumer. Tous deux
ôc aloes.cuia- i ■ T
n în.ias ccn- ayant pris le corps de Jésus ,
tum , 13 j0- l'enveloppèrent dans des linceuls ,
Wïcatas fin- couvrirent ion vilage d un linge , 8c
doncm ; éc après qu'ils l'eurent lié par tout avec
un», invol- dès bandelettes, ils le plongèrent
yu îiudonc dans des liqueurs aromatiques, en la
A, munda , . i t • r l * /
eh acccpe- manière que les Juifs ont accoutume
runc er^o d'enfevelir les morts.
corpus Jefu v , .. £
& lipvetunr Vtt% du lieu ou Jésus rut crucifie ,
iJiud linteis J0feph avoit un jardin où il avoic
cum. aroma- r • r ,, i , ; r, ,
tibus v fient fait tailler dans le roc un lepulcre en
moseft judœ- forme Je gratte voûtée : on y en-
erataucemia troit par une autre première grotte
cTfixuf1 cT; <$*' llîi fervoitde veftibule. Comme
horcus se in c'étoit alors le foir du jour avant le
ÏSZFZ. Sabbat > I11' aHoit commencer au
Tum in quo coucher du foleil , Jofeph & Nico-
£££££ deme & hâterent de mettte J Es u s
erar, dans ce monument , qui fe trouva
ptberCpa°af«- heureufementtout proche , & où au-
▼.en. Judaro- cun n'avoir encore été mis. Ils en
mm , quia c i> ' i
>uxtai erax armèrent 1 entrée par une grande
monumen- pierre qu'ils y roulèrent , & ils fe re-
tum, A. Jo- f- rt "? J
fepffpoÇaitiU tirèrent;.
iud in monii- Cependant les femmes qui étoienc
mento. fuo- j /~> ri ' t
bovo , qu©d venues de Galilée avec Jésus , entre
«xciderac in lefquelles étoit Marie Magdelaine,&:
l^tra. Et ad- x K J Ju T t J ' •
«•lmûùia Marie mere.de Joleph , etoient au.:-
de l'Evang. Ch. CXLVî. 179
près du fépuicre ; & lorfque Jofeph ™5™m **
e xt- 1 r r • 11 oftiummoniN-
ce JNicodeme en furent iortis , elles menti, &a-
y entrèrent pourconfidérer en quelle bm;. e,Et e:
Jr .. r . j rat aies paraf-
lituarion ils avoient mis le corps de eeves, &fab-
jEsus^aflnque revenant de grand ^«.sibl
matin l'embaumer de nouveau, elles fecut* autem
pufTent fe reconnoître dans les téne- SÏÏS^
bres 5 & s'acquitter de ce pieux offi- rant de Gali-
ce fans erreur & fans embarras. Elles Genres fôiur*.
s'en retournèrent préparer de bonne fepuichrum r
heure les aromates & les parfums ubi^ponere-
dont elles avoient befoin j & elles *«« , c. se
r lit • " • / quemadmo-
ne hrent rien le lendemain qui etoit jumpofitum-
le Sabbat , félon que la loi î'ordon- eratcorpuseT
01 •! jus. Er rêver»
n voit dans tout cet appareil [entes para-
tant de convictions de la vérité de la verunt aro-
1 » 1 t t mata Se un-
mort de Jésus, que les Juifs , tout gUenra : ôc
incrédules qu'ils étoient, n'ont jamais Jabbato qui-
1 l , ' demuluerunt:
pu la mettre en doute. fecundùm
Ici commencent les preuves de la niandatum?
Réfurrection de Jésus : Et avant que
de quitter fa fépulture , nous comp-
ter- ns pour lai. fa ferme &c !a ftru-
cture de (on tombeau. Dieu voulut
1. qu'il fut taillé d:ns le roc, afin
qu'on ne pût foupçonner que pour
enlever Con corps , on avoir fappé
les fondemens , ou percé les mu-
railles . ju découvert fe toit, routes
chofes humainement in pefTIbles, 2,
Qu'il n'eût encore point feevi , ÔC
a vj.
1 8 o Analyse
a. 17. b. iy;. que le corpS de JESus y fdc mis le
premier. Car enhn , diroient les
Juifs, qui nous affinera que c'efl
Jtsusqui eft: refTufcité , & non pas
quelqu'un de ceux qui étoient enfe-
velis avant lui ? La foi de fa réfur-
rection fe perd , (i on la peur con-
fondre avec celle de quelqu'autre.
Mais 11 Jésus eft le premier de le
feul qu'on y ait mis , il n'y a que
lui qui en foit forri par la réfur>
re&ion,.
La II. Preuve fe tire des précau>
rions extraordinaires que prirent les
Grands-Prêtres & les Pharifiens-
pour garder fon corps. Jésus avoit
prédit tant de fois fa réfurrection &
{es Difciples , & en avoit parlé eit
rant d'autres rencontres, quelebruk
en fu t porte je ne fçai comment juf-
ques a leurs oreilles. Et par un mér
nagement fecret de la Providence ,
ils s'en fouvinrent, lorfque les Dif-
ciples l'àvoient oublié. Ils jugèrent,
en fages politiques que cer avis n'é-
a. Altéra. to^ point à négliger. Le lendemain*
autem die , qUi étoit le jour du Sabbat , ils fu—
llufcyln ,JÇtl> cJiez. Pilate 5. & lui repréfenie*-
de l'Evàng. Ch. CXLIV. 1*1
rent qu'ils s'étoient fou .?nus que ce coaTcnerunc
r, i À , n ' Principes Sa--
ieducteur étant encore vivant, s etoit cerdomm se
vanté qu'il reiïufciteroit trois jours £!""**■ î*
y /. ^ *i 1 • « Piiatum , di-
aprés la mort, v^u ils le pnoient cences : Do>
donc de faire garder Ion fépulcre 9â°e » recor~
•T'Nirj -r • > dan fumus *
juiqu a lahn du troiiieme jour , ou quiafedudor
s'étendoit fa promette, & au- delà lhUe &** *&
duquel fa réfurreétion tardive nefe- pofttres-die»
roit plus recevable ; parce qu'alors refurgam; ju-
la raullete du terme leroit un pre- diri iepui-
jugé de la fauflété de la réfurre- f^SmS-
Ction. ùuol:
En cela ils avoient en vue, i.Une
raifon fort folide. 2. Un prétexte ridi-
cule , quoique d'une apparence allez
fpécieufe.
1 . La raifon étoit qu'ils craignoient
extrêmement l'accompliiTement de
cette prédiction. Les prodiges qui
avoient paru à fa mort , & fur-touc
Fouverture des rombeaux étoientdes
préludes de la réfurrection de Jésus.
Il eft vrai qu'ils ne fe repréfentoienc
qu'une réfurrection mortelle , com-
me étoit celle de Lazare , dont ils
avoient été témoins. Mais ce fut
aufli pour l'empêcher , ou du moins
pour en étouffer les fuites , qu'ils
demandèrent des gardes à Pilate ^ &r
qu'ils les chargèrent de tuer Jésus ,
$c de le repouller dans fon caveai*
1S1 Analyse
a. 27 d, ïf. en cas qu'il en voulût forcir. S'ils ont
rorme ce deiiein fur Lazare reliulcite,,
j^arce qu'il croit une occafion à plu-
iïeurs de croire en Jésus ; comment
ne l'auroient-ils pas fait fur Jésus
même, avec lequel toute fa Religion
demeureroit éteinte.
ffe forte ye- 2. Le prétexte de cette garde croie
iiianc diici- r r<,< r * \ 1 • 1
puiicjus, & queieslJiicipiesviendroieiitpena«.nc
furemur e- ja nujc dérober fon corps , & nu-
um', & di- ,,. . . . f : r
cane piebi : bueroient au peuble qu il etoit reii ut—
surrexk à clZfL . £rreur pîus daneeteufe que la
eric noviflî- première. Mais rien n ctoit plus
muserrorpe- £rivo{e que ce prétexte- Ç>U?l lllté-
ret auroient pris les Disciples dans
la gloire & l'immortalité de ion nom,
eux qui auroient été trompés com-
me les autres par la faillie prophétie
de fa réfurrection ? Quel plaifir au-
roient pris des gens comme eux ,
fans lettres , fans autorité , fans puif-
fance _, à tromper leur nation par un
menfonge en faveur d'un homme
mort , dont ils n'auroient eu plus
rien à efpérer ; puifque la promeffe
de la réfurrection fe trouvant fauife ,
Toutes les autres tomboient néceflfai-
rement par terre.
Cependant Pilatequi nepenétroit
pas dans toutes leurs vues , leur ac-
corda tout ce qu'ils demandoient ?
de l'Evàng. CL CXLIV. i S 5
en leur faifatit fentir qu'il ne fe mê-
loit pas volontiers de leurs affaires :
Vous ave% , leur dit-il , des foldats AirilîisPi-
pour le garder , les mêmes qui vous Iarus : HaijT
ont fervi à le crucifier \ Alle-^ , gar- diao ,
derfon fépulcre comme vous Venten- itc,cuftodite
j il ficut feins.
de%. Ils ammenerent avec eux ces
témoins futurs de fa réfurrection , nu
aurem
qui ne dévoient pas leur erre lufpects. a^eunres mu-
3 .. . f. r meruat fe-
11 y a heu de croire qu ils viuterent Fukhtum ,
le fépulcre , &" reconnurent l'état où
étoit le corps de Jésus. Enfuire ayant
appliqué de nouveau la pierre à. l'en-
trée , ils y oppoferentlefceauinvio- fignanre$ la.
lable de l'Empire , & ils y lailTerent pkfcm cu*
les foldats qui firent un corps de cuko us*
garde du veftibtiîe. Ils ne pouvoient
prendre des mefures plus juftes ôc
plus fures pour metrre la réfurre-
£Hon de Jésus ho--sde tout foupçon
de fautfeté, pour s'orer à eux-mêmes
!k aux autres tout prétexte de la ca-
lomnier , & pour pi égarer tous les
efprits raifonnables à la croire. Cette
II. raifon s'achèvera au Chapitre,
fuivant.
<$>
184 Analyse
cap. gklv. CHAPITRE CXLV.
A. 18 B. 16.
c _■+ d. lo. Résurrection.
Refurrcttïo.
1. Voyage des femmes au fépulcre.-
L
A III. preuve de la Réfurrec-
rion de Jésus fe tire de la vifite
que des femmes pieufes firent de fou
A.i8.vef- fépulcre. Après que toute cette fe-
yere autem maine fut paflTée ( c'eft: le fens de-
fabbati,qu2B r c 1 1 • \ 1 /* I
^ucefcit in vejpere autem ùabbati ) lorlque le
prima fabba- premier jour de la femaine fuivante
ri, B. Maria r . / ' • v r^. »
Magdaiene , qui répond a notre Dimanche, com-
ôc Maria &c mençoit à luire , Marie Maçdelainev
Jacobi & .■* *-?
Saiome cme- Marie mère de Jacques le mineur , &T
runc aroma- Salomc mère des deux fils de Zebe-
ra , ur ve- , , , , 1 r
niences iinge- dee partirent de grand matin , lorl-
renr jcfum. qU»jj fa i fo î t encore obfcur ,pour aller
Et valde ma- A 1 t
ne una fabba- embaumer le corps de Jésus , avec
^fUm a'*lhuc ^es p21^1115 qu'elles avoient préparés
reucbrs ef- dès-le iok du Vendredi , cV elles ar-
fent , b. ve- rjv€reQC au fépulcre lorfque le foieil
niunc ailmo- ,...,, f r ■ rr
numencum croit déjà levé. Voye-^la DiJJertation
ercojamfole, Y Y Y l/'T T
C. portantes A AA *121' , . . , ,
qu« parave- Plufietus grands obitacles s oppo-
rant atoma- f0ienc a [eur pieufe entreprife. Le i.
étoit la pierre qaL fermoit l'entrée
du fépulcre , Ôc que des femme^n^
de l'Evang. Ch. CXLV. i $$
pouvoient pas remuer de fa place >
beaucoup moinsla détacher du roc ,
où elle tenoit par des crampons de
fer. Elles s'en ïbuvinrent en chemin, B. Ec dic<r-
& fedemandoienc les unes aux au- fcancadinvi-
• . a i • ji cem : Quis
très qui leur oteroit la pierre de la reVoivec no-
porte du fépulcre. Lé 2. étoitle feau bis Jappent
*i 1>T- • r , • /-/ T' ab oiho nrcy
de 1 Empire qu on y avoit appoie. ht numeau*
le 3. le corps-de-garde qu'on avoit
poftédans le veftibule : obftaclesplus
invincibles encore que la péfanteur
de la pierre. Elles n'avoient rien fçu
de tous ces changemens , qui leur
eufiTenc 6té la penfée d'aller feule-
ment vifiter le fépulcre / Dieu le
voulut ainli , pour leur faire porter
les premières nouvelles de la Réfur-
redHondefon Fils.
Il leur envoya du ciel un Ange ,
qui leur applanit toutes ces difficul-
tés. Il annonça fa venue par un a. Ececce
grand tremblement de terre , qui re- ""* motus
*> ... , , • t • radius eft ma-
veilla ceux des gardes quidormoient; ^nus. Ange-
étant entré dans le veftibule fans au- jusr D,omT
r A 1 r J Pc dclccndic de
cun reipect pour le iceau de 1 Em- cœio-, & ac-
pire , il arracha la pierre & les cr*m- cede,ns u v°l"
r » . r vie UriJem,
pons qui 1 attachoient au roc _, & les ^.fedebacfa-
jetta hors du veftibule avec un fra- ptl *um'
cas effroyable. Son vifage brillanc Erataovm
comme un éclair qui remplit celieu a.rPcd^s. e'u*
oblcur d une lumière lurprenante , & veftimea-
i86 Analyse
A. 18. B. 16. fon habillement blanc comme la nei-
C. 14. D. zo. , , r
ge _, & toute la repreientation terri-
tumeiusficuc 11 j^ r C C \
nix : prs d- ^Q de ia perioiine , rrappa les gar-
more autem des d'une iî grande épouvante qu'ils
ejus exterrici r ' \ r 1
func eufto- en penierent mourir j larra)eur les
des , ôc faai chaffa loin de ce pofte , pour en laif-
lunt velue ri> 'IL r ' C
œortui. 1er 1 entrée libre aux iaintes temmes.
Mais l'Ange épargna leur vie, i. Afin
qu'ils puflTent témoigner ce qu'ils
avoient vu. 2. Parce que leur more
eût donné lieu aux Juifs de dire que
lesDifciples de Jésus avoient furpris
les gardes endormis , & qu'après les
avoir tués ils avoient enlevé fon
corps fans trouver aucune réfiftance.
Pour leur donner néanmoins le loifir
de reconnoître l'Auteur de leur dé-
route , ôc d'en décharger les Difci-
ples innocens ; il s'aflit fur la pierre ,
& s'expofa fièrement à leurs regards
avec cet air terrible qui les avoit
effrayés.
b. itrefpi- Cependant lesfemmesqui s'appro-
cientes (mu- choient toujours virent de loin que la
hères ) vide- . • ' , / a / , r , i r
mut c. lapi- pierre avoit ete ot.ee de la place , ians
4em révolu- appercevoir aucun qU| fût aiîlS defïllS.
tum à monu- ^f .1 i-rri
mento : b. e- C eft que les Elprits bien differens
magnu?UvPaPl- ^eS corPs ne & *om W0K 9U*^ CetlX
de: qu'ils veulent. Au(îî cette vifion les
&introeuntes eût effrayées jufqu'à leur faire quit-
mmonumen- . J -r ni
tum, c. non ter leur entreprile. Lues entrèrent
de l'Evang. Ch. CXLV. 187
jufques dans la grotte du fépulcre ,
& regardant de toutes parts j elles
n'y trouvèrent point le corps du Sei-
gneur Jésus.
Aufli-tôt Marie Magdelaine, ayant
averti (es compagnes de (on derfein ,
courut porter cette nouvelle à Simon
Pierre & à cet autre Difciple que
Jésus aimoit , ôc qui en a écrit lJhi-
floire. Elle leur dit qu'on avoit em-
porté le Seigneur hors du fépulcre ,
& qu'elles ne favoient où l'on l'a-
voit mis.
invenerunr
corpus Doirw-
ni Jefu. D.
Cucurrirerg©
Maria Mag-
dalenet&c ve-
nir, ad Simo-
nemPetrum,
& ad alium
difcipulum ,
quemamabac
Jefus -, & di-
cit illis : Tu-
Ierunr Domi-
num de mo-
numcnto , 5c
nefcimus ubi
pofuerunt c-
um.
2. Courfe de Pierre & de Jean.
Pierre partit avec cet autre Difci-
ple pour voir de leurs yeux ce qui
ctoit arrivé , & tous deux allèrent
au fépulcre , en courant enfemble \
Jean néanmoins ^romme le plus jeu-
ne courut plus vite que Pierre, &
arriva le premier. L'entrée étant fort
baffe, il fe bai (Ta & vit les linceuls
par terre ', mais la crainte l'empecha
d'entrer , &c il fait cet aveu fans doute
pour s'humilier , Se pour donner à
Pierre tout l'honneur de cette action
généreufe.
Car Simon Pierre qui le fuivoit
étant arrivé , entra hardiment dans
2 . Curfus
Pétri & Joan-
nis.
Exiit ergo
Petrus , & il-
lealiusDifci-
pulus , & vc-
nerunt ad
monumen-
tum. Curre-
bant au rem
duo fîmul, ôc
ille alius dif-
cipului pr«e-
cucurrir ci-
tiùs Petro, 6c
venir primus
adrnonumen-
runi. Er cura
fe inclin? (Ter,
vidic polira
linceamina ,
non tamen
inrroivir. Ve-
nir ergo Si-
mon Pcuui
1 88 Analyse
a. i8. b. 16. Ja taverne j il vit comme lui les
' linceuls par terre , & enfuite le fuaire
inmonumen- qui n'étoit pas avec les linceuls, mais
tum, & vidic i* / t / j
linteamina P*ie ou roule proprement dans un
pofita,&fu- lieu à part. Alors Jean devenu plus
fuerac fuper nardi par 1 exemple de Pierre, entra
capuc ejus , aufli dans la caverne du fépulcEe ; il
noncum lin- \- r c *i
tcaminibus V1C toutes ces choies : ce comme ils
poficum,fed ne favoient pas encore que félon
feparatim in- i>E. i j • rr r • j>
Yolutum in 1 Ecriture il devoitretiuiciter d encre
unumiocum. les morts , il crut auïîi-bien que Ton
Tuncergoin- ^, n r , , » J, ,
troivic & iiic Collègue , lelon le rapport de Magde*
difdpulus , laine qu'il avoit été dérobé , quoi-
qui venera: . 1 , a i ,-p
primus ad que les apparences leur prechallcnc
monumen- ie contraire ; n'y ayant aucune appa-
tum;& vidit, , J. J . ,. ,,r r
& credidit. rence que des voleurs j au heu d em-
Nondum e- porter le corps comme ils Tauroienc
mm fciebant r / r r rr rt i
scripturam , trouve , le ruiient aminés dans un
qma oportc- {[ çrand péril à le développer de {es
bat eum a , & , , r n , r , • rr.
monuis re- bandelettes & de les linceuls j de les
furgere. féparer du fuaire, & de plier le fuai-
re à part , tout cela fans craindre
Abierunr d'être pris fur le fait. Ces deux Dif-
ergo iterum ciples s'en retournèrent chez eux, Se
«difcipuli ad r .
femctipfos : Pierre toujours perluade du larcin ,
PerrS fe^um ne Pouv°ic a^ez s'étonner comment
mirans quod on avoit pu exécuter une entreprife
fr*. lue- fi ^^
DE l "Ev ANC Ch. CXLV. I 8 9
3 . Première apparition de Je/us à ^ànuTa^i
Masdelaine, ft MagdaU-
Marie ne les fuivit pas , non plus autfm *£br£
que les autres femmes qui y croient ad monu«
demeurées j mais elles forrirent avec S^Jïïl ^
eux de la caverne , Ôc Marie fondoic
en larmes fans favoir quelle réfolu-
tion prendre. Plus impatiente que
les autres, elle rentra dans le velli-
bule, <x en pleurant toujours ame- fleret, incii-
rement , elle fe pencha pour voir navic fc > Sc
de nouveau ce qu elle avon déjà lum- fnonumen_ .
famment vu _, il quelque choie pou- tum :
voit fuffire à une amante , pour voir, & viHit duos
dis-je , fi elle n'appercevroir point ffi&lffi
ce qu'elle cherchoit. Alors elle vit unûm ad ca-
deux Anges vêtus de blanc, aflis l'un ff^H
a la tête j &c l'autre aux pieds , fur pofîrum Vue-
i'eftrade de pierre creufée en forr^/ScuntS
me de cercueil où le corps de Jésus »'1i ■ Muher,
/ / ni J J quid ploras *
avoir ete mis. Ils lui demandèrent J>jCit eiS,
pourquoi elle pleuroit : parce que, QU1» tu!e*
/ i- m i / r • funr Domi-
repondit-elle , on a enlevé mon bei- num meum
gheur , Se que je ne feai où on l'a & nefeioubi
p , n *, ' J , i , rofuerunc c-
porre. Sans leur tenir plus de Hn- Um. HcTccùm
cage, elle les lai (Ta là , toute polTé- toifTet .cou.
J' JJ 1» l- » n i l • o vcrfa eft tc*.
dee de l objer qu elle cherchent , ce ttorium.
fortit du veftibule pour aller dans
tout le Jardin y porter fa recherche ,
i<.)0 Analyse
a. 18. b. 16. pendant que les autres femmes ren-
c. 14. d. 10. r 1
r c„r„ *. trerent dans le iepulcre.
b. Surgens r
aucun j«/îii Lors donc qu'elle le retourna elle
5£d?a£ vit Jesus devanc elIe' Mlls comme
païuit primo elle cherchoit un corps mort , elle
dlîene Madê ri'avoit garde de le reconnoître dans
<jua cjcccrac un homme vivant qui lui parloit , 8c
moniT d. & fur qui elle n'arrêta pas les yeux. Il
vidit jefum lui demanda de nouveau quel étoît
£onCfdcbaf, le fojet de fes larmes , & ce qu'elle
«juiajefuscft. cherchoit. Elle qui le b'rërioit pour
jDicitei Jefus; i x >r a j t J" v ' f /*' I
Muiicr,quid le Maure du Jardin ou etoit le lepiil-
piorasîquem cre y c'eft-à-dire , pour Jofephd'Ari-
ousricisî Illa i • 1 • j • r 1
exiftimans , mathie , lui dit , comme 11 tout le
^uiaboitula- monde ne devoit fonder qu'à ce qui
ivusefkc.di- ,, . r wi / a p-
citd:Domi- 1 occupoit , que il ce dépôt l mcom-
nc fi tu fu- modoit , elle le prioit de lui mar-
ftulifti cura ... \ m i j / r
aidto mihi, quer le lieu ou il 1 avoit rait cranl-
ubi pofuifti porter , afin qu'elle le fit enlever.
cura : 6c ego «^ i ■••■'%
cumtoliam. Comme il ne repondoit point a cette
prière , elle lui tourna le dos comme
aux Anges.
î™?vïzlîi ^ESUS la rappellant lui dit de ce
convctfa iiia £Gn de voix qui lui étoîr connu :
dicitei : Rab- ** • t?\\ r a
boni , quod Marie, hue le tourna en mcme-tems,
riicitur Ma- & fe jecta à fes pieds toute ravie
^ de joie , elle lui dit : Ah mon Maî-
tre ! Comme elle tenoit toujours (es
pieds embraiîés , & qu'elle ne les
DiciteiJe- qUitr0it point , Jésus pour modérer
fus:Nolimc * . . ». . ,. , n
unge^aon- cette première ardeur, Un dit qu elle
de l'Evang. Ch. CXLV. 191
ne dévoie pas ainfi fe coler à fes d«»enimaf-
. r r .. j • 1 cendi ad Pa-
pieds , comme h elle ne devoit plus u:m meum:
le revoir j qu'il n'étoit pas encore
remonté vers fon Père , & qu'il a voit vatlc auceai
, r • \ 1 ac* rratres
encore plulieurs jours a demeurer meos, & die
fur la terre. Voyc\ la DiJJertation c,s :
XXXVIII, Mais qu'elle s'en retour-
nât incelfamment vers (es frères, ter-
me d'honneur & d'amour, qu'il em-
ployoit pour consoler fes Difciples j
ôc qu'elle leur dit de fa pat t _, qu'il
n'étoic pas feulement reifufcité, mais
en état de monter dans peu de tems Afcendo ad
vers fon Père Se leur Père , vers fon Patrc™ ™e-
Dieu Se leur Dieu : Expreflion qui nemvcftrum:
marque nettement fa Divinité & fon ^Tun^vTf-
humanité. tnim.
Marie Magdelaine alla porter cette venit Ma-
heureufe nouvelle aux Difciples du ria Masdalf-
e . , i . ne annunti-
àeigneur, qui etoient encore dans ans difeipu-
les larmes ôc dans le deuil de fa lis ■ B- j***
un 1 rr » 11 1» cum co fue"
mort, iille les aliura qu elle 1 avoit mne, îugen-
vu ; Se pour leur témoigner que ce [|bus& S"
n'étoit pas une imagination , elle QuiavidiDo-
leur rapporta les chofes qu'il lui avoit T^T .* *?
,. i[, . . , .7 a ! • j. h*cduic nu-
dités. Mais quoiqu elle put dire ni. b. Et Ul|
pour leur perfuader qu'il vivoit, ôc ^fâ'viverer,
qu'elle l'avoit vu , ils ne crurent ni & vifus eflet
l'un ni l'autre , Se ils Paccuferent fj^™*
tacitement d'avoir pris pour une réa-
lité qui lui avoh frappé les yeux , le
î 92. Analyse
a. rt. b. 16. phantome donc Ton imagination étoit
pleine.
C. A4.D. 20.
4. Refune- 4. Femmes ïnjlrultes de la Réfurreclion
bus indicata. ae JeJuS'
« c. Er fac- Cependant les autres femmes qui
mente conf- etoient rentrées dans le veltibule ,
ternats ef- toutes affligées de cette féconde per-
ie:u mulieres 1 1 a /T A • A
dcifto,ccce te de leur Maître, virent paroitre
duo vin fte- auprès d'elles des hommes vêtus de
tsrunt fecus , • f • / i
jiias invcfte blanc, qui etoient apparemment les
fuigemi.cùm mêmes qui avoient apparu à Marie.
timcrent au- ru lc r T j c
tcm, & .de- -biles en turent laides de crainte j &:
clinarent comme la pudeur leur faifoit baifler
vnlcum in - 1 A 1 J:
terrant dixe- la vue en terre , les Anges leur di-
mnt ««g*/* ad rent qu'elles n'avoient aucun fujet
illas:A.No- , K . „ ,., . If
lire «mère de craindre. V,)u ils voyoïent bien
tos-, b. noii- qU'e{les cherchoient Jésus de Naza-
tc expavefce- 1 . . , , . r ,
rc : jefum retn qui avoir ère crucihe ; mais
«^uauitis Na- pourquoi chercher parmi les morrs
rifixdm. c. celui qui etoit plein de vie ? yu il
Q«id qusri- n!^roitplus là ' mais qu'il étoit refluf-
tis vivenu'tvi •,■1 F
cummoiruis? Cite.
A. Non eji lis leur en alléguèrent deux preu-
hic-: furrexit . o r
s inconreltabies. La i.eit la predi-
enim
ficuc ves inconreltabies. La i.eit la pi
dixir. c. Re c^lon gU ^ Jeiir enavoit faite: fur
corilamiui • •? 1 • 1 r r •
^uaiirer îo- quoi ils les prièrent de le louvenir
cutuseft vo- J »-j | avoir-dit étant encore
bis , cumad- 1 ;
tue in Gah- en Gainée , que le dis de 1 nomme
i*acrtet,di- jevou ^;e 1^^ entre les mains des
mec dans ,
de l'Evang. Ch. CXLV. 195
médians , attaché à la croix , & ?P°"« Fî-
rr r ■ 1 -r • Iiumhominis
reflufciterle troiiieme jour. tradi in nu_
La 1. eftque pour voir la confor nushommum
•/11 l t jvû« v i> rr 11 peccatorum ,
mite de la prédiction a l errer , elles & cmdfigi ,
n'avoiem qu'à s'en rapporter à leurs &/ilc tem*
1 11 re iuriTere.
propres yeux , qu'elles rentraient A.Venîre,
dans la grotte du iépulcre, & qu'elles & v,cletc *?:
vinllentreconnoitre le heu ou le àei pofitus crac
gneur avoit été mis. Dommus'
Après avoir réveillé leur foi , ils
exercèrent leur obéitfance. Ils leur Etckoeim-
com mandèrent d'aller avertir tous c" B-,tiicitc
r rx-r • 1 o 1 difcipuhs e-
ies Dilciples ., & principalement jUS & Petro,
Pierre doublement affligé de la mort A- .iUI0a fur"
1 r m « * o 1 r 1 a rcxit -, Oc cccc
de ton Maître & de la propre chute , précédée vos
que Jésus étoit relTufcité , &: qu'il 'nGa.l,la:ani:
A . . , r ,,, 2 B. îbi cum
iroit les attendre en Galilée , que videbiûs, û-
c'étoit-là où il devoit fe faire voir à £utdixitv<*-
eux félon fa promeife. Cet ordre re-
gardoit tous fes Difcipies , qui étant
alors plus de cinq censn'auroientpu
dans un fi grand nombre s'alTembler
dans la Judée prefque fous les yeux
des Grands-Prêtres , qu'ils n'en euf-
fent donné de l'ombrage à Pilare
comme d'une confpiration formée.
Pour la fureté de les Difcipies 8c
pour l'honneur de fon Eglife , Jésus
eut la bonté de leur alîigner un ren-
dez-vous en Galilée.
A la fin les Anges dirent aux fem- a. cuzvx*.
Tome IF. I
194 Analyse
A- 18.B. i*. mes qu'ils s'acquittoient de lacom*
C. 14- D. 10. . r i , 1 ,
million dont îlsetoient charges , de
dixi vobis Ci 1 °
Ec recordat* Aes avertir par avance de toutes ces
fiuu veibo- chofes. Elles fe fouvinrent en erret
Ex™ eikrunr des paroles de Jésus; & fortaut auffi*
citodemonu- tôt du fépulcre , faifies de crainte &
mento cura r lf 1 • • 11
timoré & traniportees de joie , elles coururent
çaudio mag- faire leur rapport aux Apôtres ; la
no,currentes r , L , 1*1 o
nunriare dif- frayeur leur donna des ailes , & ne
eipulis ejus. Jeur permit pas même d'en parier à
B. Invaferat l , « l . ,r r > 11
enim eas tre- ceux de leur connoiliance qu elles
moï&pavor: rencontrèrent en leur chemin.
6c ncmini
quidquamdi-
xerunc : ti-
jnebancenim.
5 . Seconde apparition de Je/us
s. Secundo, aux femmes.
gipparitio
chrifiimuhe- Leur foi fut récompenfée de la vue
de Jésus : elles le trouvèrent qui ve-
A. Et ecce v , 11 1 j
jefus occur- noit a leur rencontre. 11 leur donna
rit iiiis , du fa paix s & elles embraflerent (es
cens:Avete: • j o, i» j r J
iii« autem pieds , oc 1 adorèrent par un prorond
acccffcrunt , profternement : Ne craigne? point ,
& tenuerunt [ p -i ■ n j- \
pedcsejus,& leur dit-il 9 mais alle\ dire a mes
adoraverunc freres qu'Us aillent en Galilée : ce(l-
eum. Tune-7,, ,.7. ' J
aie illis Jcfus: là qu ils me verront.
Noiite cim«- Revenues du fépulcre , elles con-
re,ite,nun- r A
date fratd- terent aux onze Apôtres , oc aux
bus meis ut autres Difciples qui fe trouvèrent
cane in Gali- . x r . i , , ,
izam:ibime la, tout ce qui leur etoit arrive,
ridebunt^c. L'apparition des Anges , rafTurance
mQnumcnto, touchant la réfurre&ioii 4e Jésus , fa
fciuu rayer mi;
©e l'Evang. Ch. CXLV. 195
rencontre , fa vue , Se fes paroles h*c °,mHÎi
* r . « , n . l îllis undecim
rneme, les pieds qu elles avoienttou- & cxteùs
chés , & enfin ce qu'elles n'avoient omnibus-
pas deviné , l'ordre qu'il leur avoic
cionné pour tous les Difciples d'aller
en Galilée. Celles qui leur rappor- Eratamem
toient toutes ces chofes , écoient J^ria Ma|"
Marie Magdelaine , Jeanne _, Marie joanna' &
mère de Jacques , & plufieurs au- ^iaria-Tacobi»
, 7 n y-. ** esters
très qui etoient avec elles. Cepen- qua: cum eis
dant tout cela leur parut une pure jranu' 0j}i3\
r r diccbanr ad
rêverie , 6c ils n en crurent rien. Apoftoios
Quoique le témoignage des fem- %££?£
mes pût être infirmé par les Juifs, los ficut de-
1. du côté de leur fexe , qui e(l cré- ^^ j
dule & imbécile , 2. du côté de & non credi-
l'affection qu'elles avoient pour Je- deruntiihs-
sus , il devoit néanmoins avoir rou-
te fon autorité fur Tefprit des Apô-
tres. Car le premier défaut étoit ré-
paré , iQ. Par leur nombre , étant
impoffible qu'elles eu(Tent toutes été
trompées , &: que les unes n'eurent
pas corrigé l'erreur & Tillufion dis
autres. i°. Par le même détail de
toutes les circonftances en quoi elles
convenoient', ce qui eût été impof-
fible fi elles eufiTent été faulfes. 30.
Par leur fagelTe & par leur vertu
bien au-deffus du commun des fem-
mes, &: qui les rendoit incapables
196 Analyse
a. 18. b. 16. Je feindre une fable fi bien circon'*
C. 2.4. I). 10. n • /
itanciee.
Pour l'affection envers Jésus „ ce
n'étoit pas un défaut à l'égard des
Apôtres , qui étoient fujets au mê-
me préjugé. Mais la vérité ne per-
dit rien dans cette dureté des Apô-
tres } autant qu'Us refuferent de
créance & d'autorité au rapport des
femmes, autant en ajouterent-ils \
leur propre rapport , lorfqu'enfin
perfuadés de la réfurrection de
Jésus , ils la prêchèrent aux Juifs, de
à toutes les nations de la terre.
t.Confdium £# Confcil des Juifs pour étouffer
J0cdcuhandârl le bru'lt & la Réfurrection,
furreftione.
Il eft tems de pourfuivre la II.
preuve de la Réfurrection que nous
avons commencée au Chapitre pré-
cédent. Les Gardes furent témoins
de toutes ces démarches des deux
Apôtres & des femmes , fans qu'ils
leur vilfent rien emporter hors du
A.Quaecùm fépulcre. Après qu'elles fe furent ré-
abiifTent , ce- / 1 1 A j>
ce quidam de tirées , quelques - uns d entre eux
euftodibus vinrent dans la ville rapporter aux
▼cnerunt in ^ • j r» * » '
civicatem, & Princes des Prêtres tout ce qui s e-
nuntiaverunt toit pafïe. Témoins irréprochables %
te&dQim & qui par leunmçrec commua cou-
t>e l'Evang. Ch. CXLV. 197
tre Jésus , ne leur dévoient pas être ?™nî! 4UiE
r r rs a ■ r 1 • s *a&a fuciant.
iu'pecis. Aind 11 ne manque rien a
la folidité de la II. preuve de la Ré-
furrection de Jésus dans l'efprit des
Grands-Prêtres j ils en furent per-
suadés malgré eux , mais ils ne fe
manquèrent pas au befoin.
Ils s'alTemblerent avec les Séna- Eccongre-
o J ml ' ' ' J >*1 pati eu m fe-
teurs _, ce ayant délibère de ce qu ils nioribus,cou-
avoient à faire , ils donnèrent une lîlio afeepto,
ar i> r \ \ pecuaiam co-
e lomme d argent aux loldats , piofamdedc-
pour publier par tout , que la nuit , ,tunt, milici-
1 1 ' ,-.1 / , -| bus,dicentes:
pendant qu ils etoient endormis , les dicke quia
Difciples de Jésus croient venus dé- difeipuii ejus
, l r \ g • r nocce venc-
rober Ion corps. Mais ce menionge runt, &fu-
qui fauvoit l'honneur des Grands- ratirmueiim
n a 1 1 r , 1 v nobis doc-
rretres , perdoit les loldats auprès miencibus.
du Gouverneur , à qui ils dévoient
rendre compte de leur expédition;
parce qu'il y va de la vie i un fol-
dat en faction de fe lai (Ter aller au
fommeil. Le confeil Judaïque ratïu-
ra donc les foldats contre cette ter-
reur j & ils leur promirent que 6 aJhu^ftS
leur prévarication prétendue venoit ritâpr«fide,
~ _ 'il J r* 1 C nos fuadebi-
aux oreilles du Gouverneur , ils re- musei, &re-
roient leur paix. . euros vos far
Mais cette terreur que les foldats
ne manquèrent pas de fah*e bien va-
loir aux Juifs , pour grollîr le paye-
ment de leur menfonge , ne les tour-
lnj
ciemus.
i()$ Analyse
/. i*. b. 16. mentoir guère dans le fond. II eft
lans doute qu ils contèrent a Filate
tout le détail de i'hiftoire félon la
vérité, avec le traité que les Juifs
avoient fait avec eux pour les obli-
ger à mentir. Cependant il diilimula
tout , auiïi intérelTé que les Juifs à
étouffer le bruit de la Réfurrection
de celui qu'il avoit fait mourir con-
tre fa confidence , & contre toutes
les règles de juftice.
*.t ïîlî ac- Les foldats ayant touché l'argent
F^KSÏÏÎ des Juifs , parlèrent comme ils leur
t an- edoââ. avoient fait la bouche j & ce faux
^7/^'. enlèvement du corps de Jésus par
fauna îftud a- [qs Difciples , s'eft répandu depuis
%^Z parmi eux, & dure encore jufqu'à
iii/ :;um. nos jours , quoiqu'il n'y ait rien de
plus mal concerté & de plus extra-
vagant que ce menfonge.
Car , i. files Gardes dormoient,
qu'ont-ils pu voir ; & s'ils n'ont-
rien vu 3 que peuvent-ils témoi-
gner ?
i. Par où les Difciples ont- ils
enlevé ce faint corps ? Par la porte
fans doute gardée par les foldats s
puifque par-tout ailleurs ils n'euf-
fent trouvé qu'un rocher impéné-
trable. Mais comment ne s'éveillè-
rent-ils pas au bruit de tant de gens
de l'Evàng. Ch. CXLV. 199
qui entroient dans le fépulcre , &C
qui en fortoient f
3. Comment les Difciples ont-ils
pu arracher la pierre avec les cram-
pons fans faire un giand bruit .? com-
ment les foldats ne fe font- ils pas
éveillés aux coups de marteau &C
au fracas que la pierre a du faire en
tombant ? il falloir que leur fommeil
fut enchanté.
4. Enfin quelle apparence que les
Difciples de Jésus, qui Tavoient lâ-
chement abandonné ou renoncé pen-
dant fa vie , fufifent devenus plus
généreux après fa mort, &: qu'ils fe
flirtent jettes pour lui dans un péril 5
où dans le plus heureux fuccès il
n'y avoit rien à gagner pour eux ,
& où ils dévoient attendre une more
certaine , fi leur entreprife ne réuf-
firtoit pas î
<%>
Iir
200 ANALYSE
CAf cxivr. CHAPITRE CLX VI.
B. 16. C. 14.
Ténia & Troifieme & quatrième
quarto, appa- A . •
ruio. Apparition.
I. Quarta
éipparitio m 1. Quatrième Apparition à
Jûmmaus» . £ £
hmmaùs.
b. 16. Poft T A IV. preuve de la réfurrect! on
duobusw^is -*-J de Jisus fe rire de fon appari-
ambuianti- rion à deux de fes difciples, qui ce
bus C. ipfa pv- I iv a 11 1 1
die in caftel- J-'irnancne-la même allèrent dans le
Jum , quod bourg d'Emmaiisà 60. ftades de Jé-
«rac in fpario r \ \ ,,,
iladiorum fe- rulalem , qui valent 7500. pas d lta-
acagimaabje- lie ,& deux lieues & demie deFran-
rufalem no- n , « r -i\ rr
mine Emma- ce* " ménagea leur roiblelle avec
***> un tempérament merveilleux , & il
les prépara de loin & comme par-
degrés pour les faire pafTer de la
prévention de fa mort où ils étoient,
jufqu'à pouvoir foufriir fa vue.
#. ©ftenfus 1. H prit l'apparence d'un voya-
cft inaliae-fti- r rr. rr - r 1
pe. c.Etipfi gear inconnu qui palloit Ion che-
loqucbantuc mjn 3 &: qui marchant après eux , &
ad invicem i 1 r • • • \
de his omni- les ayant atteints , le joignit a eux
busquaacci- pour avoir l'avantage d'être de leur
derant. Et ta- l . °
ûumeftdum compagnie.
fabuiarentur, ]jp jjs s'entretenoient de tout ce
quacrctcnt : qui etoit arrive , ce même lans te
be l'Evàng. Ch. CXLVI. 201
contraindre pour lui , depuis qu'il & «pfe Jcfa*
. . i »t i • « appropin-
les eue joints , ils continuèrent a qUans ibac
s'informer l'un de l'autre des circon- cu™illis- o*
itances qu ils lçavoient, ce a raiion- iiiorumtene-
ner là-de(ïus. Ainfî il put entendre ïaiu"' f"e
t # eu m agnolce-
une partie de leur entretien , & cela rent. Et aie
lui fit prendre la liberté de leur en fi^S
demander le fujet , & quelle étoit mones,quos
la caufedeleur triftetfe. Cependant %££*£
ils ne le reconnurent point 5 foit que buiames ôc
le défaut fut dans les y eux , ou , corn- *ftis Kiftw 1
me il eft plus probable , que quel-
qu'endroit du vifage de Jésus leur
parut autrement qu'il n'étoit , ce
qui fufht pour changer tout l'air du
vifage.
III. L'un d'eux nommé Cléophas, Et refpoa-
le père ou le mari d'une des Maries , dc?s unus *
■ S , j. ,/ ,., rA ' cui nomeix
lui répondit en s étonnant qu il rut ckophas, di-
te feul étranger à Jérufalem qui n'eût fltei: Tuf°-
rien lçu des choies lugubres qui s y nus es m je-
étoient paffées dans ces jours-là. 11 non^coeno^
diflimula de le favoir, pour leur vifti quxfac-
donner moyen de lui découvrir leur £ hi°diêbus>
plaie , & pour avoir lieu d'y appli- Quibw iiie
quer le remède. Cléophas lui ayant
dit que le liijet de toute cette trage- xeruHt : <fc
die ctoit Jésus de Nazareth. Jefu Nazare-
r. 11 lui marqua les difpofitions ' f . .
prelentes ou ils etoient encore a ion propheta,po-
c^ard , d'eftime Ôc de créance , corn- ^\^^
1 v
2oi Analyse
». j6. c.z4. me d'un Prophète envoyé de Dietr^
coram Dco puiflant en (qs œuvres faintes &c
?iiomm P°" roiraculeufesj puiflant en fes paroles
par la pureté de fa doctrine , & par
l'autorité avec laquelle il enfeignoit;
puifTant en Tune & l'autre- manière
devant Dieu , qui l'avoit autorifé
par mille merveilles , & devant le
- Uomo- PeilP^e °iui l'avoit toujours admiré.
do cum tra- 2. Il marque la manière indigne*
iiL{cnmlror dont les Grands- Prêtres 6c les pre-
lumm» Sacer- ; . » /*
dotes & Prin- miers du peuple 1 avoient traite , en
S^ât£iin Ie condamnant à la mort , & en le.
nem mords , faifant attacher à une croix par la
Dunteom..^ fentence du Gcuverneur.
Nos autem 3- U repréfenre leur difpofiçiots
fperahamui., paflee , qui étoit i'efpérance qu'ils
quiaipfecllet l . A .. >-i i/i* • i
xeàcmpturus, ^voient conçue qu u aelivrerpit le?
ifraci : peuple dlfraël du joug des Gentils;
ou d^s Romains , Ôc qu'il le rétabii-
roit au même état qu'il étoit fous.
David. Car ils ne pénétroient pas
plus loin ^ & ils ne fongeoienc pas-
encore à la délivrance de la ferviu o
du démon , du péché , & de la Loi-
Mais helas ! ajouta- t-il, cette efpé-
rance étoit bien abbatuë.
*jnuncfuper Car, i . C'étoit alors le troifieme-
tertia aies eft jour depuis que tout cela etoit arrivea>
kodie , quod & cependant il n'y avoit point de*
ha?c fa&a i l j w, j l i r
xuat.. changement dans 1 état des- choies»
t>E l'Evang. Ch. CXLVI. 20$
& tout demeuroit dans la même dé-
flation j d'où il lailïbit à juger qu'il
en feroit toujours de même , 8c
qu'il n'y avoit plus rien à efpérer pour
l'avenir.
2. Il s'oppofe une petite lueur de Sed&cmu-
reflource. il eft vrai que quelques ^ a*%£.
femmes de leur parti les avoient un tris terrue-
peu étonnes : Qu étant allées avant ante lu*eiu
le jour voir fon fépulcre ( cet avant fuerunt ad
le jour eft myiténeux dans le dif- ™°mUi& non-
cours de Cléophas ) elles avoient invento cor-
y i » o '11 t .. porecius, ve-
declare , 1 . qu elles n avoient point flerun'c ai-
trouvé fon corps: 20. qu'elles avoient ccntcs fe eri-
r j' a • ri' am vifionenv
eu une viiion d Anges , qui ailu- aoçeiorum
roient que Jésus étoit plein de vie. vWiflc , qui-
M.-p 1 ' c *L1 i dicunc eura
aïs que cette reilource etoit roible! Viverc. ic a-
Quelques-uns de leurs amis étoient bierimt qui-
7, / 1 r, 1 3. r dam ex nof-
ailes au îepulcre pour s informer par tris ad Kiorm-
eux-mêmes de la vérité de ce double mtntura : fc
, r -i n • 1 ':a invenc-
temoignage. ht il elt vrai que de ces runt ficut
deux parties de leur rapport ils ont mulieres «U*
j lutine la première , qui elt qu ils
n'ont point trouvé fon corps dans
fon fépulcre. Mais que pour l'autre
qui regardoit fa réfurrecbion , ils l'a—
voient trouvée faulfe , puifqu'ils ne ,Pfum. rer^
., . . » • *k * non inve»*--
1 avoient point vu lui-même , & que runt.
s'il eût été vivant , il n'eût pas man-
qué de fe faire voir à fes plus chers
.Difeiples c|ai- le cherchaient avec^
204 Analyse
t. a. €. i4. emprefTement. De-là il laifloit à con-
clure a l'étranger , que ces bonnes
femmes ayant été au fépulcre avant
le jour s'étoient éblouies, que dans
l'obfcurité elles avoient pris pour
lui quelque phantôme qui leur avoir
frappé la vue , & que ces Anges, qui
leur avoient conté fa réfurrection ,
étoient une pure vifion de femmes y
qui s'imaginent voir & entendre tout
ce qu'elles ont dans la penfée.
IV. Après avoir entendu leurs rai-
fons, Jésus les réfuta avec la liberté
que donne la compagnie dans le
s ïc îpte di- voyage. Il les traita de gens fans ef-
c^ftuiji'^pnt & fans docilité pour tout ce
tardi corde que les Prophètes avoient écrit tou-
dum ii^om- chant le MeMie. Il paiTà fans réponfe
nihus qua? tous les faits allégués parCléophas ».
locuti funt 0 1 1 • rr > '
ïiophera: ! & dont la connoiiiance 11 etoit pas
d'un étranger donr il portoit le cara-
ctère.
Mais , 1. Il s'attacha a la mort di£
MeÛle , le fujet de leur fcandale.
2. A fa réfurrection , qui étoit le
fujet de leur défefpoir.
'onuTt^ad l' Il leur prouva; i°. Que felorc
ci.riftum, & l'Ecriture le Mefîîe dévoie fouffrir
ita incrare in tour Q que JESUS Je Nazareth avoic
glonain. lu- ^ ^_ f .,
mi: fouftert. 2. Qu il devoit entrer, par
cette voie dans, 1» gloire T 6c paf
de l'Evang. Ch. CXLVI. 205
conféquent qu'il étoit reifufcité. 11 Et încîpien
, n j • • 1 - à Moïfe , &
leur prouva , dis-je , ces deux points omnibus pro-
par coure l'Ecricure, en commençant Phctis » in"
a. x m r ■ r ■> 1 • * 1 tcrprerabatur
epuisMoile juiqu aux derniers des Mu in omai-
Prophetes. Il leur expliqua rous les busfcripcuris
lieux qui le regardaient , ce qu il rai- eranr.
foit avec d'autant plus de Lienféance
Ôc de grâce , qu'étant inconnu il iem-
bloit plutôt plaider la c^.ufe d'un au-
tre que la henné. 11 les convain-
quit de la né : de Ta mort & du
droit de fa echon , en leur
lailfant démêler, comme ils pour-
roient , les faits allégués par Cleo-
phas. Il ne reftoit plus à leur prouver
que le fait de fa réfurrection : Ec
voici comme il s'y prit.
C-i * • â * i> Ec appro»
omme ils etoient prcts d enrrer phiquave-
dans le bourg où ils alloient y il fou- rui!c c*ftefï*ii
tint juiqu au bout Ion caractère d e- & iPfe fefin-
rranger , &c il prit congé d'eux com- xic loûS"*
me s'il eut dû aller plus loin. Ainfi
il n'y a pas plus de menfonge dans
cette action , que dans l'apparence
d'étranger qu'il avoit prife , parce
que les actions ne font des ngnes
naturels que de la volonté qui les
commande , ôc non de la foi à quoi
elie les rapporte. Jésus fit l'action,
d'un homme qui vouloit pafler ou-
tre, Ôc continuer fon voyage ; ôc il
xo6 Analyse
I, 16. c. 14. l'eût en effet continue , s'ils ne Peut
fent pas arrêté comme ils firent,
tunr iiiuin , Charmés de Ton entretien , ils le
dicente$:Ma- contraignirent de demeurer avec eux
lie nobifcum, °. ,.. , ,,, .
qûonUm ad- cette huit, parce qu il etoitdeja tard,
vcfperafck , Se que le jour s'abbaiiïoit ; & il en-
eftjam aies, tra avec eux dans lamailon, comme
Ir v,nra,'ic pour y patfer la nuit. Etant à table
eu n dits. Er !. . ] * . , N .
factum où. il prit du pain des >e commencement
du m recum- dùfoupèr, il le chaàô'éà en fon corps
accepit pa par la bénédiction , & I. ayant rompu,,
nem , & be- A[ [e ;eiu. ,réfenca fans faire la même'.
nedixie , ac . r . i ..
fregic , ôc choie du calice, ce qui prouve mani-
porngebat il- fetlement la communion fous une
feule efpece.
Et apperti Dans le tems que ces deux Difci-
funtoculieo- 1 l ,-, .
ram,&cog- p*es rian^o;';:r ce qu il leur avoit
noveruac e- donné , leurs yeux furent tellement;
ouvert; qu'ils le reconnurent distin-
ctement par une vertu attachée au
myftere de PEucliâriftie. Alors ils
furent pôr Luadés du fait de fa réfur-
redtion , i. Par leurs propres yeux.
se ipfe eva- 2. Par les ; I oiritueiles de fon
eorum. corps réiiulcite.. Car il dilparut au
Ecdixciunt même moment , Se il fe rendit invi-
«d invicem i /m 1 x 1 n . I» J
Nonne cor "ble a leurs yeux. 3. Par 1 erret que
no/irum ar- fes parole-) p 5ô<fuîigre*ht d i lis4 leur ef-
dens erac in • ' 1 1 • , ■> /
nobis , dum prit penaa'nï le chemin, lis s avoue-
îoquerecur in renc pim £ l'autre que leur cceur
Via . & ape- / a / i> o 1
4ret- nobis- etoif tout ennamme a amour oc d&"
de l'Evang. Ch. CXLVI. 207
foie , lorfqu'il leur expliquoic les ScrîPtur" ?
Ecritures.
2. Troijieme Apparition à Pierre. 2. Tenim
apparïtïo P&~
Ils comprirent que Ton detTein en
difparoilTant tout d'un coup , étoit
qu'ils allafïent ince Tarn ment porter
cette heureufe nouvelle aux Diici-
ples encore dételés, lis le levèrent , ^J^t*'
de table a la mernè heure, lans le râ tegreflî
donner le loifir de manger , & ils £ai«nT&iî£
retournèrent fur leurs pas à Jcrufa- venerunteoni
lem, où ils trouvèrent les onzeaGTem- |reec^°
blés , ( quoique Thomas hitabfent,
c'eft ainli néanmoins que depuis la
mort de Judas on nommoit le collège
Apoilolique. ) Ils trouvèrent avec & eo* . lui
1 ,l ' r-x r ■ \ • cum illis c-
eux quelques autres Lhiciples , qui rantj dicen-
leur rapportoient ce que Pierre qui tes :.Q"0(i
il ai furrexit l)o™
étoit préfent leur avoit confié , & ce minus verèP
que fa modeftie &: la crainte d'exci- & aPParuic-
ter leur jaloulie l empechoit de leur
dire, comme une marque honorable
de diftinction , qui eft que le Sei-
gneur étoit vraiment relTufcité , &
qu'il étoit apparu à Simon.
Ces deux voyageurs fe joignant à ,EtiPfi narr*-
1 J ° / « ° / bant quae ge-
eux leur racontèrent ce qui leur ctoit iu eranc in
arrivé dans leur voyage , & de quelle Tia } & <ino-
11, . ' o ' j. modocogno-
mauière ils 1 avoienc reconnu dans la v«w«. <:*«*•
2o8 Analyse
In fraaïone fraclion du pain. Mais toute cette
paB.Skec aii foule de témoins ne firent encore au-
wediderunt. Cllne impreflion fur leur efprit , ôc
ils demeurèrent fermes dans leur in-
crédulité.
cxlv iTi. CHAPITRE CXL VIL
Cinquième & fixieme
Quhu*& Apparition.
B. 16. C. 14.
D. 20.
ftxta Apparï
1. Cinquième Apparition aux once;
1. Quinta
JSSU aF'J A V. preuve de la Réfurre-
8 j ctioft fe tire de l'apparition de
Jésus aux Apôtres ; & cette preuve
a toutes les conditions nécefïaires
pour être décifive. 1. Du côté des
Apôtres défians& incrédules jufqu'a
l'opiniâtreté. II. Du côté de l'appa-
rition même qui fut de la dernière
évidence. III. Du côté de leur per-
fuafion & de leur foi, qu'ils allèrent
prêcher par toute la terre , qu'ils
iîgnerent de leur fang & fcellerent de
leur mort.
I. Si on reçoit le témoignage des
ennemis , on doit compter pour quel-
que chofe la perfuafion des gens in-
crédules , qui étoiem comme armé*
DE l'ËvàNG. Cil. CXLV11. 20ç
de toutes pièces concre les argumens
de la réfurrection. Dans cette indif-
pofition Jésus les attaqua de loin ,
pour les réduire peu à peu à la véri-
té. 11 leur en fit porter la première
nouvelle par des femmes : mais ce
meflage ne fit aucune imprelîion fur
leur efprit. Ils auront donc peut-être
plus de créance en des hommes. 11
leur envoya ces deux voyageurs d'Em-
maiis , mais ils ne furent pas plus
heureux que les femmes. Ils avouent,
difoient-iis , qu'ils fe font trompçs
pendant le chemin , en le prenant
pour un autre ; n'ont-ils pas pu fe
tromper une féconde fois dans la fra-
ction du pain, en prenant quelqu'au-
tre pour lui ? Non fans doute ; car
ces deux erreurs font incompatibles,
&: s'excluent l'une l'autre : s'ils fe
font trompés la première fois , il eft
impoiîible qu'ils fe foient trompés
la féconde. Mais ils n'y regardoient
pas de fi près. D'ailleurs cette éclip-
fe de Jésus , au même inftant qu'ils
le reconnoilfoient , leur parut de
mauvaife augure. Voilà une dureté
prefque furnaturelle.
II. Ils la portèrent encore plus
loin dans cette apparition où Jésus
remédia à toutes leurs défiances , i.
no Analyse
B, !<?. c. 14. par l'apparition même. 2. Par Pc-*
D. zo. rr, . , ,, ,
preuve de la vue & de 1 attouche-
ment. 3. Par le manger.
c. H.Dum 1. Ils n'en crurent point les ex*
loquuntur. Pues 4U *1 *eur avolt envoyés j il leur
b. 16. No- porta donc lui-même en perfonne
cumbenrib'in *es nouvelles de fa réfurreclion. Ce
illis uiuiecim Dimanche-là même au fo ir , les por-
^Lx^cùm tes du lieu où croient les Difciples
crgofcroeiret étant fermées de peur des infulteS
die illo , una i r T 1 r >i ' • \ i i
fabbatorum, des Juits , loriqu us ctoient a table ,
«cforesefTent & que les voyageurs d'Emmaiis con-
claufae , ubi . J ' , ° T
«rantdjfcspu- toient encore leur avanture , Jésus
li congregati vmt & fe trouVa au milieu d'eux *
propter me- . .. f { r-
tum judso- en leur duant : La paix Joit avec
*um » QveÀlk vous. Cette vue produisît l'efTet
Jefus, 8c fie- , n . « n
tic c. in me- qu elle dévoie naturellement avoir
dio corum,6c dans leur prévention. Ils fe trou-
vons , ego blerent , ils s'effrayèrent dans la
fum, nohec créance qu'ils voyoient un efprit ,
timere. Con- , 1 / / r, '
turban vero, roqdes lans doute lur cette penetra-
& conternti, tjon £un ^eil fermé de toutes parts ,
exilhmabanc . . , , . x r '
fe fpiritum qui auroit ete împofiible a un corps.
TJr l?\ . i. Il leur demanda de quoi ils
Ir dmt eis : . .1
Quid turbati s allarmoient , & d ou venoient tant
gftatior^sCa0f"^e phantômes qu'ils fe formoienc
cendunt in eux-mêmes. Voyant donc que la firrï-
*° aîple apparition ne les convainquoie
pas , il leur prouva, i. Que c'étoit
lui-même par un argument fort pro-
portionné à leur groiîiéreté , je dis
de l'Evakg. Ch. CXLVII. 1 1 î
par les paies qu'il avoir reçues à la
croix. 11 leur montra les mains ex nus meas &
fes pieds encore percés des doux pedes , quia
î / o r * egoipfefum;
qui les avoient attaches , oc Ion co- ° r
té ouvert d'un coup de lance. 2. Il
leur prouva qu'il n'étoit point un
efprit par la confiitance de fon corps
compofé de chair & d'os , chofes
qui ne conviennent point à un ef-
prit j & il les invita à le toucher : ce paipate , &
que rirent peut-être quelques-uns 7'J^| |jjï
d'entreux , puifque faint Jean aile- nrà & oiu
gue cet attouchement , î. Joan. c. 14. ^ucnïvul-
comme un motifde crédibilité. Alors tishabere. Et
ils fe relâchèrent un peu de leur du- SStTollei*
reté , & ils en crurent a(Tez pour fe die eis ma-
'• j î j c • J nus, 6c pede$„
réjouir de la vue du beigneur , ou du D> & iatus*
moins de quelque objet qui lui étoit Gavifl fanç,
r il il ergodifcipulf
iemblable. vifoDomia^
3. Mais enfin comme un. efprit
pouvoit contrefaire tout ce qu'ils
voyoient , ils ne furent pas tout-à-
fait convaincus : mais ils conçurent „ . ,,
r . \ r • r c- Adhuc
je ne lçai quel lentiment courus , autem iiiu
mêlé de défiance , d'admiration , & n?n crfden;
, T 1 • p nbus » &rai-
de joie. La joie regardoit 1 appa- ramibus pr«
rence , qui leur étoit infiniment S4^10-
agréable j l'admiration étoit pour la
manière furprenante , qu'ils ne pou-
voient pas comprendre. La défiance
& la crainte s'atcachoient au fond j
iii Analyse
*• *'• c# H- ils appréhendoienr que rour ce qu'ils
voyoient ne fûc une îllufion.
dixic : Habe- Pour les défabufer il leur deman-
tishîcaliquid j *i r • i i i
quodmanau- da > cornrne ^s iortoient de table,
cavur? At iin s'ils n'avoient pas là quelque chofe à
*>btulerunt ei • f * n / i i /• /
panempifcis ranger, qui rut reite de leur loupe:
affi,&favura ils lui préfentereiit un morceau de
mellis.ïtcum • rr * • o i • i
manducafTec poilion rôti , oc un rayon de miel,
coram eis , \\ Qn mangea une partie . & prenant
lumens reli- . n -i i i i- r r
quias dedic ie reIre " *e leur rendit , ahn que ce
e,s# qui refroit fût comme un monument
- de ce qu'ii avoit mangé,
ptobravit in- HI. Lorfqu'il les vit affermis dans
credulitatem la foi delà Réfurreclion , il leur
eorum , & i i j / j i
duritiamcor- reprocha la dureté de leur cœur m-
dis, quiaiis, crédule , avec laquelle ils avoient
qui viderant . i \ § l i • i>
eum refurre- rejette le témoignage de ceux qui 1 a-
Îj.; non voient vu refïuicité s parce qu'ils
frediderunc. . . . , ,c, »N ,r , 1 .
dévoient plus dererer a la depolition
des fages qu'à leurs impoflibilités
prétendues.
©. Dîxîtcrgo La paix qu'il leur avoit donnée
Paxvob'is^i- d'abord , ayant été rejettée, il la leur
eut miiît me donna une féconde fois. Et i . comme
mitto 'vos°. f°n ^ere 'a* avoit donné million
Haec cumdi- dans la Judée , il la leur donna par
xiflet , infuf- i 11 a !
iîavic i &: di- toute la terre, pour y aller prêcher
*iceis:Acci- l'Evangile. 2. Mais comme ils ne
pire Spiricum i> r , •rp
fanûumquo- pouvoient 1 exercer ians la puiliance
rumremifcti- ^Q remettre les péchés , il foufrla fur
eux , en leur difanc : Recevez le
tis peccata ,
xemiccumur
de l'Evang. Ch. CXLVIT. 215
Saint- kfpr'u ; les péchés feront re- cis : & W**
\ [ \ 1 rum retinuc-
mis a ceux a qui vous les remettre^ , rjtiS) rerenca
& lis feront retenus à ceux à qui vous runt-
, 7 Q% 14.. Et'
/dj retiendrez Ii ht voir pat ce fouf dixitadeosi
fie qui croit la figure du Saint- Efprit. Hxcfuatver-
.— ^ Dâ Q icE 10CU —
qui le produiioit avec le Père pai tus fum ad
voie de ipiration. jos.cùm ad-
_, . * . , . . hue elkmvo-
11 ajouta que tout ce qui etoit am- j>ifcum;quo-
vé , étoit précifement ce qu'il leur n'am .ne"flç
» ^ r • 1 - > 1 cft implen
avoit prédit tant de rois , loriqu il opinia , quac
étoit encore avec eux ; parce qu'il fct ,iptaw ..?
, > r 1 mlcgeMoifi,
ralloit neceliairement que tout ce qui &prophecis,
étoit écrit de lui dans la Loi de Moi- **!££ ^c
Tune a-
le, dans les Ecrits des Prophètes , &c peruit Mis
dans les Pfeaumes fut accompli à la [n"ef^renutc
lettre. Scripturas :
Alors il leur ouvrir ïefprit pour &£*•£
entendre les tentures , de il leur dit feripeumeft,
qu'il eft marqué en rel & tel Heu fccSK
que le Chrift devoir foutîrir la mort ; pat» & refur-
1 " r • ' 1 J tT r £ere à inor-
que le troilieme jour il devoit reiiui tuis tcrtia
citer d'entre les morts, que la péni- <jiei&. Ptae*
oi / 'rr J 'f'J dicari in no-
rence <x la remiiiion des pèches de- mineejuspoe-
voir être prêchée en fon nom à tou- nkenriam &
1 l ■ 11 remiifionem
tes les nations de la terre , en corn- peccatorum
rnencant par Jérufaiem. Cette char- in omne«
* . •, j j» genres , înci-
ge , ajouta-t-il vous regarde dau- pientibus ab
tant plus particulièrement que vous Jerofolyma.
* F i'i Vos aurer»
êtes les témoins oculaires de tout ce teftes cft*
qui s'eft paffé. bûIlw-
ii4 Analyse
B. 16. C. 14,
1. oixieme Apparition aux mêmes
i'ifdem cum Apôtres avec 1 homas.
Thoma.
La VI. preuve fe tire de l'appa-
rition à faint Thomas , dans lequel
on doit admirer deux grandes extré-
mités } I. Un excès d'incrédulité ôc
de défiance. IL Une foi parfaite &c
dont il n'y avoit point encore eu
d'exemple.
I. Y a-t-il encore quelque chofe
à dire , que la foi de la Réfurrection
ne foit parfaitement établie dans l'ef-
Thomas prit des Apôtres ? Oui , 8c il s'en
autem unus V- * l i n n
cxduodecim, raut mune beaucoup, rar malheur
qui dicitur Thomas étoit abfent, lorfque Jésus
îwneraccum le ht voir aux autres. Ils lui dirent
cis quand© qLl'ils avoient vu le Seigneur. 11 leur
venit Jefus. J , ,., ,, . °, . , ,-
Dixerunt ei- demanda s ils l avoient bien touche,
gocialudif- pour reconnoitre (1 ce n etoit point
cipuh: Vidi- l . A -,. , ,. >-i
mu Domi- un phantome. Ils repondirent qu 11
IÊnm' setoit expofé à l'épreuve de leurs
mains ; mais que la chofe leur avoit
paru il certaine Se Ci évidente qu'ils
n'avoient pas pris la peine d'en ufer.
ïlle autem 11 les aiTura que leurs yeux avoient
«lixitcis: Ni- donc ^>te> trompés par la faillie appa-
H videro in r r i • i
œanibusejus rence d un corps ; que pour lui plus
£xuram cla- circ0nfpe6t que les autres , il ne le
croiroit point reuulcite que ious çç$
BEl/EvANG.Ch.CXLVII. II J
trois conditions, i. Qu'il verroic
de fes propres yeux dans fes mains
la place des clous qui les avoienc
percées, i. Comme la vue fe peut & mîttam
/ii- >-i r i • diçitum me-
eblouir , qu il mettroit ion coigt u.-n iniocum
dans les trous , pour en mefurer la cUvorum,
largeur avec la çroffeiir des clous à
peu près pareille à celle de fon doigr.
5. Enfin comme l'ouverture du côté
par une Lance de oit être plus large
que les plaies des mains , qu'il ne & mîttam
,_«.•«. >'i y * r ' manum me-
croiroit point , qu il n y eut enfonce am in latug
fa main toute entière , large à peu ejus,noncie«-
près comme le fer d'une lance.
Ces conditions, & fur-tout la der-
nière , étoient fort étranges , de ne
vouloir point croiie qu'un homme
vive , à moins qu'on ne le voie blef-
fé d'un coup de lance qui lui perce
le cœur. Dieu rendit par Thomas
aux Apôtres le même traitement
qu'ils avoient fait aux autres ména-
gers de la Réfurrection. Ils avoient
rejette les femmes & les voyageurs
d'Emmaiis , ils furent rejettes eux-
mêmes. Cependant il falloit fatis-
faire cet homme difficile j & c'efl:
une des raifons qui obligea le Sei-
gneur à conferver fes plaies. Et pou
II. Huit jours après la première dies( °a° ,
' . r^.vr . . , r . r iteruni e-
apDaruion ? les Dilciples etoient ai- fàai cUftipuij
i\G Analysé
b. 16. c. 14. femblés dans le moine lieu , &Tho-
D. io. , . T
mas etoit avec eux. Jésus y entra
Thomas cura Ies Porres fermées , & le trouva au
cis. Vcnicjc- milieu d'eux , fins qu'on fçiit par
fus januis v 1 rri \\\ r \ ,,
clau/îs , & ou ll zvoit paiie. li les ialua , bc leur
/lerk in me- donna fa paix. En fui te s'adrelFanc à
dio & dixit: » 1 \> ' ' 1 »■ l
Pax vobis. ■*■ llomas j& répétant ces paroles qu il
Deinde dicic n'a voit pas entendues ; Enfonce ici
Thomas : In- j . 1 • i- -i 1 •
fer digitum ton «-oigt , lui dit-il en lui montrant
tuuiu hue, & fes mains : avance ta main de mê-
vide manus c w t 1
meas,&affer me j & la plonge toute entière dans
qurrnmtua.ro mon côté y & ne fois plus incrédule ,
oemitte inla- . ~ , ,. -r-, J £ r r
tusmcum}& mais Jiaele. 1 homas ennn perlua-
îioli efc in- dé , lui dit : Vous êtes mon Seigneur,
credulus,fed _ . °
fidelis. Ref- & mon Dieu.
pondit Tho- Confeflîon complette de l'humanité
*nas,&: dixit _ , . .. . . , \ _
ci : Dominus <x de la divinité de Jésus, qui en-
meus,&Deus chérit au moins dans les termes fur
celle de faint Pierre , puifque la filia-
tion divine que celui-ci avoit recon-
nue & confeiïce , peut s'attribuer à
d'autres qui n'ont pas la Nature di-
Dixit ei T i * ' \ ■ »• 1 i»
7e fus : Quia Vlne- Jésus lui répondit qu il 1 avoir
vidifti me , cru relîiifcité , parce qu'il l'avoir vu
didlSVbeati ^e *~es Yeux : ma's clue ceux clu^ ^'a-
qui non vide- voient cru fans le voir , étoient plus
runt , ôc cre- t i I
dUderuuc. heureux que lui j parce que la nature
ôc le mente de la foi , confilte à croi-
re ce qu'on ne voit pas. Il ne parloir
pas des Apôtres , qui étoient à cet
égard dans la même caufe que Tho-
mas y
de l'Evamg. Ch. CXLVII. îry
rnas , mais de ceux qui perfuadés par
leur prédication dévoient croire fans
voir par toute la terre tk dans la
fuite des (iécles.
On voit tout d'un coup à quoi
tend Pufage que Dieu a fait de l'in-
crédulité éc de la défiance des Apô-
tres. C'a été pour ménager des preu-
ves à la Rcfurre&ion de Jésus , Se
pour en établir la créance dans tous
les efprits. Car on ne peut former
-aucun doute contre ce fait , qu'ils
n'ayent formé} ni faire aucune obje-
ction , qu'ils n'ayent faite. Ils enc
éprouvé pour nous toutes les peines
que nous pourrions fentir. Il eft donc Mal m qaî-
julte que nous nous rendions comme £?, ?.aJ,a
< . l ligna fecu Je-
ils le font rendus , ôc que nous Cusûïcoofpe-
xrroyons par leur autorité „ ce qu'ils ^J^f^
n ont cru qu après tant d épreuves, qus non (unt
Saint Jean nous avertit que Jésus bropu 7jl~
a fait devant fes Difciples plufieurs H*c aurem
autres miracles qu il n a pas juge ne ut crdaris
ceîTaire d'écrire : maisqueceux qu'il ^ûjefusoft
' r illi" C J Criftus Filius
a marques lutnlent pour periuader Dei : &
les fidèles à qui il les adrelFe , que «ed««««*i-
jEsused le Chrift &c le Fils de Dieu, -m nomincï
afin que la foi qu'ils auront en fon fus*
nom leur procure la vie éternelle.
Tom. IK K
ii$ Analyse
cxlviÎi. CHAPITRE CXLVIII.
D' tu Septième Apparition fur le
pVruh* apai bord de la mer.
mare.
x. Secundo. \* Seconde pèche miraculcufe.
pifcatio mira-
cuiofa. T A VIII. preuve fe prend de
d. 11. Po- 1 i l'apparition de Jésus à fept Dif-
ftea mamtef- c\p\es fur ie t)0rd de la mer de Ga-
vùmjefusdi- lilee. hn voici le détail. Un jour m-
fn^reTibcrfa4 mon Pierre > Thomas Didyme , Na-
dis. Manifef- thanaël qui étoit deCanaen Galilée,
«vit autcm les d fils fe zebedée Jacques &
MC. fcrant u- r^v-r • i r
mul Simon Jean , & deux autres Dilciples le
5™?,; „?S trouvant enfemble à Bethfaïde ou à
1 nomas qui
dicitur Dicfy- Capharnaum j Pierre leur dit qu il
Xna=f Nqf,i alloit pêcher, pour chercher fans
erac à ca- doute de quoi vivre, & ils s'offrirent
& Gfimlaze- tous pour l'y accompagner. On voit
bcdaii , 6c dans cette hiftoire quatre circonftan-
puîis^ ejus ces dont chacune peut faire une
duo. Dicit e- preuve à part. I. Une pèche mira-
is Simon Pe- i r i¥ tt ' '
uus : vado culeufe. II. Un repas prépare en un
pifcari. Di- inftant. III. La réparation des renon-
nimus & nos cemens de Pierre. IV. La prédiction
tccum. Je fon martyre.
Ecexierunt, I. Ces Difciples étant fortis fur
*n*ç£nil'. le foir, qui eft k meilleur tems pour
de l'Evang. Ch. CXLVIII. 119
la pèche , montèrent dans une bar- vîn>: & îf1*
1 7 • 1 \ -i • notte nihil
que , ôc cette nuit-la ils ne prirent prendide-
rien. Le lendemain matin Jésus fe runt- ^1*
r . . r ,., r aurera fado
trouva iur le rivage , lans qu ils pui- ftttit Jeûilin
fent connoître de fi loin que c etoit Jlttorrtc : "on
1 tamencogno-
lui. En] ans j leur cria- 1- il , <zve£- verunt difci-
V0&J quelque chofe à manger ? avez- \ f J^gJJJ
vous pris du poiiïbn ? Ils le prirent ergoeisjcfuii
pour un marchand qui alloit de grand ^JpuW
matin acheter des pêcheurs ce qu'il tariumhabe-
devoir revendre en détail au marché. ns ?
Ils lui répondirent qu'ils n'avoient Refponde-
nen. Jette\ _, leur dit-il, le jilet a la Dicic cis .-
droite de la barque , cv vo^j e/z finies in
_ 1 • /* 1 dexceram na-
trouvère^. Cette droite le prend par vigiirece, ce
rapport à la fituation de ceux qui font ^Tf0^5' i
rr / , ..11 • L Mifcrunt cr-
toumes vers la proue. Ils y jetterent go : & jara
le filet , ôc ils ne pouvoient plus le n,? n/aIebanc
• 1 r j 1 1 • j j lllud trdhcre
retirer, a caule delà multitude des praimuintu-
poilïbns qui s'y étoient pris. pifaum.
Le Difcipleque Jésus aimoiteon- Dixir ergo
(îdéra d'un coté cet avis qui paroif- difdpulus il-
loit rort inutile , puilqu on av#it jet- ligebac Jefus,
télé filet en tous les fens; ôc de l'au- Pctro '-D°-
t f v ... \ . . . rr.jnus eft. Si-
trele lucces prodigieux dont il avoir mon Pecrus
été fuivi ; il en conclud que c'étoit cùm^udifTer,
le seigneur , ôc il le dit a Pierre, nuscfi, tuni-
Comme celui-ci étoit nud de la moi- 5a ruccinxic
• / 1 1 > 1 » 1 • Ie> erat cnim
rie du corps > des lors qu il apprit que nudus , u
c'étoit le Seigneur il prit fa tunique ^ fe u
o.u fon habillement de detfbus pour
Kij
220 Analyse
D* **• paroître devant lui avec bienféance,
ôc ne pouvant fouftnr la lenteur de
la barque , il fe jetta dans la mer à la
Aîii autem nage , pour fe tendre plutôt auprès
difcipuli na- je [ul j_es aLltres Difciples qui n'é-
*igio venc- , r 1
runt , non c- toient éloignes du rivage que d en-
Bim longe e- vjron deux cens coudées ou *oo pas.
Tant a te ira , . > r n 7
fed quafi eu- vinrent dans la barque, traînant après
m££ e?x le filet Plein de . p°iir°» • <iui
actepifeium. n'auroit pu y entrer ni y tenir.
utergoHc- H. Lorfqu'ils furent defeendus à
tcendeiuntin -j j i i
terramiVicie. terre, ils y trouvèrent des charbons
ïunt prunas allumés , un poilïon qui rôtilïoic
îccm^Vupcr- deHus, & du pain : foit qu'ils enflent
çofitum , ôc été apportés là par les Anges , ou ,
^aiicm. ^^ ^^ e^_ ^|^s vrai-femblable , au
moins du feu & du pain , foit que
Jésus les eût formés par le change-
ment des pierres du rivage j car pour
le poiflon il venoit fans doute de la
mer même de Galilée. On peut dou-
ter avec raifon quelle néceflité il y
avoit de tenir fur le rivage un déjeû-
ner tout prêt pour des gens qui
avoient abondamment de quoi man-
ger dans la pêche qu'ils avoient
faite ; puifque la Providence ne fup-
plée dans nos befoins qu'au défaut
de toutes les reflources humaines.
On ne peut répondre autre chofe ,
J#ion que comme ils écoient exue-
DEL'EvANG.Ch.CXLVIII. 211
mement fatigués de la veille , du
travail de toute la nuit , & d'un tra-
vail inutile , le Seigneur plein de
bonté ne voulut pas différer leur re-
pas jufqu'après qu'ils auroient ap-
prêté une partie de leur pêche; mais
il leur tint une partie de leur déjeu-
ner toute prête au fortir de la barque,
pendant que d'autres poilions cui-
roient fur la braife. C'eft ce qu'il
leur dit par ces paroles ; Apporte^ . -,
quelques-uns de ces poijjbns que vous jefus : Affer-
vener de prendre , ôc les joignez à [e de Plfci"
celui-ci qui ne iuiTiroit pas pour iept prendidiius
perfonnes. nunc*
Pierre, pour lui obéir , fit quel- Afcendît
i l , « • \ Simon Pe-
ques pas dans la mer , oc tira a terre truSj& traxit
le filet qui fe trouva plein de iu.rete in ter*
gros poilions. Mais par une mer- maSnis pifei-
veille encore plus grande , comme fi bus cen^um
ces poilions le ruiient prelics pour le tribus. Et
faire prendre , ils gardèrent fi bien c/,m tanri e^"
la paix entr eux , qu il n y eut pas fdflumrctc
une maille du filet qui en fut rom-
pue : Vene? , dit Jésus aux Difci- T rDix\c, CIS
pies , dine% comme des gens qui ont tc,prandete.
travaillé de grande force pendant
toute la nuit.
Ils s'adirent fur l'herbe pour man- audcbac dif-
cer : & tous étoient fi nerfuadés ôc cumbentiu*
V ■ i r • i r mtercogatc«t
fa convaincus par les traits de Ion Um ;
K iij
ni Analyse
v. h. vifage , & par le ton de fa voîx , que
Tu quis es ? c'étoit le Seigneur , qu'aucun d'eux
lcientes quia - > • ° . , • * /-/ i i -
Dominus cft. n eur pas la moindre penlee de lui
demander qui il étoit.
Lorfqu'ils fe furent aflîs, Jésus fe
mit avec eux pour les fervir. H
fus7&niaccei- ?/n le Pain & le poiflbn , & leur en
pit panem , fit la diftribution. Ce fut la troifie-
& pifcenTiï- me £0*s q11^ apparut a {qs Difciples
jminer. Hoc affemblés , en comptant pour la pre-
manifefilcus° rniere celle du Dimanche de laréfur-
eft jefus dir- re&ion au foir ; & pour la féconde
cjpulis fuis ,11 • r r r . \ r^
cùrn refurre- ceUe qui le ht huit jours après. Car
jiflet àmor- l'Evangile n'a pas égard à plusieurs
autres apparitions qui fe firent à des
particuliers.
x.Commen- lt Jefus confie Ces brebis à Pierre.
datio ovium J *i <t
Petto.
cùm ergo ÏH- APr" qu'ils eurent mangé ,
fraadi/Tenc , Jésus voulant confirmer à Pierre la
charge de fouverain Pafteur de fes
brebis qu'il lui avoir donnée. Car
encore que la première donation fon-
dée fur fa parole &: fur fon ferment
demeurât toujours ferme & inébran-
lable, fans avoir reçu aucune attein-
te par fa chute , il voulut néanmoins
empêcher que les hérétiques n'en
pulîent tirer de fâcheufes conféquen-
ces contre fon autorité. 11 lui cou-
DE L'EvANG.Ch.CXLVIlI. 12)
firma cette charge en préfence de
trois Apôtres & de trois Difciples ,
comme repréfentant le auttes. Pour
cela le Seigneur plein de miféricorde,
bien loin de lui reprocher fa faute ,
qu'il lui avoit déjà pardonnée , fe
contenta d'exiger de lui autant d'actes
d'amour , qu'il en avoit fait de re-
noncement : Se pour marquer plus
diftinttement fa perfonne , il le dé-
signa par fon premier nom , & par
celui de fon Père.
i. Simon fis de Jean > lui dit- il j dicit sîmonl
rri aimer-vous plus que ceux-ci f corn- Petro Jefus «
1 a i t Simon Joan-
me vous vous en vantâtes dans le njS t diiigw
dernier fouper , en m'aflurant que mePlu$hisî
quand tous [çs autres m'abandonne-
roient , vous ne m'abandonneriez
jamais. Pour répondre jufte à cette
demande _, il eût fallu pénétrer dans
le cœur des autres , & mefurer fon
amour avec le leur , pour s'en donner
la préférence. Il n'eut garde de le
faire : mais devenu plus humble &
plus prudent par fa chute, il fe con-
tenta d 'exprimer ce qui fe pafTbit dans
fon cœur , en laiffant à Jésus le juge-
ment qu'il en devoit faire par rapport tzhmt Do-
r . i i • i- -I niine , tu
aux autres. Seigneur ', lui dit-il , fcis qluaanio
vous feaver que je vous aime. Paiflez rc- Dicit ei :
mes agneaux , lui répondit Jésus. mzQi, *
Kiv
214 A N A L Y s r
». if. 2. Peu après il lui répéta la mê-
picit ei ite- me demande abfolument 5 & fans
rum : Simon r . • r i /•
Joannis, di- raire comparaiion de Ion amour avec
hgis me ? Ait ce|Lli des autres : Simon fils de Jean .
îili : etiam . . i s\>- t ■ 1 •
Domine , tu rn aimc^-vous t Oui Seigneur j lui
fcis quiaamo dit-il , vous faver que je vous aime,
te. Dieu ei : ' J <- 7 i • ' j-
Pafce agnos Paijfe^ mes agneaux ., lui répondit
meos' JESUS.
Diciteirer- , Enfin il l'interrogea pour k
tio , Simon ^ r • r . ri j t
Joannis, a- troilieme rois : oimon jils de Jean
mas me? m> ' aimey-vous. Cette troisième que-
stion donnoit naturellement cette
idée 5 que Jésus fe dériant delà fin-
cénté des deux premières protefta-
fions , en exigeoit une troisième , ôc
obligeoit Pierre avant que de la faire,
à fonder férieufement ia fîtuation de
fon cœur à (on égard. D'ailleurs
comme il fe fouvenoit que Jésus lui
avoit découvert la vanité de fa pro-
mette , il craignit qu'il n'en fût de
fon amour comme de fon courage \
Contrifta- & il fut fenfiblement affligé de cette
tnseftpetrus, troi^erne -demande. 11 en appella
quia dixit ci , . , . . r j r
tertio, amas néanmoins a la connoiitance de Je-
wki Je cu.it sus Seigneur j lui dit- il , vous faver
ci : Domine , O . ? ri
tuomnia no- toutes chojes j vous Jave% que je vous
m.5 n Uis aime.
quia amo ce, ' r . , , n .
On peut faire quelques renexions
fur cette triple confeilion.
i. Elle eft vifiblement une retra-
de l'Evang. Ch.CXLVIII. 11$
dation des trois renoncemens qu'il
avoit faits chez Caïphe. Il conçue
depuis que Jésus ne lui avoit par fait
tant d'intetrogations par défiance ,
mais par forme de juitice 3 puifque
l'amour devoit au moins tirer de fa
bouche auront de confeilions , que la
ctainte de renoncemens.
i. Jésus le rend , ou plutôt il le Paf£îxît0Cve<
confirme fouverain Pafteur de (es meas.
agneaux & de fes brebis, en compre-
nant fous les agneaux tous les peu-
ples , &c fous les brebis les Pafteurs
fubalternes qui engendrent les
agneaux. Ainfi il n'excepte rien de
fa Jurifdiction , & tout ce qui porte
le nom de brebis de Jesus-Chiust eu;
fournis à fa int Pierre.
3. 11 ne fait pas en fecret cette dé-
flation réitérée , mais en préfence de
plufieurs témoins j &c même des
principaux Apôtres , afin qu'aucun
nen prétendit caufe d'ignorance , ôc
que tous ceux qui avoient été feanda-
lifés de fa chute , fufient édifiés par
fa confefiion , 8c informés de ion
affermilTement dans la primauté de
l'Eglife.
Kr
il6 Analyse
D. il
5. Pr*du: 3. Prédiction du martyre de Pierre!
tio mtrtyru ^
Pétri.
Amen, amen JY; Jésus le cohfola de la peine
dico cibi ; qu il lui avoit faite , en lui promet-
tant à lui-même avec ferment qu'un
jour il ne manqneroit pas, comme il
cûmeffes ju- avoit fait à Toccafion du martyre ,
bl°r \c\niu & qu'il répareroit ce qu'il avoit per-
ambuiabasu- du. Qu'au lieu que dans fajeuneffè
cimV°aubtem ilfe ceignoit pour le voyage, & alloic
fenueris,cx- où il vouloit , lorfqu'il fera vieux ,
tendesmanus »\ /^ \ r ■ o. » -,
tuas,ôcaiius " étendra les mains, & qu un autre
te cinget , & après l'avoir ceint le mènera où il ne
ducet quo tu • 1 ti r rr '
non vis. Hoc voudroit pas aller, lixpreilion enig-
autem dixit matique du fupplice de la croix que
qua morte * lerre devoit fourrrir , & qu il avoir
ciarificaturus déjà fouftert pour la gloire de Dieu,
cflet Deura. * ', r • j /• •/* t?
lorique iaint Jean ecrivoitlon fcvan-
gile. Pour l'obfcurcirun peu , Jésus
changea l'ordre des parties de ce fup-
plice , qui font i. D'être lié de cor-
des. 2. D'être mené à la croix, j.
D'étendre (es mains fur le travers.
4. Et d'y être attaché avec des clous ;
au lieu que J e s u s a mis l'extention
des mains devant les autres parties.
Après cette prédiction Jésus fe
«lîxlffe^didt ^eVa ^U ^eU 0U ^ ^Zon an^S ) & POUr
ei : sequere l'exhorter à ce grand effet de fou
amour, il ajouta : Suive\-moi\Q&-
Bie.
de i/Evang. Ch.CXLVIII. 117
a-dire , imitez l'exemple que je vous
ai 1 r Conrerfat
orme, comme prelentementvous Petrus vidic
allez marcher fur mes pas. Pierre fe »Hum difci-
t \ pulum quem
rerournanr vit Jean qui venoit après diiigcbat je-
lui , & qui fe défigne par fa marque fus fequen-
ordinaire du Difcipie que Jésus ai- recubiuc" in
moit , à laquelle il en ajouta deux cœna fuPcc
es, d avoir repole la tête iur ^XiC: D0mi-
fa poitrine , & de lui avoir demandé ne » 9"is cft
h , , . i • r»- • qui tradec te?
qui le devoir trahir. Pierre curieux Hunc ergo
de fa voir le fort de fou ami , & cum vidiïkt
, , r . , Petrus , dixit
croyant que Jean qui n oioit pas le jefu : Domi-
demander feroit bien aife de l'ap- ne,hicaurern
. .. v T . r quid ! Dicic
prendre _, dit a Jésus en le montrant: ei jefus : sic
Et celui-ci . Seigneur _, que deviendra- eum ,vol°
, / o \' 1 maneredonec
t-il r 01 je veux , répondit Jésus ^ veniam, quid
qu'il demeure en vie jufquà ce que je ^ te : tume
vienne _, que vous importe ? Pour vous
fuive^-moi.
Cette réponfe donna lieu au bruit Exîîtergo
1 • r fermo ifte in-
qui courut entre les rreres que ce ler fratres,
Difcipie ne mourroit point : quoi- <îuia «Jjfcipir-
T£ , a j- > 1 lus ilk non
que Jésus n eutpasditqu îlnemour- m0ritur. Et
roit point, mais que Pierre ne devoit non dixir ei
. r r i r f , Jefus , non
point le mettre en peine li Jean de morkur , fed
meureroit en vie iufqu'à fon retour. CïC eum V<?1°
^ . . r ' . * manere do-
Paroles oblcures qui ne peuvent re nec veniam,
cevoir ni le fens d'immortaliré que qu-^adic?
plufieurs leur donnent , & qu'en effet
elles ne portent point ; ni le fens d'u-
ne mort paifible de non fanglame ,
K vj
nS Analyse
D- "• puifque toute forte de mort, foitna*
tutelle ou violente , eft pour chacun
le tems de l'avènement de Jesus-
Christ,& que ce fens convient aufïi
à la mort de Pierre , qui eft fans
doute demeuré fur la terre jufqu'à ce
que Jesus-Christ foit venu pour l'en
retirer. Enfin cet avènement de Je-
sus-Christ reçoit encore moins le
fens du liège de Jérufalem , dont il
ne s'agit point ici. A quel propos
borner la vie de faim Jean à la ruine
de Jérufalem , qu'il a furvccu de plus
de 25. ans ? Voye\ la. DiJJertation
XXXIX.
Il fernble que les fidèles. d'Éphefe
ont inféré la claufefuivante; i.Pouf
cip^ïus" mîf; apprendre a toute i'Eglife^quel'Au-
qui te/timo- teur qui a écrit cette hiftoire Evan-
ttà% g^ique , Si qui en a rendu témoi-
&c fcriphc gnage , eft ce Difciple même donc
mTs^quVa J^sus parloit. 2. Pour foufcrire à font
verumeft re- cémoignage de en reconnoîcre la vé-
flimonium e- / \ r
jus. rue par leur lignature.
de L'EvAtfG. Ch.CXLIX. 229
CHAPITRE CXLIX. cap.cxli*
Huitième, neuvième & di- §;**' j.1?;
xieme Apparition. F* I,if*
OUava ,
1. Huitième Apparition en cima. apparï-
Galilée. tio-
1. Oftava
LA VIII. preuve fe prend de ZîuZ "*
cette fameufe apparition , que
les Anges & Jésus lui-même avoienc
fait annoncer par les femmes à tous
les Difciples. Il l'alîigna en Galilée ,
êc comme on le croit probablement
fur le mont Thabor , ou dans quel-
qu'autre montagne écartée.
i.Afin de ne paroître plus vifible-
ment aux yeux dts hommes , avec
lefquels il ne devoit plus avoir de
commerce après fa résurrection que
par la foi.
1. Pour ôter lieu aux ombrages
que Pilate auroit pris d'une ii grande
afTemblée , fi elle fe fut tenue dan*
la Judée, 3c auprès de Jérufaiem.
3. Pour oter moyen aux Juifs Ces
ennemis de la calomnier comme une
révolte ou une confpiration contre
l'E
m pire.
'P
i$° Analyse
A. tî.%. is. Les onze Apôtres, & tous lesaa-
&£îTf; "' très Difciples , fou de Judée ou de
a. x8. un- Galice, fe rendirent au jour nomme
éedm autem fur cette montagne que Jésus leur
bierunr in avolc marquée , & il apparut la en
taiiiaram,iu même tems , félon faint Paul à plus
«nontem ubi J^^ c ' \ rr * *»i 1 •
confiituerat de 500* rr^res. Auih-tot qu ils le VI-
îiiis jefus. f. rent , ils l'adorèrent tous , & ceux
ly. Et vifus a i i i '
eft piufquàm meme qui avoient le plus doute au-
juingencis paravant. Tous les foupçons furent
fratribus fi- lt-/r / ■ ■ > i V 'r
«ml. a. Et diiiipes par la clarté de la preience,
Tidentes eum & ds s'en retournèrent affermis pour
quidam au- jamais dans la foi de la Réfurre#tion
tem dubita- qu'ils dévoient prêcher par toute la
Verunt. 1 * *
terre.
i.NonaJa- 2. La neuvième à Jacques. La di-
cobo. Décima , . ... / r/ ri
in JerufaUm. xieme dans la ville de Jerujalem.
F. Deinde La IX. preuve eft l'apparition qui
cobordeindc fe fit à Jacques le mineur ; on n'en
Apoitoiisom- fait ni ]e tems ni Je lieu#
accedéns je- La X- efi: celle qui fe fit a tous les
fus locutus Apôtres apparemment le jour de
eft eis , di- . ,l r r rr a ^ ■ j ' 1 l 1
ten$ : 1 Atceniion. Apres avoir déclare la
uidance univerfelle que fon Père
.ui avoir donnée au ciel & fur la
nmnis p™ef- terre , fur les Anges de fur les hom-
tas incœlo , meS.
& in terra. T ti 1 r / 1 1»
I. Il leurconrera le pouvoir d exer-
cer par tout le monde & fur toutes
r,
t>ï l'Evang. Ch. CXLIX. i $ i
les âmes les fondions de l'Apoftoîat
par cette autorité dont ils étoient
déjà revêtus. IL II promit à ceux
qui croiroient , une double récom-
penfe pour la vie préfente , & pour
la vie à venir. III. 11 les munit de
tous les dons & de tous les talens
perfonnels , dont ils avoient befoiil
pour s'acquitter d'un fi grand mini-
Itère.
i. Il réduit à trois les fonctions de
leur Apoftolat.
La i. eft la prédication; il les en- Juntes erg*
voie par toute la terre prêcher l'E- b. in mun-
• i \ i / • r dum univer-
vangile a toutes les créatures railon- fum . p^i.
nables , comme étant toutes dans la «te Evange-
d/- / i i Ait i lium omni
îverhte de leurs pays & de leurs lan- creatura • a.
gages , les ouvrages du même Dieu , doceceomnes
formées par la même nn de 1 éter-
nelle félicité , & rachetées par le mê-
me prix de fon fang.
La 2. eft l'adminiftration du Bap baptîzantes
* . i t. i i* eosinnominc
terne qui comprend celle de tous les pams , &.
autres Sacremens , & il leur ordon- Filii'ôc^fïri"
ne de les baptifer au nom du Père,
& du fils , & du Saint- Efprit.
La 3. eft l'inftruction des fidèles <locentes eo»
hl / 1 11 • fervate on>-
ant le règlement de leur vie nia qu«curo-
& de leurs mœurs Ils doivent leur que man<U?i
apprendre de vive voix &c par leurs
exemples à garder tous les préceptes
2$i Analyse
a. 18. b. 16. qu'il leur adonnés , & à faire tout
C. z4. E. 1. A a , r . ' ,
F. 1. xj. ce qui elt neceilaire pour les mener
par l'Evangile a la vie bien-heu-
reufe. Ce qui comprend le pouvoir
de faire des Loix Eccléfialtiques , ôC
de les foutenir par des Cenfures.
IL II marque deux fortes de ré-
compenfes réfervées à ceux qui au-
ront cru , & qui auront reçu le Bap-
tême; reflTentieile & l'acceiToire.
B.Qui crc- La 1. eft le falut éternel , dont les
dideric , & • ' 1 1 r 11 1
baptizatus incrédules leront tellement exclus ,
fueiic,falvus qu.'ils encourront la damnation éter-
rononcrcdi- nelle. Il n étend pas cette peine a
dedc con- tous ceux qui ne feront pas baptifés ,
ûeranabitur. 1 1 T 1 r> a
parce que le deratir de Baptême peut
être fupplée dans les adultes par la
pénitence , &" qu'il dépend d'un mi-
nière qui peut manquer.
Signa au- ^a x récompenfe ce font diverfes
tem eos , qui r
crcdiderint , grâces gratuites , qui avoient lieu
h« fcquen- aans Ie commencement de l'Eglife
pour y attirer les infidèles , & qui
dans la fuite des fiécles n'ont été ac-
cordées qu'à des particuliers donc
Dieu vouloit honorer la fainteté.
»ito d^mo! C'eft 1. la puiflance de chafler les
nia ejidcnt: démons du corps des poGfedés. 2. De
çuJntur no- parler des langues nouvelles ou etran-
*is : gères. 3. De chaffer les ferpens des
Uin™ lieux qu'ils infecteront ., & de les
»e l'Evàng* Ch. CXLIX. i;t
tuer par leurs prières. 4. De ne re- fc-ffmortïfo
r r 1 ■ r » 1 rum quid bi-
cevoir aucun mal du poiion qu ils bcrinc, no»
auront pris , foit par contrainte , foit eis nocebit :
par mégarde. 5. De guérir les mala- fuper a*gros
*j i>- r ' 11 manus impo-
des par 1 împontion de leurs mains. nenc t &£e-
A tout cela il ajoute la promefle au- ne habebunt.
tentique qu'il fait à fon Eglife dans go vobifcum
la perfonne des Apôtres de demeu- fum omnibui
1 •/-, , l !!•/*>> diebus ufque
rer viliblement avec elle juiquaaa co-ifum-
la fin des fiécles , par une préfence «adonem G*
de protection & de venu efficace, par
la préfence de (on efprit dans fa con-
duite , Se par celle de (on corps dans
fon facrifice } promeîTe, qui emporte
nécessairement la perpétuité & la vi-
abilité de l'Eglife jufqu'à la Rn des
fîécles.
3. Promeffe du S aint-E fprit. *« tromlfi
7 M Jt fio SpiritâÊ
fanftï.
III. llles enrichit des dons nécef-
faires pour s'acquitter de leur char-
ge. Et pour cela les ayant affemblés E. I>It
pour la dernière fois , il leur ordon- convefeens
1 >»i 1 T' r pnecepic c'a M
na de ne point s cloigner de Jcrula- jerofoiymis
lem j mais d'y attendre l'effet de la ne difeede-
promelie du Père qu ils avoient ap- p;aarentpro-
prife de fa bouche , qui eft qu'au lieu miffionemP*.
1 T - t t» 1> 1 tris , quam
que Jeanavoitbaptile avec 1 eau,dans audiftis , in-
peu de jours ils feroient baptifés dans <iuit * Per ?$
1 c • rr • * Tii • meum : quia
le baim-Elprit même. Il leur promit jcannci qu*.
134 Analyse
A. is. B. \6. pofitivement qu'il leur enverroitl'Ef-
F. i^zy. " prit-Saint que le Père leur avoir pro-
dem baptiia- mis , & qu'ils n'avoient qu'à demeu-
yhaqua.voi rer dans la ville, jufqu'à ce qu'ils
autem bapu- r /T- A i> i * t»
zabimini spi- rulieiir revêtus d en-haut d une vertu
ritu fanao & j'une folxe noUvelle.
nonpoltmul-
tos hos dies. C. Et ego micto promifTum Patris mei in vos : toi
autem fedete in civitate quoad ufque induamini virtute ex alto*
t. îgitur Ceux qui fe trouvèrent à cette der-
4m cwivene- rr t_l ' • '
tant interro- niere allemblee , toujours préoccu-
pant eum , p^s ju royaume temporel d'lfraê'1 ,
dicenres:Do- ,r . , J « r r - r
mine , fi in lui demandèrent li ce ieroit ennn
tempore hoc £ m CQ tems qu^ \Q rétabliroit.
reftuues reg- m ; t
aura ifraci ? Il ne leur répondit rien touchant
la nature de ce royaume qu'il étoit
venu fonder dans le monde. Ulailla
au Saint- Efprit à leur faire cette in-
ftruction dont ils n'étoient point en-
Dixit autem core capables. Mais pour le tems
eh : Non eft de ce rétabli(Tement vifible , il leur
veltrumnolie , ,. ,/ • \
tempora vel répondit que ce n etoit point a eux
momenta, ^e favojr |es tems & les momens
quae Pater po- , . 0 , , ,r / i j-r
fuitinfuapo- dont le Père s etoit relerve la dilpo-
teftate , fed Çn\on, Qu'ils dévoient feulement fe
accipietisvir- , ^v . . . c
tutem fuper- préparer a recevoir la vertu oc la tor-
▼enientis spi- ce ju Saint-Efprit , qui defeendroit
mm fandti jn > z1 i • r
vos, en eux , & qu armes de cette puil-
& eritis mihi fance , ils lui ferviroient de témoins
telles in Je- pour prêcher fa Divinité , fon In-
rufalem . & r r. « r r» T n.' J
i» omui ju- carnation , & la KeiurreCtion dans
mum ictix.
de i/Evang. Ch. CL. 1 3 5
Jérufalem , dans toute la Judée, dans dafa.» * s*:
i r» • J c o • C » maria, & uf-
la Province de Samarie^juiquaux que ad uki-
cxtrémités de la terre.
Il ne nomme point la Galilée , foit
que la patrie des Apôtres leur fût
afTez recommandée par elle-même ,
ou qu'il n'eût voulu leur marquer que
des terres ennemies , ou hérétiques ,
ou infidelles , dont ils auroieut eu
peut-être de Péloignementjfeit qu'el-
le fût comprife fous le nom de toute
la Judée.
CHAPITRE CL.
Ascension.
ENfin l'hiftoire Evangélique fi-
nit , I. Par l'élévation de Jésus
au Ciel. II. Par la prome(Te de fon
retour. III. Par la préparation des
Difciples à la miflion univerfelle.
IV. Parla proteftation de l'Evaneé-
lifte. ë
1. 11 les mena hors la ville jufqu'à
Bethanie } & après qu'il leur eut
donné fes dernières inftructions , il
éleva fes mains , & il leur donna fa
bénédiction. Dans le tems qu'il les
bénitfbit , il les quitta , & s'éleva
C A F. CL.
B. 16. C. 14*
D. xi. E. i.
Afcctnfia*
C. 14.Edu-
sic autem eos
foras in Be-
thaniam. B.
16. Et Domi-
nus quidcm
Je fus poft-
quàm locu-
tus cft cis *
I. vtdcnùbui
i$6 Analyse
h. i*. c. 14. vers le Ciel à leur vue , jufqu'à et
D. 11. E. 1. , , 1, IL*
.„. . qu une nuée 1 ayant reçu le cacha a
iHn clevatus ,* \ , r ' x , , ,
eft b in cœ- leurs yeux , 6c il s aine a la droue de
lum : C. Ec [)ieu<
elevatis ma-
iiibiis fuis , benedixit cis : Et faftum eft , dum benediceret illis ,
rccciHcab cis ; 2c ferebaciu in cœlum : E. Et nubes fufeepit eui»
ab oculis eorum. B. Et fedet à dexcris Dei.
E.cumque Les Djfciples après l'avoir perdu
lntuer**ncur . l . l . r
in cœlum c- de vue , tenoient encore les yeux
ûntemillum, attaches au Ciel où ilmontoit, lorf-
cccc duo viri
afti-crunt que deux hommes vêtus de blanc fe
juxta iiios in préfenterent à eux avec ces paroles :
vclhbus al- r ^ . r
bis , qui & hommes de Galilée leur dirent- ils ,
ri GaTihei1* Pourau01 vous arrêtez-vous ici à re-
quid iiatis af- garder au Ciel, Ce Jefus qui en vous
lalum" hic quittant efi monté dans le Ciel „ en
3c fus qui af- reviendra de la même forte que vous
vXrc'ψ'/> ^fT vu monter. Us difparurent
lam , fievs- en même-tems. Aind Jésus dansle
admodumw- tems même de Ton Afcenlïon a fait
diftis cum po;:er a Ton EgUfe Paiîurance de fou
«untem in r î »
cœlum. iecond avènement.
c. Et ipfî 111- Les Difciples ayant adoré Je-
adorantes re- susdans le même Heuoù l'on dit que
grem funt in , n . -. * • i r i /
jerufaiem les velnges de les pieds lont demeu-
cùm gaudio rés imprimés fur le rocher , remplis
magno , E. a ., r % . j r
monte qui d une exceliive joie, s en retournèrent
vocatur oii .-\ Jénifalem du mont qu'on appelle
veti , qui cft , rv.. . ,. , j1, -11 J 1
iuxta jerufa- des Oliviers , éloigne delà ville de la
lern , fabbati |oneueur. du chemin qu'on peut faire
habens ncr. yTB 1 r
dans un jour de oabbat. Depuis ce
de l'Evang. Ch. CL. 237
jour ils écoient continuellement dans c- Ete"n«
le temple , louant & bemilant Dieu, lcmpio , îau-
Et après qu'ils eurent reçu le Saint- Nantes, &be-
rr K .. * , T, >r, nedicmies
Jbiprit ils partirent cie Jeruialem pour Deum, amen»
aller prêcher l'Evaneile par toute la B- J.11' aiuera
terre , & le Seigneur agilioit invili- dicavemuc
blement avec eux , & confîrmoitleur ubuiue « D°-
• 1 j m p mmo coope"
parole par les miracles dont ils 1 ac- rame, & fer-
raon^m con-
compaçnoient. % ;
tr 11 1 r fumante , fe-
IV. 11 y a tant d'autres choies mer- quemibus &■
veilieufes que Jésus a faites, que (ion *™'ll Sunc
les écrivoit en détail, je ne crois pas, aucemScalia
dit le Difciple bien-aimé de Jésus , Eft*iefK
que le monde tout entier pût corn- <\ux fi feri-
dl 1 • » ' bantur per
re tous les livres qu on en ecri- fu)gula t nec
roit : Ce qu'on peut expliquer par îpwm arbi-
1 11 j 1 n ' J •• J trormundum
hyperbole de la valte ctenduc du C2pere po{^e
monde, ou peut-être de l'intelligen- eos,quifcri-
ce des nommes du monde , qui ne broJt
feroient pas capables de comprendre
ou de croire tout ce qu'on en écri-
roic.
23*
DISSERTATION XXIX.
Luc. C. XXII. v. 15. Defiderio
defideravi hoc Pafcha mandu-
care vobifcum aniequam patiar.
Concord. Cap. CXXVIII.
ON fait deux queftions fur la
dernière Pâquede Jesus-Christ,
dont Tune regarde le fait , & l'au-
tre le tems, toutes deux importantes
&: néceifaires pour une parfaite con-
noilîance de î'Hiftoire Evangélique.
La 1. eft fi Jesus-Christ a fait la der-
nière Pâque , comme c'eft le fentiment
de toute l'Eglife, & des Sociétés mê-
mes qui en font féparées ; ou s'il ne
Ta pas faite , comme l'ont cru quelques
Auteurs , dont l'opinion éteinte ou af-
foupie jufqu'ici , a été réveillée par
l'Auteur de l'Harmonie que j'ai déjà
cité , foûtenue dans fa Lettre au R. P. F.
ôc depuis dans fon Traité Hiftorique
de la Pâque. La IL queftion efr quand
Jesus-Christ a fait la dernière Pâque,
s'il l'a célébrée le même jour que les
Juifs , ou s'il a anticipé ce tems d'un
i4o Dissertation XXIX.
jour, foit pour fe conformer à la Loi
que les Juifs quittoient pour fuivre leur
Tradition , foit dans la vue de fa Paf-
fion prochaine.
Je traiterai l'un & l'autre dans deux
DiOertations , en commençant par celle
du fait. Ce n'elt pas ici le lieu de trai-
ter cette matière avec toute l'étendue
qu'elle mériteroit. Cet Ouvrage ne doit
traiter les difficultés qu'autant que cela
eft néceflaire, pour ôter les obftacles
qui arrêtent ou qui embarraflfent la le-
cture. J'efpere néanmoins en dire affez
pour fatisfaire ceux qui de bonne foi &c
Ùlîis prévention cherchent la vérité, en
péfant dans une balance droite les rai-
10ns qu'on allègue de part & d'autre.
§. i.
Que Jefus-Chrift a fait la dernière Va-
que qui précéda immédiatement fa
mort. Preuves par V Ecriture,
Toutes les expredîons de l'Ecriture
font manifeftement pour cette propor-
tion. On y voit que la Pâqne eft im-
molée par les Juifs , propofée à Jesus-
Chiust par fes Difciples , commandée
par Jesus-Christ, apprêtée par deuxde
fes Difciples , enfin actuellement man-
gée.
Dissertation XXIX. 241
gée. Le premier jour des Azymes où les
Juifs immoloient la Pâque. Marc. 14,
il, & où l'on étoit obligé de V immoler ^
félon faine Luc ,22,7. Les Difciples lui
demandèrent où il vouloit qu'ils allaf-
fenc lui préparer toutes chofes pour
manger la Pâque. Cette queftion lui
propofoit deux chofes. La 1. s'il agréoit
qu'ils allalFent lui préparer la Pâque.
La 2. en quelle mailon il vouloit qu'ils
fiifent cette préparation. Jefus - Chrift
confentit à la première demande. Alle%>
leur dit-il , apprêtez-nous ce qu'il faut
pour manger la Pâque. 11 répondit à la
féconde j en leur marquant le lieu. Il
adreflTa Pierre & Jean à un certain Dif-
ciple , avec ces paroles : Mon tems ejl
proche _, je dois faire che^vous la Pâ-
que avec mes Difciples. Ils firent ce que
Jefus-Chrift leur avoit ordonné , & ils
préparèrent la Pâque. L'heure étant
venue, il fe rendit fur le foir au lieu
marqué, Pc il leur témoigna qu'il avoit
déliré avec ardeur de manger cette Pâ-
que avec eux avant que de fouffrir.
On voit dans tout ce narré , tiré de
faint Matthieu , de faint Marc & de
faint Luc , 1. l'intention de manger la
Pâque , 2. la préparation qu'en font deux
Difciples, 3.U mancjucaçion a&uelle.
Tome IFt L
242. Dissertation XXIX.
Sur quoi on peut raifonner en cette ma-
nière.
Dans tous ces lieux , où le mot de
Pâque eft répété deux fois, & fous-
entendu deux autres après le verbe 9pré+
parc^-nous _, parate _, ce mot ne change
point de lignification : la Pâque s'y
prend par-tout dans le même fens , parce
que toutes les actions. dont l'objet eft la
Pâque font' tellement liées enfemble ,
qu'elles ne fe peuvent féparer. L'immo-
lation publique eft l'occafion de la pro-
portion. La proportion eft fuivie du
commandement de la préparer j le com-
mandement, de la préparation ; & la
préparation , de la manducation ac-
tuelle.
Or dans l'immolation j necejje erat
cccldi Pafcha : ce terme n'a point d'au-
tre fens que celui de l'Agneau Pafchal.
Car de toutes les chofes qui étoient né-
ceflaires dans cette fête , il n'y avoit que
l'Agneau qui pût être tué, & qui fût
çn effet immolé par les Juifs. On ne
prétendra pas fans doute qu'on tuoit les
herbes ameres , <Sc qu'on égorgeoit les
pains fans levain. La Pâque donc ne
peut lignifier autre chofe que l'Agneau
dans tous les autres lieux où elle eft
exprimée.
Dissertation- X \ ! \"
t incontefta-
blc. Toute la difficulté' eft dans la pre-
: e , qui porte que daiu tous les lieux
où le terme de Pàque eic employé , 1!
ne change point r.
préiendra peut î tré cjue la I ini-
tiant l'Agneau Palthal quand il
de l'immoler , e toute autre cl.
quand il s'agit d is qui
• fe periuadec féneaferriefit
u hors d-apparen 1 'unir,
tion n'cùVelle pas une partie i ;nc
la | le de la | m-
reeni une l' "e être
un Agneau q m l'immole, .
en laimc ai:
i Azyme quand elle
( induit
es allé
icr le | >ur des A
i il parok par ! rMai
dcm.in ' • • ■ \\c\x
ils 1 u 1 1 lent la I
ilors le
>u:umc de l'immoler : Et primo die
rum c
pjrcmus ribi nt mandat
i 4 , i
«olacion fci rtal aux IV
JL44 Dissertation XXIX.
pour demander à Jefus Chrift en queK
lieu ils lui dévoient apprêter la Pâque,
& qu'ainfi la prépaier ôc l'immoler
étoient la même choie.
Or il ell certain par la liaifon de tous
ces palfages que Jefus-Chrift mangea
de la Pâque que les Difciples lui avoient
préparée. 11 mangea donc de la Pâque
immolée.
On me niera peut-être encore cette
féconde proportion. Mais elle fe dé-
montre invinciblement , parce que la
rnanducation eft exprimée quatre fois,
comme le but & le terme de toutes les
autres actions qui la précèdent.
Elle eft le terme de la proposition des
Difciples : Où vous plaît - il que nous
allions vous apprêter ce qu'il faut , afin
que vous MA NG I E Z la Pâque ; ut
MANDVCES Pafcha?
Elle eft le terme de l'intention de
Jefus - Chrift , & des commandemens
qu'il fait à fes Difciples : Alle% nous
préparer tout ce qui eft néceffaire , afin
que nous MANGIONS la Pâque..
Euntes _, parate nobis Pafcha > ut
MANDUCEMUS.
Elle eft le terme de la demande que
Jefus-Chrift lit au Difciple inconnu >
de lui prêter une chambre : Ou eft.
V appartement où je dois MANGER la\
Dissertation XXIX. 245
Pâque avec mes Difciples ? Ubi ejl di-
verforium ubi Pafcha cum Difcipulis
meis MANDUCEM?
Elle eft le fujec de la préparation
qu'en firent les Difciples : Où voulez-
vous que nous allions vous préparer la
Pâque à MANGER ? Ubi vis pare-
mus tibi comedere Pafcha} Us la pré-
parèrent donc, à moins qu'ils ne l'ayent
oublié en chemin; & que par un rare
éblouiftement ils n'ayent fait toute autre
chofe que ce qu'ils écoient allé faire.
Elle eft enfin exprimée comme ac-
tuelle. Jefus-Chrift étant à table témoi-
gna à (es Difciples qu'il avoit dès long-
tems fouhaité avec ardeur de manger
cette Pâque avec eux. Dejiderio dejî-
deravi hoc Pafcha MANDUCARE
vobifcum. Ce pronom démonftratif hoc
ne s'applique qu'aux chofes préfentes Se
qui frappent les fens. Si donc les Dif-
ciples apprêtèrent la Pâque , afin que
Jefus-Chrift en mangeât , il eft certain
que Jefus-Chrift mangea de la même
Pâque qu'ils avoient apprêtée, & qui
lui fut fervie. Car enfin qui l'en auroic
empêché ? Qui auroit pu fruftrer ces
defirs û ardens , & rendre inutile cette
préparation. Et h d'ailleurs la Pâque ^
que les Difciples préparèrent, eft celle
que les Juifs immoloient, ôc qu'on de-,
L iij
±4^ Dissertation XXIX.
voir immoler félon la Loi, je dis l'A-
gneau Pafchal j pour être perfuadé que
Jefus-Chrift mangea de l'Agneau Paf-
chal à la dernière Cène , il n'en faudroit
pas davantage à tous les efprits de bon-
ne foi que cet argument qui eft la réca-
pitulation de tout ce que je viens de
dire.
Les Difciples préparèrent la même
Paque &: de la même manière que les
Juits qui Timmoloient. Or Jefus-Chrift
mangea de la même Paque que les Dif-
ciples avoient préparée. 11 mangea donc
d'une Paque immolée. Cela eft d'autant
plus vrai , qu'encore que le nom de
Paque pût , le long de la femaine des
Azymes , s'appliquer par analogie à
d'autres victimes \ il eft néanmoins hors
de doute que le premier jour il fignifioit
] 'Agneau qui étoit la vraie Paque, la
principale circonftance du feftin Pafchal,
qui communiquoit ce nom à toutes les
autres , & il n'en pouvoir fignifier au-
cune à fon exclufion.
§. h.
Preuves par la Tradition Eccléjiajlique.
J
'Appelle Tradition le fentimenr una-
nime des Pères , touchant un point
Dissertation XXIX. 247
dont ils ont écrit, & qui a été reçu par
l'Eglife depuis leur fiecle jufqu'en nos
jours. Je dis des Pères qui en ont écrit ^
car il n'ell pas néceffaire que tous les
Pères ayent parlé d'un article pour le
faire paflfer en Tradition. Il fufïit que
ceux d'entr'eux qui en ont écrit , ôc
dont les Ouvrages font venus jufqu'à
nous,, en ayent eu le même fentiment
qui règne encore aujourd'hui dans l'E-
glife.
On ne peut refnfer cette notion de la
Tradition Eccléiiaftique au point que
nous agitons ici. Ceux des Pères qui
ont parlé de la dernière Pique où Jefus-
Chrift a fini fa vie, enfeignent tous
qu'il l'a faite. Et on n'en doit point ex-
cepter ceux qui moralifent ou qui tour-
nent en allégorie les paifages que nous
avons expliqués ci - delfus. L'allégorie
ni la morale ne détruifent point le fens
littéral.
Cette opinion règne encore par toute
l'Eglife Catholique ; tous les Interprètes
de l'Ecriture l'expliquent en ce fens; tou-
tes les Eglifes en retendirent dans les
Sermons du Jeudi Saint & du jour du
Saint-Sacrement; on l'enfeigne dans
toutes les Ecoles de Théologie ; on l'ap-
prend même aux enfans dans les Caté-
chifmes un peu étendus \ on la chante
L iv
248 Dissertation XXIX.
dans les Offices Eccléfiaftiques ; & il y
a des Théologiens qui en font un dog-
me de foi fui ce principe inconteftable;
qu'un point de fait ou de doctrine ,
contenu dans l'Ecriture , expliqué unani-
mement en ce fens par tous les Pères qui
en ont écrit > appartient à la foi de l'E-
glife'
Ce qui eft un grand préjugé de vérité ,
c'cftque toutes les Sociétés féparées de
Communion d'avec l'Eglife Catholi-
que, les Grecs , les Proteftans , & tout
ce qui eM comptis fous ces deux noms,
conviennent avec elle dans ce point , que
Jefus - Chrilt a fait la dernière Pâque ,
excepté quelques-uns dont le petit nom-
bre ne mérite pas de faire exception
dan»s la généralité des autres.
Tout ce que l'Auteur de l'Harmonie
oppofe à. leur autorité , eft qu'il repro-
che à Origene , qu'il ne paroît pas
avoir étudié ce qui regardoït la Pâque ,
parce qu'il compte le jour quon immo-
loït V Agneau Pafchal pour un des fept
jours pendant lefquels la Loi comman-
doit de ne point manger de pain levé, p.
351. Ce qui eft néanmoins vrai en un
fens, & félon l'Auteur même j comme
on le verra dans fon lieu*, Se qui d'ail-
leurs n'eft qu'une bagatelle. 11 fait le
même reproche à faint Auguftin, qu'il
* Voyci ci-dejjbus, $. XXXI F, p. SP8.
Dissertation XXIX 2 49
ne paroit pas dans aucun de Je s Ouvra-
ges qu'il ait étudié cette matière , &
qu'on ne doit pas relever toutes les pa-
roles qui lui font échappées. A faint Am-
broife, qu'il fuppofe ce qu'il dit, fans
en donner de preuves , p. 3 5 5 . A faine
Jérôme , que ce nejl point une quejlion
qu'il agite , cejl un petit mot dit en paf
fant. Reproches vains ôc frivoles qui
ne font fondés que fur ce que ces faines
Docteurs ne fe font pas étendus fur cet-
te matière } au lieu que c'eft une mar-
que évidence , d'un côté que l'Ecriture
eft fi claire fur la dernière Pâque de
Jefus-Chrift , qu'ils n'ont eu befoin que
d'alïurer ce qu'elle dit, fans s'y arrêter
davantage y ôc de l'autre , que cette
créance touchant la dernière Pâque étoit
fi généralement reçue de tout le monde,
que c'eût été perdre fon tems de faire
de longs difeours pour établir un point
qui n'étoit contefte de perfonne.
§. m.
Que Jefus-Chrijl a obfervé dans la der*
niere Pâque la circonjlance du lieu
ordonnée par la Loi.
Après avoir établi le fait de la der-
nière Pdque , il eft aifé d'en ailurer le
L T
250 Dissertation XXIX.
droit à l'égard du tems & du heu. Ec
pour commencer par le lieu , Jefus-
Chrifl: la célébra dans Jérufalem chez
un particulier de fes Difciples _, qui lui
prêta ia maifon pour cette fainte céré-
monie. L'un & 1 autre conformément
à la difpofition de la Loi., qui ordon-
noit,
i°. Que dans chaque famille on prît
un agneau ou un chevreau d'une année,
& qui n'eût aucun, défaut : Tollat unuf-
quifque agnum pcr familias & domos
fuas. Lxod. en.
2. Que fi une famille n'étoit pas afîez
nombreufe pour le manger tout entier,
elle emprunteroit de la maifon la plus
proche autant de perfonnes qu'il lui en
falloir pour cela, n'étant pas permis
d'en réferver aucune partie pour le len-
demain.
5. Que rout le peuple Timmoleroit,
non pas collectivement, ce qui efl im-
poflible , mais chacun le fien , & cha-
cun chez foi entre deux foirs , c'eft-à-
dire , dans le tems qui fe pâlie entre
te foleil couchant 6c le foleil couché j
ce qu'on a eftimé à deux heures de tems ,
depuis les trois heures du foir jufqu'â
cinq, comme nous l'apprenons de Jo-
feph j parce qu'on fe réfervoit une heu-
*e pour le faire cuire avant la grande
Dissertation XXÎX. 2 5 1
fête des Azymes, qui commençoit à 6
heures dans l'Equinoxe , & que cecce
cuifine n'eût pas été permife j fi la fête
fut tombée dans le Sabbat, comme il
arrivoit fouvent. Un efpace de tems fî
court eft une preuve invincible que cha-
que famille devoit immoler fon agneau
à part, comme Moïfe l'exprime nette-
ment : Ite tollentes animal per familias
vejlras , & immolate Phafe ; parce qu'il
falloit que l'immolation fe fit par - tout
en même-tems.
4. Que fous peine de la vie on feroic
l'afperiion du fang de l'agneau fur le
haut de la porte. Autre marque certai-
ne que rimmolation s'étoit faite dans la
maifon même, parce que dans l'incer-
titude de l'heure de du moment où de-
voit palfer l'Ange exterminateur cette
nuit - li , Tranjîko noble illa ; aucun
n'eût ofé dans un fi grand péril diffé-
rer tant foit peu après l'immolation , une
afperhon fi nécefiaire.
5. Qu'on mengeroit la Pâque debout,
le bâton à la main & dans la pofture
de voyageurs , pour être toujours en
état de partir au premier fignal. Voilà
les Replemens touchant la Paqne que
Moïfe fit en Egvpte : à quoi il en ajouta
depuis un (■>. Qu'il ne ferait pas permis
de l'immoler dans toute autre ville que
Lvj
i$i Dissertation XXIX,
dans le Heu que le Seigneur auroit choiji
pour y établir fon nom. Deut. c. \6 y 5.
On ne peut douter que Jefus-Chrift
n'ait accompli à la lettre tous ces Re-
glemens ; de même ceux qui paroiflent
n'avoir été faits que pour l'Egypte. Car
ce qu'on fait la première fois par né-
cefîité , on le fait dans la fuite par Re-
ligion , & par cérémonie. Il a immolé
l'Agneau Pafchal dans une maifon par-
ticulière par les mains de deux de ^qs
Difciples fes fubftituts, ôc il l'a man-
gée avec fa famille dans l'enceinte de la
ville de Jérufalem , qui eft le lieu que
Dieu avoit choiiï pour y habiter , de-
puis que David eut fait tranfporter l'Ar-
che avec le Tabernacle 3 de Gabaa où
elle étoit auparavant , dans fa maifon
bâtie fur la montagne de Sion , qu'on
appelloit la Cité de David > & que Sa-
lomon l'eut placée dans le Temple qu'il
avoit fait bâtir , & qui fuccéda au Ta-
bernacle.
§. iv.
Témoignage de Jofeph & de Philon
touchant le lieu de l'immolation de la
Pâque : Ce dernier jujlifié du fehif-
me.
Rien n'eft plus conforme à la difpo-
Dissertation XXIX. 25^
fition de la Loi que toute cette conduite
de Jefus-Chrift , pour ce qui regarde le
lieu où il a célébré la Pâque. 11 eft déjà
confiant par l'Ecriture & par le témoi-
gnage de Jofeph , que dans l'Egypte les
Hébreux l'immolèrent chacun dans leur
maifon , ou dans une maifon empruntée.
Car il écrit que Moifeles diftribua com-
me par diverfes familles ou confrairies
qui dévoient manger la Pâque enfem-
ble, «T/ctTcfcJctc «/'* (ppcfcTp/ctf. /. 2. Ant.
c. 5 , qui eft le même terme dont il fe
fert ailleurs pour fignifier la compagnie
qui s'aftembloit pour manger chaque a-
gneau : G>V«p cTê çp&rpt et <wh$i iK&ïtiv
yiyviTcti Qvff/ctv. Moïfe ayant partagé
ainfi les Hébreux les affembla de tout le
pay s deGeften dans un même lieu, qui pa-
roît avoir été la ville de Rameffes , qu'ils
avoient bâtie : afin qu'ils y filfent la Pâ-
que enfemble , non fous des tentes qui
n'ont point de portes , fur le haut des-
quelles ils ayent pu faire les afperfions
du fang de l'agneau; mais dans des mai-
fons qui leur appartenoient , & qu'ils
prêtoient aux Hébreux étrangers.
Cette coutume de s'alTembier dans
une même ville pour y faire la Pâque,
eft demeurée depuis en ufage parmi les
Juifs , comme aufti celle d'immoler la
Pâque dans les maifons particulières.
*Î4 Dissertation XXIX.
On n'en peut douter après ce témoigna-
ge de Philon qui connoilToit bien les
coutumes de fa Nation : Au tems de
Paque _, dit- il, 1. 3. de la vie de Moïfe,
on rien ufe pas comme dans les autres
jours de Vannée ou les Laïques prefentent
leurs victimes à l'autel pour être immo-
lées par les Prêtres. Mais pour l'or-
donnance de la Loi tout le peuple facri-
fie lui-même _, chacun immolant à part fa.
victime de fes propres mains. Et dans
le Livre du Décalogue : La fête de Pa-
que eft lorfque fans attendre les Prêtres ^
les particuliers du peuple font eux - mê-
mes le facrijîce j & que tous les ans pen-
dant un jour dejliné à cette cérémonie _, la
Loi leur permet de faire eux-mêmes l'of-
fice & la fonction de Prêtres.
L'Auteur répond à cela _, que ces
paroles de Philon font d'un fchifmati-
que \ parce que , félon l'Ecriture , la
Pâque fe devoit faire à Jérufalem 3 Tr.
H.ft. p. 1 3 5 , & que Philon ne le dit pas.
Je ne fais n* fa perfonne a été fchifma-
tique, mai~ je fuis aiïuré que fes pa-
roles ne le font pas _, & que rien au
contraire n'eft plus conforme à la vérité
figurée par le facnrlce de l'Agneau Paf-
chdl.l)jeu voulut que chaque Ifraclite
en fut le Prêtre, pour exprimer ce fa-
ceidoce intérieur ôc fpirnuel donc cous
Dissertation XXîX. îjj
les Chrétiens font revêtus, félon le
Prince des Apôtres , pour offrir à Dieu
des hofties ipirituelles d'adoration 8c
d'action de grâces : Sacerdotium fanclum
offerre fpirhuaUs hoftias. i. Petr. c. 2 ,
v. 5. mais fur tout pour immoler la pre-
mière fois Jefus-Chrift dans le Baptême
par une entière application de fa morr.
Car ce que dit faint Paul , qu'il eft im-
poiîible de remettre de nouveau Jefus-
Chrift en croix pour la rémilîion de Ces
rechûtes : Rurfus crua 'figent es fibimet-
ipfis filium Dei , fuppoie qu'on i'avoit
déjà crucifié & immolé une fois pour
fes premiers péchés, & que ce facrifice,
dont chaque tidele eft le Prêtre , bien
loin d'être impoflible , eft aufii nécef-
faire qu'il eft méritoire & agréable à
Dieu. Or c'eft de quoi l'Agneau Paf-
chal facrihé par les Hébreux étoit une
excellente figure _, parce qu'il exprime
Jefus-Chrift attaché à la Croix; & le
facrifice exécrable àt% bourreaux qui
crucifièrent Jefus - Chrift , devient un
facrifice légitime de la part de ceux qui
dans leur cœur , comme dans un Te n-
ple , immolent & mettent en croix Je-
fus Chrift , en s'en appliquant le prix
de fa mort Pourroit-on mieux expri-
mer la figure de cette vérité de Reli-
gion j que par ces belles paroles de
'zyG Dissertation XXIX.
Philon : Que dans la fête de Pâque cha-
que maifbn devient un Temple augujle
& vénérable , 1. de Septenario.
Mais enfin voyons comment l'Auteur
de l'Harmonie s'y prendra pour le con-
vaincre de fchifme. // ejl confiant , dit-
il , félon l'Ecriture , que la Pâque fe
dev oit faire en Jérufalem. Philon le dit-
il ? p. 135. Mais dit-il le contraire ? On
juge de la créance d^s gens par ce qu'ils
enfeignent , 8c non par ce qu'ils n'en-
feignent pas, à moins qu'ils ne le duf-
fent , fuivant le delfein qu'ils s'étoient
propofé ; & Ci on me foutient le con-
traire, j'aimerois autant accufer de Lu-
théranifme un Auteur _, qui fans nier la
tranfubftantiation , affureroit fortement
la préfence réelle. Si donc ce qu'avance
Philon eft très - catholique , ce qu'il
n'avance pas, parce qu'il n'eft pas de
fon fujet , ne le doit pas rendre fchif-
matique. Cette I. preuve négative de
fon fchifme efi donc entièrement nulle.
La 1 I. l'eft encore davantage. Car
je foutiens même qu'il le dit pour
tou • ceux qui favent un peu raifonner,
& qui jugent des chofes fans préven-
tion } 8c ce qui eft rare j il le dit par les
mêmes paroles où l'on prétend le con-
vaincre de fchifme. Ceux qui voyagent ,
dit- il , ou qui demeurent dans les pays.
Dissertation XXIX. 257
éloignés , ne méritent pas pour cela d'ê-
tre privés de l'honneur de faire la Pâ-
que , qui leur doit être commun avec
tous les autres. En voici la raifon : Cefl
quune feule Région ne peut pas contenir
une Nation nombreufe qui s'efl répan-
due par toute la terre , 1. de la vie de
Moïfe , 1. 33. D'où l'Auteur de l'Har-
monie conclut , qu'il n'entend pas feu-
lement qu'ils puiffent faire la Pâque à
leur retour y mais qu'il infirme ajfe^_
clairement qu'on la peut faire en tout
lieu. Trait. Hift. p. 135.
Sur quoi fonde-t-il un jugement fi
défavantageux ? Qui ne voit au con-
traire que ce paffage fuppofe que félon
la Loi , la Pâque fe devoir faire à Jéru-
falem ? Oeil une excufe qu'il fournit
aux voyageurs ou aux étrangers comme
lui , qui font abfens pendant la Pâque
du premier mois. Il la tire de l'embar-
ras qu'il y a à la faire dans un lieu où
une nation toute entière s'aiTembloic
pour ce même fujetde toutes les parties
du monde } &c il veut dire que quand
des étrangers n'auroient point d'autre
raifon de la différer au deuxième mois
que la fuite d'une fi grande incommo-
dité, ils ne mériteroient pas pour cela
d'être privés d'un honneur commun à
tous les Juifs. 11 parle de la ville de
258 Dl S SERT AT ION XXIX.
Jérufalem comme du rendez-vous géné-
ral de toute la Nation } il regarde com-
me un honneur d'y célébrer la Pâque j
il craint feulement la foule inévitable
dans cette fête } il ufe de la relïource
c[ue la Loi accorde aux abfens. Où eft
le fchifme ?
Mais parce que l'Auteur fait con-
finer fon fchifme à n'avoir pas condam-
né celui des alexandrins fes compatrio-
tes j qui fe ferv oient du Temple quOnias
avoit fait bâtir dans V Egypte, lbid. p.
1 3 5 j on peut déjà répondre qu'on n'ap-
prouve pas tout ce qu'on ne condamne
pas extérieurement j parce que la pru-
dence demande fouvent qu'on y obferve
des mefures. De plus pour rejetter fon
prétendu fchifme, on n'a qu'à lire dans
fon Ambafïade traduite par M. d'An-
dilli, ch. 12, ce qu'il a écrit du Temple
de Jérufalem, & les fentimens qu'il a
eus de la profanation que Caligula mé-
ditoit d'en faire : La ruine de notre
Temple efl afjurée ; ( c'eft la nouvelle
qu'un Juif lui vint apporter : ) car l'Em-
pereur a commandé de mettre fa jlatue
dans le Sanctuaire , & de donner pour
infcription à ce Coloffe le nom de Jupi-
ter. Une Ji épouvantable nouvelle nous
rendit prcfqu immobiles : nous nous re-
tirâmes & nous enfermâmes dans notre
Dissertation XXIX. 259
logis pour y déplorer la ruine particu-
lière & générale de notre Nation. Et
quelques lignes plus bas : Qui auroit
été ajje% hardi pour lui repréfenter qu'il
ne devoir pas violer la fainteté du plus
augufle de tous les Temples ? Et pour-
voit- on fans perdre la vie s'oppofer par
des remontrances au torrent d'une fi
grande impiété} En vérité ces paroles
de Philon ne font point d'un fchifmati-
que , ou les fchifmatiques d'Alexandrie
parloienc fort catholiquement , comme
il paroit encore par ce qu'il ajoute :
Caïus écrivit donc que l'on confacrât ,
& que l'on mît fa flatue dans notre
Temple, ch. 13.
De plus , Ci la multitude des Temples
eft une conviction de fchifme , jamais
aucun Juif ne fut plus éloigné de ce
crime que Philon, qui s'eft fi hautement
déclaré pour l'unité du Temple de Dieu
qui étoit à Jérufalem , qu'il condamne
tous ceux qu'on voudroit bâtir _, foie
ailleurs, foit dans cette ville même. Car
après avoir dit élégamment que l'Uni-
vers était le feul Temple véritable Se
digne de Dieu; il ajoute que pour fa-
vorifer la piété des hommes Se le culte
de Dieu, il y en devoit avoir un qui
fut bâti par la main des hommes j mais
que Dieu avoit pourvu quon n'en bâtît
26b Dissertation XXIX.
pas en plujieurs lieux , ni plujieurs en
un même lieu , avec d'autant plus de
raifon que comme il n'y a quun feul
Dieu j il riy doit avoir quun feul
Temple. Liv* i de la Monarchie. On
ne peut mieux établir l'unité de Tem-
ple que d'éloigner tous les moyens de
la multiplier , qui feroient ou d'en bâ-
tir un dans chaque ville ; ou ( fi cet
honneur étoit deftiné pour une feule )
d'en bâtir plufieurs dans la ville de
Jérufalem. Philon nous apprend que
Dieu a défendu l'un & l'autre ; 8c il
fonde divinement cette unité du Tem-
ple fur l'unité même de Dieu, tppovvo'n-
ffi <Tê ai « Tê fEraMet^O/ , «V iV TcbV-
?o 43-otôa.ll ajoute conféquemmentque
Dieu ne permet point aux hommes de
lui facrifier chacun en fa maifon. Que
leur éloignement de Jérufalem ne les dif-
penfe point de ce précepte; & quand il
faudroit pour eux venir des extrémités
du monde , Dieu leur commande de
fe rendre dans ce Temple s'ils veulent
lui offrir des facrifices.
L'Auteur de l'Harmonie dans fes
Réflexions fur le fyftême du P. Har-
douin , p. 2 , témoigne avoir lu tout
cela; Ôc fa Réflexion eft , que ce qu'il
dit touchant la défenfe d'édifier des
Temples en différais endroits , & d'en
Dissertation XXIX. 2(jI
bâtir plufieurs dans un même lieu _, eji
ce qui le rend fufpecl , & nefl point con-
traire au fchifme des Juifs d'Alexan-
drie. Il faut avouer que les mêmes cho-
fes font des impreflions bien différentes
fur des efprits diverfement tournés.
J'aurois cru (implement que cet endroit
étoit formel pour difculper Philon du
fchifme. C'eft au contraire , félon l'Au-
teur , ce qui l'en rend fufpect. Mais
j'attends fa raifon. C'eft, ajoute t-il, que
les Juifs d'Alexandrie reconnoiffoient le
Temple de Jérufalem pour la maijbn de
Dieu : mais en même-tems ils vouloient
quon eut pu bâtir un Temple dans CE"
gypte. Refl. p. 3. I. Comment cette
prétention peut-elle s'accorder avec ce
qu'il dit enfuite , que l'unité de Temple
eft fondée fur l'unité de Dieu; ce qui
fuppofe que la multiplication des Tem-
ples fembie prêcher la pluralité des
Dieux. Or le Temple de l'Egypte mul-
tiplioit les Temples de Dieu ; il multi-
plioit donc les Dieux en fa manière.
Comment, dis-je, Philon fi zélé pour
l'unité de Dieu, vouloit-il qu'on eût
pu ériger dans un fécond Temple, un
monument fi contraire à cette unité di-
vine ?
2. Cejl j ajoute l'Auteur , ce qui
{ait dire à Philon quil n étoit pas per~
i£i Dissertation XXIX.
mis d'en bâtir en plujieurs endroits. Réf.
p. 3 , comme fi ce privilège écoicréfervé
À la feule Egypte. Mais il fait dire à
Philon une choie à quoi ce Philofophe
n'a jamais fongé. Et je ne fais en quelle
confcience l'Auteur peut falfifïer la pro-
pofition de Philon, en y ajoutant cette
reftriérion qui n'y eft point : Hormis
dans l'Egypte : &c qui eft réfutée par
tout fon raifonnement. Car la défenfe
de bâtir des Temples en plujieurs en-
droits , «Vê moKKcL^o^i , fe fait par op-
pofirion à la feule ville de Jérufalem où
le Temple étoit bâti j ôc il a la force
d'alibi, ailleurs. Ainfi ces divers lieux ,
ces plujieurs endroits _, où s'étendoit la
défenfe j comprenoient l'Egypte , aufïî-
bien que les autres lieux du monde j Se
par - là il condamne le Temple d'E-
gypte.
3. Enfin comment ce Temple d'Ale-
xandrie pouvoit-il s'accorder dans l'ef-
prit de Philon avec l'ordre que Dieu?
avoir donné aux Juifs de fe rendre dans;
le Temple de Jérufalem pour facrifier ,
quand il leur eût fallu venir du bout du
monde? Si l'on en croit l'Auteur, ce
lavant Juif n'étoit pas feulement fchif-
matique, il avoit encore l'efprit ren-
verfé. Mais c'eft une méchante manière
de prouver le fchifme d'un homme ^
Dissertation XXIX.
que de luppolcr qu'il n'a pas le feQi
commuai
( ifemoni néanmoins par complai-
fance, que Philon K (maciqae;
qu'en infère t on - âge.
cil do\. touchant l'immolation
laP
;t roue irraire une marque qu'il
cil indubr [ li Philon parle
l.l P y H
n'auruic p . . idence d'avances
un rait publia h non mx , qu'il
cûr - par r.
ou quatre millions de témoin?. S'il a
en vue |ue qui le :
dne qu'en cela :oic
conforme a celle de I . ;!em. An
ment poucqa 1 . :res de pec
du droit
dont ceux : en poi-
m 1 emple a
l'immolation de i timej I
Jules ' 1! que les Juifs
d'Alexandrie eu:: .ore
:ol-
s 1
lx>ir 1 r.ipj quelU n y
il de 1 ; ■ ;_ la
e le plus .;ra- *>us
; elle le t.iit par lord
lUJice de la Lui, \$ le du PJuiuii j
1^4 Dissertation XXIX.
jubente lege , permijfu legis , & fur
l'exemple de la première Pâque , qui
s'eft faite fous les yeux du Légiflateur.
11 feroic inutile d'en dire ici davan-
tage.
§. V.
Que Jefus - Chrijl a accompli la Loi
touchant le tems de l'immolation
de la Pâque.
■Jk Preuve par deux ufages des Juifs ,
Vun félon la Loi , Vautre félon
la Tradition.
A l'égard du tems , Moïfe avoit or-
Sonné qu'on immoleroit l'agneau le
foir du 1 4 du premier mois qu'on nom-
moit Nifan. Etfervabitis eum ( agnum )
ufque ad quartam decimam diem men-
fis hujus , & immolabit eum univerfa
multitudo ad vefperam. Exod. c. n. 6,
Et c'eft alors que devoit commencer
l'ufage des pains fans levain. Comme
donc le 14 de la Lune fe doit compter
fur le premier où arrive la nouvelle
Lune , on n'a qu'à chercher dans les
Tables aftronomiques quel jour tomba
la nouvelle Lune de cette année-là , qui
fur la 33 de Jefu$-Çhrift félon l'Ere
commune,
Dissertation XXIX. 265
commune, pour trouver infailliblement
dans lequel de nos mois & dans quel
jour de la femaine arriva le 14.
CedevoitêtreauflilaPàque des juifs.
Mais parce que pour de certaines rai-
fons ils transferoient fouvent la fête de
Paque du jour où elle tomboit au jour
fuivant , ils la firent le lendemain de
celle de Jefus-Chrift. C'eft une diver-
sité de tems qu'il eft aifé de concilier,
fans qu'on foit obligé d'en conclure, ni
que Jefus-Chrift n'a point fait la Paque,
parce qu'il ne l'a point faite avec les
Juits ; ni que les Juifs l'ont fake le
même jour que Jefus-Chrift, parce que
Jefus-Chrift l'a faite en fon tems : Deux
extrémités vicieufes , dont la première
ne peut s'accorder avec trois Evangc-
liftes, ni la féconde avec faint Jean.
Il n'y a pour cela qu'à fe fervir de
l'hypotèfe de Rupert qui vivoit vers
le commencement du 11. fiecle. Mais
pour la mettre en un plus grand jour,
il eft bon de fuppléer ce qui y manque
par Paul de S. Marie , Juif de naiffance ,
ôc depuis fa converfion Evcque de Bur-
gos dont il étoit originaire , ôc connu
maintenant fous ce nom là.
Il eft mort félon Calvifius à la fin du
14. fiécle, & félon les autres au com-
mencement du 15. Son fentiment tou-
Tome IF. M
166 Dissertation XXtX.
chant le tems de la Pâque & de la mort
de Jefus-Chrift , eft d'autant plus con-
fidérable, qu'ayant fuppofé à de favans
Hébreux la iupputation qu'il en avoir
faite , elle en fut approuvée.
Il y avoit parmi les Juifs une ancienne
Tradition établie depuis le retour de la
captivité & dès le fécond Temple >
qu'on évitoit autant qu'on le pouvoit de
faire deux fêtes de fuite, à caufe de plu-
fïeurs incommodités inféparables de
cette concurrence , & particulièrement
de la fépulture qui étoit défendue les
jours de fêtes. Mais on transféroit la
première dans le jour de la féconde à
la faveur de deux obfervations qui é-
toient d'un grand ufage parmi les Juifs
pour le jour de la Pâque qui regloit ceux
des autres fêtes.
La I. eft, que les jours de chaque
mois étant toujours folaires, prenoient
néanmoins de la Lune leur rang & leur
nombre ordinal dans le mois , & fe
comptoient le premier _, le fécond , le
troifieme , & ainfi des autres , félon les
révolutions de la Lune depuis fa con-
jonction avec le Soleil. C'étoit donc
cette conjonction qui rendoit le jour où
elle arrivoit le premier jour du mois.
Mais pour le déterminer on avoit égard
à l'heure où elle étoit arrivée , lorfqae
Dissertation X I
. oit en:. î
midi, ce jour- là même croie c
pour le premier jour du mois :n-
me la Ncomenie attachée
jour ûoit une fête parmi les } . elle
commençoit con,
le foir pi .:. A mit la N.omenie
comim ilors plufieors I .me
la conjonction de la Luik ^rf-
ion romboïc entre midi
.unuit , e\: même au poin: -ii,
ce : tOÎl point COmpi 11 le
lu mois-, mais la nouvelle Lu-
ii transférée au lendemain y .5c U
• de la x nenic comm
le Soleil coucl
La raifon naturelle en e(i que la rcte
nie comment urs
au loir , ! ué au jou
rant d< : 1 1 noir. [ me
qui ne tut arrivée qu'a-
vant , la nouvelle Cône nci
dix- huit heu-
res avant la N
I I IL -ion cfl que ni la N
menie de la lune Pafchile , m par
\/vmo , qui
éto\ . île C<
>ienc jamais le -
ni I jour d
à - dire le 1 ' ii , le M.
M
'x£t Dissertation XXIX.
Vendredi j &c fi elles arrivoienc un de
ces trois jours , on la transferoit au jour
fuivanr.
Nous apprenons cela d'un Hifrorien
Juif dans le Livre intitulé, Seder Olam>
dont Janfénius de Gand cite ces paro-
les Latines que je rapporterai en Fran-
çois : Nos Maîtres _, les Juges & Ma gif
irats compofant le Grand Sanhédrin _,
perfonnages célèbres dans le monde j ont
fait ce Règlement à perpétuité
L'Auteur ajoute ici une viiion mira-
culeufe qui a toute l'apparence d'un
conte dont il veut autorifer la coutume
des Tranflations. Quoique l'Auteur de
l'Harmonie l'explique autrement; quoi-
qu'il en foit il continue : Nos Maîtres
ont mis ce Règlement entre les mains du
Rabbi Elie\er le plus confidèrable de
tous. C'ejl que la fête des Sorts ne fc~
voit jamais célébrée le fécond 5 le qua-*-
trieme & le feptieme jour de la femai^
ne : ni la Pâque , ( c'elr-à-dire la fcre
des Azymes , ) le fécond _> le quatrième
& le Jixieme : ni le commencement de
l'année ., ( la Néomenie Pafcale ) le fe^
cond j le quatrième & le Jixieme : ni le
jour de l'Expiation , le premier j le troi-*
/cerne & le Jixieme.
Les caufes de ces Tranflations éroîent
f juftes au jugement de Grotius, quoi*
DlSSERTATI ON XXIX. l£$
qu'il ne juge pas qu'on en ai: eu befoin
cette année , qu'elles dévoient plutôc
être confidérées comme une interpréta-
tion de la Loi que comme une innova-
tion. C'étoit comme j'ai dit, pour évi-
ter la concurrence de plusieurs fêtes de
fuite , pendant lefquelles il étoit défen-
du de faire des œuvres ferviles. Car Ci
par exemple une fête des Azymes qui
devoit naturellement arriver le Ven-
dredi , eut été immédiatement fuivie
du Sabbat , on n'eût pu éviter dans les
pays chauds où les Juifs étoient difper-
fésj que les corps morts qu'on n'auroit
pu enterrer pendant ces deux jours ne
fe fuifent corrompus avec une grande
incommodité des familles. Or il n'effc
pas vraifemblable que Dieu eût impofé
aux Juifs l'obligation d'obferver une
cérémonie au péril d'un fi grand incon-
vénient.
Il fallut donc commencer la Transla-
tion par la fcte de Pâque , la première
de Tannée, de laquelle dépendoit la
Situation de toutes les autres. Car fi la
Pâque fe fut célébrée le Lundi, le Mer-
credi ou le Vendredi , elle auroit fait
tomber d'autres fêtes en concurrence
avec le Sabbat , ou elle y fût tombée
elle-même. La Pâque au Lundi leur eût
donné la fête de l'Expiation au Ven-
M iij
i-jo Dissertation XXIX.
dredi veille du Sabbat. Au Mercredi ,
elle eut Fait arriver cette même fête le
Dimanche , lendemain- du Sabbat , en-
fin au Vendredi la Pâque fe fût trouvée
la veille du Sabbat : & de plus elle eût
fait tomber dans le Sabbat même le fep-
tieme jour des Tabernacles , où ils don-
noient de certaines marques publiques
de reconnoilTance , qu'ils ne fe croyoïent
pas permifes le jour du Sabbat.
Ceux qui avoient établi cette Tranfla-
tion d'une fête dans un autre jour, s'é-
toient peut-être autorifés de celle que le
Roi Ezéchias fit de la Pâque générale
du premier mois dans le fécond, contre
l'ordonnance de Moïfe , porté par des
raifons particulières auxquelles la Loi
n'avoit eu aucun égard , comme je le
dirai plus bas. Cet exemple fit voir que
la Pâque n'étoit pas fi attachée à un
jour préfix qu'on ne la pût transférer
dans un autre pour quelque néceiïité ,
fans qu'on empêchât de la célébrer dans
fon jour naturel.
Or l'année 33. de Jefus-Chrift eft
marquée de ces deux Translations que
je viens d'expliquer félon la Tradition
des Juifs. La nouvelle Lune Pafchale ou
celle qui eft la plus proche de l'équi-
noxe du Printems arriva le Jeudi 19
Mars , à quelques minutes après midi.
Dissertation XXIX. 271
Ainfi félon la première obfervation ce
jour-là fur rejette pour la nouvelle Lu-
ne. Elle devoir donc être transférée au
lendemain Vendredi. Mais parce que
fuivant la féconde obfervation , le Ven-
dredi n'étoit point un jour de Néomenie
pour éviter la concurrence d^s fêtes ,
la nouvelle Lune ôc la Néomenie fut
transférée de nouveau au Samedi jour
de Sabbat', ôc par conféquent la fête de
Pâque ou des Azymes qui arrive tou-
jours le m, jour d'après > y fut aufli
transférée.
Mais comme cette féconde Transla-
tion étoit contraire à la Loi qui rlxoit
la fête des Azymes au 1 5 depuis la con-
jonction , ce fut pour plufieurs un fujet
de fcrupule,qui donna lieu à deux diffé-
rens ufages.Les uns fuivoient la tradition
fur laquelle on regloit l'ordre public , de
qui cette année-là transferoit la Pàque
au Vendredi , & la fête des Azvmes au
Samedi. Les autres fe conformoient à
la difpofition de la Loi qui fixoit la Pâ-
que au 14 & les Azymes au 1 5. Et c'eft
le parti que prit Jefus-Chrift dans cette
dernière Pâque qu'il avoit à faire avant
que de mourir. Car encore qu'il ait pu
luivre les années précédentes l'ordre pu-
blic fondé fur la Tradition^ il eft cer-
tain néanmoins que cette denuete fois
M iv
171 Dissertation XXIX.
il obferva religieufement la Loi, parce
que fa mort qui étoit fixée au jour de la
Pâque des Juifs ne lui permetroir pas
de la faire avec eux.
Plus fournis à la Loi de fon Père
qu'aux Traditions judaïques, il célébra
la Pâque dans fon tems légitime. Car
fi du Vendredi 20 Mars on compte 14
jours, on arrivera au Jeudi 1 Avril;
& comme tes 14 jours font fol aires ,
il ne pouvoit immoler ni manger la
Pâque que le foir du 14 jour. C'eft
donc alors qu'il la célébra comme plu-
fieurs autres Juifs, par une pratique qui
pour hêtre plus de l'ordre public, ne
lailîoit pas d'avoir été reçue dans Tufa-
ge. C'eft de ceux-ci que parlent faint
Marc &c faint Luc , lorfqu ils difent que
le premier jour des Azymes , les Juifs
immolaient la Pâque j quando Pafcha
immolahant. Voilà le fait; en voici le
droit , & l'on étoit obligé par la Loi dô
V immoler _, in qua necejje erat occidï
Pafcha. Au lieu que faint Jean ne parle
de la Pâque que félon l'ordre public
réglé par la Tradition & pratiqué par
le plus grand nombre.
Selon ce Syftême Jefus-Chrifr. n'an-
ticipa point extraordinairement le tems
de la Pâque , ni les Juifs ne la différèrent
point. Elle fut obfervée de part & d'au-
Dissertation XXIX. 275
tre dans le tems qu'on croyoit légitime ,
par Jefus-Chrift félon la Loi de Moïfe ,
8c par les Juifs félon la Tradition de
leurs Pères. Ces deux ufages étoienc
permis, &c ceux qui les fuivoient, ne
s'accufoient point réciproquement , les
uns d'anticipation , cV les autres de
retardement ; parce que les uns & les
autres fixoient toujours la Pâque au 14
depuis le jour où ils avoient fixé la nou-
velle Lune, foit félon les Tables Aftro-
nomiques , foit en fuiv^nt la Tradi-
tion.
§. VI.
Avantages de UEglife dans la Tradi-
tion Judaïque _, touchant les Tranfla-
tions des Fêtes. Réponfes aux Objec-
tions contre le fait.
La commodité fit inventer ces Tranf-
lations par les Juifs qui fe procurèrent
f>ar ce moyen la liberté de ne garder
eurs morts qu'un jour , & de les en-
terrer le lendemain , au lieu que dans
la concurrence des fêtes, ils étoient
obligés de les garder quelquefois deux
jours entiers, &c de ne les enterrer que
le troifieme. Mais les Tranflations nous
font encore plus commodes qu'à eux.
{Iles ont déjà toute la certitude de
Mv
274 Dissertation XXIX.
fait qu'on y puifle fouhaiter 'y les Juifs
d'aujourd'hui les reconnoi(Tent comme
une de leurs Traditions,, & en cette
qualité ils les pratiquent du confente-
nient de l'Auteur»» J'avoue, dit- il, Let.
» p. 31 qu'effectivement ces Tranfla-
>î rions ne font point feintes. Ce ne
a? font point les Chrétiens qui fe les
j> font imaginées , les Rabbins les pra-
» tiquent , ôc donnent des règles pour
» cela. Ils pofent pour fondement qu'u-
» ne fête ne doit point précéder ou
>5 fuivre un Samedi , afin qu'il n'y ait
» point deux fêtes de fuite. Ainfi ils
» difpofent tellement leurs Néomenies
» qu'elles n'arrivent jamais ni la pre-
>î miere férié, ni la quatrième, ni la
» fixieme. Ils ne veulent pas aulîi que
» la Pâque fe rencontre ou la féconde
j> férié, ou la quatrième, ou la fixie-
» me Je ne contefte donc point
que les Juifs ne foient dans les prati-
ques que je viens de marquer.
D'ailleurs elles viennent heut£ufe-
ment à notre fecours pour accorder des
paffages qui paroiflent irréconciliables.
Pour juftifier la Tradition de la dernière
Pâque de Jefus-Chrift , & pour nous
délivrer de la néceflité de faire dire à
l'Ecriture ce qu'elle ne dit point, ou
plutôt de l'empêcher de dire ce qu'elle
Dissertation XXIX. 275
dit clairement , on n'a qu'à fuppofer
que faine Jean qui a fupprimé la der-
nière Pâque de Jefus-Chrilt , comme
ayant été fuffifamment rapportée avant
lui , parle de la Pâque que les Juifs fi-
rent félon la Tradition , & que les trois
autres Evangéliftes qui n'ont rien dit de
celle des Juifs, n'ont rapporté que celle
que Jefus-Chrift fit félon la Loi. Avec
cela feul tout eft d'accord dans ces Hif-
toriens facrés , & rien ne s'y dément.
Qui nous empêche donc de nous préva-
loir d'un moyen de conciliation qui nous
eft offert par nos adverfaires? Pourquoi
ennemis de nos avantages ne nous fer-
virions-nous pas d'une Tradition fore
utile, qu'ils nous alfurent qui s'eft tou-
jours obfervée parmi eux , depuis le
fécond Temple j ufqu'à la deftrudtion du
troifieme, & qu'on ne peut foupçonner
qu'ils ayent fuppofée pour nous favo-
rifer ?
Cependant il n'a pas plu à l'Auteur
de s'en fervir ni dans Jon Harmonie ,
ni dans fa Lettre au R. P. F. ni dans
fon dernier Traité Hijîorique. 11 eft
en mauvaife humeur contre les Tradi-
tions, ôc il aime mieux fe jetter en de
fàcheufes extrémités Et qu'y trouve-
t-il à redire^ 11 a peur qu'elles ne foient
pas allez anciennes : Nous n'avons rien>
M vj
i-jG Dissertation XXIX.
dit-il , Let. p. 32. dans l'antiquité ', qui
ne nous convainque que ces Tranjlations
font une imagination des Juifs long-tems
après leur difperfion.
Mais les preuves qu'il en rapporte
font, 1. Le filence de l'Ecriture ^ de
Philon & de Jofeph \ argumens néga-
tifs qui ne prouvent rien par eux-mê-
mes j &: dont le premier eft fort inu-
tile , puifqu'on avoue que les Tradi-
tions font plus nouvelles que l'Ecriture*
1. L'exemple desQuartodécimans qui
faifoient la Pâque avec les Juifs quel-
que }our de la femaine qu'elle fe ren-
contrât:, c'eit- à-dire que tombât le 14.
// ejl confiant _, dit- il > Let. p. 33. par
les difputes des Quartodécimans qui vou-
loient que dans VEglife Von confervât
le Judaïfme quant à la Pâque j que les
Juifs de ce tems-là nav oient point en-
core la coutume de transférer la Pâque
ou de V exclure de certain jours j comme
depuis ils ont fait.
Cet exemple eft fort mal allégué : car
les Auteurs qui fuppofent les Tranfla-
tions n'ont jamais prétendu que les Juifs
& les Quartodécimans ayent célébré la
Pâque dans un autre jour que le 14*
Mais ils croyent feulement qu'ils ont
compté pour le 14 celui qui l'étoit en
effet depuis le jour inclusivement où la
Dissertation XXIX. 277
nouvelle Lune pafchale avoic été mar-
quée ou différée.
La troifieme objection fe rire de la
nouvelle dare desTranllations que Mai-
monide dir clairement n'avoir été en
ufage que depuis le nouveau Calendrier
dreffé par R. Ada , après le tems de
Jefus-Chrifl: dont il s'agit ici. Car alors^
félon l'Abbé Bartholocci , dans fa Bi-
bliothèque Rabbinique , ces règles tou-
chant les Translations des fêtes n'étoienc
point en ufage. Tant que le Temple a
fubiîfté on ne digeroit point les années
par cycles. Mais on ouvroit l'année, ôc
l'on confacroit les Néomenies par la
première apparition du Croiifant.
Voila une raifon qui prouve invinci-
blement les Tranflations , comme il
paroîtra au §. fuivant, tant ces Parti-
fans des Phafes font fins & heureux
dans leurs raifonnemens. En attendant
je renvoie l'Auteur de l'Harmonie à
un favant Chronologifte j c'eft Sethus
Calvifiuss qui aflure que félon une an-
cienne Tradition , ex vctujiijjima tra~
dïtione y les Juifs conformément à'ia
règle établie dans le Calendrier , ne
commencent jamais leur année, c elt-
à-dire, la Néomenie du mois Tifri par
la première férié, ni par la 4. ni par la
l. Ifag. Chrouol. p. 116. lin. 2. Cet Au-
178 Dissertation XXIX.
ceur donc reconnoit que la Tradition
des Tranflations eft plus vieille que le
nouveau Calendrier , puique la règle
des Tranflations eft fondée fur la Tra-
dition. Pour tout le tems qui a précé-
dé ce Calendrier , il dit que depuis la
fottie de l'Egypte jufqu'au tems d'Ale-
xandre le Grand les Juifs n'avoient pas
de Calendrier qui pût, heure pour heure,
ou minute pour minute , marquer exac-
tement les nouvelles Lunes , ibid. p.
108 & 109. Mais qu'après le tems
d'Alexandre , lorfqu'avec le joug des
Macédoniens ils eurent reçu la manière
de compter les années, pratiquée par les
Grecs, environ 19 ans après la publi-
cation de la Période de Calippe _, ils fui-
virent cette Période dans le règlement
de leurs Néomenies & de leurs fêtes ;
8c ils en uferent jufqu'au tems de Conf-
tantin, environ pendant 600 ans. Cette
Période eft une révolution de y 6 ans
qui comprend quatre fois celle de 19
ans inventée par Méton,, ibid. p. 113.
Comme néanmoins ils s'upperçurent
que par le défaut de cette Période, ils
fe trompoient fouvent de deux jours
dans la célébration de leurs fêtes , ils
compoferent un nouveau Calendrier,
en réglant les mois par le mouvement
moyen de la Lune , plus favorable aux
Dissertation XXIX. 27$
Tranflations que la Période de Calippe,
& c'eft ce que fit le Rabbin Hiiiel vers
Tan 3 $8 fous 1 Empire de Confiance.
Voye\ Calvijius ChronoL Van $61. Si
on ne fe fatisfait pas de ce que die
Calvifîus , Maimonide fuffira pour nous
apprendre qu'avec la Phafe on employoic
encore les Tables Aftronomiques.
Le même Abbé allègue qu'il paroît
par la Mifna & par la Gemara que la
fête de Pâque a été fouvent célébrée le
Lundi, le Mercredi & le Vendredi.
Mais que prouve cette raifon , finon que
cet ufage n'étoit pas Ci bien établi , qu'on
n'eût la liberté de fuivre la difpofition
de la Loi? Ces exemples ne font que
juftifier l'anticipation que Jefus^Chrift
en a faite le Jeudi au foir , où corn-
mençoit la fête du Vendredi. Et ils
autorifent le même fens qu'on donne
à faint Marc & à faint Luc a l'égard
de plufieurs qui uferent , comme Jefus-
Chrift, de la même anticipation. Le
premier jour des Azymes arriva , ou
l'on immoloit la Pâque s & où il f allô U
nécessairement y félon la difpofition de
U Loi , quelU fut immolée»
180 Dissertation XXIX.
§• VII.
1 1. Preuve , par la fuppofition de la
première Phafe ou apparition de la
nouvelle Lune. Que cette Méthode
efl entièrement parallèle & équiva-
lente à celle des Tranflations régu-
lières.
Si rout ce que je viens de dire ne
peut réconcilier les Tranflations avec
l'Auteur , il faut avoir recours à une
autre fuppofition pour expliquer les dé-
lais de la Pâque j ce fera ma 1 1 Preuve ;
je ne doute point qu'il ne fe rende à
l'autorité que je vais lui citer _, puifque
c'eft la fienne : Elle doit avoir fur fon
efprit le poids Se le pouvoir d'une jufte
démonstration. Il établit dans fon Trai-
té 8c dans fa Lettre p. 50. que les Juifs
par la nouvelle Lune entendoient fa pre-
mière Phafe j ou apparition \ c'eft par
elle qu'ils commencoient leurs mois j &
cefl ce qu il faut bien établir.
111e prouve 1. parce que cette ma-
nière étoit la plus naturelle , la plus ai-
fée , & la plus proportionnée à la capa-
cité des Juifs , qui fans calcul n'eufient
pu connoitre le moment précis de la
conjonction de la Lune avec le SoleiL
Dissertation XXIX. 2$ 1
Or , dit-il j il y a de l'apparence que
Dieu n'exigea pas d'eux de commencer
leurs mois d'une manière qu'il leur eût
été difficile de lui obéir. Cette raifon
n'eft guère démonftrative , puifque l'Au-
teur prétend ailleurs que c'étoit au San-
hédrin, de non aux (Impies Juifs à dé-
clarer le jour de la Néomenie. Or trois
pages plus bas , fans aller plus loin , il
reconnoît après Maimonide dans le
Sanhédrin une grande connoifTance des
règles de l'Aftronomie : Chaque mois y
dit- il 3 p. 53 , le Sanhédrin recherchent
par les principes de V Ajlronomie > non-
feulement le tems que la Lune devait
paroure j mais encore toutes jes aijfere/i"
tes difpofuions ; & cejl par-là que les
Juges reconnoijjbient Ji ce quon leur rap-
portoit êtoit conforme à la vérité. Ce
n'étoit donc pas faute de connoiftance
& d'habileté dans l'Aftronomie que les
Juifs regloient les mois , Se par confé-
quent toutes chofes par la feule vue de
la première Phafe de la Lune.
Mais Ci cette raifon elt foible , il la
foutient par l'autorité de Jofeph & de
Philon, &: ce qui eft plus que tout cela,
par le favant Maimonide , qui en fait
un article de foi Judaïque , Tr. hift. p.
5 2. Lorfque Dieu dit à Moïfe : Ce
mois fera le premier des mois , il lui fit
*8i Dissertation XXIX.
voir la Lune qui commencoït à paroi-
tre j & lui dit que lorfqud la verroit
dans la même figure il confacrât la Nco-
menie. Après cet ordre , qui eut ofé
douter fans facrilege , que l'apparition
du premier Croiflant ouvroit le mois ,
ôc étoitle moment d'où fe comptoit la
nouvelle Lune.
Or de ce principe il s'enfuit claire-
ment que les Juifs célébroient la Pâque
auiîl tard que fi la Tranflati'on civile
eût été en ufage. Car la nouvelle Lune
étant différée jufqu'au premier Croif-
fant, le 14 qui fe comptoit fur cette
première Phafe fe differoit à propor-
tion \ ce pour montrer que jô ne l'a-
vance point au hafard , il fe trouve à
la lettre , que l'année 3 3 de l'Ere com-
mune où Jefus Chrift mourut, le 14
jour de la Lune , foit par la Tranfla-
tion , foit par la nouvelle Phafe , tomba
le même jour 2 Avril. Cela paroît dans
la fupputation que M. leFebvre, à la
prière de l'Auteur , a faite de huit an-
nées, & qu'il a inférée dans fon Traité
Hiftorique : & dans celle que Calvi-
fîus, dans fon introduction , a faite des
quatre premières de ces mêmes années.
Voici celle de l'année 3 3 dont il s'a-
git-
Selon M. leFebvre, p. 108. l'année
Dissertation XXIX. 283
3 3 de notre Ere , qui avoit D. pour
Lettre Dominicale , la Lune fut nou-
velle à Jerufalem le Jeudi 19 Mars à
une heure 30 minutes après midi. p. 1 1 1
à la fin. Le Vendredi fuivant 20 Mars,
le lendemain de fa conjonction, la Lu-
ne à 6 heures & demie du foir , après
que le Soleil fut couché , étoit éloignée
de lui de 17 dégrés. Elle put donc in-
conteftablement être vifible ce foir-là
félon toutes les règles, p. 112 à la fin.
Ainfi le mois Pafcal commença le foir
du Vendredi 2© Mars. Comptez de là
14 jours , vous trouverez que le qua-
torzième commença le Jeudi au foir
deuxième Avril, & le 1 < le Vendredi
au foir troifieme Avril , où fe fit Taprès
midi l'immolation de la Pâque. La
grande fête des Azymes tomba le Same-
di. Voilà une fupputation fort jufte.
Voyons maintenant celle de Calvifius
qui admet la Tranilation.
L'année 3 3 de l'Ere Chrétienne , la
nouvelle Lune moyenne , félon la Pério-
de ufuée ( c'eft celle de Calippe ) arri-
va chez les Juifs le Jeudi 1 9 de Mars à
la 13 heure, c'eft-à-dire, à une heure
après midi 16 minutes. Or comme cette
heure paiTe midi, le premier jour du
premier mois fe transfère au jour fui-
vant, je dis au Vendredi. Mais com-
2l§4 Dissertation XXIX.
me le Vendredi ne reçoit point la nou-
velle Lune , le premier jour eft trans-
féré de nouveau au Samedi 1 i Mars ,
félon la Période de Calippe , & félon
le mouvement moyen & le véritable de
la Lune. Si de-là on compte 14 jours ,
on arrivera au Vendredi 3 Avril, Se
on trouvera que cette année la grande
fête des Azymes fut célébrée le Samedi
4 d'Avril.
Cela fe juftirîe encore de la fête des
Azymes des autres années, comme de
celle de la 29 année de Jefus-Chrift _>
qui félon l'une & l'autre méthode ar-
riva le Dimanche 17 Avril _, celle de
l'iinaée 30 qui tomba le Samedi 8
Avril ; & le bon eft que s'il y a quelque
différence , c'eft que la première Phafe
eft: quelquefois fi éloignée de la vraie
ou moyenne nouvelle Lune, qu'elle re-
cule Pâque un jour plus tard que la
Tranflatîon. C'eft ce qu'on voit dans
Tanuée 3 1 où félon la Translation le
jour de Pâque arriva le Lundi 2.6 Mars,
ôc les Azymes le Mardi 27 au lieu
que félon la première Phafe la Pâque y
dit l'Auteur, s'immola h 27, qui étoit
un Mardi , & par conféquent les Azy-
mes arrivèrent le lendemain Mercredi
28 Mars.
A quoi fert donc tout ce que l'Au-
Dissertation XXÎX 285
teur a dit avec tant d'étendue pour re-
lever l'exactitude des Juifs à faire la
Pâque dans le tems convenable; ôc
pour décrier les Tranflations ; puifque
fi l'exactitude confifte à faire chaque
fête le plus près qu'il fe peut du tems
où elles font fixées par la Loi, les nou-
velles Phafes & les Tranflations fai-
foient arriver la Pâque dans le même
jour j &c que, qui pis eit, fouvent les
nouvelles Phafes la reculoient plus loin
de fon jour naturel que les Tranllations?
Eft-ce être exact à obferver les tems que
de marquer la nouvelle Lune Pafchale,
tantôt au 1 & tantôt au 5 jour après
fa conjonction avec le Soleil ? C'eft ce
que faifoient les Juifs , félon l'Auteur.
La Lune depuis fa conjonction s'éloi-
gne du Soleil le premier jour de 1 2 dé-
grés 11 minutes, le fécond de 24 dé-
grés 22 minutes, & ainfi du relie juf-
qu'a fon plein. Que s'en fuit-il de-là?
Une chofe alTez plaifante. C'eft que l'an-
née $6 de Jefus-Chrift , la nouvelle
Lune arriva le Vendredi \G Mars à 6
heures trois quarts du foir. Tout le Sa-
medi elle fut encore invifible : Elle ne
-put être. vifibU , dit l'Auteur p. 105 , que
le Dimanche dix- huitième de Mars au
foir quelle fut éloignée du Soleil de 24
de grés j c'eft-à-dire de deux jours en-"
•ï86 Dissertation XXIX.
tiers j & c'eft alors au commencement
du troifîeme qu'on commença à comp-
ter la nouvelle Lune. Celles des autres
années ne furent viiîbles de même qu'é-
tant éloignées du Soleil de 2.0 , de 1 1 8c
de 23 dégrés, c'eft-à-dire de près de
deux jours ; & c'étoit à cette première
Phafe ou apparition que commençoic
la nouvelle Lune.
Qui ne voit donc que la méthode
des Phafes retombe dans celle des Trans-
lations , & que tout ce que l'Auteur
dit en faveur des premières , quadre Ci
jufte aux fécondes , qu'il ne peut dé-
créditer les fécondes comme il tâche inu-
tilement de faire , qu'il ne détruife fans
y penfer les premières , parce qu'on ne
peut prefque jamais obferver les Phafes
fans Translation. 11 ne le croit pas néan-
moins , comme il paroît par ce qu'il dit
au fujet de la Pâque de l'an 33. La
grande fêti des Azymes , dit- il, p. 113,
tomba le Samedi \ ainfi il n'y eut point
deux fêtes de fuite, qui euffent obligé les
Juifs, Ji en ce tems-là les Tranflations
euffent été en ufage , de transférer la
Pâque. Et pourquoi la fête tomba-t-elle
le Samedi , finon parce que la nouvelle
Lune Pafchale avoit été transférée du
Jeudi 19 Mars j où arriva fa conjonc-
tion ? au foir du lendemain , c'eft-à-dire*
Dissertation XXIX. 1S7
au commencement du Samedi , où ar-
riva fa première Phafe f Ce fut pour
éviter cette concurrence que la Tranfla-
tion s'étoit faite dès la nouvelle Lune.
11 ne faut donc pas s'étonner s'il n'y
eut point deux fêtes de fuite.
Ainfi l'Auteur par une erreur qui lui
eft favorable , fuppofe la Tranflation en
la rejettant. Que coûtoit aux Juifs , dit-
il, p. 43 , qu'en fit la Pâque le jour
quelle fe rencontroiO. Rien fans doute;
mais comme il l'a reconnu lui-même
ci-delïus §. XXXII, ils prenoient leurs
mefures de loin pour la faire rencontrer
dans un jour commode , & qui ne fut
précédé ni fuivi par aucune fête \ ils
appelloient le 14 du mois celui qu'ils
comptoient le 14 depuis le premier
Croilfant, & qui étoit en effet le 1 5 ou
le 16 depuis la conjonction de la Lune
avec le Soleil.
L'Auteur n'a donc aucun fujet de fe
récrier contre lesTranflations , puifqu'il
les admet lui-même après fon favanc
Rabbin Maimonide , lorfqu'il les ex-
plique ; car il dit clairement , p. 6 S , que
la rai fin pourquoi on diffère la Néomenic
dans le mois de Tifri j c'ejl parce que la
Lune ne paroit pas aujjl-tôt que les Ta-*
blés le marquent. Cet aveu eft fort in-
génu j de n au lieu du terme différer ,
*88 Dissertation XXIX.
l'Auteur fe fût fervi de transférer ; qui
eft fynonime ou équivalent , la difpute
étoit finie ; car fur cette propofition
de Maimonide , on peut faire cet argu-
ment fans réplique. Différer la Néo-
menie à un autre jour , c'eft la trans-
férer y Ôc la différer , parce que la Lune
ne paroît pas , c'eft la transférer de la
Conjon&ion de la Lune avec le Soleil
jufqu'à fa première apparition. Or fé-
lon Maimonide , dès le tems de Moïfe ,
lorfque la Lune ne paroifloit pas , on
différoit la Néomenie jufqu'à la pre-
mière Phafe : Donc , félon les Rabbins
les Tranflations de la Néomenie , ôc
par conféquent de la Pâque étoient en
ufage depuis Moïfe.
§. VIII,
III. Preuve. Que rien n'a pu empê~
cher que Je fus - Çhrijl n'aie célébré j
félon la Loi j la dernière Pâque j ni
la Tradition des Tranflations _, ni
celle de la première Phafe.
Comme cette Tradition reculoit la
Pâque loin du vrai 14 du mois où
Moïfe l'avoit placée, il eft fort naturel
de penfer que ce fut un fujet de peine
& ae fcrupule pour les gens de bien , <k
que
Dissertation XXIX. 2S9
que cette diverfité de fentimens donna
lieu à deux ufages dirîerens dans la
célébration de la Pâque. L'un de ceux
qui comptant le 14. fur la vraie nou-
velle Lune , quelque jour que l'un &c
l'autre arrivaient dans la femaine , im-
moloient la Pâque dans le jour précis
où la Loi l'avoit fixée : On ne peut
point fuppofer, dit l'Auteur , p. 112. que
les Juijs ayent été dans une Jl grande
ignorance de V Afironomie j qu'ils ne
pujjent pas favoir non - feulement le
jour où la Lune étoit ajfe^ éloignée du
Soleil pour être vue 3 mais encore celui
où elle étoit en conjonction avec le So-
leil pour y fixer la nouvelle Lune Paf-
cale , &c pour y déterminer le quator-
zième. Depuis Alexandre on ne doit
pas s'imaginer qu'il n'y eut aucun AJÏra~
nome che^ les Juifs ; la Tribu d'Iffa-
char y dit Maimonide _, étudioit V ' AJlro-
no mie 3 p. 78. Ils fe conduifoient par
la Période de Calippe. 11 y a néanmoins
apparence que le nombre de ceux qui
fuivoient ce premier ufage étoit arfez
petit pour ne pas faire de différence
lenlible dans le peuple.
L'autre félon la Tradition , Se fur le-
quel l'ordre public étoit réglé , étoit de
ceux qui transferoient la nouvelle Lune
de la Paque au jour fuivanc , foit pour
Tom. IK N
xc)0 Dissertation XXIX,
éviter la concurrence de deux fêtes qui
fe fuivoient , foit parce qu'ils fixoienc
la nouvelle Lune à la première Phafe,
foit par quelqu'autre raifon que nous ne
pouvons pas deviner.
Je prétens que Jesus-Christ a fait
la Pâque félon le premier ufage , parce,
qu'il étoit preffé par le tems de fa Paf-
fion , marquée par fon Père au lende-
main, où les Juifs dévoient faire la leur
félon l'ufage de la Tradition. Je me
contenterai de cette feule preuve tirée
en partie du principe de l'Auteur , ôc
fondée d'ailleurs fur des principes in-
conteftables. Mais avant que de la pro-
pofer je fais excufe de l'indécence de ce
langage , qui ne convient nullement à
Jesus-Christ jlajuftice& la vérité fou-
veraine j 8c dont la volonté eft la règle
de tout ce qui eft jufte. C'eft une efpe-
ce de blafphême de prouver que Jesus-
Christ a pu faire une chofe qu'il a fai-
te félon les Evangéliftes ^ comme fi on
en pouvoit douter , ou que la chofe eue
befoin de preuve.
Jesus-Christ apuinnocemmentac-
complir à la lettre la Loi de la Pâque ,
c'eft-i-dire , dans le jour qui félon le
mouvement de la Lune , qu'il connoif-
foit bien , & qui étoit connu du public j
ctoit le quatorzième depuis fa çonjon-:
Dissertation XXIX. 251
ction avec le Soleil. Or le Jeudi 2 d'A-
vril de l'Année 33. étoit le quatorzième,
a compter depuis le 20 Mars où tomba
là nouvelle Lune Pafchale.J esus-Christ
donc put célébrer ce Jeudi fa dernière
Pâque avec (es Difciples. La 2. propo-
rtion efl: fondée fur les Tables Agro-
nomiques. Toute la difficulté confifte
dans la première , ôc pour la prouver
je demande ce qui a pu empêcher que
Jesus-Chp.ist n'ait pu célébrer félon la
Loi la Pâque dans le quatorzième de-
puis la conjonction. Ce ne peut être
que la Tradition j mais quelle Tradi-
tion ? Eft-ce celle des Translations ou
celle de la première Phafe f Ce n'efl:
pas déjà la première , & l'Auteur ne
m'en défavouera pas *, félon lui elles
font inouïes , p. 75. Il n'y en a aucun
vejlige dans toute l'antiquité Judaïque.
On voit dans Jofeph un exemple de deux
fêtes qui fe juivent immédiatement :
D'ailleurs elles font inutiles à fon gré ,
ôc du coté des vivres qu'on pouvoic
préparer tous les jours de fêtes, excepté
le Sabbat j 8c du coté des morts , que
félon Maimonide _, on pouvoit enterrer
dès le premier jour de fête , p. -2.
pourv"; qu'on fe fervîc pour cet office
d.'" 1 j c'eH: a-dire , d'un hom-
rr • :t fujet à l1 Loi de
ij
ic)i Disse rtàtion XXIX,
Moïfe ; 3c pour le fécond jour de fête
un Juif pouvoir enterrer un Juif. Elles
n'ont aucun fondement dans l'Ecriture.
Seroit-il pojfible j dit- il , Let. p. 3 1. que
l'Ecriture n'eut point preferit ces re-*
gles des Tranflations qu'on devoil faire
des fêtes ; & qu'ayant marqué le jour
précis de la Pâque _, elle n'eût point en
même-tems ajouté l'exception _, difanc
par exemple qu'an célékreroit la Pâque
le 1 4. du premier mois _, pourvu que ce
ne fût ni la féconde ni la quatrième ■> ni
la Jîxieme férié. Enfin elles font , dit- il ,
contraires à la Loi de Dieu, qui avoit,
p. 47. fouvent renouvelle l'ordonnance
de faire la Pâque le jour précis que la
Loi le preferivoit : la folemnité de la
Pâque j dit E^éclùel de fa part , fe célé-
brera le quatorzième du premier mois ;
les Juifs ne pouvoient manquer à une
Loi dont le violement devoit être puni
de mort. Si quelqu'un étant pur _, dit le
Livre des Nomh. c. 9. v. 13. & n'étant
point en voyage _, ne fait pas néanmoins
la Pâque j il fera exterminé du milieu,
de fon peuple _, parce qu'il na pas offert
en fon tems le facrifice au Seigneur,
Tout cela effc tiré de ce que l'Auteur
allègue contre les Tranflations. Ainfi
je ne doute point qu'il ne m'avoue très-
volontiejs , qu'au moins cette annçe-U
D I SS E RT AT I O N XXIX. 295
Jesus-Christ n'a du avoir aucun égard
à la Tradition des Tranflations , 3c
qu'elle n'a point dû l'empêcher de célé-
brer la dernière Pâque. Comment fe
fût- il réglé par des Tranflations inouies
dans toute l'antiquité , inutiles à leur
fin _, fans fondement dans l'Ecriture ,
contraires à la Loi divine?
Je dis la même chofe de la Tradition
de la première Phafe ou apparition du
CroiOTant : 3c fi l'Auteur n'y veut pas
confentir , il eft aifé de l'y contraindre
par cette raifon ; que dans le fond la
première Phafe prife pour la nouvelle
Lune n'eft autre chofe qu'une Tranfla-
rion : car quelle différence y a-t-ii entre
transférer la nouvelle Lune au troisième
jour j 3c différer à la compter jufqu'au
premier CroifTant , qui fouvent ne pa-
roîtque le troifieme jour ? Ainfi tout
ce que les Tranflations ont d'odieux fe
retrouve dans la Néomenie des pre-
mières Phafes : Si celles-là font con-
traires à la Loi en mettant la Paque
hors de fon jour légitime , on doit dire
de même de celle-ci , à moins que la
même chofe ne fût permife 8c inno-
cente fous le nom de première Phafe, 3c
criminelle 3c interdite fous le nom de
Tranflation j ce qui feroit fort extra-
ordinaire.
Niij
i«)4 Dissertation XXIX.
Je conclus de là que rien n'ayant
empêché que Jésus- Christ n'ait fait la
dernière Pâque ^ ni le lieu qui n'étoit
point le Temple 3 ni le jour qui étoit
le 14. ni l'heure qui étoit le loir du
Jeudi , ni les Translations qui étoienc
des Traditions Judaïques , ni les pre-
mières Phafes qui font de pures Tran/la-
tions , ni l'exemple des Juifs , qui en
les fuivant ne faifoient point la Pâque
enfon tems : il l'a donc faite comme les-
Evangéliftes l'affurent, Se ce fait feulle?
concilie heureufement , non-feulement
entr'eux , mais encore avec les Hiito-
riens Juifs , qui ne difent rien qui lui
foit contraire , Se avec la créance de
l'Eglife , qui en a toujours fait une par-
tie de fa Tradition. Il n'y a que les Rab-
bins qui courent un peu de rifque dans
cette occafion , Se fur-tout la vifion de
Maimonide , qui a voulu , pour ainu*
dire , confacrer les premières phafes, Se
en faire un point de Religion , lorfqu'il
nous conte que Dieu , p. 51.52. en di-
fant à Moife^ce mois fera le premier mois,,
lui fit voir la Lune qui commencoit de
paraître _, & lui ordonna de confacrer la
Néomenie lorfquil la verroit dans la
même figure. Mais l'Auteur fage Se
pieux comme il eft, ne doit point avoir
de regret à abandonner des gens enne-
Disse r t a t ion XXIX. 295
mis de Jesus-Christ , menteurs de pro-
feflion , Ecrivains indignes de toute
créance , ôc qui décréditent la vérité
quand ils la font palTer par leur plume.
Au pis aller il ne refufera pas à Je*fus-
Chrift le pouvoir de fe difpenfer de cette
obligation prétendue dans une occafion
où prefle par la proximité defaPafïion ,
il vouloit donner avant que de l'abolir ,
cette dernière marque de fon obéifiance
sl la Loi.
§. ix.
V. Preuve. Quejijefus-Ckrijtnapoint
fait la dernière Pâque j il s'enfuit
néceffairement cette fauffete que les
Apôtres aujfi ne Vont point faite.
Si le Jeudi au foir Jefus - Chrift ne
fit pas la Pâque, c'eft une fuite inévi-
table que les Apôtres ne la firent point
auiîi ; & j'avoue , fi l'on veut que cette
omillion leur caufa d'autant moins de
peine , que ne prévoyant nullement la
mort de leur Maître , ils s'attendoient
a la faire le lendemain avec lui. Mais
comme le lendemain Jefus-Chrilt atta-
ché à la Croix rendoit les derniers fou-
pirs à la même heure qu'on immoloit
Us Agneaux 3 il s'enfuit 2. que le len-
Niv
Z96 Dissertation XXIX.
demain les Apôtres ne firent non plus la
Pâque que le jour précèdent , ni par
confcquent cette année-là.
L'Auteur de l'Harmonie voit les in-
convéniens de cette conféquence , quel-
que parti qu'il prenne. S'il la nie , on
le prie de nous dire quand & en quel
lieu ils purent célébrer cette Pâque, dé-
folés &z confondus comme ils étoient.
Se rafiemblerent-ils dans la même mai-
ion que le jour précédente Mais ce fut
à la mort de Jefus-Chrift ou jamais, que
s'accomplit la Prophétie dont il les avoir
menacés : Je frapperai le Pufteur , & les
brebis feront difperfees ; & voici l'heure _,
oà vous féparant & allant chacun de
votre côté _, vous me laiffere^ tout feuL
Chacun alla-t-il donc s'afïocier a quel-
qu'autre bande Pafchale , en qualité
d'ombre ou d'hôte furnuméraire ?Mais
comment auroient-ils pu feulement fouf-'
frir la vue des autres Juifs , qui les au-
roient reconnus pour les Difciples d'un
homme qui venoit d'être puni de mort
comme un faux Prophète ? Comment
la crainte d'être arrêtés , & le péril que
Pierre avoit à peine échappé la nuit
précédente , leur eût-il permis de fe fier
à perfonne ? Dans cette confternation
tout leur devoit être fufpect. Il n'y a
donc pas moyen de demeurer dans cette
fuppofuioa.
Dissertation XXIX. 297
L'Auteur fans doute avouera , comme
il fait dans fon Harmonie , que cette
année-là ils ne firent point la Pâque
figurative , qui leur étoit d'autant moins
néceiTaire , qu'ils avoient reçu la vraie
Pâque dans l'Euchariltie. Mais com-
ment les Apôtres auroient-ils connu
dès lors cette vérité de Religion, que le
Corps 3c le Sang de Jefus-Chrift étoient
l'accompliftement du facrifice de la Pâ-
que , eux qui n'avoient pas alors la
moindre penfée de la mort de Jefus-
Chrift j & qui ne purent jamais la com-
prendre , quelque foin qu'il prit de les
en avertir ? Ils ne connurent ce Myftere
que par les entretiens qu'il eut avec eux
après fa Réfurrection : ainft ils furent
convaincus , félon le fyftême de l'Au-
teur , que contre Pordonnance expretfe
de Dieu ils avoient manqué cette année-
là à faire h Pâque , Se ils crurent avoir
mérité la mort, félon les termes de la
Loi: Si quelqu'un étant pur & n'étant
point en voyage _, ne fait pas néanmoins
la Pâque _, il fera exterminé du milieu
de fon peuple > parce qu Un a pas offert
en fon tems le facrifice au Seigneur. Il
portera lui- même la peine de fon péché.
Nomb. 9. 13. L'Auteur leur en donne-
rai-il difpenfe ? Ou bien trouvera-t il
quelque moyen pour les fauver de cet
N v
iç)î Dissertation XXDT.
arrêt?? Il les renvoyera peut-être au 14;
du fécond mois , pour leur faire fup-
pléer ce qu'ils avoient manqué dans le
premier. L'expédient feroit julte j fi ce
manquement eût pufe réparer par quel-
que caufe qu'il fut arrivé : Mais la Loi
n'accordoit cette reifource qu'à ceux qui
ctoient légalement immondes ôc aux
voyageurs abfens. Je ne parle pas des
Translations extraordinaires qui fe fai-
foient quelquefois par autorité publi-
que. Or les Apôtres n'étoient point dans
les cas de cette exception ; ils étoienc
purifiés comme Jefus-Chrift le recon-
nbxc , Jam vos mundi efiis , & ils
étoient à Jérufalem. Ils mériroientdone
la mort pour avoir manqué à célébrer
la Paque.
L'Auteur croit que la feule propofi-
tionde manger _, après l'Agneau Pafchal,
d'un nouveau mets quoique fpirituel 3
comme l'étoit l'Euchariftie , leur eût
fait horreur j parce quelle étoit con-
traire à une coutume qu'ils croyoient
fainte. Quelle horreur, donc , &c quel
fcrupule leur devoir caufer le manque-
ment à une Loi, qu'ils dévoient juger
bien plus fainte Se plus indifpenfable
que toutes les Traditions Pharifaïques ?
Eft-il poffible que Jefus-Chrift allant à
la mort les eût abandonnés en proye i
Disse rtation XXIX. 299
ces reproches intérieurs , à ces remords
^e confcience , qui dévoient aggraver
d'un (i grand poids la défolation ÔC la
douleur où ils étoient déjà plongés ?
Or comme tout cela eft faux & impoflî-
ble , il eft conftant qu'ils ont fait la
dernière Paque , & que Jefus-Chrift
l'a faite avec eux avant que de s'enga-
ger dans la carrière de fa Pailîon.
§. X.
Fondement de l'opinion contraire ; &
1. Autorités tirées des domejliques
de la Foi.
Voilà en gros le fondement folide
de l'opinion de l'Eglife , qui croit que
Jefus-Chrift a célébré la dernière Paque
avec fes Apôtres; & je crois que l'Au-
teur fans faire tort à la réputation de
fon efprit & de fon habileté pouvoir s'en
tenir la. L'opinion contraire fe fonde
aufti en autorités , en partages de l'E-
criture , de en raifonnemens j 6c il eft
jufte de les examiner pour leur faire
juftice. Mais j'efpere qu'on verra qu'il
n'y a rien de plus frivole que ces au-
torités , ni de plus forcé que ces paca-
ges , ni de moins concluant que ces
raifonnemens.
Nvj
500 Dissertation XXIX.
On fe fert de deux iortes d'autorités;
les unes tirées des Chrétiens , qui fon?
lesdomeftiquesde la foi ; les autres des
étrangers , je dis des Juifs & des Rab-
bins. Nous commencerons cet examen
par les premières, &c entre celles-ci, par
les plus anciennes, qui font celles des
Pères. On brigue leur faveur pour ce
parti ; mais quoiqu'on falïe , ils ne lui
font point propices. Les plus favorables
font ceux qui n'ont rien écrit de cette
queltion , èc qui ainfi demeurant dans
la neutralité n'empêchent pas que cha-
cun n'abonde en fon fens. Quelques-
uns , comme Origene , faint Hilairec^
faintChryfoftome appliquent à l'Eu-
chariftie le fens allégorique de laPâque,
Ôc quoiqu'ils fe foient déclarés pour
l'opini on commune , on ne lailfe pas de
mettre à profit cette allégorie. Quel-
ques autres parmi lefquels on cite faint
Juftin , Tertulien, faint Irenée de faine
Cyrille , témoignent feulement que
Jefus-Chrift fut crucihé le même jour
que les Juifs immoloient la Pâque. Ce
qui eft vrai , mais ce qui n'empêche pas
qu'il ne l'ait pu Elire le jour précèdent,
Il ne faut pas omettre que faint Juftin &C
faint Irenée enfeignent feulement que
l'Agneau Pafchal devoit félon la Loi être
immolé dans, la Yii|e. de Jérufalem;par~
Dissertation XXIX. $01
<e que c'eft-lâ où Jefus-Chrift: dévoie
fourfrir ] l'un & l'autre ne fait point
mention du Temple. Les autres Pères
cy-deifus nommés font clairement pour
la dernière Pâque de Jefus-Chrift.
Mais à leur défaut on fait grand fond
fur l'Ouvrage d'un Auteur inconnu ,
que M. du Cange a fait imprimer fous
le titre de Chronique Pafchale, connue
autrefois fous le nom de Chronique
d3 Alexandrie. A la tete de l'Ouvrage
il y a un grand difeours touchant la
Pâque, tiiTîi de fentimens contraires,
comme d'Objections Ôc de Réponfes, &c
qui néanmoins eft uni comme li le mê-
me Auteur y parloir toujours , & fans
qu'il y paroilfe aucune autre marquede
diftinttion ou de dialogue que par la
contrariété des fentimens. Autant qu'on
en peut juger _, c'effc le fragment d'une
difpute entre un Quartodeciman de un
Orthodoxe.
Le premier, pour prouver qu'il fauc
faire la Pâque dans le 14. du premier
mois , quelque femaine & quelque jour
qu'il arrive , cite la Loi de l'Exode :
Recîe à lege pr&fcriptum ejl _, &c. Il
cite encore l'exemple de Jefus-Chrift :
Fecit Pafcha hac die y ideo necejfe efi
ut eodem modo faciam _, quo fecit Do~
minus, Mais pour fe difculper de la
3©i Dissertation XXIX.
conformité avec les Juifs , il prétend
que depuis la ruine de Jérufalem , ils
ont négligé par l'endurciflement de leur
cœur la Loi du tems de la Pâque , qu'ils
font avant l'équinoxe du Printems. Ec
que c'en: ce que Dieu leur reproche par
le Prophète : Leur cœur ejl toujours
dans l'égarement , aujji dans ma colère
je leur ai déclaré a\ ec ferment qu ils n en-
treront jamais dans mon repos.
L'Ortodoxe ou l'Auteur fait don-
ner à ce Quartodeciman un démenti
par Pierre Evêque d'Alexandrie , à l'é-
gard de cette erreur qu'il attribue aux
Juifs , parce qu'elle retomberoit fur
Moïfe , fur Jofué , fur les Prophètes.
Et après avoit allégué faint Athanafe ,
il prétend pour mieux réfuter le Quar-
todeciman , que Jefus-Chrifl n'a point
même fait la dernière Pâque , bien loin
qu'il l'ait faite le 14. 11 cite pour cela
faint Jean qui n'en dit pas un mot. Il
foutient qu'on ne peut prouver le con-
traire ni par les Evangéliites ni par au-
cuns de Apôtres : Quod neque & fanclis
Evangelifiis didicimus y neque quifquam
ex Beatis Apojlolis nohis tradidit. 11
croit au contraire très- évident par les
Ev.mgéliftes , que Jefus-Chriit n'a point
mangé la dernière Pâque , de laudatis
Evangelifiis j & ex Patrum doclrinï$
Dissertation XXIX. 30$
patet omnino. Ainfi il ne conre pour
rien tout ce que trois Evangéliftes en
rapportent.
11 allègue faint Hypofite Evêque de
Porto pour fon parti , & il lui fait
avancer , comme de quelque Evangé-
lifte, ces paroles prétendues de Jefus-
Chrift qu'il n'a jamais dites ; & qui
pis eft , dont il a dit tout le contraire
dans trois Evangéliftes : je ne fais pas
encore la Pâque. Quia non adhue man-
duco Pa/cha. Ce qui eft une infigne fal-
fifi'cation.
Il allègue Apollinaire Evèque de
Jeraple , qui de ce que quelques-uns
eftiment fur le rapport de faint Mat-
thieu , que Jefus-Chrift a mangé l'A-
gneau le 14. avec (es Difciples, 8c qu'il
a fouffert le grand jour des Azymes ?
atque ita dicere Matthdtum , en con-
clut de cela feul que leur interprétation
eft donc contraire à la Loi , de que l'E-
vangélifte leur eft oppofé : Unde legl
contraria eft eorum interpretatio Hfque
adverfari videntur Evangelia. N'eft-
ce pas là une conféquence fans répli-
que ?
Il allègue enfin Clément d'Alexan-
drie , qui femble fuppofer que le 1 4. les
Difciples demandèrent à Jefus-Chrift
où il vouloit qu'on lui apprêtât la Pi-
'|04 Dissertation XXIX.
€]ue : Difcipulos jlatim edocu'u figura
myflcrïtim 1 4. quâ etiam illum roga-
runt , ubi vis pare/nus tibi Pafcha man~
duc are ? &c qui néanmoins par une con-
tradiction viuble enfeigne que le marin
du 14. où Jefus-Chrift fourrrit, les Pon-
tifes & les Docteurs l'ayant mené au
Palais j n'encrèrent point dans le Pré-
toire.
11 n'en faut pas davantage pour rejet-y
ter cet Auteur inconnu avec ceux qu'il
cite fauflement lotis des noms illuftres ,
ôc qu'il fait parler comme s'ils n'avoient
pas le fens commun. 11 faut mettre en
même rang d'autres Auteurs qu'on pro-
duit encore contre la dernière Pâque de
Jefus-Chrift ., Se qui étant d'ailleurs
aufti récufables qu'ils le font , décrédi-
tent plusletu parti qu'ils ne l'autorifent.
Comme Antoine de Dominis, Villega-
gnon , &c. Auiïi on ne conte pas beau-
coup fur leur autorité , & je ne m'y ar-
rêterai pas davantage.
Dissertation XXIX. ^o~$
§XI.
Autorités étrangères contre la dernière
Pâque. Rabbins témoins non-receva-
bles touchant les chofes où Jefus-
Chrijl ejl intérejje.
Il faut venir aux autorités étrangères
des Rabbins qu'on prend dans cette
difpute pour arbitres fouverains , ou du
moins pour témoins irréprochables. Ce
nJeft pas qu'ils ayent écrit touchant la
dernière Pâque de Jefus-Chrift , ou in-
finué feulement qu'il ne l'a pas faite.
Mais on reçoit pour confiant tout ce
qu'il leur a plu écrire touchant les cé-
rémonies & les autres circonftances de
la Pâque ; Se on en fait une règle , à
laquelle on applique tout ce que les
Ecrivains facrés & les Auteurs Ecclé-
ilaftiques nous en ont lailfé par écrit.
S'ils en font différens en quelque chofe,
on fait grâce aux premiers , & à la fa-
veur de quelque violence qu'on leur
fait fourTrir , on fait leur conciliation
avec les Rabbins. Mais on traite les
féconds à la rigueur _, & fi ce qu'ils ont
écrit de la dernière Pâque de Jefus-
Chrift ne s'accorde non-feulement avec
les fuppoficions de ces Maîtres irrefra-
$o£ DrSSERTATlON XXIX.
gables , mais même avec toutes lescora-
féquences qu'on en tire , il eft rejette
fans rémiflion. On ne peut pas pouffer
plus loin le refpect & la déférence pour
les uns, ni la févérité pour les autres.
Cependant le témoignage des Rab-
bins, dont il nous relie des écrits , eft
marqué de tout ce qui peut rendre félon
le Droit des témoins reprochables.
i. Ils n'ont ni vu ni entendu les
chofes qu'ils rapportent , parce qu'ils
font poftérieurs de plufieurs ficelés au
tems où elles fe paffoient , ôc aux faits
auxquels on les applique. Ainfi ils don-
nent au moins un violent foupçon que
tout ce qu'ils rapportent eft l'ouvrage
de leur imagination & un Roman fait à
plaifir; ou du moins s'ils font finceres ,
ils parlent au hazard & fur le rapport
d'autrui de ce qu'ils n'ont jamais vu. La
Mifna , qui eft le premier recueil du
Droit Judaïque fut dreffée , félon Cal-
vifius , en 190. (îx vingt ans ou environ
après la ruine du Temple. Le Talmud
de Jérufalem en 369. Le Talmud Baby-
lonique fut commencé en 476. & achevé
en 506.
Comment après cela l'Auteur de
l'Harmonie peut-il fe plaindre du peu
de créance qu'on donne aux Juifs, com-
me Ji des Auteurs , dit-il p. 190. né-
I)lbSliRTÀTlON XXIX. 307
toient pas croyables en ce qu'ils rappor~
tent des coutumes de leur nation. Il
reconnoit ailleurs que du tems des Rab-
bins le Temple ne fubfijloit plus , & il
pouvoir ajouter depuis plufieurs fiécles
à regard de ceux à qui il donne le plus
d'autorité, p. 155. puifque Maimonide ,
dans fon Traité du Jubilé j dit qu'il
écrit l'an 1 1 07. depuis la dejlruction du
Temple qui répond à l'an 1 179. de notre
Ere. 11 avoue encore que depuis la
deftruction du Temple les Juifs ne fai-
foient plus la Pâque , ni aucun autre
facrifice , parce qu'ils ne pouvoient fa-
crifler que dans le Temple. Cependant
il s'agit ici de coutumes qu'il prétend
qui s'y pratiquoient , comme de l'im-
molation de la Pâque, & il fe plaindra
qu'on ne les croit pas en ce qu'ils rap-
portent de ces Coutumes qu'ils n'ont ja-
mais vues. Il fait plus : il prétend je ne
fçai comment que ces Coutumes des
Juifs fe pratiquoient encore de leur tems ,
lors mime que le Temple ne fubfijloit
plus, Eft-ce que le Temple étant ruiné ,
les Coutumes qui ne pouvoient s'obfer-
ver que dans le Temple étoient encore
en vigueur? 11 le faut bien , puifque les
Rabbins Auteurs de la Mifna & com-
pilateurs du Talmud , qui vivoient les
uns à la h 11 du 11. iiécle , les autres à la.
'3oS Dissertation XXIX.
fin du V. Se au commencement du VI.
ôc les autres , comme Maimonide, dans
le XII. ne font , dit l'Auteur , qu'ex-
pliquer ce que V Ecriture dit en peu de
mots y comme on écrit pour ceux qui ont
vu pratiquer les chofes. Toutes les an-
nées , les Juifs de ces fiécles V. VI. ôc
XII. voy oient avec quelles cérémonies Je
faifoit la Pâquc , qui avoit ceiTé dès
l'année 70. Voila une étrange préten-
tion.
II. Les Rabbins ne font pas feule-
ment poftérieurs au tems dont il s'agit,
ils font encore contraires aux Auteurs
contemporains , comme font Philon &c
Jofeph ; on verra dans la fuite cette
contrariété palpable. Or c'eft une règle
du bon fens , que dans le choix de plu-
fieurs Auteurs qui ont écrit Phiftoire ,
on doit préférer ceux qui ont été té-
moins oculaires des chofes , ou qui ont
vécu peu après qu'elles fe font pallées y
c'eft ce qu'il faut répondre à cette autre
plainte. On croit , dit-on p. 1 2.9. ce
que les Grecs & les Romains nous difent
de leurs propres Coutumes : quelle rai-
fon avons-nous pour croire que tout ce
quon trouve dans les Livres des Juifs
touchant leurs cérémonies ne font que des
contes ? C'eft que les Grecs & les
Romains nous rapportent ce qui étoit
Dissertation XXIX. 309
en ufage de leur terns ; & à l'égard des
chofes qu'ils n'ont pas vues 5 ils n'a-,
voîent aucun intérêt à les faldfier , &
ils s'accordent avec ceux qui en ont écrit
les premiers. Les Rabbins au contraire
outre les motifs fecrets qui lesportoienc
à falfiher leur hiftoire à caufe des Chré-
tiens , ils ne conviennent en cela ni
avec l'Ecriture ni avec les Auteurs con-
temporains.
111. Selon une autre règle de Droite
un homme convaincu de crime , & fur
tout de parjure & de faux témoignage,
qui y perfevere encore , ôc qui pour
cela a encouru une note d'infamie 3 n'ëft
point reçu en témoignage , parce qu'on
préfume que celui qui a été une fois
menteur & trompeur dans un rapport 5
peut l'être en tous les autres. Or on
fait que la Mifna , la Geumara , &-le
Talmud font remplis de folies palpa-
bles , de menfonges groiliers, de blaf-
phemes même contre Dieu. Il feroic
infini d'en rapporter tous les exemples
que ces Livres nous en fournirent j je
me contente de ceux qui regardent la
matière de la Pâque : ôc pour agir de
meilleure foi , je ne prendrai que ceux
que l'Auteur nous allègue du plus fag#
de cous les Rabbins , Maimonide , qui
ayant entrepris de ne repréfeaterle Tal-
510 Dissertation XXIX.
mud que par les endroits les plus rai-
fonnables , a fuccombé fous une diffi-
cile entreprife , 8c n'a pu éviter de dire
encore cent extravagances. Cela fervira
de réponfe à la plainte du peu d'ejlime
qu on fait des Juifs , & de ce quon ne
dijlingue point ce qu'ils ont de bon d'a-
vec les chofes fauffes & inutiles dont
leurs Livres font pleins. Cette plainte
eft fort injufte ; car enfin qui fera ce
difcernement , & fur quoi fe doit - on
régler pour ne fi pas méprendre ? Qui
ofera fe fier dans des chofes de fait a des
gens qu'on a furpris en tant de menfon-
ges, Ôc qui jugera fur leur rapport de ce
que Jefus-Chrift a du ou n'a pas du
faire ? 11 eft vifible que dès lors ils font
indignes de toute créance dans les vérités
même qu'ils avanceroient , ôc dont on
n'auroit point d'autre preuve que leur
dépofition , parce qu'il feroit impofiible
de les démêler d'avec les fauftetés ,
dont on avoue que leurs Livres font
pleins.
IV. Les Rabbins font des étrangers
a notre égard j ce iont même nos enne-
mis déclarés. 11 eft donc contre l'équité
naturelle de les prendre pour Juges de
nos dirTérens y &c même de tirer de
leurs dépofitions des conféquences pour
les régler. Dans les démêlés, particu-
Dissertation XXIX. 311
liers le Droit ne reçoit point les témoi-
gnages des Juifs & des infidèles ; à plus
forte raifon ils ne feront pas recevables
dans les différens de Religion : Contra
Chrijlianum nec Jud&us nec Pagamus rec-
tè tcjlimonla dicent.
Le V. réproche qu'on leur peut faire ,
fe tire des caractères particuliers de leurs
menfonges. Il y en a deux très-recon-
noillables, dont le premier confiiîedans
une contrariété fenfible de leurs Tradi?
rions , à toutes les circonstances de la
dernière Pâque de Jefus Chrift,quie(tla
feule que les Evangéliftes ayent marquée*
Sur ce fondement je prétens, félon tou-
tes les apparences , que pour convaincre
Jefus-Chrift de prévarication & pour le
rendre odieux lui & fa Religion à toute
la poftérité Judaïque , ils ont faliihé
leurs coutumes, outré* leur difcipline 5
affecté d'établir en règlement le contre-
pied de tout ce qu'a fait Jefus-Chrift
dans fa dernière Pâque; que pour la
décrier comme un violement de la Loi s
les Rabbins ont fabriqué exprès un
fy (terne nouveau de la H que , qui ne
peut s'allier avec cell< J? Jefus-Chriffc
a l'égard de prefque toutes les circonf-
tances.
Le fécond caractère confifte dans une
affectation vifible de faintetc & de mi^
5i* Dissertation XXIX.
racles. Frappés de tant d'actions héroï-
ques , & de tant de merveilles que les
Chrétiens faifoient de tous côtés , de
avec une évidence que nulle chicanne-
rie ne pouvoir niobfcurcirni calomnier,
les Rabbins crurent qu'il leur feroit
honteux de ne pouvoir produire rien de
femblable dans leur Religion : dans ce
deffein il eft très - probable qu'ils ont
groffi 5 exagéré , outré toutes chofes au-
delà des juftes bornes que la nature a
mifes aux chofes ; ils ont porté l'obfer-
vation de la Loi a une exactitude méta-
phyfique : mais dans la pratique ils fe
remettent bien-tôt au large. Le (impie
& le naturel ne les fatisfait pas; ils veu-
lent du miraculeux par tout j Se ils en
font fi mauvais ménagers , que le mira-
culeux donne fouvent dans l'impofliblc
Ôc dans l'extravagant. Il ne faut pas
différer davantage à donner des exem-
ples de ces deux fortes de caractères^
les unscalomnieux envers Jefus-Chriftj
les autres flatteurs & honorables pour
la Synagogue. Mais il eft jufte de com-
mencer par les premiers ; 8c j'efpere
qu'à voir la contrariété palpable qui eft
entre ces réglemens , & ce que les
Evangéliftes nous rapportent de la der-
nière Pâque de Jefus-Chrift , on fera
convaincu que ces réglemens qui n'ont
aucun
Dissertation XXIX 5 1 5
aucun fondement dans l'Ecriture , ont
été faits exprès après coup par les Rab-
bins, pour faire regarder par les Juifs
comme une profanation digne de toute
leur horreur , cette Pâque qu'ils fuppo-
fent par le rapport des Evangéliites ,
que Jefus-Chrill a faite comme la der-
nière adtion de fa vie avant fa Paillon,
§. XII.
Que les Rabbins en compofant leurs Re~
glemens chimériques touchant la Pâ-
que , on eu en vue de condamner de
facrilege la dernière Pâque de Jefus-
Chnft.
La I. circonftance eft celle du tems.
Jefus-Chrift , comme on Ta vu , n'a point
fait la dernière Pâque le même jour que
les Juifs. Et comme les Maimonides ne
pouvoient pas douter qu'il ne Peut faite
dans le jour marqué par la Loi , qui
étoit le 14 après la conjonction de la
Lune avec le Soleil , il faut qu'ils ayent
trouvé à propos de fabriquer un Règle-
ment contraire , dont il n'y a aucune
trace dans l'Ecriture , qui eft de ne
conter la nouvelle Lune que depuis*
l'apparition du premier Croilfant , qui
Jeur donna le 14 un jour plus tard qu'd
Tome IF% Q
^14 Dissertation XXIX.
Jefus-Chrift ; c'eft - à - dire , de rendre
perpétuelles les Translations qui écoienç
attachées à certains jours de la femaine.
Afin que comme les trois premiers Evan-
géliftes en rapportant la dernière Pâque
de Jefus-Chrift _, n'en avoient pas mar-
qué le jour, quelque jour qu'il l'eût fai-
te dans le vrai 14 il l'eût toujours fait®
contre la règle des Phafes , fans qu'on
pût l'excufer , en difant que peut-être
cette année - là il n'y avoir point de
Translation ; ôc qu'ainfi Jefus-Chrift
avoit fait la Pâque le même jour que
les Juifs. Pour cela ils revêtent le San-
hédrin d'un pouvoir abfolu : Maimo-
nide , dit l'Auteur p. 5 5 , prouve que
c étoit à lui à régler généralement tout
ce qui regardoit le Calendrier , à indi-
quer les Néomenies _, les fêtes , & à in-
tercaler l'année j &c. Si quelqu'un y
eût manqué avec connoiffance _> ne faifant
pas ce facrifice le j 4 jour ordonné par
le Sanhédrin, fans en être empêché par
quelque impureté légale ou par un voya-
ge y il étoit puni de la peine Chereth >
c'eft- à -dire, du dernier fupplice. Ainft
au gré des Rabbins Jefus-Chrift étoit
digne de mort pour avoir fait la Pâque
un jour avant les Juifs. AuJJi Maimo-
nide dit que V obligation de V immoler
l* après-midi de ce 14 étpit fi grande 4
Dissertation XXJX. $i$
que fi on Vavoit fait une heure plutôt _,
cauroit été un facrifice profane , p. 145,
Qu'étoit-ce donc de le prévenir d'un
jour tour entier, finon un horrible fa-?
crilege ? c'eft la conféquence des Rab-
bins j 3c l'Auteur qui en convient, n'a
point trouvé d'autre expédient pour
iauver la vie & l'innocence à Jefus-
Chrifl:, que de nier qu'il ait fait cette
dernière Pâque. Car , dit-il p. 5 5 , quand
le Sanhédrin fe feroit trompé en ordon-
nant que la Pâque ne fe fît que le Ven-
dredi , comme les Juifs la rirent, lorfi
quelle fe devoit faire le Jeudi j où l'on
ïuppole que Jefus-Chrift la fit , les Apô*
très & l'hôte qui prêta fa maifon fa
Jeroient Jlandalifés avec jujlice de ce
qu'il ne s'étoit pas afjujetti aux ordon*
nances du Sanhédrin.
II. Les Chrétiens auroient pu excu-
fer l'anticipation de Jefus-Chrift par la
coutume qu'ont les Juifs de doubler
leurs principales fêtes, c'eft-â dire, de
les célébrer deux jours de fuite : Ainfï
Jefus-Chrift avoit le choix de l'un de
ces deux jours pour y célébrer la Pâque,
Mais Maimonide & l'Auteur s'y oppo-
fent p. 5 8. Le premier dit formellement,
que pendant que le Sanhédrin a fubfifté,
on ne doubloit les fètes que dans les
lieux éloignés , où on ne pouvoir pa$
O ij
3i6 Dissertation XXIX.
lavoir certainement le jour qu'elles fe
faifoient dans la Paleftine, & il déclare
que tout cela elt une nouveauté. Jefus-
Chrift donc qui étoit à Jérufalem n'é-
toit point dans cette efpece.
III. Si Jefus-Chrift a fait la Pâque ,
c'a été conftamment dans une maifon
particulière. Maimonide dans fon Trai-
té du facrifice de l'Agneau Pafchal , p.
130, décide au contraire c^x il n étoit
point permis d'immoler la Pâque ailleurs
que dans le Temple ; que celui qui l'au-
roit fait auroit été puni _, parce que la
Loi étoit exprejje qu'on ne pouvoit im-
moler la Pâque que dans un lieu choijï»
C'eft une fauiTe allégation de l'Ecriture.
Mais comme l'Auteur eftaflez bon pour
l'allouer , & même pour accufer à* étu-
dier peu V Ecriture ceux qui entendent
ce lieu choijl de toute la ville de Jéru-
falem. Let. p. 44 , il a voulu par piété ,
en niant la dernière Pâque de Jefus-
Chrift , ôter aux Juifs ce moyen fur de
fe difculper du crime de fa mort, per-
fuadé par tout ce qu'il a écrit contre
Philon , qu'une Pâque immolée à l'é-
cart dans une maifon particulière , eft
une action fchifmatique qui mérite un
châtiment exemplaire.
IV. Les deux Apôtres commis pour
préparer la Pâque ne reçurent cetce conv
Dis S E R T A TI O N XXIX. 317
million que le foir du 14 & ils n'eu-
rent pas même le loifir de nettoyer la
maifon du pain levé. Cpendant la re-
cherche devoit s" en faire des le commen-
cement du jour j c'eft-à-dire dès le foir
précédent , qui Jinijjbit le treizième, p.
176. Les fages , dit Maimonide , l3a-
y oient ainfi ordonné. Et l'Auteur plein
d'un refpect religieux pour cette ordon-
nance : Ce foin , dit- il, ibid. nous paraît
inutile , mais cétoit pour obéir à une
Loi rigoureufe. Dieu prévenoit même la
juflice des hommes par des maladies j
par des morts fubites* Ainfi ce nétoit
pas feulement la crainte des Magïflrats
qui rendoit les Juifs fi exacls. Ils crai-
gnoient les Jugemens de Dieu. Cette
exeufe des Juifs eft une exagération.
Car jamais Dieu n'a ordonné qu'on
nettoyât dès le foir du 13 les maifons
du pain levé ; il n'y en a pas un feul
mot dans toute la Loi. Jamais Dieu n'a
puni perfonne pour y avoir manqué.
Il n'y en a pas un feul exemple; Se ces
maladies _, ces morts fuhites pour ce pré-
tendu péché, ne font que des terreurs
paniques. Tout ce que Dieu avoit or-
donné fur cela , eft que le jour des Azy-
mes qui commençoit des le foir du 14
il ne fe trouvât plus de pain levé dans
les maifons, &c qu'on s'en abftînt pen-
O iij
j i-8 Dissertation XXIX.
dant fept jours : Septem diebus a^yma
comeditis , i/2 die primo non erit fermen-
tatum in domibus veflris. Tout le refte
eft de l'invention des Rabbins , appa-
remment pour noircir les deux Difciples
Pierre & Jean , &: par eux la dernière
Pâque de Jefus-Chrift
V. De ce que les deux Apôtres Pierre
& Jean ne furent point au Temple , il
fe conclud démonftrativement que la
graifTe de l'Agneau Pafcal qu'ils immo-
lèrent, ne fut point brûlée fur l'Autel
des holocauftes. Autre prévarication de
la Pâque de Jefus-Chrift. Car, félon
Maimonide , p. 1 5 <? , onfaifoit brûler cl
part la graijfe de chaque victime» Et
plus bas : Si quelqu'un eût négligé de
la faire brûler , de forte que toute la
nuit fe fût paffée fans quelle eût été
mife fur V Autel ^ & quainfi elle fût
devenue profane y il auroit ètè coupable
d'une tranfgreffwn. Qui peut donc dou-
ter qu'au jugement des Rabbins , la der-
nière Pâque de Jefus - Chrift n'ait été
profane , &c que lui-même n'ait été un
prévaricateur , ce qui eft horrible à pen-
ler , puifque (es deux Difciples ont man-
qué à une cérémonie fi elfentielle ? Et
ne doit-on pas favoir bon gré â l'Au-
teur de faire tous fes efforts , de de ten-
ter même l'impolfible pour empêcher
Dissertation XXIX. 519
que Jefus-Chrift n'ait célébré cette Pâ-
que fatale à fon innocence &c à fa fain-
reté ? Mais il vient un peu tard pour y
rcuflir , & fon oracle Maimonide , je
crois , ne l'en avouera pas.
Aulîi le fondement de leur opinion
n'eft guère folide. C'eft ce précepte né-
gatif de l'Exode, c. 23 v. 18. Non re-
mancbit adcps folcmnitatïs met ufque
mane. La graifje de l'hojlïe qui rnejl of-
ferte folemnellement j ne demeurera point
jufquau lendemain, p. 159. Si le Rab-
bin n'avoit en vue la Pàque de Jefus-
Chrifl , il n'allcgueroit pas pour l'A-
gneau Pafchal un paflage qui ne regarde
que les victimes qui s'immoloient dans
le Temple ; &c c'eft ici le fophifme qu'on
appelle Ignoratio elenchi , ou prouver
autre chofe que ce qui eft en queftion.
Mais il eût cité le règlement de la Loi
touchant l'Agneau Pafchal , Exod. c. 1 2.
v. 10, qui porte, qu'on n en réfervera
rien pour le lendemain \ que s'il en refie
quelque chofe on le brûlera. Non rema-
nebit quidquam ex eo ufque mane j fi
quid refiduum fuerit , igné comburetis.
Ce lieu dit la même chofe que celui
qui eft cité par Maimonide. Il eft d'ail-
leurs exprès pour la Pâque. Pourquoi
ne s'en eit-il pas fervi ? C'eft qu'il avoir
befoin d'un paflfage qui prouvât que la
O iv
3io Dissertation XXIX.
Pâque s'immoloit dans le Temple, ôC
que lesDifciples de Jefus-Chrift qui l'a-
voient immolée dans une maifon ,
étoient fchifmariques.
V I. Les Rabbins ont eu tout lieu
de croire que Jefus-Chrift ne parut point
dans le Temple , le jour qu'il fit avec
fes Difciples la dernière Pâque. Les
Grands -Prêtres avoient dès long-tems
donné ordre de l'arrêter , c'eût été ve-
nir de gaieté de cœur fe remettre entre
leurs mains : Et il femble , dit l'Au-
teur p. 16 1 , qu'il attendit la nuit pour
venir à Jérufalem _, afin de nêtre pas
appercu de fes ennemis. En voilà affez ,
félon les Rabbins , pour le rendre irré-
gulier ce jour-là à l'égard de la Paque.
Le jour qu'on immoloit y difent-ils par
l'Auteur leur Interprète p. 262, on êtoit
obligé de ccmparoitre dans h Temple &
de s'y faire voir fans doute par les Prê-
tres.
Mais comme ils favoient par l'E-
vangile qu'il l'avoit faite , ils ne fe font
pas contentés de cette irrégularité pré-
rendue, ils ont trouvé dans ce défaut
de comparution de quoi rendre fa Pa-
que illégitime. Si on avoït , dit Mai-
inonide , immolé dans le Temple une
victime PafchaU pour un homme qui fe-
roit hors de Jérufalem , comme on pour-
Dissertation XXIX. 321
roit fuppofer qu'ont fait les deux Dif-
ciples envoyés par Jefus-Chrift pour
préparer la Pâque , & quon eût même
verfé le fang au pied de l'Autel , il ny
pouvoit participer s'il ne venoit que le
foir à Jérufalem ; // devoit attendre le
fécond mois pour la Pâque, Cela qua-
dre (î j ufte au fait dont il s'agit, qu'il
faut fe faire violence pour ne pas croire
que ce règlement de Maimonide a écé
fait exprès en vue de l'efpece particu-
lière de la dernière Pâque de Jefus-
Chrift. Car lorfqu'il envoya fes deux
Apôtres, il étoit hors de Jérufalem j il
n'y vint que le foir, 3c il trouva une
Pâque préparée en fon abfence.
Àufli l'Auteur ne manque pas d'en
former fa conclufîon. Quand on fuppo-
fer oit ^ dit-il , que Pierre & Jean euffent
été au Temple le Jeudi après midi _, &
qu'Us y euffent immolé un agneau avec
les cérémonies requifes ; Notre Seigneur
& les autres Apôtres n auroient pas pu
manger de cet agneau , n étant venus
que le foir à Jérufalem, Maimonide dé-
cide ce cas ; & vifiblement afin de faire
pafter cette Pâque pour un facrifice pro-
fane. Mais un Auteur Chrétien en fup-
pofant la décifion du Rabbin irréfra-
gable , a mieux aimé nier cette Pâque,
que de l'attribuer ainfi deshonorée à
O v
3ii Dissertation XXIX.
Jefus - Chrift , au hafard de donner la
gêne à trois Evangéliftes qui l'afïurent ,
pour les obliger , non pas à dire le con-
traire , mais au moins à ne le dire plus,
ou à dire route autre chofe. Cela lui a
paru plus refpechieux. De ce fait , dit-
il , que Notre Seigneur ne vint à Jeru~
falem que le foir , j'en tire cette con-
séquence : qu indubitablement il ne fit
point la Pâque légale ce foir-là ; & la
raifon qu'il en donne plus bas j eft que
Notre Seigneur saffujettiffoit aux cou-
tumes des Juifs , autrement il auroit
feandalifé fes Difciples > & celui qui le
reçut en fa maifon.
Si néanmoins il étoit permis de pro-
pofer avec refpedfc fes difficultés, je de-
manderois à l'Auteur de l'Harmonie ^
comment cela peut s'accorder avec ce
qu'il a reconnu plus haut p. 146. Quil
n étoit pas nécefjaire que ceux qui corn-
pofoient une de ces Sociétés , allaffent
au Temple ; il fuffifoit quun feul offrit
f Agneau PafchaL Maimonide le dit en
termes formels. Après cela 3 qui oferoic
en doutera Au lieu d'un fubititut, en
voilà deux que Jefus- Chrift envoyé of-
frir la Pâque pour lui & pour fa fa-
mille : & Maimonide n'eft pas encore
coiffent.
JLAureur me répondra fans doute que
Dl SSERT AT IO N XXIX. 3 2. J
ce Rabbin parle ici de l'immolation
où un feul fuffifoit pour plufieurs; mais
que dans la déciflon du cas , il parle de
la comparution perfonnelle que chacun
devoir faire ce jour-la dans le Temple
à quelqu'heure du matin.
Et fur quoi eft fondée la nécefiïté de
cette comparution/* Sur cette ordon-
nance de l'Exode ,c, 1 3 . v. 17, citée par
Maimonide , au rapport de l'Auteur ;
Apparebit omne mafculinum tuum co-
ram Domino Deo tuo. Tous les mâles
qui font parmi vous viendront fe pré"
fenter devant le Seigneur. Je veux croire
pour l'honneur de l'Auteur que ce n'eft
pas lui qui a retranché de ce paifage ces
mots eifentiels , ter in anno , trois fois
Vannée ; mais qu'il n'a fait que le rap-
porter tel qu'il eft dans (on. Rabbin.
Car ces mots malicieufement fupprimés,
font voir qu'il s'agit en cet endroit des
trois fêtes principales des Juifs , des
Azymes , de la Pentecôte 3 Se des Ta-
bernacles , &: que l'obligation de s'y
préfenter devant le Seigneur , étoit égale
Se de même forte pour toutes les trois.
Or les Juifs avoient toute la femaine
depuis chacune de ces trois fêtes pour
fatisfaire à cette obligation. Cela paroît
par l'exemple de Jefus-Chrift même,
qui n'arriva à Jcrufalem pour la ïhtc
314 Dissertation XXîX.
des Tabernacles , que vers le milieu de
Ja femaine , c'eft-à-dire , le 14 jour:
Jam autem fejlo médian te. Joan. c. 7. 14.
On avoit donc le même tems pour fe
repréfenter à la fête des Azymes : Et
rien n'eft plus chimérique que de retfer-
rer , comme ont fait les Rabbins , cette
obligation dans la matinée de la veille
de la fête, à l'exclufion de toute la fe-
maine. Pourquoi n'eût-on pas fansfaic
à cette ordonnance , en fe faifant voir
le lendemain de l'immolation , qui étoic
la grande fête des Azymes ? Et com-
ment tant de millions d'hommes eufTent-
ils pu dans l'efpace d'une feule matinée
pafler en revue des Prêtres ? Y étoit-
on obligé même au péril de fa vie ? Lqs
fouverains Prêtres avoient des long-
tems envoyé par tout des ordres exprès
Î>our arrêter Jefus-Chrift en quelque
ieu qu'il fe trouvât. Etoit-il obligé ,
fous peine d'être interdit de la Pâque ,
de s'aller mettre entre les mains de (es
mortels ennemis ? Enfin cette repréfen-
tation commandée dans l'Exode , trois
fois l'an , ne confiftoit pas feulement
dans cette comparution paiTagere ; mais
a fe rendre à Jcrufalem pour y célébrer
les trois principales fêtes.
Qui peut donc douter après cela, que
«es règlement fantaftiques couchant la
Dissertation XXIX. 315
Pâque., n'ayent été drefles après coup
par les Rabbins ; non pour prouver que
Jeius-Chrift ne Ta pas faite, les Hifto-
riens de fa vie l'allurent trop claire-
ment j mais pour la convaincre de facri-
lege, en établitfant des conditions arbi-
traires qu'ils favoient bien qu'il n'avoic
pas obfervées.
§. XIII.
Suite des Règle mens faits à plaijlr par
les Rabbins pour cenfurer la dernière
Pâque de Jefus- Chrijl,
s> Vil. Jefus- Chrifl: dans fa dernière
33 Pâque n'a point obfervé les cérémo-
35 nies avec lefquelles , félon les Rab-
» bins , on préparoit les pains azymes,
95 p. 178. Maimonide, dit l'Auteur ,
« donne plufieurs avis pour cela. On
35 prenoit de la farine de deux ou trois
3> jours bien refroidie. Ce Docteur exa-
35 mine ce qui peut contribuer à la fer-
3> mentation , ou à l'empêcher. Les
3> Juifs prennent garde encore aujour-
3* d'hui que le bled dont ils font les ga-
3J lettes Pafchales ou azymes n'ait point
33 été mouillé : quand un fac a fervi le
33 refte de l'année , ils le découfent &C
v le lavent. Ils ne le mettent pas fur un
32.6 Dissertation XXïX.
îî cheval nud , de crainte que la fueur
33 ne mouille la farine , & ne la faiTe
s? fermenter par la chaleur. Ils font pi-
33 quer de nouveau les meules des mou-
33 lins. L'eau dont ils fe fervent pour
33 pétrir ne doit point avoir vu le foleil
s; depuis 24 heures. Ils paîtriflent dans
33 un lieu frais hors du foleil. Toutes
33 ces précautions fe prennent , afin que
>3 la pâte ne s'échauffe point jufqu'à fe
33 fermenter j Se qu'ainfi on eût dans fa
33 maifon, au lieu d'azymes, du pain
33 levé. L'Auteur leur donne à toutes
une approbation fans téferve, lorfqu'il
ajoute tout de fuite, ibid. Que cela fc
jît du tems de Notre Seigneur. Cejl une
chofe incontefiable. La Loi y obligeoit.
Je ne fai de quelle Loi il veut parler.
Au moins la Loi de Moïfe ne dit pas un
feul mot de toutes ces obfervations fu-
perftitieufes ; & il n'eft guère plus ex-
cufable , lorfqu'il en prend pour garant
ce difeours de faint Paul : Purifîe%-vous
donc du vieux levain , afin que vous
foye^ une pâte nouvelle & toute pure j
comme vous deve\ être purs & fans
aucun levain d'iniquité.
Quoi qu'il en foit , on peut aiïurer
fans crainte , que les deux Apôtres dépu-
tés pour préparer la Pâque , n'ont rien
fait de tout ce que Mairnoiiide a jugé
Dissertation XXIX. $ij
tiéceflaire pour faire le pain azyme ; de
c'eft même pour donner lieu de faire
cette réflexion que l'Auteur a rapporté fi
exactement tout le détail de cette bou-
langerie. Ainii ces deux Difciples ont
fait manger à Jefus - Chrift & à leurs
confrères du pain levé , ou qui pouvoit
n'avoir pas toutes les conditions du pain
azyme; & par conféquent cette Pâque
a été profane.
V 111. Entre les cérémonies Pafchales ,
il eft jufte de donner un rang particulier
à celle que je vais citer, comme étant
une des plus effentielles. C'eft qu'on R-
nilïbit tellement le fouper par l'Agneau
Pafchal 3 qu'après en avoir mangé , on
ne goûtoit plus de rien. A la fin , dit
Maimonide, p. 268, on mange de la chair
de V Agneau au moins de la groffeur d'u-
ne olive j & après on ne goûte plus
de rien j afin que le banquet finiffant
par là j le goût de la chair de l'Agneau
Pafchal refte plus long - tems dans la
bouche, L'Auteur en conclut que Jefus-
Chrift qui a inftitué l'Euchariftie à la
fin du fouper , n'avoit point mangé
l'Agneau Pafchal ; parce , dit-il p. 268 ,
que fi Notre Seigneur avoit mangé l'A-
gneau Pafchal avant defe lever de table ,
il auroit feandalifé fes Apôtres lorfquil
s'y remit j & qu'il leur propofa un autrt
lji8 Dissertation XXIX.
repas. Il devait être fpirituel ce repas ,
dira-t-on. Il ejl vrai. Mais les Apô-
tres ne favoient pas ce que Notre Sei-
gneur alloit faire \ & la feule propor-
tion de manger de nouveau leur auroit
fait horreur , comme étant contraire à
une coutume qu'ils croy 'oient fainte. Cette
expreflion eft un peu violente. Mais
qu'il ne s'alarme point tant. Il y a tout
lieu de croire , non que linftitution de
l'Eucharift-ie auroit été un violement de
la Tradition rapportée par Maimonide;
mais que cette Tradition prétendue a
été fabriquée par Maimonide , ou par
les autres Rabbins , en vue de l'inftitu-
tion de l'Euchariftie. Cet endroit qui
nous eft fi cher & fi vénérable ^ ce Sa-
crement , la fource de toute la fainteté
qui eft dans l'Eglife , leur a paru trop
beau Se trop commode par la date de
fon inftitution, pour n'en pas faire une
horrible prévarication. C'eft ce qu'ils
ont fait par ce Règlement fantaftique ,
dont il ne paroît aucune trace dans l'E-
criture : Que la dernière chofe au on
mangeoit fut la chair de l'Agneau Paf-
ehal dont on devoit conferver le bon goût ,
pag. 170.
Car en quel endroit de l'Ecriture eft-
il preferit qu'on dévoie finir le fouper
par un morceau çje la chair de l'Agneau ?,
Dissertation XXIX. 315
te quelle fainreté les Apôtres trou-
voient-ils dans cette coutume ? Etoit-
ce , comme dit Maimonide p. 268 , en
ce que le banquet finirent par là , le
goût de la chair de l'Agneau Pafchal
refloit dans la bouche ? Us avoient donc
bien perdu leur tems à l'école de Jefus-
Chrift, & ils avoient bien mal profité
de fes inftructions , de n'avoir pas ap-
pris de lui ce que l'Apôtre a enfeigné
depuis aux Corinthiens , c. 8. v. 18. Que
le manger ne fait rien pour nous rendre
faints & profanes , agréables ou odieux
aux yeux de Dieu. Efca nos non com-
mentât Deo. On ne peut aceufer les
Apôtres d'une plus grofîiere ignorance ;
ôc c'efl: alors après plus de trois ans
d'inftru&ion , que Jefus-Chrift auroit
eu lieu de la leur reprocher bien plus
vivement que dans une autre occafion :
Adhuc & vos Jine intelleclu ejlis ?
Ave^-vous donc encore à l'heure qu'il eft ,
Jî peu d'intelligence î En effet , c'étoit
une conféquence naturelle de ce qu'il
leur avoit enfeigné autrefois , que ce
qui entre dans l'homme par la bouche,
n'efl pas ce qui le fouille : Non quod
intrat in os, hoc coinquinat hominem\
ni par conféquent ce qui le rend faint.
Suppofons néanmoins qu'ils ayent
trouvé une grande dévotion à confer-
3$o Dissertation XXIX.
ver long-tems le goût de la falive de
l'Agneau Pafchal ; auroient-ils pu fans
impiété préférer une Tradition Juive
à un précepte de Jefus-Chrift 3 & fe
feandalifer d'une nouvelle proportion
de manger , qu'il leur fit , &c qui leur
auroit fait perdre le goût de l'agneau ?
Ils ont allez réfuté ce foupçon inju-
rieux par ce qu'ils ont fait en d'autres
occafions. Accoutumés par leur Maître
a n'avoir que du mépris pour les Tradi-
tions Pharifaïques , ils ne faifoient point
<ie fcrupule , ni de manger fans avoir
lavé Leurs mains 5 ni de rompre des épis
entre leurs mains le jour du Sabbat ,
quand ils avoient faim. Grands attentats
au jugement des Pharifiens.
Mais ils n'ont jamais témoigné plus
hautement la déférence univerfelle qu'ils
avoient pour toutes les paroles de Jefus-
Chrift, que dans la Synagogue de Ca-
pharnaiim. Jefus-Chrift fans adouciffe-
ment leur propofa à eux &: aux Juifs fa
chair à manger & fon fang à boire ;
propofition qui fembloit violer directe-
ment toutes les Loix naturelles & civi-
les. Cependant lorfque les autres Dif-
ciples & les Juifs révoltés contre cette
idée , fe retirèrent de fa compagnie , les
feuls Apôtres demeurèrent fermes dans
la foumiflion > & ils dirent tous à Je-
fus-Chrift par l'organe de faint Pierre :
Seigneur _, où irons - nous ? Vous ave%
les paroles de la vie éternelle. Er on
s'imaginera que s'il eût propofé feule-
ment un morceau à manger après l'A-
gneau Pafchal , ils s'en feroient fcanda-
lifés jufqu'à en être frappés d'horreur},
Quelle eue été leur bizarrerie de rece-
voir avec une pleine déférence une pro-
portion , qui n'étant point expliquée,
fembloit choquer les bonnes mœurs ,
ôc tous les fentimens d'humanité , ôc
de fe foulever contre une autre , dont
toute l'énormité confiftoit à violer une
Tradition Pharifaïque ?
L'Auteur doit réparation d'honneur
aux Apôtres j pour leur avoir attribué
à. tous une difpofition d'ame envers Je-
fus-Chrift j dont a peine Judas eût été
capable. Et il feroit inutile de répon-
dre, que comme Jefus-Chrift, ni eux
ne mangèrent point l'Agneau Pafchal,
la proportion de manger l'Euchariftie
ne put les fcandalifer; car il y a, ce me
femble, une grande imprudence à faire
dépendre la créance ck la profonde vé-
nération des Apôtres pour toutes les
paroles de Jefus-Chrift , d'une fuppofi-
tion auili hafardeufe , pour ne pas dire
aufli fa 11 (Te , que celle qu'il n'a pas fait
la dernière Pâque.
33* Dissertation XXIX.
On peut réduire toutes les Traditions'
des Pharifiens à deux efpeces. Les unes
étoient vaines , inutiles 6c fuperftitieu-
fes , comme celle des ablutions généra-
les & fréquentes de tout ce qui fervoit
à leur ufage. Les autres étoient péril-
leufes & damnabies même pour la conf-
cience , & c'étoient les fautfes interpré-
tations des Commandemens de Dieu ;
comme eft. celle du quatrième touchant
l'afîiftance que les enfans doivent à leurs
pères & à leurs mères. Jefus-Chrift re-
proche aux Juifs les unes &c les autres
dans l 'Evangile, en les traitant de pré-
ceptes arbitraires, de de Traditions hu-
maines. Il élevoit fes Apôtres dans cet
efprit; & quelques-uns l'ayant averti
que les Pharifiens s'étoient feandalifés
de cette parole : Ce qui entre dans la
bouche, ri eft pas ce qui fouille l'homme ;
il leur répondit : Laiffe\ - les là : ce
font des aveugles qui en conduifent d'au*
très.
Or qui peut nier que le précepte de
finir le repas de la Pâque par l'Agneau
Pafchai, en forte qu'on ne goûte plus
d'aucun mets 9 p, 268, &c cela afin que
le goût en refte plus long-tems dans la
bouche , que ce précepte , dis-je , ne foit
une Tradition vaine, Se que ce ne foit
même une fotte fuperftition de la croire
Dissertation XXIX. 3 3 $
fainte. On ne peut donc pas prérendre
que les Apôrres eulfent plus déféré aux
Traditions des Pharifiens j qu'à la doc-
trine de leur Maître , & que fi lui-
même ne s'y fut pas fournis, ils en
auroïent pris le même fcandale.
IX. Lorfqu'on lit ces paroles de faint
Marc : Sur le folr il vint avec les dou\e
Apôtres, ôc celles-ci de faint Luc:
L'heure du fouper étant venue il fe mit
à table _, & les dou\e Apôtres avec lui :
On ne peut fe former d'autre idée , finon
qu'ils commencèrent le fouper Pafchal
au commencement de la nuit , c'eft-à-
dire entre fix ou fept heures du foir. Et
comme Jefus-Chrift , en fe mettant à
table dit d'abord aux Apôtres qu'il avoit
toujours defiré avec ardeur de mangée
cette Pâque avec eux : Et chm facla effet
kora difeubuit , & ait illis : Dejïderio de-
flderavi hoc Pafcha manducare vobif-
cum> Luc. c. 21. v. 14. 1 5. on fe repré-
fente qu'on commença le fouper par l'A-
gneau Pafchal ; ôc on donne le tort à
l'Auteur , qui ne fait dire ces paroles à
Jefus-Chrift , qu'après fouper, lorfqu'il
voulut inîtituer le Sacrement de l'Eucha*
riftie , p. 264. C'efl dans le tems de cette
inflitution j félon faint Luc même _, qu'il
dit qu'il avoit defîré de manger cette-
Pâaue j dont il ne devo'u plus manger
334 Dissertation XXIX.
avant fa mort. Il n étoit donc plus quef
tion de la Pâque légale qui s' étoit faite y
fi elle fe fit , dans le premier repas ; ce
n étoit point > dis-je a f Agneau Pafchal
que Jefus - Chrijl avoit en vue, 11 me
permettra de lui dire , qu'il fe trompe
en tout cela. Mais il y aura lieu plus
bas de reprendre cette matière.
Qu'ont fait les Rabbins fur cela ? Ils
n'ont pu fe réfoudre à lailTer palTer im-
punément une circonftance (1 innocente
ôc "fi conforme à la Loi. Pour en faire
un crime à Jefus-Chrift , ils ont ordonné
que la Tradition porteroit : Que la Pâ-
que ne fe mangeoit que vers le minuit 9
& qu'on pouvoit la manger jufquau
point du jour , p. 17Z. Ce que Jefus-
Chrift, qui étoit à minuit chez Caïphç
ou dans le Jardin des Oliviers n'avoit
eu garde d'obferver. Mais qu'y a-t-il
de plus extravagant que cette ordon-
nance , de quelque coté qu'on la confé-
déré ? Il ne faut que fe fouvenir de la
première Pâque pour la réfuter. Les
premiers nés furent tués par toute l'E-
gypte juftementâ minuit : Dum nox in
fuo curfu médium iter perageret. Les
Jfraclites preffés fans relâche par les
Egyptiens , partirent à la même heure.
Etoit - ce donc pour eux un tems de
manger l'Agneau Pafchal ? Il eft vifible
Dissertation XXIX 33$
que dans l'incertitude du moment où
paflferoit l'Ange exterminateur , qui écoit
comme le fignal de leur départ , ÔC
pour n'être pas furpris, ils le mangèrent;
le plutôt qu'ils purent, & même, com-
me portoit le commandement, avec pré-
cipitation , feftinanter , étant même en
le mangeant dans la pofture et dans l'é-
tat de voyageurs prêts à partir. D'ail-
leurs il faut confidérer que l'immola-
tion de la Paque fe faifoit , félon Jo-
feph , depuis trois heures jufqu'à cinq,
tk que cette dernière heure du jour juf-
qu'à fix étoit employée à l'apprêter , Se
à la mettre en état d'être mangée, pour
n'être pas obligé de faire cette cuifine
le jour du Sabbat, où tomboit fouvenc
la fête de Pâque , comme elle y tomba
en effet l'année que Jefus-Chrift mou-
rut. Par quelle raifon myftérieufe donc
les Juifs auroient-ils différé jufques
vers le minuit, de manger une viande
cuite & apprêtée fix heures auparavant ?
Au moins la Loi leur commandoit ex-
preffément de manger du pain fans le-
vain le foir du 14 jour du premier
mois. Or ils n'étoient obligés d'en man-
ger pour la première fois qu'au repas de
l'Agneau Pafchal. Primo menfe , quarto,
décima die menjîs ad vefperam a\yma
fomedetis, Exod, c. iz. y. 18, Si donc
$ $6 Dissertation XXIX.
ils n'eufFent mangé la Pâque que vers le
minuit, ils auroient pu contre la Loi
manger du pain levé le foir du 14, de-
puis 6 heures jufqu'au fouper Pafchal.
X. Une autre irrégularité pour les
Rabbins, & un obftacle invincible pour
l'Auteur à la dernière Pâque de Jefus-
Chrift, eft ce que dit faint Matthieu,
que Notre Seigneur ne coucha pas cette
nuit à Jérufalem , & qu'après avoir
foupé, il alla fur la montagne des Oli-
viers. Car comme on étoit obligé cette
nuit - là de coucher à Jérufalem , on en
peut conclure j que ce n étoit donc pas la
nuit où fe mangeoit la Pâque. p. 166,
Où eft-ce que faint Matthieu allure que
Jefus-Chrift ne palTa pas à Jérufalem la
nuit de la dernière Cène ? J'avoue qu'il
alla fur la montagne des Oliviers j mais
il n'y coucha pas : les foldats le rame-
nèrent à Jérufalem , Se il y palTa cette
douloureufenuit dans la maifon deCaï-
phe. Ainfi rien n'empêche de ce côté-là
que Jefus-Chrift n'ait pu manger la der-
nière Pâque.
Mais , félon les Rabbins , Y Agneau
Pafchal ne fe mangeoit que vers le mi-
nuit. Or Jefus-Chrift fortit bien aupara-
vant de Jérufalem , p. z6y. Je l'avoue
çncore. Mais ce précepte de ne manger
la Pâque qu'à minuit, ne paroît, comme
Dissertation XXIX. 3 57
je le répète, qu'une Tradition inventée)
Se faite à plaifir pour convaincre do
prévarication la dernière Pâque de Je-
ius-Chrift. Ou fi elle étoit effective , il
Ja faut ranger parmi les vaines Tradi-
tions qui n'avoient aucun fondement
dans l'Ecriture , Se pour lefquelles Je-
fus-Chrift n'avoit que du mépris. Tour,
ce que l 'Ecriture preferit touchant le
sems de la manducation , eft y que cette
nuit - là les Hébreux dévoient manger de
la chair rôtie. Et edent carnes noble illâ
ajfas igni. Exod. c. 12. 8. Or dans le
tems de l'Equinoxe 3 auquel la Pâque
étoit attachée , la nuit commençoit dès
les 6 heures du foir , ôc au coucher du
foleil. On avoit donc dès-lors la liberté
«le commencer le feftin Pafchal,
XI. Voici un Règlement qui eft au
moins fondé fur l'écorce de la Loi , je
dis fur le dehors de la lettre, Elle dé-
fend aux lfraclites de porter dehors au-
cune partie de la chair de l'Agneau Paf-
chal : Nec efferctis de carnibus ej us foras %
ibid. v. 46. ce qui s'explique de foi-
meme par l'ordre qui précède immédia-
tement, de le manger tout entier dans la
même maifon : In una domo comedetur*
La Loi donc leur défendoit d'en en-
voyer dehors quelque part à leurs amis %
comme ils avoient accoutumé d'en ufeç
Tome IF. P
$$8 Dissertation XXIX.
dans leurs feftins j 8c pour figurer l'obli-
gation de n'accorder la Communion
qu'à ceux qui font dans l'Eglife Catho-
lique , dont chaque maifon ctoit la fi-
gure , 8c de la refufer à ceux qui en
font féparés par rhéréfie 5 ou par le
fchifme.
Les Rabbins toujours excefîifs dans
leurs Commentaires , ont étendu cette
défenfe jufqu'à la chair de l'Agneau
mangée 8c demi digérée ; 8c par cette
raifon ils ont obligé les Juifs de pafTer
cette nuit-là a Jerufalem , parce qu'auiîi-
tôt que la chair de la Pâque avoir été
portée hors des enceintes de cette ville,
elle devenoit fouillée, p. 172. Or en
fortant après foupé , ils Pauroient portée
dehors dans leur eftomach. On ne peut
pas porter plus loin le rafinement. Qu'ar-
riva-t-il ? C'eft que Jefus - Chrift qui
entendoit autrement cette Loi que les
Rabbins fortit de la ville avec fes Dif-
ciples après le fouper Pafchal ; il pa(Ta
le torrent de Cedron , il fut jufqu'a Geth-
femani , village fitué fur le mont des
Oliviers , 8c entra dans un Jardin où il
fut pris. Qui peut douter après un fi
manifefte violement de la défenfe des
Rabbins , que la chair de FAgneau Paf-
chal , que lui 8c (es Difciples avoient
mangé, ne devînt tout d'un coup irn.^
Dissertation XXIX. 3 3 9
pure & profane dans leur efëomach ? C'efl:
au moins le compte & la prétention des
Rabbins. Mais l'Auteur lage ôc pieux >
comme il eft, ne fouffrira pas un fi
grand fcandale , & il l'empêchera bien.
Il ne peut pas faire en forte que cette
nuit-là Jefus-Chrift ne foit point forti
de Jérufalem. Mais pour le fauver de
la profanation fulminée par les Rabbins ,
il ne confentira jamais qu'il ait mangé
l'Agneau Pafchai : De ce que dit faine
Matthieu , que Notre Seigneur ne cou-
cha pas cette nuit à Jérufalem , & qua-
près avoir foupé il alla fur la montagne
des Oliviers \ j'en puis conclure que ce
nétoit donc pas la nuit oh fe mangeoit
la Pâque , on et oit obligé cette nuit-là
de coucher à Jérufalem. p. 166,
XII. Enfin les Rabbins feveres cen-
seurs de la dernière Paque de Jefus-
Chrift, ont obfervé que Pierre, au vu
êc fu de fon Maître, s'éroit muni d'u-
ne épée a tout événement, lis n'ont pas
manqué de faire fur cela un Règlement,
qui défend aux Juifs de rien porter les
jours de fêtes , non pas même le cou-
teau avec lequel ils dévoient égorger
l'Agneau Pafchai, p. 171. Ils l'atta-
choient à fes cornes ou à fa toifon. L'Au-
teur approuve cette ordonnance. Ce
aétoit pas 9 dit - il , une fuperflition
Pij
540 Dissertât ion XXIX.
vainc ; ôc il l'autorife par la défenfe
étroite dans Jérémie de porter des far-
deaux les jours de fêtes ou de Sabbat ,.
ôc de les tranfporter hors de fa maifon^
Nolite port arc pondéra in die fabbati ;
nolite ejicerc onera de domibus vejlris ,
c. 17. v. 21 , 22. Il eil vrai que la con-
clufion s'étend mille fois plus loin que
la preuve ? Car quelle proportion y a-
t-il entre un couteau qu'on porte en fa
poche, ôc de lourds fardeaux qu'on ne
peut porter que fur fes épaules ? J'aime-
rois autant dire qu'il leur étoit défendu
«le porter aufli leurs habits qui pefoient
plus qu'un couteau. N'importe, l'in-
clination fuppléera au défaut de la rai-
fon } ôc les Rabbins auront toujours
convaincu faint Pierre d'une grande pré-
varication d'avoir porté mie épée , un
jour, qui après la manducation de l'A-
gneau Pafchal , devoit être pour lui ^
pour fon Maître , 6c pour £gs Collè-
gues le grand jour des Azymes.
Je laille toutes les autres Traditions
Rabbiniques , qui ne regardent point
notre fujet, ôc qui ne font fondées que
fur l'autorité des gens qui n'en ont point
parmi nous , ôc qui étant décriés par
leurs menfonges n'en doivent point
avoit par toute la terre. Je m'étonne
feulement de ce qu'on les approuve , dô
Dissertation XXIX. 5 4 1
ce qu'on s'efforce de canonifer j pour
ainfi dire , ces vaines Traditions fous
le nom de Coutumes; qu'on y foumet
Jefus-Chrift même, tk que fur l'auto-
rité de ces ennemis de l'Eglife, on re-
jette des Traditions qui y ont été re-
çues dès le commencement.
§. XIV.
Réponfe à tout ce qu'on peut alléguer ^
pour difculper les Juifs de la fuper-
cherie d-e leurs prétendus Reglemens
touchant la Pâque.
Voilà douze Chefs eiïentiels rappor-
tés par FAuteur dans fon Traité Hifto-
rique de la Pâque, fans compter ceux
qu'il n'a pas cités ; car je lui fais vo-
lontiers ma déclaration , que je ne perds
pas le tems a lire ces fortes de Livres.
Je prétends que félon toutes les apparen-
ces ils ont été fabriqués exprès par les
Rabbins , poar avoir de quoi calom-
nier la dernière Pâque de Jefus-Chrift,
&: l'accufer de profanation & de facri-
lege. Il me reprochera peut-être que
c'eit moi - même qui les calomnie , &
que je fuppofe ce qui ell en queftion,
pout avoir lieu de leur impofer ce mau-
vais deffein. Que pour faire voir qu'ea
P iij
54i Dissertation XXIX.
cela ils n'ont jamais fongé ni à Jefus-
Chrift , ni à fa dernière Pâque , ils ne
lui ont jamais appliqué ces Reglemens
pour le convaincre de les avoir violés ;
mais qu'ils fe contentent de les rappor-
ter comme une partie de leurs Coutu-
mes, en laifTant aux Chrétiens d'en fai-
re , fi bon leur femble , l'application à
qui il leur plaira.
Je réponds déjà que les Rabbins n'é-
toient pas fi mauvais politiques , que
de s'attirer par ces applications mali-
gnes la haine 8c la persécution des Prin-
ces Chrétiens fous lefquels ils vivoient.
Ils avoient déjà afTez de peine, odieux
comme ils étoient à tous les peuples, à
fe maintenir par leur fîlence dans la paix
qu'on leur accordoit. Mais ce qu'ils
n'ofoient pas écrire, rien ne les empê-
choit de le débiter en fecret dans les
maifons, & même dans les Synagogues
à des gens qui étoient de ferment de ne
rien révéler de ce qui s'y pafioit j de il
ne faut pas s'étonner fi les Juifs abufés
par ces mauvais Maîtres , ont conçu de
confervent encore tant d'horreur pour
Jefus- Chrift , Se pour fa Religion.
D'ailleurs, pour me difculper de la
pétition de principe que l'Auteur pour-
roit m'imputer, je veux bien lui rendre
compte des moyens dont je me fers pour
Dissertation XXIX. 345
les accufer de ce méchant artifice j & je
ne crains point de l'exciter à leur faire
juftice.
Le 1 . moyen eft , que l'Ecriture ayant
ordonné la Pâque avec toutes les céré-
monies ôc toutes les circonftances qui
s'y dévoient obferver ; la plupart de ces
Reglemens Rabbiniques font contraires
à l'Ecriture & incompatibles avec fes
ordonnances. C'eft ce qu'on verra dans
la fuite j quoique l'Auteur ait écrit far
le fujet des Pâques d'Ezéchias ^ d'Ofias
& d'Efdras, que ce que nous difent les
Rabbins ejl Ji conforme à l'Ecriture ^
au on ne le peut point prendre pour des
ficlions. Trait, p. 129.
Le 2 eft , que les autres Reglemens
qui ne paroiffent pas formellement op-
pofés à l'Ecriture , font des additions
arbitraires , qui n'y ont aucun fonde-
ment , non plus que dans Jofeph ni dans
Philon , qui font leurs Hiftoriens ; Sz
elles font telles que les Rabbins n'ont
pas eu foin de les retenir dans les bor-
nes du vraifemblable j & même du pof-
fible.
Le 5. eft l'oppofition fi jufte & Ci me-
furée qui eft entre ces Reglemens pré-
tendus , & toutes les circonftances de la
dernière Pâque de Jefus-Chrift j car il
vy a pas fait une démarche qui ne foit
Piv
»44 Dissertation XXIX.
condamnée par une Loi contraire, fous
peine dépêché & fouvent de mort. Ainfi
il faut qu'ils l'ayent fuivi pas à pas, pour
faire après coup de toutes fes actions au-
tant de tranfgreflions capitales -y ou que
par un hafard fans exemple , toutes
leurs Traditions fe foient trouvé oppo-
fées à tout ce qu'a fait Jefus-Chrift j ou
qu'enfin Jefus-Chrift ait affecté de pren-
dre dans fa conduite le contraire de leurs
Traditions. Or comme le hafard ne
peut avoir lieu dans une fi longue fuite
d'actions &c de défenfes , & qu'on ne
peut d'ailleurs attribuer a Jefus-Chrift
un deffein fi bas , que de violer fans né-
ceflité exprès les Traditions des Juifs ,
il ne refte autre chofe, finon que pour
décrier les actions de Jefus-Chrift, les
Kabbins ont fabriqué exprès des Re-
^lumens tout contraires.
Quelques vioîens que foient ces foup-
çons , je ne les donne néanmoins que
pour des foupçons qui ne démontrent
peut-être pas entièrement la mauvaife
Foi des Rabbins , mais qui la rendent
au moins très-probable. Mais je fou-
nens qu'il y a affez de lumière pour
donner à un Auteur Chrétien de grands
fujets de défiance, qu'il peut y avoir
de la fupercherie dans une contrariété
{} exacte entre ces Reglewens des Rab-
DlSSERTATI ON XXIX. % 45
bins & les circonftances de la dernière
Pâque de Jefus-Chrift \ Se pour l'obli-
ger à ne faire pas ce partage injufte
entr'eux & les Evangéliftes , de pren-
dre les Traditions de ceux-là pour des
principes , & les témoignages de ceux-
ci pour des objections.
Mais autant qu'ils fe font appliqués
à noircir par leurs Traditions la der-
nière Paque de Jefus - Chriffc , autant
ont-ils eu de foin de relever la fainteté
de la leur par des circonftances toutes
miraculeufes^ indignes par l'un & par
l'autre d'être écoutés & d'être reçus en
témoignage par les Chrétiens dans les
différends qu'ils ont à démêler enfem-
ble touchant la Paque de Jefus-Chrift
fk les autres dogmes de leur Religion.
C'eft ce fécond caractère de merveilles
& de fainteté qu'il me refte à juftifler,
pour convaincre les Rabbins d'être de
faux témoins , par les menfonges ridi-
cules qu'ils ont mêlés dans leurs Tra-
ditions.
§. XV.
Fauffe cxaCïuude du Sanhédrin dans
l'obfervation de la nouvelle Lune
de chaque mois,
I! faut commencer par la premiers
34^ Dissertation XXIX.
cérémonie j qui éroit de déclarer la
nouvelle Lune , ou le premier jour du
mois Nifan , parce que c'eft de-là que
dépend le 14 où fe faifoit l'immolation
de la Pâque. On nous fait voir , Traité
Hift. p. 5 1 , qu'en cela leur exactitude
allait jufquau fcrupule. Ils avoient
deux moyens pour s'affurer de la nou-
velle Lune. Le premier étoit de con-
fulter les Tables Aftronomiques. Le
fécond étoit d'obferver la première ap-
parition de la Lune où ils avoient ac-
coutumé de la fixer : tous deux en ufa-
ge , quoique l'un ou l'autre fût absolu-
ment inutile. Car (1 les Tables mar-
quoient infailliblement la nouvelle Lu-
ne , quel befoin avoient-ils de l'obfer-
vation/* C'eft qu'il étoit efTentiel qu'on
ne célébrât la Néomenie que par l'or-
dre du grand Sanhédrin : or les Tables
Aftronomiques étoient ou pouvoient
être entre les mains de tout le monde.
Tout le monde pouvoit de même obfer-
ver le premier CroifTant fans erreur.
Mais pour faire dépendre du Sanhédrin
la nouvelle Lune , il envoyoit fur les
hautes montagnes âçs exprès pour l'ob-
ferver j il la fixoit fur leur rapport à
fon jour , & le chef du Sanhédrin pro-
nonçoit à haute voix Mechudas _, c'eft-
à-dire3 le jour de la Néomenie eft con-
Dissertation XXIX 347
facré ; & le mot Mechudas retentifloit
aufli-tôt par toute la ville. Toutes les
obfervations particulières étoient fans
autorité , de n'étoient comptées pour
rien.
On voit d'abord que cette méthode
étoit fujette à de grands abus. Car com-
me le Sanhédrin n'étoit pas infaillible,
s'il fe Fût trompé dans la détermination
de la Néoménie , étoit-on obligé de le
fuivre ? Oui fans doute. Ce que le
Sanhédrin avoit ordonné touchant la.
confécration de la Néoménie _, bien que
fondé fur quelque erreur j & fait avec
imprudence ou par violence , devoit
s y exécuter ,p. 54. Quoi , contre la difpo-
fîtion même de la Loi ? Qu'étoit donc
devenue cette exactitude fcrupuleufe , 8c
qui alloit jufqu'à la Religion ; puif-
qu après tout > la Néoménie , 8c par
conséquent la Pâque dépendoit de la
fantaiile du Sanhédrin , fi ce n'eft peur-
être que la Loi même ne lui donnât dif-
penfe de violer fes préceptes f Aufli il
ne manquoit pas de ce pouvoir, 8c le
voici, comme prétend Maimonide, bien
marqué dans le Lévirique, ch. 25, 37. Ce
font- là , dit Dieu à Moïfe, les fêtes que
vous indiquerez. On ne peut qu'on ne
s'inferive en faux contre ce Commen-
taire qui détruit fon texte. C'efl: au con-
P vj
$ 4-5 Dissertation XXIX.
traire une ordonnance expreffè de célé-
brer les fèces dans les propres jours qui
leur font aiïîgnés dans ce Chapitre. Le
texte porte à la lettre ; Voilà les jours
d'ajfemblées j que vous appellerez des
afj'emblées faintes . . . Vous y fere^ cha-
que chofe en fon jour: Rem diei in die
fuo. Lors donc que le Sanhédrin maï-
quoit d'autres jours pour les fêtes que la
Xoi n'avoit preferites , les Juifs fi reli-
gieux obfervateurs de la Loi, pouvoient-
îls balancer un moment à prendre parti
«entre 'Dieu & le Sanhédrin ?
Or ils dévoient regarder la Néome-
-nie fixée à la première Phafe de la Lune,
comme un violement de la Loi , qui l'at-
tache au contraire à fa conjonction avec
le Soleil. Car de cette conjonction à la
première apparition il y a quelquefois
deux jours entiers d'intervalle. Ce n'ér
toit donc plus faire chaque fête en fon
jour 5 ni chaque cérémonie en fa fête :
Rem diei in die fuo. N'importe. 11 fal-
îoit fuivre le Sanhédrin ; & pour ôter
tous les ferupuies , Lorfque Dieu dit à
Moïfe : Ce mois fera le premier des moisy
il lui fit voir la Lune qui commencoit
•de paroître ; & il lui dit que lorf qu'il
laverroit dans la même figure > il con-
fëLCrât laNéomenie , /?. 5 1 , $ 1. C'eft Mai'
^nfionide qui rend ce témoignage •; Aur
Dissertation XXIX. 344
torité-au-deiliis de toute exception. Qui
eût ofé après cela condamner une prati-
que que Dieu même avoit ordonnée ? Il
n'y a fans doute que la révélation qui
ait pu apprendre à ce Rabbin une Tra-
dition dent l'Ecriture ne parle point ,
& qu'en fuivant le texte on auroit lieu
de placer plutôt dans le 8 ou le 9 du
mois , à caufe du précepte qui fuit im-
médiatement 5 Que les Hébreux fe pour-
voient dès le iOj d'un agneau pour la
Paque. Mais il faut faire un acte de foi
pour croire Maimonide.
Après tout , ces paroles de Dieu à
Moïfe regardent toute la République ,
& ne reftraignent point au Sanhédrin
le pouvoir de déclarer la Néomenie.
Ce qui manque donc à cet ordre , eft
fuppléé par un autre , au rapport dti
même Auteur : Moïfe > dit-il, p. 60 ,
avoit reçu cet ordre fur la montagne de
Sinaïy que pendant que ce Tribunal fub-
fijleroit , on déclarât la Néomenie ^ lorf-
que la Lune auroit paru , & que dans
la fuite des tems , lorfquil n'y auroit
plus de Sanhédrin , on n'eut plus d'égard
aux Phafes de la Lune , mais aux feules
Tables Ajlronomiques , comme nous f ai"
fins à préfent. En vérité , ce Rabbin
n'oublie rien j & il a pourvu à tout. Car
•enfin il étoit un peu fcandaleux qu«
5 5© Dl S SERT ATION XXIX.
Dieu en donnant à Moïfe un ordre ab-
folu ôc fans limitation, n'eût pas prévu
que les Juifs tomberoient un jour dans
un état où il leur feroit impoflible de
lui obéir. Il a donc fallu le rendre con-
ditionnel , & en reftraindre la vigueur
à la durée & au règne du Sanhédrin.
Rien n'eft plus exa&.
Mais je craindrois que cette exactitu-
de même ne fît ériger Maimonide en
Prophète des chofes paiïees j Se que
cet ordre prétendu daté du mont Sinaï
n'eut été compofé après coup vers la
fin du 12 fiecle. Car qui croira que
Moïfe eût averti le Sanhédrin , qu'il
viendroit un tems où le Sanhédrin mê-
me ne feroit plus, & par conféquent
où toute la République feroit renverfée?
Tous les Juifs n'ont-ils pas été perfua-
<{és que l'alliance que Dieu avoir faite
avec eux par Fentremife de leur Législa-
teur étoit éternelle, fondés fur ces pa-
roles & fur plusieurs autres femblables :
Paclum efl fempiternum j paclum falis
femphernum. N'en coûta- 1- il pas la vie
à faint Etienne pour avoir prononcé ce
blafphème prétendu pour tous les Juifs :
Que Je/us de Nazareth détruira ce lieu
faint y Se ce qui eft encore plus effroya-
ble , qu'il changera les ordonnances que
Moïfe a laijfées aux Juifs j A et, 6 . 1 4.
Dissertation XXIX. 351
& par conféquent robfervation de la
première Phafe de la Lune ? Ne fut-ce
pas même ce qui fit conclure la mort
de Jefus-Chrift , que la terreur panique
qu'ils eurent que tous les Juifs croyant
en lui , il ne reftât plus perfonne pour
défendre la ville Se le Temple, & que
les Romains venant dans un 11 fâcheux
contre-tems ne ruinaient l'un & l'autre
avec toute la nation : Et ventent Romani>
& tollent nojlrum locum & gentem. Ce-
pendant voici un Rabbin qui nous dit
froidement , qu'on s'attendoit à cette
révolution dès le mont Sinaï_, plus de
24 ou 25 fiecles auparavant, 5c qui
nous en fait la Prophétie environ 1 100
ans après qu'elle eft arrivée; mais ces
prédictions Rabbiniques demandent une
déférence aveugle , cV non pas des dif-
euffions critiques. Continuons donc la
déclaration de la nouvelle Lune.
§. XVI.
Incommodité inutile des ohfervations ocu-
laires ; prodiges incompréhenjibles de
vîtejje dans les ohfervations de la nou-
velle Lune j & dans les mejfagers de
la Né orne nie.
Avant que de palTer outre, il faut
*j5i Dissertation XXIX.
qu'on me développe un embarras que je
trouve en mon chemin. C'eft une con-
tradiction qui faute aux yeux. On re-
connoît, p. 6o, que la Synagogue navoit
point de privilège particulier qui la ren-
dît infaillible dans la déclaration des
nouvelles Lunes. Mais > dit-on, p. Gi ,
elle ne Je pouvoit pas tromper en fe fer-
yant de Tables défeclueufes & de Cy-
cles imparfaits , puifquelle rien avoit
point du tout. Du tems de Notre Sei~
gneur on ne regloit pas les fêtes Juives
par des Tables & des Cycles ; cétoit
par la feule vue de la première Phafc
de la Lune qu'on regloit les mois , &
par conféquent toutes chofes. Comment
peut-on accorder ce paradoxe avec ce
qu'on a reconnu plus haut après Mai-
monide , p. 53, que chaque mois le San-
hédrin recherchoit par les principes de
V AJlronomie 3 non- feulement le tems que
la Tune devoit paroitre , mais encore
toutes fes différentes dïfpofitions ;Ji elle
feroit inclinée vers le Septentrion ou vers
le Midi ; fi elle paroîtroit grande ou
petite ; comme elle tourneront la pointe
de fes cornes : & cefl par- là que les
Juges reconnoiffoient fi ce qu'on leur rap-
portoit étoit conforme à la vérité. Les
règles ou les principes de l'AuTonomie
ae comprennent - ils pas les Tables &
Dissertation XXIX. 355
les Cycles Agronomiques ?
Je demeurerai donc dans cette fé-
conde fuppofition j 8c je remarquerai,
fur la foi du même Rabbin , qu'on en-
voyoic fur les hautes montagnes des
perfonnes de bonne vie & dignes de foi ,
p. 5 3 , pour découvrir la Lune. Car on
ne fe iioit pas à toutes fortes de gens9
de on ne fe contentoit pas qu'ils mon-
taiïent fur le haut du Temple 3 qui étoit
lui-même fitué fur une montagne. Ce-
pendant , dit Maimonide , le grand
Sanhédrin examinoit avec foin félon les
règles de V Aftronomie fi la Lune paroi-
troit le 30 du mois 3 ou fi. elle ne paroi-
troit pas. Pourquoi donc députoient-
ils ces obfervateurs d'office pour faire
cette découverte ? Eft-ce qu'ils ne fe
floient pas à leurs propres règles? Tout
au contraire : Si on favoit par les Ta-
bles Afironomiques que la Lune ne pou-
voir point paroître ce jour- la _, on ri at-
tendoit point les envoyés. En vérité cette
commifllon étoit une grande mommerie.
Car enfin s'ils favoient par les Tables
que la Lune ne paroîtroit point 3 pour-
quoi les envoyoient - ils découvrir ce
qui ne devoit point paroître. S* ils reve-
naient j dit notre Rabbin , comme ayant
ru la Lune 3 on les prenoit pour des men-
zeurs. S'ils ne le favoient pas , que ne
^54 D IS SE R T AT ION XXIX.
confultoient-ils leurs Tables avant que
de les envoyer. Rien n'étoit donc non-
feulement plus inutile , mais encore plus
incommode pour le public que ces voya-
ges y puifqu'en attendant les obferva-
tions , le jour demeuroit toujours en
fufpens, on ne favoit à" quel mois il
devoit appartenir. Ou plutôt, puifqu'on
redreiToit leurs obfervations par les Ta-
bles j il eft. vifible contre ce qu'on a
prétendu plus haut, p. 6 1 , qu'on regloit
les fêtes Juives par des Tables & par
des Cycles j & non par la feule vue de
la première Phafe de la Lune _, puifqu'on
ne fuivoit les obfervations qu'autant
qu'elles s'accordoient avec les Tables.
Si l'Auteur a bien pris les fentimens
des Rabbins , de quoi je veux bien me
fier en lui, il ne faut que cette contra-
diction pour faire voir leur étourdifle-
ment & leur fatuité. Elle eft fi palpable
que Calvifius par charité ou autrement,
a cru leur devoir attribuer une conduite
plus raifonnable : Comme, dit- il, depuis
leur fortie de V Egypte jufquau tems
d'Alexandre le Grand , le cours ou le
mouvement de la Lune nétoit pas encore
bien connu , ils navoient point de Calen-
drier affe^ exact pour leur marquer
r heure & la minute des nouvelles Lunes.
Auffi les Rabbins nous témoignent dans
Dissertation XXIX. 3 5 5
leurs écrits , qu'autrefois parmi les Ifraé-
lites il y avoit des gens gagés pour ob-
ferver la nouvelle Lune _, & qui l'ayant
vue aujji - tôt quelle étoit fortie de fa
conjonction avec le foleilj en répandoient
le bruit par des cris publics _, & indi-
quoient la Néomenie. On obfervoit fur-
tout cette coutume dans les lieux où le
Tabernacle étoit dreffé , & enfuite à
Jérufalem depuis que Salomon eut fait
conjlruire le Temple. Cela me paroi t de
bon fens , parce qu'il eft fort naturel
de fuppiéer par les obfervations ocu-
laires au défaut de la fcience du cours
des aftres : mais rien n'eft moins fenfé
que d'envoyer fpéculer le Croiflant ,
lorfqu'on fçait infailliblement s'il doit
ou ne doit pas paroître , pour avoir le
plaidr de voir (1 les fpéculations font
conformes aux Ephémérides.
Il ajoute plus bas , que depuis le rè-
gne d'Alexandre le Grand , les Juifs
fuivirent la Période deCalippe dans la
détermination de leurs Néomenies 8c de
leurs autres fêtes , 8c en uferent environ
pendant £00 ans, c'eft-à-dire , jufqu'au
tems du Grand Conftantin , & que pen-
dant tout ce tems on efr prefque aftliré
8c de la mefure des années Judaïques ,
8c de la date de la célébration de leurs
Pâques.
556 Dissertation XXï)t.
Les députés venoienc en diligence
faire leur rapport pour fe trouver au
feftin dont on les régaloit à leur retour,
p. 54. Il y avoit du furnaturel dans leur
diligence ; car ils ne pouvoient ap-
percevoir la Lune naitTante qu'après le
coucher du foleil vers le tems de l'Equi-
noxe. Ils partoient auiîi-tôt chacun de
la montagne qu'ils avoient choilie, car
ils ne fe poftoient pas tous fur la même ,
nhn que fi la Lune étoit cachée dans un
nuage à l'égard d'un afpect, elle pût
être vue à découvert dans un autre. Ce-
pendant & par une merveille furpre-
nante, ils fe trouvoient tous le foir mê-
me à Jérufalem , affez à tems pour af-
filier au feftin préparé qui les atten-
doit.
Quand on ne voudroit pas admettre
ce miracle pour ces petits voyages qui ne
fortoient point de la Judée , on ne pour-
roit l'éviter, lorfqu'on envoyoit dans
les pays éloignés la déclaration de la
Néomenie & des autres fêtes que le
Sanhédrin avoit dreffée. Car depuis que
Dieu l'eût ordonné à Moïfe fur le mont
de Sinaï, il falloit tous les mois de l'an-
née que le Sanhédrin annonçât par des
courriers la Néomenie & les autres prin-
cipales fêtes aux Juifs difperfés par tou-
te la terre, dans l'Efpagne, dans l'Ira-
Dissertation XXIX. 557
lie, dans les Gaules ., dans la Perfe»
dans tout L'Orient , &: généralement dans-
tous les lieux dont on voit le dénom-
brement _, Acl. c. 2., v. 10, 11. En vain
ils auroient vu le premier Croiffant de
leurs yeux, il falloir que le Sanhédrin
leur apprît que c'étoit le CroilTant , au*
trement ils fe fuifent défiés de leurs,
propres yeux. Mais par quelle voie leur
apprenoit-on cette nouvelle f II y en a-
voit deux d'une extrême diligence. C'elt
toujours Maimonide qui parle. La 1.
étoit de l'annoncer par des flambeaux-
qu'on allumoit fur les hautes montagnes y
p. 57. Mais par malheur les Samaritains
jaloux ayant fait la même chofe en
d'autres tems , trompèrent les Juifs, de
obligèrent ainfi le Sanhédrin à prendre
d'autres mefures. La 2. fut donc d*en-
voyer des Meffàgers exprès. Quelqu'un
après cela a ofe douter comment les
Juifs répandus par tout le monde pou*
y/oient s'accorder dans la célébration de
leurs fêtes 3 p. 56. Mais ceux qui pro-
pofent ce doute font gens incrédules ,'
qui ne favent pas que les miracles é-
toient ordinaires dans le gouvernement
de la Synagogue ^ ôc que la manière
dont le Sanhédrin faifoit connoitre à tous
les Juifs du monde ce qu'il avoit déter-
miné touchant les Néomenies lève toutes
bs difficultés.
5 $ 8 Dissertation XXIX,
Car dans les lieux > dit Maimonides
où ceux qui portoient la nouvelle de la
nouvelle Lune pouvoient arriver à terns^
comme dans la Paleftine & dans la Sy-
rie, qui n'ont que l'étendue de 6 à 7
degrés, c'eft-à -dire , environ de 150
lieues , on ne faifoit chaque fête que
pendant un jour j comme la Loi nous
l'ordonne j p. 57 , qui étoit le premier
jour du mois , & le lendemain de la dé-
couverte du premier CroifTant. Or la
fête de la Néomenie commençoit dès
le foir précédent. Ainfi pour arriver à
tems , il falioit qu'étant partis de Jéru-
falem après le retour des fpéculateurs
de la Lune , ils arrivaient ce foir même
dans tous ces lieux.
Mais ceux qui et oient Ji éloignés >
( car les Juifs étoient répandus par route
la terre , ) qu'ils ne pouvoient appren-
dre que fort tard les déclarations du
Sanhédrin j ils célébroient pendant deux
jours chaque folemnité. C'efl: que les
Courriers du Sanhédrin n'arrivoienc
dans tous les lieux du monde que le foir
du jour de la Néomenie. Il fe trouvoit
ainfi qu'ils la célébroient deux jours de
fuite. Le premier pour obéir à la Loi,
ou à la première apparition de la Lune;
mais parce que PobéifTance à la Loi
nétok d'aucun mérite fans l'attache du
Dissertation XXIX. 359.
Sanhédrin, ils célébroient laNéomenie
le fécond jour pour obéir aux ordres du
Sanhédrin 'y Se après qu'il fur aboli , ils
firent par coutume ce qu'ils faifoient
autrefois par obéiifance.
Il ne s'eil: jamais rien imaginé de
plus admirable, & tous les miracles de
la Religion Chrétienne ne font rien en
comparaifon. Car on ne peut concevoir
autrement la chofe , qu'en fe représen-
tant qu'au premier jour de chaque mois
Ôc à toutes les grandes fêtes de l'année,
ces meflagers montoient fur les portil-
lons d'Eole , & prenant chacun leur
route aux quatre coins du monde, ils
en portoient la nouvelle à tous les Juifs,
en parcourant les lieux où ils demeu-
roient : ou bien le miracle d'Habacuc
fe renouvelloit autant de fois , & des
Anges les prenant par les cheveux , les
tranfportoient en un moment par tout
où les Juifs étoient répandus. Car s'ils
n'euirent fait ces voyages que par les
voies ordinaires, les Juifs des Provinces
éloignées euffent appris de célébré la
Néomenie , les uns plutôt, les autres
plus tard j chaque Synagogue félon fa
diftance de Jérufalem j &z quelques-unes,
ce qui eût été fort fcandaleux , ne l'euf-
fent faite qu'au milieu du mois j ni les.
autres qu'à la fin.
%6o Dissertation XXIX.
§. XVII.
Plan du Temple de Jérufalem félon Jo+
feph. Roman des Rabbins touchant
l3 immolation de la Pâque. Confe'quen*
ce qu'on en tire contre la dernière Pâ-
que de Je/us- Chrifl.
Puifque nous fommes fur les mira-
cles des Rabbins , il en faut continuer
la matière , & nous'ne choifirons que
ceux dont on fe fert pour convaincre
de faïuTeté la dernière Pâque de Jefus-
Chrift que nous défendons. N'eft - ce
pas à moi une grande témérité de fou-
tenir une caufe contre laquelle le Ciel
s'eft déclaré par tant de miracles ? Mais
pour mettre toute cette matière dans un
plus grand jour, il eft bon de donner
ici en peu de mots le plan du Temple
de Jérufalem , félon la defcription que
Jofeph témoin oculaire en a faite , fort
différente de celle que les Rabbins nous
ont laiffée.
Le Mont Moria, fur lequel le Tem-
ple étoit bâti , étoit un Tertre haut ,
pierreux , & efcarpé de tous côtés, linon
du côté du Septentrion où la pente étoiç
plus aifée , &c la vallée moins profonde.
Comme à peine le haut auroit pn
contenir
Dissertation XXIX. $6t
contenir l'édifice du Temple &c l'Autel ,
Salomon , pour en étendre l'enceinte ,
le ht enfermer depuis le pied juiquM la
hauteur de 300 coudées , de quatre
grandes & foutes murailles , qui le joi-
gnoient dans les angles , & qui étoient
bâties de pierres de 40 coudées ; &c
ayant fait combler de terre l'entre- deux
dss murs & de la montagne , il lit une
grande place quarrée de 500 pas de
tour , Se dont chaque coté éroit de 1 2 5
pas ou d'un îtade. Le long de ces côtés
regnoient quatre grandes galeries d'une
magnificence iingulicre. Celle qui re-
gardoit le Midi s'appeiioit la Galène du
Roi ou de Salomon, Ôc elle avoit qua-
tre ran^s de colonnes qui faifoient amiî
trois allées pour fe promener , dont celle
du milieu avoit 45 pieds de large fur
100 de hauteur j & celles des deux cô-
tés étoient chacune de 50 pieds de lar-
ge & hautes de 50. Elles étoient comme
celle du Roi lambrilfées de cèdre, mais
fans aucun ornement de fculpture. C'eft
dms cette Galerie de Salomon que Je-
fus-Chrift, fe promenoir quelquefois en
Hiver , afin de s'échauffe* ; comme il
paroi t qu'il arriva le jour de la Dédi-
cace. Joan. c. 10, 22.
On entroit par 6 portes dans ce pre-
mier quarré qui écoïc ouvert a tout le
Tome IK Q
562. Dissertation XXIX.
monde , Ôc où les Juifs immondes &c
les Gentils avoient également droit de
faiie leurs prières. Celle de la Galerie
du Roi qui donnoit vers le Midi s'ap-
pelloit la Belle-Porte _, à caufe des or-
nemens dont elle étoit enrichie } & com-
me celle de l'Orient , elle conduifoit
par un long Efcalier dans la ville. On
fortoit de la Galerie de l'Occident par
quatre autres qui menoient en divers
quartiers. Tout le refte de cet Enclos
qu'on nommoit le Parvis des Gentils
etoit pavé de diverfes fortes de pierres.
Mais comme il n'alloit depuis le pied que
jufqu'à la hauteur de 300 coudées, la
Montagne qui s'élevoit encore au deiïus,
donna lieu à un fécond Enclos quarré
comme le premier qu'on y ménagea
pour y bâtir le Temple.
On montoit dans cet Enclos intérieur
de trois côtés par un Efcalier de 14 de-
grés jufqu'à un terre- plain long de dix
coudées , au bout duquel on montoit en-
core 5 dégrés jufqu'à la porte de l'En-
clos. Ou côté de l'Orient le tertein é-
toit plus bas de ces 5 dégrés, qui ne s'y
trouvoient point. Le mur qui féparoit
le fécond Enclos du premier étoit haut
par dehors de 40 coudées, & de 25 par
dedans , parce que l'Efcalier étoit pris
dans l'épaiffeur de la muraille. Du côté
Dissertation XXIX. $£j
du Septentrion & du Midi on y entroic
par 8 portes _, 4 de chaque coté , hau-
tes de 30 coudées fur autant de largeur ,
entre lefquelles le long des murs , on
avoir pratiqué des Salles ou des Sacrifties,
où l'on mettoit diverfes chofes qui fer-
voient à Fufage du Temple. Mais du
côté de l'Orient il n'y avoit qu'une
porte plus ample Se plus ornée que les
autres j & c'eft celle par où entroienc
les femmes.
Cet Enclos dans fa capacité compre-
noit 4 Parvis, diftingués entr'eux par
des baluftrades allez balTesj deux pour
les hommes du coté du Septentrion &c
du Midi , longs & larges de 30 coudées ;
un troifieme pour les femmes du côté
de l'Orient, large de 40 coudées j &
au milieu des trois un quatrième réfervé
pour les Prêtres , qui fut 187 coudées
de long, en avoit 1 3 5 de large.
Au milieu de ce Parvis on trouvoit
d'abord l'Autel des Holocauftes , qui
avoit en quarré 50 coudées , & 1 5 de
hauteur. On y montoit du côté du Midi
par une rampe douce & aifée. L'Autel
étoit féparé du Temple par un efpace
qui conduifoit au Vefhbule , où l'on
montoit par un Efcalier de 1 1 dégrés :
l'entrée haute de 70 coudées, 6V large
de i 5 , n'avoit point de porte & demeu-
Qij
$4 Dissertation XXTX.
a i-.ui-ouvs ouverte Le Veitibule te-
noit toute la Lice du Temple p.tr 100
coudées de Lojag fur autant de hauteur,
de 40 de largeur»
De-! i on entroit duis le Bâtiment des
deux Sanctuaires, qui n'étoient iéparcs
entr'eux qule par un grand voile 3 qui fut
déchiré du haut en bas au moment de
la mort de Jefus-Chriit. Dans ce pre-
mier Sanctuaire. qu'on nommoit fîmple-
ment le Saint, ik qui étoit long de 40
coudées fur 20 de largeur j là, dis-je ,
étoient le Chandelier à iept branches ,
la Table des pains expofes , & l'Autel
des parfums , le tout d'or malïîf j &C
c'eft-là que le Prêtre qui écoit en femai-
ne entroit tous les jours pour y offrir
le Sacrifice du p.rfum.
Du premier Sanctuaire on entroit par
le voile dans le iecond, qu'on nommoit
le Saint des Saints , qui fur la même
hauteur de 60 coudées , c\: la même
largeur de 20, n'avoit que 20 coudée?
de long. Là autrefois étoit l'Arche à
l'ombre des ailes de deux grands Ché-
rubins. Ce faint lieu écoit inacceihbie à.
tout autre qu'au grand Prêtre , qui n'y
entroit qu'une fois l'année ,, le jour de-
l'Expiation folemnelle.
Enfin le long des deux Sanctuaires en
dehors regnoieiit plufieurs Chambres >
Dissertation XXIX. 3 £5
011 les Prêtres qui étoient en 1 emaine de-
meuroient pendant le tems de leur fonc-
tion.
Voilà en abrégé l'idée du Temple de
Jérufalem que Capelle a recueillie de
Jofeph , qui ayant vu leTerrple lur pié,
&c y ayant fervi en qualité de Prêtre , en
devoit bien (avoir les mefures. On doit
juger par -là quelle créance on doit aux
Rabbins , qui ont vécu plufieurs fiecles
après la dêftru&ion de Jérufalem , 6c
qui convenant en quelque chofe avec
Jofeph ,, nous en ont fait une peinture
toute différente , dans la îltuation gé-
nérale du Temple fur la-Montagne ,
dans le nombre j dans les mefures , &
en pluiieurs autres chofes qu'il feroit
trop long de rapporter ici : ce que nous
en avons dit ne devant fervir que de
préliminaire à la defcription magnifi-
que qu'ils nous ont faite à plai(ir de la
Pâque qu'ils n'ont jamais vue.
Le favant Rabbin que nous avons
déjà cite tan: de fois, enfeigne p. 154,
» que tous les agneaux s'immoloient
» dans le Temple. Que les Prêtres ,
j> qui iervoient tous dans cette grande
» K..mnité, fe rangeoient fur diflcren-
ij tes hits, ayant à la main des coupes
ïî pour recevoir le fang des victimes , &:
*y le porter de main en main jufqu'a
Qi>)
$66 Dissertation XXIX.
j> l'Autel , au pied duquel il étoit ré-
as pandu. Que les coupes d'une file é-
» toient d'or , & celles de l'autre d'ar-
v gent, p. 149. Que les Laïques qui of-
33 froient les agneaux fe partageoient en
» trois bandes 3 qui étoient tout - à. - la
» fois dans le Temple , mais chacun en
« dittérens quartiers. Que la première
» bande étant entrée dans l'Azaraou le
>j lieu de l'immolation , on en fermoit
» la porte jufqu'à ce qu'elle fut achevée,
>5 que chaque particulier immoloit fon
>» agneau au bout de chaque file \ ôc
» fans fortir de la place il en faifoit
« égouter tout le fang dans la coupe du
s? Prêtre qui étoit le plus proche , il
» ôtoit la peau & en féparoit la graifle.
33 Que le Prêtre donnoit cette coupe à
33 celui qui le précédoit vers l'Autel , où
35 en un inftant elle étoit portée de main
33 en main , p. 1 5 1 , & en revenoit par
33 une autre file. Un autre Rabbin néan-
33 moins a jugé qu'il feroit plus mer-
35 veilleux j que chacun reçût & donnât
33 en mème-tems d'une main une coupe
*3 pleine , & de l'autre une vuide 3 ôc
33 que cela fe fît avec tant d'adrelfe ,
33 & Ci promptement , que les coupes
33 femblaffent voler , allant comme des
33 traits , p. 152. Au moins il a(ïure que
»> les Prêtres fe préparoient à cet exer-
Dissertation XXIX. % Gj
» cice pendant 30 jours avant Pâque ,
» afin de ne pas faire de fautes , p. 153.
» Après que l'immolation de la pre-
» miere bande étoit achevée on lavoic
jî l'Azara \ 6c les deux autres qui y en-
» troientenfuitefaifoientiucceflivemeiK
>s la leur avec les mêmes cérémonies.
On immoloit ainfi , félon que Jofeph
le rapporte, 256500 victimes dans l'ef-
pace de deux heures, c'eft-à-dire , de-
puis trois heures après midi jufques
à cinq.
De cette fuppofition que l'Auteur de
l'Harmonie reçoit avec une entière dé-
férence , il conclut démonftrativement
que Jefus - Chrilr. n'a donc pas fait la
dernière Pâque , parce que tous les a-
gneaux n'ayant été immolés que le Ven-
dredi fuivant , celui qu'il auroit mangé
le Jeudi n'auroit pu être immolé dans
le Temple. Aufli ce n'elt point dans le
Temple que Jefus-Chrift envoya Pierre
& Jean faire la préparation de la Pâque;
mais dans la maifon d'un particulier , où,
l'Agneau Pafchal ne pouvoit être immo-
lé. On jugera de la valeur & du poids
de certe conféquence après que nous
aurons remarqué , je ne dis pas feule-
ment le grand &c le iublime de ce narré ,
dont j'ai omis exprès plufieurs circonf-
tances qui ne font rien pour notre fu-
Qiv
■3 6% Dissertation XXIX.
jet; mais le miraculeux & le furpre-
nant qui y éclate par tout.
: §. XVIII.
Miracles prodigieux de la Pâque des
Rabbins , à l'égard des lieux ;
& i. dans le Tabernacle.
Examinons les merveilles qui regar-
dent le lieu, ck commençons par l'an-
cien Tabernacle, qui étoit comme un
.Temple portatif 8c ambulatoire , où
pendant 480 ans on a offert tous les
Sacrifices , ôc par confcquent la Pâque ,
ainfi qu'on le prétend. Le parvis du
Tabernacle étoit un grand efpacequarré,
formé par des colonnes pofées d'efpace
en efpace , auxquelles étoient attachées
des tapiffenes, qui lui tendient lieu de
murs, & qui l'enfermoient de tous co-
tés. Il n'y a qu'à confidérer l'étendue
que l'Ecriture lui donne , pour juger fi
tout le peuple a pu immoler dans fon
.enceinte : Ce nejî pas ici , dit l'Auteur
p. i$6, le lieu d'examiner quelle pou-
voit être l'étendue du Tabernacle. Il a
raifon de fuir cet examen comme un
ccucil. 11 a bien vu que fi le lyfteme
de la Pâque Rabbi nique dépend des
inclûtes de ce lieu faint , il faut renon-
Dissertation XXIX. 369
cer au fyftême, & ne s'oppofer plus à
la dernière Paque de Jefus-Chrift. Nous
ne lailTerons donc pas à' examiner cette
étendue ; car enfin quand donc fera-ce
le lieu de mefurer le Tabernacle , fînon
dans une occadon comme celle-ci , d'où
dépend la vérité ou la faufleté de cette
Tradition des Rabbins , que les Juifs
immoloient la Pâque dans le Temple ;
parce qu'on n'a pu faire dans le Temple
depuis qu'il fut bâti , que ce qu'on avoic
fait autrefois dans le Tabernacle.
Selon l'Exode , c. 27 , v. 1 8 , le Parvis
du Tabernacle avoir 100 coudées de
long fur 50 de large, qui multipliées
les unes par les autres, font une furface
de 5000 coudées en quarré. Au mi-
lieu de cet efpace étoit le Tabernacle
long de 50 coudées & large de 10, qui
font 300 coudées en quarré. Devant
le Tabernacle étoit l'Autel des Holo-
cauftes long de 5 coudées , &c large
d'autant j qui font en quarré 1 5 cou-
dées. Comme on n immoloit pas les vic-
times Pafchales , ni fur l'Autel , ni dans
le Tabernacle , il faut retrancher du
Parvis les fur faces de l'un de de l'autre.
Si donc on déduit 325 coudées de 5 000
il en reftera 467^ pour le lieu de l'im-
molation de la Paque. Voilà le terrein
que nous avons en notre difpofitioiu
Qv
370 Dissertation XXIX.
Voici le monde qu'il y faut placer.
Il fortit de l'Egypte , félon le Livre
des Nombres , c. i . 603 5 5 o hommes ca-
pables de porter les armes , fans comp-
ter les femmes , les vieillards , les enfans,
les jeunes -gens au-deflous de 20 ans,
ôc un nombre innombrable d'Egyptiens
de tout fexe & de tout âge, la plupart
Profélytes , & qui par cette raifon s'é-
toient donnes à eux. Si je fais monter
tout ce monde à trois millions de per-
fonnes , je ne crois pas qu'on m'en dédi-
fe, mais je prévois qu'on ne leur per-
mettra pas d'allifter tous dans le Parvis
du Tabernacle à l'immolation de la Pâ-
que. On fait fagement de s'accommo-
der aux Loix de la Nature , au hazard
de violenter un peu la lettre du Texte.,
qui attribue l'immolation généralement
à tout le peuple : Immolabitquc eum
unïverfa multitude*.
Distribuons donc ces trois millions
en petites familles ou fociétés, chacune
de 1 5 perfonnes , nombre moyen entre
10 & 10 dont elles pouvoient être
compofées , pour manger la Pâque : ce
feront deux cens mille familles, dont
nous enverrons les Chefs chargés d'au-
tant d'agneaux dnns le Parvis du Taber-
nacle pour les immoler. Il s'agit de
trouver où les placer fur un terrein de
Dissertation XXIX. 371
4675 coudées en quatre. Eu vériré
i'entrepnfe n'eft pas fans difficulté , 8c
on fuccomberoit fous une bien moin-
dre. // ne faut pas néanmoins que cela
nous effraye ; la difficulté nefi pas in-
furmontable _, p. 146. Il effc des efprits
à qui tout elt facile, 8c qui ne s'embar-
ralfent de rien. Ils placeront tous ces
offrans à leur aife , 8c ils auront encore
du terrein de refte pour les Prêtres 8c
pour les Lévites , qui fe trouveront alors
au nombre de 8580.
Comme il faut par nécedité réduire
les coudées en pouces j 8c les pouces en
lignes pour ne faire point de jalouile $
4675 coudées nous donneront 130900
pouces _, ou 1570800 lignes, qui étant
partagées entre 100000 hommes ne
donneront à chacun que 7 lignes fort
juftesj 8c le furplus fera partagé entre
les Mimltres. On ne peut pas mieux
ménager un terrein li précieux. 11 faut
avouer que rien n'eu: împolîible à la
toute-puilïance des Rabbins.
Audi ce nen eft là qu'un coup d'ef-
fai alfez léger. Car (1 la Pâque qui fe fit
auprès du Mont Smai un an après la
forrie de l'Egypte fut (1 miracnleufe ,
que fera-ce de toutes celles qui fe firent
pendant plus de 440 ans dans la Pa-
lestine , lorfquc les Tribus d'Ifracl fe
37* Dissertation XXIX.
furent multipliées à l'infini j & félon
l'expreifion de l'Ecriture, étoient deve-
nues aulli innombrables que le fable de
la mer , comme nous le voyons fous le
règne de David dans ceconfeilqueChu-
fai donna à Abfalom : Commande-^ que
depuis Dan jufquà Berfabée on levé &
qu'on ajjemble auprès de vous tout le
peuple d'Ijra'èl dans une armée innom-
brable comme le fable de la mer, Con-
gregetur ad te univerfus Ifra'el à Dan
ufque Berfabœe quafi arena maris innu-
/nerabilis, i Rois , c. 17, y. 1 1 j comme
il paroît encore fous le règne de Salo-
lîion avant la conftrudfcion du Temple :
Juda & Ifra'èl innumerabiles fcut arena
maris in multitudine. Que fera- ce, dis—
- je , de toutes ces Pâques qui fe firent
dans le Tabernacle auprès de Jéricho ,
dans Galgala , dans Silo, dans Nobé ,
dans Gabaon ? A-t on jamais vu un
fpe£tacle plus prodigieux & plus incon-
cevable? Il faifoit beau voir tant de
milliers d'hommes dans un efpace fi
étroit , & dont chacun ne tenoit pas
tant de place qu'un épi de blé.
La conclufion que j'en tire eft, qu'on
n'a pu rien faire dans le Temple tou-
chant les iacrifices _, que ce qu'on avoit
fait autrefois dans le Tabernacle , qui
croit un Temple mobile & portatif, de
/
Dl SSER T ATION XXIX. $7$
où toutes les coutumes qui regardoient
les facrifices ont été obfervées 480 ans
avant la conftruclion du Temple. Or
nous ne liions point dans i'Ectiture que
les Ifraclites ayent jamais fait la Pâque
dans le Tabernacle ni dans l'enceinte
de fon Parvis : Et félon les mefures
qu'elle en a faites j il étoit abfolument
impoflible qu'elle y fût célébrée , tant
par la petiteife de l'efpace , que par les
ruirTeaux de fang qui l'auroient inondé.
On n'a donc point fait la Pâque dans le
Temple de Jérufalem qui a fuccédé au
Tabernacle , parce que Dieu n'a fait
depuis l'Egypte aucune nouvelle difpo-
fmon pour l'immolation de la Pâque ;
ôc qu'un ufage qui a duré près de V.
fiecles ne peut pas être changé par le
changement du lieu de facrifice.
Mais il fiut juftiher cette conclufîon
plus particulièrement par les mefures
mêmes du Temple ; & il paroîtra que
Ç\ on ne devoit pas immoler la Pâque
dans le Temple ^ parce qu'elle ne l'a-
voir jamais été dans le Tabernacle j on
ne le pouvoit pas aulîi , parce que la pe-
titeife du terrein ne le permettoit pas.
374 Dissertation XXIX,
§. XIX.
Continuation des miracles de la Pâque
Rabbinique , qui regardent le lieu
dans le Temple de Jérufalem.
Il e(t inconcevable que le Temple de
Jérufalem pût naturellement contenir
dans Ton enceinte autant de perfonnes
que la coutume avoir réglé qu'il y en
devoit avoir _, pour manger un fi prodi-
gieux nombre d'agneaux. Jofeph té-
moigne que pour chacun il y avoit au
moins dix perfonnes, & que ce nombre
pouvoit même aller jufqu'à 10. Prenons
donc encore un nombre moyen , c'eil-
à-dire 15 perfonnes pour chaque victi-
me, 8c nous trouverons 3847500 per-
fonnes pour 256500 agneaux. A ce
nombre il faut ajouter encore celui des
Prêtres , dont les 24 familles fervoient
toutes dans les trois grandes fêtes de
l'année , & encore plus dans celle de
Pâque. Jofeph écrivant contre Appion ,
compte en chacune ,de ces 24 ClafTes
plus de 5000 Prêtres , qui font le
nombre de 120000. Il en falloit , dit
l'Auteur de l'Harmonie, un grand nom-
bre pour l'immolation de tant d'a-
gneaux , p. 1 54. Si on ajoute le nombre
Dissertation XXX. 3 75
des Prêtres à celui des Laïques qui or-
froieuc les agneaux , on trouvera que la
fomme totale montoit à trois millions
neuf cens foixante fept mille cinq cens
perfonnes qui étoient enfemble dans
l'enceinte du Temple. Enfin à ce nom-
bre prodigieux il faut encore ajouter les
Lévites, furcroîr très-confidérable. Ils
dévoient tous aififter à la cérémonie de
la Pâque en qualité de Miniftres , in-
férieurs ou fubalrernes.
La Tribu de Lévi fe divifoit en trois
branches , qui font celles de Gerfon, de
Caath & de Merari.
Pour fupputer leur nombre , il faut
confidérer qu'au fortir de l'Egypte tous
les Lévites depuis 30 ans jufqu'a 50 qui
e(t le tems de leur miniftere, montoienr,
comme j'ai dit , au nombre de 8580,
celui des 4 enfans de Caath étoit de
2750. J'en prends la quatrième partie
pour Amram fon aine, père d'Aarori
& de Moi'fe, & cette divifion lui don-
nera 687 petits fils qu'il faut partager
entre Moïfe & Aaron- Ce feront 545.
enfans pour chacun, tous Prêtres , qui
étant déduits du nombre total des 8 580
Lévites , il reliera 8237 fimples Lévi-
tes. Sur cela je dis, fi 343 Prècres à là
fortie de l'Egypte fe font multipliés ,
félon Jofeph ,, jufqu'à être au tems de
37^ Dissertation XXIX.
Jefus-Chnft plus de 120000 hommes,
quel fera le nombre que 8237 Lévites
auront produits dans le même tems ; fi
on compte bien , on trouvera, iauf er-
reur de calcul,, près de trois millions
de Lévites , c'eft-à-dire , 280000 qui
étant joints au nombre des Prêtres &
des Laïques _, feront fix millions huit
cens quarante-fept mille cinq cens per-
fonnes.
>j Car tous les Juifs, dit l'Auteur, p.
« 141 , y dévoient are préfensj Dieu
» Tavoit ainfi ordonné dès la première
j) inftitution de la Pâque. Toute la mul-
33 tïtude des enfans d'JJraèl l'immolera
s> au foir. Exod. c. 1 2 , v. 6. Dans le
a? Latin il y a : Immolabitque eum uni-
55 yerfa multitudo filiorum lfraël ad vef-
53 peram ^ p. 142. Ce mot Latin multi-
5> tudo , a trompé plusieurs perfonnes
s? qui fe font imaginées que la Loi vou-
« ioit feulement que tous les Juifs fans
»? exception immolaient la Pâque, mais
>3 fans obligation de le faire autrement
33 qu'en particulier. Ce n'elt pas là le
33 fens. Dans l'Hébreu il y a Cahal _,
33 qui (îgnifie affemblée , & répond à ces
33 mots Grecs, crvvetycoy^ , c,KKh y\(jI cl
53 commeon le voit dans les Septantes 3c
n dans Philon. On en trouvera une
35 foule de preuves dans le Tréfor de
Dissertation XXIX. 377
Pagnin & dans les Concordances Hé-
braïques. Les Septantes traduifene
ainfi le pa(Tage dont il eft queftion :
Toute la multitude de V Affemblée ou
Synagogue. L'original dit encore da-
vantage \ car il y a deux difrérens
mots cjui fignihent Ajjemblee , Cho-
Cehal ada _, c'eft-à-dire en Latin , To-
tus cœtus congrégation! s : Toute Vaf-
femblée de tous les Ifraè'lites. La Para-
phrafe Chaldaïque a exprimé l'Hé-
breu , Toute ï Eglijè des Enfans d'If-
rael affemblés ; c elt comme il y a
dans l'original de cette Paraphrafe ; car
dans l'interprète Latin on trouve feu-
lement , omnis Ecclefia. Il devoit a-
jouter pour exprimer l'original, con-
gregata. Ce feroit-là un étrange lan-
gage fi cela vouloit dire que chaque
lfraclite tueroit l'Agneau Pafchal fé-
parément. Tous les Juifs fe dévoient
donc trouver dans le Temple à l'heure
que l'on immoloit la Paque. Aufîî
une des raifons d'Ezéchias pour diffé-
rer la Paque , fut que les Ifraè'lites n'a-
voient pas pu encore venir à Jéru-
falem : Populus nondum congre gatus
fuerat in Jerufalem. 1. Parai, c. 30, y.
3. Je lai(Te toutes les autres preuves
que l'Auteur,/?. 143 , tire en grand nom-
bre de Jofeph & de Philon , pour crier ,
378 Dissertation XXIX.
miracle ! Quoi , près de fept millions
de perfonnes, fans compter plus de deux
cens cinquante fix mille agneaux tous
compris dans le quarté intérieur du Tem-
ple de Jétufalem ! Car les Talmudiftes
» racontent comme un miracle que tant
j) de monde fe pût trouver à la fois fans
>3 s'incommoder , p. 1 48. Les Ijraelites ,
33 dit un Rabbin _, étoient extrêmement
55 PreJfes dans le Temple , & la Glofe
33 ajoute, de forte qu'à peine touchoient-
33 ils la terre du bout des pieds , & ce-
y> pendant dans le tems de l'adoration ils
>#■ avoient ajfe% d'efpace. Cette Glofe
n'en dit pas alfez. Il falloir que ces If-
raëlites eufTent le privilège des corps
glorieux , qui n'occupent que la place
qu'ils veulent, ou qui pénètrent les di-
menfîons des autres corps j car dans le
tems de l'adoration , c'eft à-dire , du
facrifice , on ne pouvoir éviter qu'on ne
fît plufîeurs mouvemens qui euflfent été
impolîibles , fi tout étant plein , les
corps n'euflfent pa(Té au travers les uns
des autres. On ne peut s'empêcher, à la
▼ue d'une chofe fi prodigieuie, de criée
encore , miracle !
Dissertation XXIX. 379
§. XX.
Nullité des moyens d' accommodement »
qui conjiflent dans la réduction du
nombre des personnes , & dans la mul-
tiplie atiou du terre in,
L'Auteur de l'Harmonie néanmoins
veut foulager la peine qu'il y a à s'ima-
giner un prodige (î incompréhenfible \
8c il s'y prend en deux manières. La î.
en diminuant le nombre de ceux qui af-
fîftoient dans le Temple à l'immolation
de la Pâque. La 1. en augmentant le
terrein , 8c en allongeant les mefures du
Temple.
>5 1. 11 nous dit, p. 146, qu'il n'étoit
>3 pas néceflaire que tous ceux qui fai-
>j foient la Pâque fe trouvaient dans le
« Temple dans le tems de l'immolation
des agneaux ; il fuffifoit qu'un feul of-
frit l'Agneau Pafchal pour la compagnie
dont il étoit , pour le manger. Mai-
monide le dit en termes formels : Vingt
perfonnes , dit- il , pouvoient s' affembler
pour manger un agneau. On en députoit
un pour l'offrir & l'immoler dans le
Temple au nom de tous.
Mais ce moyen d'accommodement
n'eft point receyable > parce qu'Une peiK
3S0 Dissertation XXIX,
s'allier avec ce qu'on a reconnu plus
haut touchant l'afliitance générale de
tout le peuple à l'immolation de la Pâ-
que. Tous les Juifs , dit-on , fe dévoient
trouver dans le Temple à l heure qu'on
immoloit la Pâque , p. 142. Comment
ne voit-on pas qu'on renonce par cette
réduction à l'avantage qu'on tiroit du
paffage de l'Exode : Immolabitque eum
univerfa multitudo filiorum Ifraél. Tout
compté , tout rabbatu , il fe trouve que
toute cette multitude n'eft que la vingtiè-
me partie du peuple ^ & encore moins ,
puifque félon le Talmud , ce nombre alloit
encore plus loin dans chaque fociétéqui
fe formoit pour manger l'Agneau Paf-
chal j p. 146. Et que deviennent donc
toutes ces autorités tirées de l'Hébreu ,,
• des Septantes , de la Paraphrafe Chaldaï-
que , du Tréfor de Pagnin , des Con-
cordances Hébraïques , de Philon , Se
de Jofeph, pour prouver que Dieu avoit
ordonné des la première injlitution de la
Pâque y que tous les Juifs y fuffent pré-
fens ? p. 141. Il v a la même proportion
de 1 à 20, que de 5 à 100. Le Roi com-
mande à une Compagnie de cent Offi-
ciers d'affilier tous aune cérémonie. Au
lieu de s'y rendre , ils y en députent cinq
de leur Corps. Peut-on dire de bonne
foi que toute la Compagnie y a aflifté :
Dissertation XXIX. 3 Si
Vniverja multitudo f Ce ferolt - la un
étrange langage , fi cela vouloit dire que
cent Officiers le font rendus à la céré-
monie, h on ne l'entend par Procu-
reur.
Après avoir réduit le nombre des af-
fîftans a 300000 perfonnes , lAtueur
étend l'enceinte du Temple pour foula-
ger notre imagination, qui auroit peine
» à les y placer j de il trouve qu'en
s> donnant 500 coudées , ou dix mille.
» pouces à chaque côté de la grande en-
» ceinte du Temple j la furface de touc
s? le grand Quarré fera de cent millions
55 de pouces , qui partagés entre trois
55 cens mille perfonnes , à quoi l'Au-
55 teur réduit tous les aQiltans, donne-»
55 ront à chacun 333 pouces ; ce qui fait
35 un peu plus qu'un pied & demi en
35 quarré , efpace plus que fuffifant pour
35 des gens qui fe tiennent debout ik qui
35 fe preilent : de pour nous faire valoir
la grâce qu'il nous fait, il nous dé-
clare qu'il ne fait ici la coudée que de
20 pouces , au lieu que Villalpand fait
l'aire du Temple pour le moins fix fois
plus grande qu'on ne la fait ici. Ou
entre dans ce menu détail pour nous
difpenfer de faire fur l'autorité des Rab-
bins un acte de foi auiîï difficile que
nous l'avons vu dans le §. précédent, ÔC
382 Dissertation XXIX.
j'ai beaucoup de reconnoiffance pour
celui qui nous donne cette exemption.
Mais dans le fonds la difpenfe eft nulle,
& après toutes les déductions qu'il faut
faire, je ne me fens nullement déchar-
gé-
I. Viilalpand ne doit point are allé-
gué en cette occafion. Le Temple d'E-
zéchiel, dont il a fupputé les mefures,
n'eft ni le Temple de Salomon ni le
'Temple rebâti par Hérode. C'eft l'idée
ou le defïein d'un Temple qui n'a point
encore été exécuté , ôc qui a tout l'air
d'être une Parabole j ou une allégorie
qui repréfente l'Eglife. C'eft la même
chofe que fi on vouloit prendre les di-
mensions de l'ancienne ville de Jérufa-
lem fur les mefures de la nouvelle Jéru-
falem _, qu'un Ange prend dans l'Apo-
calvpfe.
D'ailleurs , pour nous mettre au large
l'Auteur nous préfente la mefure de
l'aire du grand Quarré du Temple. Mais
c'eft encore nous donner le change. Il
jie s'agit pas ici de la grande enceinte du
Temple, où tout le monde pouvoit en-
trer, Juifs de Gentils, purs & immon-
des. On y pouvoir prier j mais comme
il n'y avoit point d'Autel, on n'y a ja-
mais fait de facrifice1. 11 n'eft ici quef-
tion, félon Iqs Rabbins même, que
Dissertation XXIX. 383
du Quarré ou de l'Enclos intérieur où
l'on Douvoic facnlier. Car ils nous con-
tent que coûte l'aflemblée Paichale fe di-
vifoit en trois bandes } que lorfque la
première étoit entrée dans PAzara, on
en fermoit les portes , & que les deux
autres étant dehors , attendoient pour
entrer que ia cérémonie rut finie. Quel-
les étoient ces portes fermées , linon
celles du Quarré intérieur ? Et quel
étoit le lieu où les autres bandes arten-
doient , finon le grand Quarré de de-
hors ? Car hors de ce Quarré il n'y a-
voit que des Efcaliers longs à perte de
vue , qui n'étoient pas des places com-
modes pour loger deux cens mille per-
sonnes avec autant d'agneaux.
Encore ce Quarré intérieur ne peut-il
pas iervir ici tout entier, & il faut por-
ter encore le retranchement plus loin.
Selon lesTalmudiftes mêmes, auxquels
on donne ici une autorité fouveraine ,
toute la lon^eur du terrein de l'Orient
en Occident , fans y comprendre les
portes & les Sacrifties attachées au mur,
étoit de 187 coudées, & la largeur du
Midi au Septentrion, de 1 3 5 coudées,
qui font 152.45 coudées en quarré. De
tout ce terrein les Talmudiftes n'ont
pris pour le lieu des facrifices qu'un es-
pace long de 76 coudées , & large de
584 Dissertation XXIX.
60 qui font en quarré 4560 coudées
qu'il faudroit partager fans jaloufîe en-
tre les Prêtres , les Lévites , les oftrans
& les viétimes j & fans calculer on voie
tout d'un coup que chaque corps n'au-
roit pas un demi pouce pour fe placer;
ce qui feroit un miracle un peu vio-
lent.
Pour le réduire donc un peu plus
dans la portée de l'efprit , 1. l'Auteur
retranche les agneaux, dont il trouve à
propos que chacun porte le (ien , non
dans fes mains, mais fur fa tête,/?. 149,
afin qu'il foit compris dans la même
colonne de l'efpace qu'occupe celui qui
le porte. Quoique cette figure de Juifs
cocrTés chacun de leur agneau , foit un
peu bizarre, je ne m'y oppofe point. 2.
11 réduit le nombre de tous les Minif-
tres, tant Prêtres que Lévites, & des
ofTrans, a tioiscens mille hommes.
3.II voudra peut-être prendre tout le
terrein de l'Enclos , qui monte en quarré
à 2.52.45 coudées. J'y confens néan-
moins encore, pourvu qu'il en retran-
che les efpaces du Veftibule , des Sanc-
tuaires , de l'Autel , & de la rampe
par où on montoit fur l'Autel , qui
constamment ne font point des lieux
d'immolation. Le Temple qui compre-
noit le Veftibule & le Sanctuaire étoit
long
Dissertation XXÎX. 3S5
long de 1 00 coudées j & large d'autant,
Se il occupoit ainfî 10000 coudées en
quarré. L'Autel , félon Jofeph témoin
oculaire , avoit en longueur & en lar-
geer 50 coudées } ce feroient 1500
coudées en quarré. Mais je mécontente
desdimenfions plus petites que les Tal-
mudiftes lui donnent, qui font de 32
coudées en longueur fur autant de large,
ôc qui font 1014 coudées quarrées. La
rampe avoit la même largeur que l'Au-
tel de 31 coudées, ôc la pente s'éten-
doit à 30 coudées en long qui font en
quarré 960 coudées. Ces trois efpaces
joints enfemble font 11 984 coudées
qu'il faut retrancher des 2.5145 de tout
i'Enclos j & il réitéra 1 3 16 1 coudées de
terrain à partager entre 100000 hom-
mes, le tiers des offrans ; entre 120000
Prêtres , de 2880000 Lévites , qui font
en tout trois millions cent mille per-
sonnes. Comme chacun n'aura pas fa
coudée , ni même fon pied , il les faut
réduire en 371308 pouces , & les pou-
ces en 44 5 5 606 lignes } tk alors chacun
trouvera pour fe placer commodément
tm peu moins de deux lignes : a mtoins
de pouvoir être de purs efprits ils ne pou-
voient pas occuper moins de place.
Que feroit-ce donc Ci je n'avois don-
ne avec le Talmud à l'Azara , c eft-à-
Tom. U\ R
x%6 Dissertation XXIX.
dire au lieu où fefaifoit l'immolation
de la Pâque , que 1 1. coudées fur 135.
de longueur , qui font 1485. coudées en
quarré, ou 41580. pouces, 8c qui don-
neroient à chacun des trois cens mille
une ligne & environ 8. points. L'Au-
teur doute fur cela , p. 1 5 5.7? les Tal-
mudifles doivent avoir autant d'autorité
dans ce qui regarde les me fur es du Tem-
ple , que dans ce qu'ils rapportent des
Coutumes des Juifs ; Se pour faire pan-
cher la balance du côté de la négative ,
il allègue que ces coutumes fe prati-
quoient encore de leur tems , au lieu que
le Temple ne fubfifloit plus. Mais il n'y
penfepas.
Sur quoi peut- il former un doute fi
déraifonnable ? Je l'ai dit plus haut, Se
il eftbon de le répéter ici. 11 s'agit ici
de Coutume , qui , comme il le prétend,
11e fe pouvoit pratiquer que dans le
Temple } je dis de l'immolation de la
Pâque , Se des cérémonies qu'on y ob-
fervoit. 11 reconnoit que du tems des
Rabbins , dont il nous refte des écrits ,
le Temple ne fubfifloit plus \ Se il nous
vient de dire que les Coutumes fe prati-
quoient encore de leur tems. Eit-ce qu'on
pouvoit pratiquer des Coutumes dans un
Temple qui ne fubfifloit plus ? ou, il
après la ruine du Temple , les Juifs ne
Dissertation XXIX. 387
laifîoient pas d'immoler ailleurs la Pâ-
que qui ne pouvoir l'être que dans le
Temple ?
Pour moi je crois que lesTalmudiftes
ont autanr d'aurorité dans les mefures
du Temple que dans les Coutumes 9
c'eft-à-dire , qu'ils n'en ont point du
tout ; car n'ayant pu vok ni les unes ni
les autres , ils n'en pouvoient parler
qu'au hazard , & fur le rapport d'au-
trui. Or l'Auteur avoue qu'ils fe font
terriblement éblouis dans les mefures.
Celles de Jofeph témoin oculaire ne s'ac-
cordent nullement avec celles des Rab-
bins , comme on le peut juftifier par le
Traité de Louis Capelle , qui eil au-
devant de la Polyglotte. Comment donc
mériteroient-ils d'être écoutés fur les
Coutumes &: fur les cérémonies qu'ils
n'ont jamais vues , non plus que les me-
fures ? Des gens convaincus d'erreur
dans un point inféparablement lié avec
un autre, peuvent-ils conferver pour le
fécond cette autorité qu'ils ont perdue à
i'égard du premier ? 11 faut néanmoins
nous contenter de ce qu'on nous donne.
Il n'en fera pas moins vrai , quoi qu'on
en dife , que par un miracle épouvan-
table , il failoit que tous ces corps-là ,
en y comprenant les Lévites , euifent le
privilège des efprics , qui n'occupenc
Rij
388 Dissertation XXIX.
qu'un point imperceptible.
§. XXI.
Prodiges Rabbiniques touchant le mou-
yement & la pénétration des corps
dans l'immolation delà Pâque,
Les miracles qui regardent le mouve-
ment , ne le cèdent point à ceux qui
concernent le lieu : car fi ceux-ci con-
fîftoient dans la pénétration des dimen-
lîons j de dans la fituation de plufieurs
corps en une même place; ceux-là ne fe
peuvent comprendre qu'en attribuant à
ces corps une fubtilité qui les fit pafler
fans obftacle au travers les uns des au-
tres , Se une agilité qui les tranfportâc
d'un terme à l'autre fans paffer par le
milieu. On ne pouvoir éviter de faire
divers mouvemens dans le Teanple , de
dans le Tabernacle au tems de l'immo-
lation. On me dira que les files des
Prêtres, qui faifoient porter de main
en main le fang des victimes jufqu'à
l'Autel les difpenfoient de fe remuer
pour cela. Mais les Laïques quiimmo-
loient , dévoient fans doute fe mouvoir
pour fe fuccéder les uns aux autres dans
le même lieu. Or comment fe remuer
où tout ett plein f On fçait que le mou-
Disse ht a tion XXIX. $S$
vement ne fe fait que parce que les corps
voiiîns cèdent à celui qui fe remue , 6c
lui donnent palTage : que s'ils ne cèdent
pas, il n'y a point de mouvement , &c
chaque corps demeure en fa place. Ainil
aucun ne fe pouvoit remuer quefes voi-
fins ne lui cédaflent leur place dans la
ligne de fon mouvement. Mais où pou-
voient-ils fe retirer , puifque tout étoic
plein j & qu'il n'y avoit point de vuide
à remplir ? 11 falloit nécefTairementque
par une grande incommodité à chaque
mouvement toute l'alTemblée fe remuât,
8c que chacun changeât de place , ou ,
ce qui ne fe pouvoit faire fans miracle»
que ceux qui le remuoient ne trouvaient
point dans les autres d'obftacles à leur
mouvement, & qu'ils pafTafTent tous aa
travers les uns des autres. Je donne le
choix de ces deux moyens.
D'ailleurs , comme il y avoit des
corps immobiles & incapables de céder
au mouvement des autres , on ne peut
s'empêcher d'avoir recours au miracle ,
fi l'on ne veut rendre impolTible les mou-
vemens de plufieurs corps. Je m'expli-
ue : fi nous recevons pour un tems la
aulfe fuppofition que tout le grand
Quarré fervoit à l'immolation de la
Pâque , on efl: obligé déranger les Prê-
tres en diverfes files ? qui de l'Autel,
R iij
?
390 Dissertation XXIX.
comme de leur centre , s'étendoient juf-
qu'aux extrémités j c'eft- à-dire , juf-
qu'aux galeries qui bornoientce Quarré
extérieur. En effet , fans cette longue
étendue de files , à peine pourroit-on
employer ces 120000 Prêtres, qui néan-
moins dévoient tous fervir à la fête de
Pâques. Rangeons-les donc en fix-vingts
files y compofées chacune de 1000 Prê-
tres. Je fuis feulement en peine par où
nous les ferons fortir du Quarré inté-
rieur , qui étoit environné d'une mu-
raille haute par dehors de 40. coudées,
6c par dedans de 25.
11 n'y avoir que fept portes, félon les
Talmudiftes , p. 1 56. or il eft impoiîî-
ble que toutes ces files ayent pu paiTer
par ces fept portes. Mais il y a une ref-
fource forr aifée dans le monde du Tal-
mud , c'eft: que les murailles du Quarré
intérieur j & les Sales ou Sacrifties qui
y étoient attachées par dedans , quoique
naturellement immobiles , devenoient
fluides pour fe laifTer pénétrer par les
files des Prêtres.
Il y auroit de l'ennui à développer
toutes les fuites prodigieufes qui font
enfermées dans ces commencemens.
L'Auteur les pénètre tout d'un coup.
Mais comme on eft porté A fe dillimuler
à foi- même les impollibilités du parti
Dissertation XXIX. 391
où l'on s'eft engagé , j'ai été bien-aife,
par ce peu que je lui en ai remis devant
les yeux , de lui donner lieu d'apperce-
voir même ce que je n'en ai pas dit _, &c
d'examiner s'il peut dévorer toutes ces
difficultés , femblable à celui dont il
eft parlé dans le Livre de Job , c. 40. v.
28. Ecce abforbebit fluvium _, & non mi~
rabitur _, & habet fiduciam quoi influât
Jordanis in os ejus* Je n'ai rien outré ni
falfifié, au moins volontairement j Se
qui foit de ma connoiffance. S'il s'eft
gliifé par mégarde & malgré moi , quel-
que erreur dans le calcul , il me la doit
pardonner , elle ne va pas à une grande
conféquence.
§.XXÏI.
Miracle* dans le tems ou dans la durée
de toute la cérémonie Pafchale _, dijïri-
buée entre les facrifiecs particuliers*
Il ne me refte plus à repréfenter que
les miracles qui regardent le tems. Les
Rabbins y ont foute nu jufqu'au bout
leur caractère de Taumaturgues. Ils ont
tellement enchéri fur Moïfe^ qu'il fem-
ble que ce Prophète au prix d'eux n'é-
toit qu'un apprentif en fait de prodi-
ges.
Riv
55)1 Dl S S ERTATION XXIX.
Le tems que la Loi détermine pour
l'immolation de la Pâque eft celui qui
fe paffe entre le Soleil couchant & le
Soleil couché , félon la lettre , inter duas
vefperas\ ce qui, à la rigueur , ne com-
prendroit qu'une heure , depuis 5 juf-
qu'à 6 pendant l'Equinoxe. Mais parce
que la préparation entière demandoit
plus de tems , on a étendu le couchant
jufqu'à l'efpace de trois heures , dont la
dernière depuis 5 jufqu'à 6 étoit em-
ployée à rôtir l'Agneau Pafchal , & les
deux précédentes étoient confacrées à
l'immolation. C'eft ce que nous appre-
nons de Jofeph , qui étant Sacrificateur,
devoit bien favoir le tems où corn-
mençoit ., & où finifïbit une cérémonie
où il avoit alîifté plusieurs fois. A la
fête de Pâque _, dit- il, on facrifïe les
Agneaux depuis la neuvième heure du
jour jufquà l'onzième _, 1. 7. de la Guer-
re j c'eft-à-dire , depuis trois heures
après midi jufqu'à cinq , vers le tems de
LEquinoxe. 11 laiffe entendre que la i 1
heure , qui eft la dernière du jour , étoic
deftinée à la cuifine.
Les Rabbins n'ont rien changé dans
ce Règlement, finon qu'ils ont avancé
environ d'une heure le tems de l'immo-
lation. Maimonide cité par l'Auteur, p.
« 145 , dit que l'obligation d'immoler
Dissertation XXIX. % 9 j
*> la Pâque le foir du 1 4 écoit fi grande ,
>5 que fi on l'avoir fait une heure plu-
» tôt , ç'auroitété un facrifice propha-
« ne. Les Juifs dans laMifna établiiîent
» cecte maxime fur la foumilîion exacte
»? qu'on doit à la Loi j qui déterminant
» un certain tems,marquoit clairement
» qu'on ne le pouvoit pas faire dans
3) un autre. Or elle détermine le tems
» dans ces paroles : lmmolabifquc
Phafe vefperc ad Jolis occafum j quando
egrejfus es de ^Egypto : Vous immo-
lerez la Pâque vers le foir , qui ejl le tems
où vous êtes forti de l'Egypte. Deut. c.
16. 6.
Il efl: maintenant fort aifc de régler
le tems que duroit , félon les Rabbins,
l'immolation de chaque agneau. On les
égorgeoit au bout des files , afin que
leur fang put être porté de main en
main jufqu'à l'Autel. Suppofonsqueles
Prêtres fe diftribuafTent en 120 files;
comme en effet , c'e^t plus qu'il ne s'en
pouvoit ranger dans cj petit nombre de
portes par où elles devoienr s'étendre du
petit Quarré dans le grand. Ainfi on ne
pouvoir immoler à la fois que 120
agneaux. Il y en avoit quelquefois, félon
Jofeph , 25 5600 deftinés au facrifice ,
qui étant divifés par 120 files , don-
naient à chacune 2130 agneaux à immo-
Rv
394 Dissertation XXIX.
1er dans l'efpace de deux heures. Er
comme deux heures comprennent 120
minutes , fi on les partage entre les
2130 agneaux , on trouvera que dans
l'efpace d'une minute on devoit immo-
ler 17 agneaux , ce qui n'iroit encore
qu'à 2040 agneaux immolés. 11 en ré-
itéra 90 dont il faudra rejetter par
furcroit l'immolation fur 90 minutes ,
à chacune le fien. Et pour terminer
clairement ce compte de 120 minutes ,
il y en avoit 90 dans chacune defquel-
les on facrifioit 18 agneaux , & 30 où
dans chacune on en facrifioit 17. Et en
quoi confiftoit ce facrifice ? 1. A égor-
ger l'agneau. 2. A biffer égouter tout
fon fang dans une coupe qui alloit de
main en main jufqu'à l'Autel le long
d'une file de mille Prêtres. 3. A lui
pafTer un bâton entre les jambes liées.
4. A le fufpendre a un crochet , où au
moins fur l'épaule de fon compagnon
& fur la fienne. 5. A lui ouvrir le ven-
dre. 6. A en fcparer la graiffe. 7. A
la mettre en réferve dans un plat pour
être brûlée fur l'Autel. 8. A dépouiller
l'agneau. Et tout cela dans la 1 8 ou la
17 partie d'une minute. On ne peut
pas mieux ménager un tems fi court ôc
fi précieux. On nous dit que les coupes
fembloient voler jufquà l'Autel , tant
Dissertation XXIX. 3 9 5
elles alloient vite. C'en eft trop peu dire
pour une fi grande diligence ; il falloir,
qu'elles enflent la vîtelfe de l'éclair, qui
patte dans un clin d'œil de l'Orient à.
l'Occident. Et ce qui eft inconcevable >
chaque Prêtre devoit avoir le loifir de
donner une coupe pleine de fang à un de
fes voitins , qui en même-tems lui en
donnoit une vuide , & tout de fuite de
donner à l'autre cette coupe vuide à un
autre qui lui en donnoit une pleine.
Je dis cela dans la fuppofition que le
flux & le reflux des coupes fe fit par la
mcme file. Car je fçai qu'ailleurs on
fuppofe , ce qui feroit un peu plus em-
barrallant } qu'une file de Prêtres rece~
volt les coupes pleines de fang _, & qu'une
autre file Us rapportoit vuides. Let.p. 515
parce qu'alors chaque agneau Pafchal oc-
cupant deux files , il raudroit les dou-
bler , Se de 120 en faire 240 qui cau-
feroient un peu d'embarras dans les fept
portes où elles dévoient palfer.
Qu'y a-t-il de plus miraculeux que
toute cette cérémonie f On veut dimi-
nuer notre étonnement par l'exemple du
grand nombre de victimes que Salomon
fit immoler le jour de la Dédicace du
Temple jufqu'au nombre de 210000
brebis. Mais en cela il n'y avoit rien
d'extraordinaire, ni pour le tems > ni
Rvj
39^ Dissertation XXIX.
pour le lieu des facrifices , ni pour h?
nombre des victimes. Tout le jour de
la Dédicace fut employé à ce pieux offi-
ce , au lieu qu'on n'avoitque deux heu-
res pour immoler la Paque. Une partie
de ces facrifices de Salomon le fit dans
les rues pendant la marche de la pompe
de la Translation de l'Arche. Le Roi
Salomon & tout le peuple d'Ifra'èl qui
syétoit afjemblé auprès de lui >marchoient
devant V Arche , & on immoloit cepen-
dant des brebis & des bœufs fans nom-
bre & fans prix y 3. Rois 5 c. 8. C'eft
ainfi que lorfque David la transfera de
la maifon d'Obededom dans la fienne ;
de fix pas en fix pas il immoloit un bœuf
êc un bélier : Cumque tranfeendiffent
qui portabant arcam Dominifex paffus ,
immolabat bovem & arietem.i. Rois, c.
6. Ainfi toute la ville de Jérufalem étoit
le lieu du facrifice. Ici au contraire on
prétend que toutes les victimes de la Pa-
que dévoient s'immoler dans l'enceinte
du Temple. Enfin quelle proportion y
a-t-il de 22000 bœufs & de 120000
brebis qui font 142000 victimes,, avec
25 5600 agneaux ? 11 y a différence de
près de la moitié. 11 faut donc recon-
noître que la Dédicace de Salomon n'eft
pas comparable à la Paque des Rabbins.
Elle ne pouvoit prefque s'accomplir
Dissertation XXIX. 5 97
fans le miracle du mouvement en un
inftant.
On croira peur-être que je dis cela
pour égayer un peu cette matière en-
nuyeufe. Mais il y a des admirateurs des
écrits des Rabbins , qui , bien loin de
me défavouer , enchériront encore fur
tout ce que je dis par un nouveau fur-
croit de merveilles. Cunaeus , Auteur
d'ailleurs fort habile dans fa République
des Hébreux jy 1. 2. ayant promis dans le
tit. du ch. 13. des chofes fingulieres &
prefqu incroyables touchant la fête de
Pâque : De fejlo Pafchatis Jingulare
quid , & pene fupra fidem ; accomplir
fa promeffe, non par ces longues files
de Prêtres, rangés en double haie, qu'il
avoit lues fans doute dans Maimonide ;
maisenfaifant immoler fur le même Au-
tel des Holocauftes les 25 5600 agneaux
de Jofeph : Porrb harum omnium (vicli~
marum ) immolatio facla in uno altari
tfl.
Que peur-on ajourer à cerre merveille ?
Pour moi je n'oferois m'y oppofer , de
peur que pour punir mon incrédulité, il
ne prenne envie à quelqu'aurre d'enché-
rir encore par dépir fur Cunxus , & de
me foutenir que l'immolation s'en fai-
foit en moins de deux heures dans le
même endroit de l'Autel , qui ayant;
$98 DlSSERTATÎON XXIX.
félon les Talmudiftes 3 1 coudées en
quarré , pouvoit au moins fervir en
même- teins à plufieurs facrifîces. Il faut
pardonnet ces actes de foi a ceux qui re-
çoivent avec refpect tout ce qui vient de
la part des Rabbins, fans fe mettre fort
en peine s'ils s'accordent ou non avec les
Auteurs contemporains ôc avec les té-
moins oculaires. Mais ceux qui ne fe
font pas une Religion de les croire aveu-
glement , en concluront que tous ces
faits ne font que des fables mal concer-
tées , qui à force d 'affecter le merveil-
leux , donnent dans Timpollible. Qu'ils
les ont fabriquées exprès pour étourdir
les Gentils , foit Chrétiens , foit idolâ-
tres du récit des merveilles prérendues
de leur Judaïfme} Se fur tout pour leur
donner une idée magnifique de la Pâ-
que , la première ôc la principale de leurs
fêtes.
§. XXIII.
Sainteté exigée par les Rabbins pour la
Pâque dans l'intention exprejje _, dans
l'attention continuelle , & dans la
manière de rôtir l'Agneau PafchaL
Après les miracles examinons les cé-
rémonies qui marquent la fainteté pré-
. Dissertation XXIX. 3 99
tendue des Juifs dans l'exacte obferva-^
tion de la Loi de la Pâque ; de ne choi-
fiflbns que celles qu'on mec en preuve
contre la dernière Pâque de Jefus-
Chrift.
La I. circonftance fort contraire à ceux
qui veulent que Notre-Seigneur ait pu
faire la Pâque féparement fans la parti-
» cipationdes Prêtres , eft que dans le
» facrifice de la Pâque ^ comme dans tous
>s les autres, ceux qui étoient députés
» pour l'offrir j dévoient marquer leur
» intention , p. 157. La Mifna veut
» qu'on dife exprelfement fi c'eft pour
» la Pâque qu'on offre. Or il eft bien
certain que le Jeudi où l'on prétend que
Jefus-Chrift fit la Pâque ., ni lui j ni les
deux Difciples députés pour l'apprêter ,
ne déclarèrent point aux Prêtres que leur
intention étoit de manger la Pâque.
Je réponds déjà pour ceux qui croyent
que les Juifs la firent le Jeudi comme
Jefus-Chnft, qu'on avance cela en l'air;
que fi cette déclaration étoit néceffaire,
rien n'empêche que les Difciples ne
Payent pu faire , &: le filence de l'Ecri-
ture ne feroit pas une raifon pour ne le
croire pas , puifque tout ce qui s'eft fait
n'a pas été écrit. Mais comme je ne
puis pas ufer de cette réponfe, moi qui
tiens que la Pâque des Juifs ne fe fit que
Î4oo Dissertation XXIX.
le Vendredi : Je demande feulement fur
quoi eft fondée la nécefîité de cette dé-
claration .<* Sur ce partage , répond Mai-
monide : T u facrïficras la Pâqueau Sei-
gneur _, Deut. c. 1 6. v. i . Or il faut que
l'intention d'obéir foit jointe à Tobéif-
fance \ Se afin qu'on n'en doute point ,
il faut la déclarer.
Mais fauf le refpecl qu'on doit à la
Mifna 8c à fon Interprète Maimonide ,
n'eft-ce pas aflfez qu'on obéifte à la Loi ?
de cette obéiftance effective ne lui fatis-
fait-elle pas > puifqu'elle eft inféparable
de l'intention f Car qui ferok affez in-
fenfé pour faire tout ce que la Loi com-
mande, & n'avoir pas l'intention de lui
obéir ? Que s'il la faut déclarer , ache-
ter un agneau qui a toutes les conditions
requifes par la Loi , l'apporter dans le
Temple le foir du 14 de Nifan , ÔC
l'égorger en même-tems qu'on immole
tous les autres , n'eft ce pas une déclara-
tion bien expreife qu'on veut faire la
Paque ? Et celui qui feroit afifez bizarre
pour ne vouloir pas faire la Paque, en
faifant tout ce que la Loi commande
pour cela , feroit- il fcrupule de mentir
en déclarant aux Prêtres une intention
qu'il n'auroit point eue? Non fans dou-
te : mais cette déclaration étoit nécellai-
re pour la famteté Judaïque,
Dissertation XXIX. 40T
II. Les Rabbins n'en demeurent pas
là , & ils la portent jufqu'â défendre
aux Juifs la moindre diffraction pendant
toute la cérémonie , fouis peine à eux de
n'offrir à Dieu qu'une Pâque fouillée 5c
profane. Maimonidc , nous dit l'Au-
teur p. 157. pouffe la chofe fi loin _, que
fi en immolant la victime on avoit penfé
à une autre forte de victime \ le Jacri-
fice auroit été imparfait. Il a flatté , &C
même énervé la penfée de ce Rabbin ,
qu'il repréfente ailleurs dans toute fa
force , Let. p. 35. Elle eft tirée de (on
Livre Corban Pefach. c. 15. De facris
temeratis j Des facrifices fouillés. Agnus
Pafchalis 3 fi per immolationem ejusno-
men aliud cogitaretur _, feu nomen alte-
ri us viclimA , feu nomen befli a profanée 5
utique temeraretur. Si pendant l'immo-
lation de V Agneau Pafchal _, il venolt
feulement dans l'efprit Vidée ou le nom
de quelqu autre chofe j foit que ce fut
le nom d'une autre victime jou celui d'un
animal profane ou immonde , la Pâque
deviendroit profane. Or qui peut répon-
dre que faint Pierre &: faim Jean n'ayent
pas eu quelque diflraCtion femblable ,
6c qu'en préparant la Pâque pour le
Seigneur, ils n'ayent pas fongéouàla
Pâque de l'année précédente , ou aux
«Jeux animaux, dont l'un le porta dans
40i Dissertation XXIX.
fon entrée à Jérufalem. Il n'y a fans
doute que Dieu qui le fâche. Quoi
qu'il en foit , voilà une perfection telle
qu'elle fe peut trouver dans les Anges
&c dans les Saints du Ciel; & je ne fcai
fi l'homme dans l'état d'innocence en
étoit capable. Mais où eft-ce que Mai-
monide a trouvé un commandement fi
difficile ? Dans l'Exode, c. 12. v. 27.
Vous leur dire% , dit Dieu à Moïfe , c'eJZ
la victime du paffage du Seigneur. La
preuve eft aufli merveilleufe que la thé-
fe ; & après cela on ne doit plus douter
de la nullité de la dernière Pâque de
Jefus-Chrift.
Une autre preuve miraculeufe de la
fainteté des Juifs dans la célébration de
la Pâque , eft la fcrupuleufe obfervation
de cette Loi : Vous ne mangere^ rien
qui foit crû , ou qui foit cuit dans l'eau 3
mais feulement rôti au feu , p. 1 6 1 . Mai-
monide dit que celui qui auroit mangé
de la chair de l'Agneau Pafchal bouillie,
feulement de la grofTeur d'une olive, au-
roit été condamné au fouet. Pour éviter
» ce crime & ce malheur , il enfeigne ,
3J ibid. Que la véritable manière de rô-
>j tir V Agneau 3 eft de lui pajfer depuis
55 la tête jufquau bas une broche de
55 bois , de le f uf pendre dans un four par
» cette broche j & de faire du feu deffous j
Dissertation XXIX. 405
53 ainji la broche nétoit pas couchée fe-
» Ion notre ufage. Elle demeuroit droite
j> pendant que le feu qui étoit autour
« cuifoit V Agneau. Quelqu'un croira
peut-être que naturellement la broche &:
PAgneauqui ne tournoient point, dé-
voient brûler. Mais c'eft en cela que
confiftoit le miracle. S'ils PeulTent tour-
né devant le feu , dans une broche de
fer , comme on en ufe parmi nous , il
n'y auroit eu en cela rien d'extraordi-
naire. Cela ne comenroit pas ces gens-
là avides de miracles , Judù Jîgna pe-
tunt. 11 a donc fallu fe fervir d'une bro-
che de bois , & la tenir droite & immo-
bile avec fa charge au-deffus du feu , en
faifant défenfe au feu de brûler la broche
& la charge.
Ce n'eft pas tout , l'importance eft de
bien choifir le bois dont on veut faire la
broche, p. 161. Prefque tous les bois
»? rendent de Peau quand ils font écauf-
» fés : ce qui feroit un mal dans cette
» occafion ; car Peau fe mêlant avec
» l'Agneau ., fa chair feroit plutôt bouil-
» lie que rôtie. On dira peut-être que
cela n'étoit pas fort à* craindre , puifque
le bois ne rendant l'eau que lorfqu'ii
brûle, il ne la rend que par les bouts,
fort loin de l'Agneau j qui étoit au mi-
lieu de la broche. N'importe la fainteté
404 Dissertation XXIX.
Judaïque demandoit cette exactitude.
Mais enfin de quel boisdevoit-on ufer?
La Mifna prefcrit du bois de grenadier,
parce que , dit notre Docteur Juif, ce
bois ne rend point d'eau quand il eft
échauffé.
Or eft il vraifemblable que Pierre Se
Jean ayent eu cette précaution ? 11 eft
hors de doute qu'ils ne firent manger à
leur Maître qu'une Paque bouillie dans
la broche , & par conféquent facrilége.
Eurent-ils feulement la diferétion de fé-
parer les entrailles de la victime pour
les faire rôtir à part , parce qu'étant
humides , elles dévoient naturellement
bouillir dans le ventre de l'Agneau ?
Cela eft en effet fort incertain.
§. XXIV.
Réponfc aux pajfages de V ancien Tejla-
ment cités contre la dernière Paque de
Jefus-Chrifl. En quel fens tout le
Peuple d3 Ifraél étoit obligé d'immoler
V Agneau PafchaL
Si l'Auteur de l'Harmonie ne nous
oppofoitque les Rabbins, nous nous en
déferions à peu de fraix , en rejettant
leurs témoignages comme une monnoie
de faux alloi. Mais comme il les fou-
Dissertation XXIX. 405
tienc par l'autorité facrée de l'Ecriture,
ôc ce qui eft merveilleux , qu'il n'épar-
gne pas même les Evangéliftes, qui nous
apprennent que Jefus-Chrift a fait la
dernière Pâque ; il eft jufte de féparer
l'Ecriture d'avec la Mifna , & l'Evangile
d'avec le Talmud , pour rendre à cha-
cun d'eux ce qui lui appartient. J'exa-
minerai les pafTages qu'il nous objecte 3
félonie rang qu'ils tiennent dans l'an-
cien & dans le nouveau Teftament.
Le I. qui fe préfente eft dans l'Exode
c. 12. v. 6. Immolabitque eum univerfa
multitude filiorum Ifraèl ad vefperam.
Toute la multitude, de Enfans d* Ifraèl
immolera V Agneau Pafchal au foir. Que
conclud-il de-la ? Que félon l'Original
les Septente , les Parapharafes , & les
Hiftoriens , lefens de la Loi étoit que
tous les Ifraèlites dévoient s' 'ajfembler
pour l'immolation de la Pâque y Let. p.
41. J'y confens de bon cœur; & pour
le témoigner , je trouve très-conforme
au bon lens que pour faire la première
Pâque dans l'Egypte , Moïfe ait alTern-
blé dans un même lieu tout le peuple
d'Ifracl , pour être en état de partir in-
ceffammentau premier ordre qui devoit
venir après la mort des premiers nés.
Les enfans d* Ifraèl partirent de Kamefft
dans Sccoth au nombre d'environ 600000
406 DlSSER TATION XXIX.
hommes de pie > fans compter les enfans
6* une multitude innombrable de toutes
fortes de gens. Par conféquent il y a voie
affemblé tout ce monde pour y célébrer
laPâque. Jufques-là nous n'aurons au-
cun différend.
llconclud en 2. lieu de cette convo-
cation que la Pâque fe devoit donc faire
dans le Temple \ 8c moi par la même
raifon j'ajoutedans le Tabernacle. Mais
comme on eft frappé d'abord de l'énor-
me difproportion qu'il y avoit de cette
multitude innombrable avec desefpaces
(\ petits ; il retracte bien-tôt ce qu'il a
avancé : // riétoit pas néceffaire j dit-il
p. 42. que tous fe trouvaient dans le
Temple à V heure de V immolation. Il
?i'y avoit pas la dixième partie du peu-
ple qui fût obligée de fe trouver à l'af-
femblée qui fe faifoit dans le Temple, Il
fe relâche encore plus fur l'autorité de
Jofeph , qui témoigne que pour manger
un agneau on s'afîembloit quelquefois
au nombre de vingt perfonnes. // fc
pouvoit faire , dit- il Let. p. 43. qu'il
ri y eût que la quinzième , 8c j'ajoute
la vingtième partie du peuple qui fe trou-
yât dans le Temple. J'appelle cela une
rétra&ation , 8c c'en eft même plus que
je ne demande. Car j'en conclus, que,
félon ce fyûeme , toute la multitude, des.
Dissertation XXIX. 407
tnfans d'Ifra'ël nimmoloit donc pas V A-
gneau Pafchal. Que fî on s'opiniâtre à
foutenir l'un & l'autre , j'appellerai cela
une contradiction. Car en quel bon fens
peut-on dire : Tout le peuple dévoie
immoler la Pàque. Mais ce n'étoit pas
tout le peuple qui devoit immoler , il
n'y en avoit que la quinzième ou la
vingtième partie ? 11 eft donc réduit à
avouer Tune de ces deux extrémités , ou
contre le ben fens , que la 1 5 ou la 20
partie du peuple ett tout le peuple , ou
contreles paroles exprefles de l'Ecriture,
que tout le peuple n'immoloit pas l'A-
gneau Pafchal.
Puis donc qu'il faut trouver un fens
raifonnable à l'Ecriture, on n'a déjà qu'à
prendre toute cette multitude dans un
fens diitributif pour chaque famille du
peuple, dans le même fens qu'on difoit,
tout le peuple pay oit le tribut au Temple ,
c'eft-à-direj chaque particulier du peu-
ple. On ne peut éviter cette diftribution,
puifqu'on n'immoloit pas pour un feul
agneau } mais que dans le Temple mê-
me l'Auteur avoue que chaque chef de
famille immoloit le fien. Or le fens
collectif donneroit cette idée, que tout
le peuple feroit alfemblé pour immoler
un feul agneau , immolabit eum. D'ail-
leurs , il faut expliquer cette aflemblée
*4oS Dissertation XXIX.
générale dans le même lieu , non par
rapporta un lieu particulier ; comme un
Temple ou un Tabernacle ; mais à une
ville > ou à l'enceinte d'une grande ha-
bitation en l'oppofant à toutes les autres
villes de la Judée. De cinquante exem-
ples que j'en pourrois citer , je me con-
tente d'un feul , d'autant plus fort qu'il
regarde la Pâque dont il s'agit. On na-
voit pu faire la Pâque en fon tems^parce
que le peuple ne s* et oit pas encore a (Je ta-
blé dans la ville de Jérufalem . 2. Par. c.
3 o V. 3 . Et populus nondum congregatus
fuerat in Jérufalem. Voilà l'alTemblée
générale dans le même lieu que la Loi
demande pour le facrifice de la Pâque.
Sur cela je demande à rout homme
tant foit peu Latin , lequel de ces deux
fens exprime mieux la généralité de
l'alTemblée du peuple : Vnïverfa multi-
tudo congre gâta ; le premier conçu en
ces termes : La quinzième partie du
peuple a ((emblée dans le Tabernacle ou
dans le Temple immolera V Agneau Paf-
chal. Ou le fécond en cette forte : Tout
le peuple généralement affemblé à Jéru-
falem _, ou dans quelqu autre ville _, fera
chacun che% foi cette immolation. 11 ne
faut qu'entendre les termes pour préfé-
rer la féconde traduction.
11 elt vrai qu'on aie fait pas dans le
fyfteme
Dissertation XXIX. 40a
fyftème de la Pâque du Temple roue ce
qu'on voudroit bien ; Se on eft terrible-
ment gêné entre coûte la multitude de le
Temple. Si on diminue le nombre des
ofFrans jufqu'à la 1 5 ou la 20 partie du
peuple , pour les faire tenir tous dans le
Temple , on s'éloigne de toute la mul~
tltude. Si pour s'en rapprocher on veut
multiplier le nombre des ofFrans, on ne
peut plus les faire tenir dans l'enceinte
du Temple. C'eft un embarras dont on
ne peut fortir. Il n'y a que les Rabbins
qui s'en jouent à la faveur des miracles
qui ne leur coûtent rien , & que des
Auteurs Chrétiens n'oferoientpas adop-
ter.
Revenons donc à notre paffage , &
difons qu'il prouve invinciblement que
la première Paque fut immolée dans les
maifons particulières , Se par chaque
chef de famille au milieu de (es domefti-
ques , pour être plus à portée de faire
l'afperfion du fang fur le haut de la
porte *, cette Loi a été faite lorfqu'il n'y
avoit encore ni Prêtres, ni Tabernacle ,
ni Temple. Ainfi rien de tout cela n'é-
toitnccelfaire à l'immolation de la Pa-
que. Autrement la première eût été fort
irréguliere & défe&ueufe ; cependant
quelle Paque a du être plus exa&e &C
plus conforme à la Loi que la première
Tome IV. S
410 Dissertation XXIX.
qui s'eft faite fous les yeux mêmes du
Législateur.
§. XXV,
Que la première difpofition de la Pâque
n'a point été changée par les Loix
des autres facrifices. Différences entre
ces facrifices & celui de la Pâque r
L'Auteur fe récrie contre cette pro-
portion y Let. p. 48 , & il ne peut a£e%
témoigner la furprife ou il efl de ce que
ceux qui raifonnent ainji entendent fi
peu l * Ecriture fainte , qu'ils ne com-
prennent pas qu'alors Dieu navoitpoinc
encore fait de difiinciion de Laïques &
de Prêtres , que le Tabernacle nétoit
point fait _, & que le Temple ne fut bâti
que plufieurs fiécles après. Ce feroit en
effet une fort grofîiere ignorance. Mais
comment pourroient - ils ignorer des
chofes fur quoi tout leur raifonue-
ment eft fondé. Le voici dans toute fa
force. 11 faut juger de toutes les Pâques
par la première pour ce qui regarde les
principales circonftances du lieu , du
rems , des Minières Se des vidlimes. Or
à la première Pâque, félon l 'Auteur, Ler.
p. 48 , /'/ ne pouvait pas y avoir de Lot
pour faire la Paque dans un certain lieu
Dissertation XXIX. 411
particulier , comme le Tabernacle & le
Temple , puifqu'ils n'étoient pas con-
ftruits '} ni on ne pouvoit pas avoir re->
cours au minijlcre des Prêtres , Ler. pa
48, parce qu'ils n'étoient pas encore éta-
blis. Donc ni le Tabernacle _, ni le Tem-
ple , ni les Prêtres n'ont été néceflaires
à toutes les Pâques qui ont fuivi la pre-
mière. En effet, Dieu pouvoit-il mar-
quer plus fentiblement que la Pâque ne
dépendoit d'aucune de ces deux circon-
stances du lieu &c des perfonnes , que
par les dattes dont celle de la Pâque étoic
antérieure à l'autre; c'ell- à-dire, en éta-
blitfant cette fête dans un tems où il nj
avoit encore ni Prêtres > ni Temple , ni
Tabernacle ?
L'Auteur nie donc cette conféquen-
ce, 8c ce principe fur quoi elle eft fon-
dée : Qu'il faut juger de toutes les Pâ-
ques par la première. II prétend au con-
traire qu'après le Tabernacle drejje &
les Prêtres choijis , les chofes changèrent ;
ce qui étoit permis auparavant devint
un crime y Let. p. 48. Voici comme il
le prouve. La Pâque j dit-il dans le
Traité hift. p. 1 1 8 _, ejl appellée par tout
en l'Ecriture un facrifice \ fur quoi il
cite l'Exode _, c. 13 , v. 18. Vous ne myim~
molere% point avec du levain ; le fan g
de la yielime qui mejl immolée , & la
Sij
4ii Dissertation XXIX.
graijfe de Vhofiie qui mefi offerte ne de-
meureront point jufquau lendemain,
C'eft de la Pâque qu'il parle. C'eft une
bonne théfe fout mal prouvée. Car il on
confulte l'endroit , on verra qu'il ne
parle point de la Pâque en particulier ,
mais des trois grandes fêtes , dont la Pâ-
que étoit la première. Or ceux qui nie-
roient que l'Agneau Pafchal fût un fa-
crifice , pourroient dire que pour obéir
à ce précepte, qui eft général pour tous
les facrifices , il fuffifoit de l'accomplir
dans ceux de la Pentecôte , de la fête
des Tabernacles , & dans toutes les au-
tres de Tannée ; & qu'ainfi la preuve de
l'Auteur eft une pure illufion : Mais
cela n'eft point néceflaire pour prouver
le facrifice de la Pâque ; on n'a befoin
que de la première Loi : Immolabitque
eum univerfa multitudo , parce que l'im-
molation ne tombe que fur une victime,
6c toute victime immolée eft un facri-
fice. J'avoue donc fort volontiers que
la Pâque eft un vrai facrifice,
A cette proportion il ajoute ., Trait.
Hift. p. 166 : Or il eft confiant qu'on
ne pouvoit faire de facrifice que dans le
Tabernacle depuis qu'il fut dreffé _, &
enfuite dans le Temple après qu'il eut été
bâti. Il ne refte plus qu'à conclure que
la Pâque ne s'immoloic donc que dans
Dissertation XXIX. 415
le Tabernacle, ou dans le Temple. J'at-
tens avec impatience la preuve de cette
féconde proposition , où eft toute la
difficulté. La voici , ibid. p. 117 , tirée
du Lévitique , c. 1 7 , v. 3 . Si un homme
de la maifon d'ifraél j quel qu'il p^ijje
être j ayant tué un bœuf ou une brebis
dans le champ _, ou hors du champ _, ne la
préfente pas à l'entrée du Tabernacle
pour être offerts au Seigneur j il fera
condamné à mort. Et plus bas , v. 5. Les
enfans a" Ifraél doivent préfenter au Prê-
tre les hojlies qu'ils auroient égorgées
dans les champs , afin que les
Prêtres les immolent au Seigneur com-
me des hojlies pacifiques. Enfin , ib. p.
1 18. plus bas , v. 13. Prene^ bien garde
de ne point offrir vos holocaujles dans
tous les lieux que vous verre\. Maïs of-
fre^ vos hojlies dans le lieu que le Sei-
gneur votre Dieu aura choifi dans F une
de vos Tribus _, 6c. Sur cela il prétend
que Dieu par l'érection du Sacerdoce &
par les règles du facrifice , a changé toute
la difpofition qu'il avoit faite en Egypte
pour l'immolation de la Paque.
Mais il ne faut pas être fort entendu,
dans l'Ecriture fainte , Let. p. 48. pour
voir que dans tous ces lieux on nous
donne le change , & qu'on applique
fans raifon à l'Agneau Pafchal des Ré-
S iij
414 Dissertation XXIX.
glemens qui ne regardent que les facri-
rkes, foit publics ., ou particuliers , qui
pouvoienr s'offrir tous les jours.
Cela fe démontre , I. par la datte de
ces Ordonnances. Il eft certain que les
Réglemens prefcrits dans le Lévitique
pour le lieu , & les autres circonftan-
ces de tous les facrifîces ordinaires font
poftérieures à la Loi delà Pâquepourle
moins de 1 3 mois. Si donc Dieu en fai-
fant ces nouveaux réglemens qui défen-
dent de facrifier hors du Tabernacle &
du Temple , eût voulu changer la pre-
mière difpofition de laLoiPafchale,qui
commandoit d'immoler la Pâque dans
les maifons , il eût dérogé à cette Loi
par une mention expreiTe ; car c'efl une
maxime qui a lieu dans la Religion
comme dans les états : Que les Loix
poftérieures n'aboliflenr point celles qui
les précédent , à moins que celles-là ne
dérogent à celles-ci par des claufes ex-
prefles.
On doit faire ici le même raifonne-
ment dont l'Apôtre prouve que l'allian-
ce ou la promette de Dieu à Abraham
n'a pu être abolie par la Loi de Moïfe ,
poftérieure de 430 ans : Tcjlamentum
confirmatum à Deo j qu& poj? quadrin-
gentos & trïginta annos facîa ejl Lex j
non irritum facit. GaL c. 3 , v. 17. Mais
Dissertation XXIX. 415
il en faut juger autrement , lorfque le
fécond a&e porte une dérogation du pre-
mier. Et c'eft par cette raifon que la
nouvelle alliance a aboli l'ancienne ,
comme le même Apôtre le démontre
dans l'Epure aux Hébreux, parce que le
titre de nouvelle , qui eft donné à celle-
là par les Prophètes mêmes , eft une
qualité dérogatoire pour celle - ci. Il
viendra un tems ou je ferai avec la mai-
fon d'Ifraél & avec la mal/on de Juda
une alliance nouvelle ....... En V appel-
lant nouvelle il a fait voir que la pre-
mière fe pajfoit & vieillijjbit \ or ce qui
Je paffe & vieillit eft proche de fa fin :
D kendo autem novum veteravit prius A
quod autem anùquatur & fenefeit _, pro-
pe interitum eft. îlebr. c. 8 j v. 15.
Ox ii on fait la revue de ces Parta-
ges , qu'on prétend avoir changé la dif-
pofirion du lieu Pc des Miniftres de la
Pâque } on n'en trouvera pas un feul
qui parle feulement de la Loi & de la
Fête Pafchale. Ils ne regardent tous que
les facrifices parriculiers & ordinaires
qui pouvoient s'offrir tous les jours,
comme il paroîtra encore plus claire-
ment par la démonftration fuivante.
Depuis même le Lévitique il ne s'eft
fait aucune nouvelle ordonnance fur le
fujet de la Pâque. Quant à ce qui a été
SlY
4i £ Dissertation XXIX.
ordonné dans l'Egypte touchant les eir-
confiances principales delà Paque, com-
me font celles du lieu , du tems , des
Mimitres & des Victimes ( car je ne
parle pas de quelques cérémonies qui
étoient peut-être attachées à la conjon-
cture du tems , comme la pofture de-
bout , le bâton à la main , les robes re-
trouvées , la diligence à manger ) tout
le relie , dis-je > eft demeuré dans toute
fa vigueur , ck a été ordinairement exé-
cuté en la même manière.
II. Cela fe démontre par la nature
de tous les facrifices fanglans , qui font
prefcrits dans le Lévitique , & marques
dans les paffages ci-deiîus allégués. Ils
fe réduifent à trois efpéces toutes diffé-
rentes du facrifice de la Pâque. A l'ho-
locaufle , au facrifice pour le péché, &:
au facrifice pacifique. Ce dénombre-
ment eft exact, & on en peut conclure ,
à Texclufion de tout autre. Or l'Agneau
Pafchal n'eft compris fous aucun de ces
trois genres _, comme il eft évident par
cette feule circonftance qui lui eft pro-
pre, qu'il étoit tellement deftiné à l'a?
fage des offrans, qu'aucun autre n'y
avoit part. Ce n'étoitdonc point un ho-
locaufte , qui fe confumoit tout entier
par le feu a la gloire de Dieu , à l'ex-
clufion de tout autre ; ce n'étoit point
Dissertation XXIX. 417
un facrifice pour le péché qui fe parta-
geoit entre Dieu &c les Miniftres , fans
que l'offrant y participât. Ce n'étoit pas
enfin un facrifice pacifique qui fe divi-
foit entre Dieu , les Miniftres & les Of-
frons. Voilà tous les facrifices , dont
ces PalTages ci-deifus cités font men-
tion , dont le Lévitique établit les régie-
mens , & dont il interdit l'ufage hors de
l'enceinte du Tabernacle & du Temple.
Puis donc que le facrifice de la Pàque ri y
eft point compris , avec quelle couleur
peut-on affûter qu'il devoir s'offrir né-
cessairement dans le Tabernacle ou dans
le Temple ?
III. Si on prend la peine de relire
ces Partages , les facrifices dont ils par-
lent font fi bien circonftanciés par les
Victimes & par les Offrans , qu'on ne
peut les confondre avec celui de la Pâ-
que. Celui-ci confifte dans un Agneau
mâle d'un an. Les Victimes des autres
font un bœuf , une brebis , une chèvre.
Le premier eft un facrifice général , qui
s'offre en meme-tems dans un certain
jour de l'année par tout le peuple j c'eft-
à-dire , par tous les chers de famille.
Les autres font des facrifices qui fe font
par des particuliers _, fans conféquence
pour les autres : Homo quïllbct de domo
IfracL Le facrifice de la Paque ccoit
S v
4i$ Dissertation XXIX»
commun > d'obligation , & commandé
fous peine de péché & de mort : les
autres étoient arbitraires & a dévotion.
Enfin le tems du facrifice Pafchal étoic
fixé au foir du 14 du premier mois , les
autres fe pouvoient offrir à toutes les
heures du jour & dans tous les mois de
l'année. Je ne fçai comment on fe peut
inéprendre dans la diftindbion de deux
choies fi différentes.
§. XXVI.
Que la Ville de Jérufalem,& non le Tem~
pie ni le Tabernacle ^ étoit ce lieu choijt
que Dieu avoit preferit pour y célébrer
la Pâque.
L'Auteur ne s'en tient pas à ces lieux
tirés du Lévitique ; mais pour faire voir
que Dieu avoit changé la difpofition
qu'il avoit faite dans l'Egypte touchant
la Pâque , il produit d'autres autorites
qu'il croit qui y dérogent expreflement.
Vous immolerez la Pâque au Seigneur
.... dans le lieu que le Seigneur votre
Dieu aura choiji pour y établir fa gloi-
re & fon nom. Deut. c. 16 y v. 9. 11 eft
néanmoins fi perfuadéque ce lieu choifi
n'eft ni le Temple ni le Tabernacle,qu'il
ajouta immédiatenaent après, T. p. 1 16.
Dissertation XXIX. 419
Moife infirme clairement que ce lieu que
Dieu devait choifïr feroit une ville _, &
que ce feroit dans cette feule ville qu'il fe-
roit permis de faire la Pâque • vous ne
pourrez pas ( dit-il plus bas ) immoler
la Pâque indifféremment dans toutes les
villes que le Seigneur vous aura don-
nées _, mais feulement dans le lieu que le
Seigneur votre Dieu aura choifi pour y
établir fon Nom. Puis donc que ni le
Tabernacle ni le Temple n'éroient pas
des villes , qu'y a-t-il de plus formel
pour prouver que ni l'un ni l'autre n'é-
roient pas le lieu où l'on devoit im-
moler la Pâque ? Cependant quatre li-
gnes plus bas , Il efl confiant , dit-il j,
Tr. hiit. p. 11^, qu'on ne pouvoit faire
.defacrifîce , ni par conféquent celui de
la Pâque _, que dans le Tabernacle depuis
-qu'il fut dreffé , & enfuit e dans le Temple
après qu'il eut été bâti.
Quelle difparate ! 11 vient d'avouer .9
sque ce lieu que Dieu devoit choifir feroit
une ville j & qui ce feroit dans cette ville
qu'il feroit permis de faire la Pâque.
Comment peut-il en fi peu de rems l'a*-
•voir oublié ou changer de fentiment?
11 faut néceflairement , ou qu'il prenne
;le Temple & le Tabernacle pour des
villes , ou qu'il avoue que le Temple
kai le Tabernacle .a'étoient pas le lie»
4*o Dï$SîîiTArïoN XXîX.
choifi de Dieu pour la Paque. 11 faut donc
le prouver en forme.
1. On ne peut déjà douter que cette
défignation de lieu cho'ijl pour y établir
le Nom de Dieu, ne convienne à la ville
de Jérufalem aulîi-bien qu'au Temple,
dans 22 PafTaçes où cette défionation
commune eft marquée j puifque fi le
choix tombe fur le Temple entre tous
les autres , il ne tombe pas moins fur
Jérufalem pour y bâtir le Temple par
préférence aux autres villes.
II. De ces 22 Paifàges , il y en a on-
ze où cette défi^nation vague &£ ambl-
es o
gue eft déterminée à la ville de Jérufa-
lem par des marques qui lui font pro-
pres , & qui ne conviennent point au
Temple.
Car 1. ce lieu choifi eft un lieu où
Dieu promet au Ifraëlites de leur don-
ner une demeure tranquille & exempte
de toute crainte, ce qui ne peut convenir
qu'à une Province & a une ville qui
en eft une partie : Et abfque ullo timoré
habitetis in loco quem elegerit Dominus
JDeus vefler. Deut. 12. 11.
2. C'eft un lieu où l'on devoit man-
ger la Paque immolée : Et coques &
corne des in loco quem elegerit Dominus*
Deut. c. 16 , v. 7. Comme auflï certai-
nes fortes de dixmes & de prémices
Dissertation XXIX. 411
qu'on avoir offertes ou promifesàDieu.
Deut. c. 12. Or quoiqu'on difpute un
peu le rerrain à l'égard de l'immolation ,
on fuccombe fous les vaftes préparatifs
de la cuifine. On ne trouve point aflez
de place dans le Temple pour y faire
affeoir tout ce peuple à autant de tables
qu'il y avoit de familles ou de petites
focietés. Comme , dit- il , Tr. p. 1 33. les
cuïfines du Temple ne pouvoient pas
fuffîre s on avoit interprété l'ordre de
Dieu , & après avoir fait dans le Tem-
ple l'ejfentiel du facrifice , on pouvoit
defeendre dans la ville & y manger ce
qui en refioit. Il cite pour cela ces paro-
les du Deut. c. i<S, v. 11 & u. Ce fera
dans le heu que le Seigneur votre Dieu,
aura choifi pour y établir fa gloire &
fon nom que vous apporterez vos holo-
caufles Ce fera là que vous fere^ des
feflïns de réjouijfance devant le Seigneur,
Mais comment ne voit-il pas qu'il fe
condamne par ce Paffage ? Car Ci on
devoit faire dans le lieu choifi des feftins
qu'il étoit impoflible de faire dans le
Temple, qui ne voit que le Temple
n'étoit donc pas ce lieu choifi ; Se Ci
l'on devoit apporter tous lesholocauftes
8c toutes les hofties dans le même lieu
où l'on devoit faire des feftins j qui ne
voit que ce lieu ne défigne que la ville
41 1 Dissertation XXIX.
de Jérafalem , avec exclufion feulement
des autres villes , & que c'étoit dans
{on enceinte & non pas ailleurs, qu'on
devoit offrir à Dieu les Victimes, parce
que le Temple où fe faifoient ces obla-
tions étoitdans l'enceinte de Jérufalem?
Ce précepte eft répété fix fois en divers
endroits du Deutéronome.
3. C'eft un lieu oùl'oncélcbroit pen-
dant fept jours les principales Fêtes de
l'année : Septem diebus Domino Deo tuo
lelebrabis inloco quem elegerit Dominus»
Deut. c. 16,15. Or il eft bien confiant
que les Fêtes fe célébroientdans la ville,
éc qu'elles étoient violées , quoiqu'in-
iiocemment dans le Temple, parle tra-
vail continuel des facriflces.
4. C'eft un lieu où Ton portoit tou-
tes les caufes obfcures & douteufes pour
-en recevoir la décifiondes chefs du peu-
ple qui y préfidoient. Si difficile & am-
biguum apud te judicium effe perfpexe-
ris , furge & afeende ai locum quem ele-
gerit Dominus Deus tuus. Deut. c. 17,
3. Et faciès quodeumque dixerin-t qui
pr&funt loco quem elegerit Dominus. Or
qui peut douter que les Juges j les Ma-
giftrats & les fouverains Prêtres mêmes
ne demeuraient dans la ville , &c non
dans le Temple.
5< C'eft un lieu oùle$ Lévites quit-.
Dissertation XXIX. 41 j
tant leur pais pouvoient aller s'établir
pour y lervir au nom du Seigneur , &•
pour y jouir des mêmes droits que les
autres Lévites leurs frères. Si exierit
Lévites ex una urbium tuarum ex omnï
Ifra'èl in qua habitée , & voluerit ventre
dejiderans locum quem elegerit Domi-
nas, Deut. c. 18,6. Cependant les Lé-
vites n'habitoient pas dans le Temple ,
mais dans la ville.
6. Enfin c'eft un lieu qui dans l'im-
molation de la Pâque eft préféré à tou-
tes les autres villes de la Paleftine. On
ne peut mieux juger (î c'eft le Temple
ou la ville , que par les exclurions &
les oppohtions des autres lieux de même
efpece : Or l'Ecriture ne nous a pas
iaiffé les maîtres de ce jugement. Vous
ne pourrez pas , dit Moïfe , immoler la
Pâque dans quelque ville qu'il vous
plaira ; mais feulement dans le lieu que
le Seigneur votre Dieu aura choi/i pour
y établir la demeure de fon nom. Non
poteris immolare Phafe in qualibet ur-
bium tuarum .... fed in loco quem ele-
gerit Dominus Deus tuus ut habitet no-
men e/us ibi. Deut. c. 16,5 , C. Ce lieu
choifi eft donc oppofé à toutes les autres
villes de la Terre promife, auxquelles il
donne l'exclufîon pour l'immolation de
ia Pique , & par conféquent c'eft une
'4H Dissertation XXIX.
ville entière , parce qu'il n'y a qu'une
ville qui puilïe faire oppofîtion aux au-
tres villes. Si la Loi écoit exprimée en
ces termes : Vous ne pourre^pas immo-
ler la Pâque dans vos maifons ni dans
quelqu autre quartier de la ville , mais
feulement dans le lieu que le Seigneur
aura choiji , il eft fans cloute que ce
lieu choiji ne pourroit s'entendre que
du Mont Moria , par rapport aux autres
quartiers , ou du Temple par rapporc
aux maifons particulières \ parce que les
lieux fur qui tombe l'exclulion doivent
être de même efpéce que celui qui en
eft excepté : mais comme Dieu com-
mande d'immoler la Pâque dans un cer-
tain lieu , à l'exclufion de toutes les au-
tres villes , il faut pour parler raifonna-
blement que ce lieu prefcrit foit aufli
une ville.
III. La qualité de la ville choifïe ne
convient pas feulement à Jéiufalem,par
des marques qui ne conviennent point
au Temple , mais il y a dix-fept ou dix-
huit endroits de l'Ecriture où elle lui eft
formellement attribuée. J'en citerai
quelques-uns Se je cotterai les autres.
Je laijjerai néanmoins une tribu à votre
fils , en confidération de mon ferviteur
David & de la ville de Jéfufalem que
j'ai choifie, 5. Rois,c. iijV, 1 3. Le Sei-
Dissertation XXIX. 41 j
gneur a choifi Sion> il fa choijïe pour fa.
demeure :fy habiterai parce que je l'ai
choifie. Pfeau. 1 3 1 , v. 13 , 1 4. *
IV. Ce qui démontre clairement la
chofe , eft que Ci l'Ecriture joint enfem-
ble le Temple &c la ville de Jérufaiem ,
elle fait toujours tomber le choix de
Dieu fur la ville de Jérufaiem , de elle
attribue feulement au Temple d'être le
fiége ou la demeure du nom de Dieu,
ou d'avoir été bâti à la gloire de fon
nom. J'établirai pour jamais mon nom
dans ce Temple & dans Jérufaiem que
j'ai choifie entre toutes les Tribus d'If-
raè'l : In Templo & in Jérufaiem quam
elegi de cunclis Tribubus Ifraè'l ., ponam
nomen meum infempiternum. 4. Rois , c.
21 j v. 7. Cette jonction du Temple 8c
de la ville fe trouve en huit endroits :
on n'a qu'à confulter dans la Concorde
ceux que j'ai cottes ci-delTus.
V. Lorfque Jérufaiem eft marquée
feule , elle eft toujours diftinguée par
le choix que Dieu en a fait pour y éta-
blir fon nom , c'eft-à-dire , par le Tem-
ple. Je veux qu'il rejle toujours à mon
ferviteur David une lampe brillante à
* Voyt7 de plus 3. Rois c. 8. ié. ibid. v. 44. &
4t. ibid. c. 1 1 . v. ; 3. & v. je. ibid. c. 1 4.V. 1 / . 4.
Rois c. 2 j . v. 7 • ibid . c. 2 3. v. 27 • 2 . Parai, c. 6 . v.
5. & v. 34. & v. si. ibid, c. 12. v. 13' ibid. c. 3 3>
v. 7.
4i£ Dissertation XXIX.
mes yeux dans la ville de Jérufalem ^
que j3 aï choifie pour y faire rcjider mon
nom : Ut remaneat lucerna David fervo
meo cunclis diebus coram me in Jérufa-
lem civitate 5 quam elegi ut effet nomen
nteum ibi. 3. Reg. c, 1 1 , v. 36. Ainfi il
e(r vifible qu'il faut faire cette diftin-
clion entre le choix de Dieu & l'éta-
bliiîement de fon nom, que le premier
cft toujours attribué à Jérufalem , &c le
fécond au Temple. Cela paroît mani-
feftement dans ce lieu du 4. des Rois ,
c» 23 , v. 27. Je renverferai cette ville que
favoïs choijie & cette maifon dont fa-
vois dit que mon nom y demeureroit tou-
jours : Projiciam civitatem hanc quam
elegi _, & domum de qua dixi , erit nomen
meum ibi.
VI. Il n'y a qu'un endroit où Dieu
parlant du Temple fans le joindre avec
Jérufalem , dit qu'il l'a choifi pour lui
fervir de maifon de facrifice. Elegi lo-
cum ijlum mihi in domum facrifi c'a. 4.
Reg. c. 7 , v. 1 2 ; ce qui ne peut infirmer
la conféquence qui fe tire de tant d'au-
tres Partages , que le choix de Dieu
tombe toujours fur la ville de Jérufa-
lem , & que c'eft elle qui eft dé (ignée par
le lieu que Dieu a choifi par préférence
à tous les autres pour y établir fou
nom.
Dissertation XXIX. 417
VII. Enfin je ne puis mieux fermer
toutes ces autorités que par cette raifon,
qui n'y laiffe pas la moindre difficulté.
Le Temple ne peut être ce lieu choifi ,
ôc ce titre ne lui peut convenir que
dans le même fens qu'il conviendroit à
l'ancien Tabernacle auquel le Temple
a fuccédé dans l'office de contenir le
nom de Dieu. Or ce titre ne peut con-
venir au Tabernacle, & jamais l'Ecri-
ture ne le lui a attribué : car 1. en quel
fens peut-on dire qu'une tente ou un
pavillon mobile & une maifon portative
que Dieu s'eft fait conftruire , eft un lieu
iixe & immobile , qu'il a choifi entre
mille autres pour y établir fa demeure?
Quels font ces autres lieux auxquels
Dieu auroit préféré le Tabernacle ? Dieu
pouvoir choifir un lieu pour y faire ré-
pofer fon Tabernacle , ôc pour y réfi-
cer. C'eft ainfi qu'il a choifi fucceflive-
ment Silo , Nobé , Gabaon , enfin Jé-
rufalem : mais jamais on n'a dit que
Dieu ait choifi le Tabernacle pour le
lieu de fa demeure , parce que Dieu ne
le féparoit point d'avec lui-même. Dieu
demeuroit dans le lieu où il pîantoit fon
Tabernacle y ôc quand il le tranfporcoit
ailleurs, il changeoit de demeure.
2. Les règles du langage ne permet-
tent pas qu'on exprime par le futur une
r4iB Dissertation XXIX.
action paffée , une chofe qu'on a déjà
faite depuis plusieurs années. Or Dieu
ne commence à parler du lieu choifi que
dans le Deutéronome , lorfqu'il y avoit
déjà plus de 3 S ans que le Tabernacle
étoit drefifé , puifque le Deutéronome
n'a été écrit qu'à la fin de la vie de
Moïfe , & que le Tabernacle fut drelfé
dès la féconde année après la fortie de
l'Egypte. Cependant ni Dieu ni Moïfe
ne parlent jamais que par le futur du lieu
que Dieu devoit choifir pour y établir
fon nom , ad locum quem elegerh Do-
minus. Quelle forte de Grammaire fe-
roit-ce que celle-là t Y a-t-il du bon
fens à dire qu'on choisira pour fa de-
meure un lieu où Ton demeure depuis
près de quarante ans.
3. Si ce choix de Dieu ne pouvoir
convenir au Tabernacle , il ne pouvoic
non plus quadrer au Temple , quoiqu'il
fût encore à venir , & qu'il dût être
ftable & immobile , parce que Dieu ne
féparoit point fa préfence de celle du
Temple > qui eft le Palais qu'il s'étoit
fait bâtir. Or on peut bien dire qu'un
Prince choifit une ville entre toutes les
autres j pour y établir fa demeure , &
pour y bâtir un Palais ^ ces deuxexpref-
iions étant équivalentes : mais jamais
on n'a dit qu'un Prince a choifi fon Pa-
Dissertation XXIX. 429
lais entre tous les autres lieux pour y
établir fa demeure , ce n'eft pas là une
matière de choix; car où veut-on que
le Roi demeure (mon dans le Louvre ?
Le Temple elt le Palais de Dieu. Entre
toutes les villes de la Terre promifeil a
choifi Jérufalem pour y bâtir le Temple,
jérufalem eft donc le lieu qu'il a choid
pour y établir fa demeure.
Après cela il ne feroit pas nécelTaire
de répondre a une autre objection que
l'Auteur propofe en ces termes,Tr. Hift.
p. 130. Ce que" nous voyons pratiquer aux
Juifs depuis la dejlruclion du Temple ^
ejl une demonflration quilsy immoloient
la Pâque, Car pourquoi ne la peuvent*
ils plus faire _, finon parce qu'ils ne peu~
yent faire aucun facrifice que dans le
Temple de Jérufalem _, qui ne fubfîjle
plus ? Cette raifon feroit bonne à l'é-
gard de tous les autres facrifices , mais
elle ne vaut rien à l'égard de celui de>
la Pâque. Car fi Dieu avoit attaché au
Temple les autres facrifices , il avoit
attaché celui de l'Agneau Pafchal à la
ville qu'il avoit choifie pour y établir
fon nom & fa gloire. L'enceinte du
Temple étoit nécelTaire pour facrifier,
mais l'enceintede Jérufalem l'étoit pout
immoler ôc pour manger la Pâque , à
la yus ôc comme à l'ombre, du Tem*
4 $ o Dissertation XXIX.
pie. Les Juifs ne peuvent donc plus
Faire ni l'un ni l'autre en aucun lieu du
monde; parce qu'il n'y a plus défor-
mais pour eux ni de Temple ni de ville
de Jérufalem : Dieu a toujours eu foin
de les en chafTer depuis leur dernière
défolation; '& quand ils s'y établiroienr,
fans Temple , ce ne feroit qu'une ville
profane. Ce n'efl: donc pas précifement
faute de Temple qu'ils ne facrifientplus
la Pâque , comme l'Auteur le fuppofe;
c'eft faute de ville choifie de Dieu par
le Temple : ce font deux conditions
nécefïaires pour célébrer la Pâque ; le
Temple eft nécelTaire à la ville pour la
rendre choifie , Ôc la ville choifie eft
nécelfaire au Temple pour le rendre 1§
Temple de Dieu.
§. XXVIÏ.
Que les Pâques d'E^échias , de Jojias
& d'Efdras font des exceptions qui
ne tirent point à conféquence pour les
autres qui les précédèrent ou qui les.
fuivirent*
On nous objecte les Pâques d'Ezé-
chias dans le i. Parai, c. 30. de Jofias ,
ibid. chap. 3 5 ; ôc d'Efdras , 1. 1 c. 6 ,
qui fe firent par le miniflere des Prê-
Dissertation XXIX. 431
très de des Lévites : d'où l'on rire cette
conféquence qu'elles fe rirent dans le
Temple j &c à l'égard de celle d'Ezé-
chias : Si la Pâque j dit l'Auteur , n'eût
pas dû fe faire dans 7e Temple , & que
le miniftere des Prêtres n'y eût point été
requis _, pourquoi ce petit nombre de
Prêtres y qui furent feuls en état d'of-
frir j auroit-il oblige de différer la Pâ-
que au fécond mois ? 11 nous cite encore
l'invitation de ce pieux Roi aux tribus
d'iiracl. ObéïJJe^ au Seigneur _, leur
difoit-il _, & vene^ dans fon Sancluaire ,
c'eit-à-dire , dans ton Temple, qu'il a
fanclifié pour toujours ; fur quoi il fait
cette remarque , Tr. p. 125. Qu'on ex-
hortoit donc les Jfraëlites de venir dans
le Temple pour y offrir la Pâque.
Pour moi je n'empêche point que la
Pâque d'Ezéchias j non plus que les
deux autres , n'ayent été immolées dans
le Temple par les Prêtres & par les
Lévites , au défaut de Laïques , qui n'é-
toient point en état de faire eux-mêmes
cette fonction ; mais je foutiens que ce
font des exceptions &: des exemples par-
ticuliers , dont on ne peut tirer aucune
conféquence pour le palfé ni pour l'ave-
jiir , c'eft-à-dire , pour en inférer que
les Pâques précédentes & les fuivantes
fe foient paflfées en la même manière ;
43 i Dissertation XXIX.
& je crois pouvoir dire de ces trois
exemples ce que dit l'Auteur de la pre-
mière qui fe fit dans l'Egypte fous les
yeux de Moïfe , Tr. p. i \6. Ne jugeons
pas de toutes les Pâques par celle d3E-
^échias.
On n'a qu'à fe repréfenter l'état mi-
férable où le peuple d'Ifrac'l avec été
avant le règne d'Ezéchias & celui de
Jofias. L'impie Achas , le père du pre-
mier , facrifia à tous les Dieux des Sy-
riens fes vainqueurs > pour fe les rendre
favorables; il fit ériger à Jérufalem un
Autel tout femblable à celui qu'il avoir
vu à Damas, & il y offrit des facuifices;
il pilla tous lesVafés facrés du Tem-
ple , il en ferma les portes , &: il fie
dreiïer des Autels dans toutes les rues
de Jérufalem &c dans toutes les villes
de Juda , pour y brûler de l'encens j 8c
lorfqu'après fa more les Prêtres <k les
Lévites , par Tordre d'Ezéchias , tra-
vaillèrent i purifier le Temple de tou-
tes les immondices qui y étoient , ils n'en
vinrent à bout que dans feize jours.
Pour Manaflfés l'Ayeul de Jofias , il
fuffit de dire que fon règne fut diftin-
gué par toutes les abominations Se les
idolâtries qui fe pratiquoient par les
Gentils; qu'il entraîna tout Juda & les
habitans de Jérufalem dans tous le*
défordres h
Dissertation XXIX. 4;$
défordres , foit de Religion , foit de
mœurs , dom il leur donna l'exemple ;
ik quoique dans fa pénitence il ait ch ni-
gé tout ce qu'il avoit fait dans fon infi-
délité, après la mort néanmoins Amon
fon fils rétablit tout ce qu'il avoit chan-
gé , & laiifa en mourant le Royaume
en cet état déplorable à fon fils Jofias j
le refte de la Paleftine étant rempli d'i-
dolâtres.
Quant a Efdras , on fait que fous
lui les Juifs revenoient de la captivité
de Babylone , où ils avoient oublié les
Loix & les coutumes de leur Religion,
faut- il donc s'étonner fî ces deux
pieux Rois , Ezéchias & Jofias, voulu-
rent, pour ainfî dire, réconcilier par
la célébration de la Pique le Temple
profané par tan: de facnlcges &c d'abo-
minations ; ôc Ci Efdras trouva bon de
dédier fon nouveau Temple par la mê-
me cérémonie ? Ces deux Rois fe por-
tèrent fans doute a cette réfolution par
pluiieurs autres raifons , dont on ne peut
rien conclure pour les autres Piques.
1. Après une li longue interruption
du facnfice de cette Fête, la première de
toutes , ils trouvèrent bon de la trans-
férer des mailons dans le Temple , afin
de la rendre plus fobmnelle. 2. Ceux
qui fireni ta Pique fe trouvèrent en II
Tome IK T
434 Dissertation XXIX.
petit nombre j que rien n'empêcha de
ce côté-la qu'on ne la put immoler dans
le Temple pour tout le monde. De
tous ceux qu'Ezéchias invita, il n'y eue
que la tribu de Juda , $t quelques-uns,
quidam viri ., des tribus d'Azer , de
Mana (Tés & de Zabulon qui fe rendi-
rent a Jérufalem , tout le refte fe moc-
qua de fes envoyés & les fifrla par tout
où ils pafTerent : II lis irrident ib us &
fubfannantibus cos. Sous Jofias il n'y
eut aufîi que la tribu de Juda qui fit la
Pâque avec ce peu qui étoit refté des
dix tribus que Salmanazar avoit trans-
férées à Babylone. Auiii l'immolation
ne fe fit pas feulement dans le Temple,
mais fans en fortir les Lévites y firent
rôtir tous les Agneaux , & cuire dans
des chaudières toutes les hofties pacifi-
ques , & les diftribuerent à tout le peu-
ple : marque évidente que le nombre
des communians n'étoit pas fort exhor-
bitant. Or quelle proportion y a-t-il
d'une tribu à tout le peuple compofé de
fes douze tribus.
3. Ils étoient tous dans une profonde
ignorance des cérémonies de la Pâque :
les uns avoient eu le loifir de les oublier
fous les règnes d'Achaz , deManaiïés&
d'Arnon j les autres ne les avoient ja-
mais ni vues ni pratiquées. 11 fallut
Dissertation XX IX. 435
donc que les Prêtres & les Lévites s'en
acquittaient pour ces Laïques qui y au-
roient commis plnlieurs fautes.
4. ils étoient prefque rous immon-
des j 6c par coniéquent hors d'état de
fane par eux-mêmes une fonction aufil
fainte que celle d'immoler la Pâque, ôc
même de la manger : 6V il fallut qu'E-
zéchias plein de confiance dans la bonté
de Dieu leur donnât cette difpenfe de la
Loi,quine permettoit lamanducationde
l'Agneau Pafchal qu'à ceux qui étoienc
purifiés. Les Prêtres & les Lévites fu-
rent obligés de prêter aux Laïques leur
miniftere pour cette immolation, dont
fans cela ils auroient dû s'acquitter eux-
mêmes. C'eit pour cette raifon que Jo-
fias difoit aux Lévites : Vous qui êtes
purs j immole^ la Pâque 3 & aïde^ vos
frères à s'y préparer 3 afin qu'ils puifi
fent faire les ckofes félon les ordres
eue Dieu nous a donnes par Mo'ife. 2.
Parai, c. 55. G. Ezéchias même trouva
bon de différer la tienne au fécond mois,
par deux raifons. La i. e'û _, que vou-
lant invirer à cette Pâque tout le peu-
ple d'Ifracl , des long-tems accoutumé
au fchifme &: à l'idolâtrie , ils n'euflTent
pu chacun dans fa famille , faire félon
la Loi qu'ils avoient oubliée , le facri-
nce de la Pâque j &c que dans le pie-
Tij
4$6 Dissertation XXÎX.
mier mois , il fe trouva peu de Piètres
purifiés , &: en état de fuppléer à cette
fonction pour les Laïques. Il fallut
donc attendre au fécond mois , où s'é-
tant purifiés en plus grand nombre , ils
purent fuffire à l'immolation de tant
d'agneaux.
La II. eft, que ceux des Conviés qui
confentirent à l'invitation du Roi ne fe
rendirent pas â tems à Jérufalem _, pour
faire félon la Loi la Pâquedans le pre-
mier mois : ce qui n'auroit pas dû em-
pêcher de la faire en foa tems , ceux
qui y demeuroient , &c ceux qui s'y
étoient déjà rendus des villes éloignées*,
mais le Roi voulut qu'ils dirTéraflfent
auiii tous la Pâque au fécond mois, pour
attendre les peuples invités , &r pour
rendre ainfi par ce concours la Pâque
plus foie m n elle,
5. Enfin comme on avoir de grands
fujets de foupçons qu'ils ne fulTent
encore idolâtres ou fchifmatiques, on
ne crut pas fe devoir fier a eux de cette
cérémonie religieufe , qu'ils auroient
peut-être négligée , ou qu'ils auroient
pu profaner par le mélange de leurs
anciennes fuperftitions. On fit donc la
Pâque générale dans le Temple par les
mains cjs Prêtres , & on fe contenta
d'en rendre les Laïques fpe&ateurs.
Dissertation XXIX. 437
Des Pâques fi extraordinaires , quoi-
qu'elles foient écrites , ne tirent point
à conféquence pour celles qui les ont
précédées ou fuivies : aufii n'ont-elles
été écrites que parce qu'elles étoient ex-
traordinaires ; & fi elles fe fuifent célé-
brées félon la régie commune , l'Ecri-
ture n'en eût pas fait plus de mention
que de celles qui fe font faites fous les
Juges , fous David , fous Salomon 3c
fous les autres Rois de Juda. Cependant
on prouve par ces trois exemples , que
côtoie une obligation de préfenter la Pâ-
que au Temple , comme toute autre of-
frande : la coutume interprète la Loi.
Tr. p. 112. On n'étend pas mal le nom
& l'idée de coutume. Eft-ce donc que
trois exemples avec interruption font
une coutume f Ou bien étoit-ce la cou-
tume que les Rois transféraient la Pâ-
que du premier mois au fécond \ &c
que ceux qui la faifoient fufTent aupa-
ravant idolâtres , fchifmatiques , im-
mondes , même en la mangeant _, igno-
rans , en petit nombre f Qui ne voit au
contraire qu'il ne faut point juger des
autres Pâques par celles-là , puifque
l'Ecriture déclare que depuis Salomon
jufqu'à Ezéchias , &c depuis Samuel juf-
qu'à Ozias il ne s'en étoit point fait de
femblables t
T i.j
45 S Dissertation XXIX.
§. XXVIII.
Réponfe aux lieux tirés des Evangé-
lifies : diverfes fuppofitions que fait
V Auteur pour les éluder & pour les
rendre inutiles à la dernière Pâque
de Jefus-Chrijl.
Nous voici arrivés aux PafTages tirés
des Evangéliftes , qui étant les Hifto-
riens de la dernière Pâque de Jefus-
Chriii , doivent avoir une autoriré iou-
veraine pour régler ce qu'on en doit
croire. Auiîî l'Auteur du Traité Hifto-
rique p. 2.47. avoue que tout ce qu'ils
difent ejl vrai j & il ne refufe point
queux feuls /oient nos Juges dans la
dècijion de notre queftion. Mais il s'en
faut bien qu'il s'en tienne en effet à leur
décilion. Il cite leur témoignage pour
les défarmer de tout ce qu'ils ont de
contraire a fon fyfteme j &c afin d'ôter
tout lieu de prife fur lui , il n'aflure les
chofes qu'en chancelant , 8c pour ainfi
dire , il ne combat qu'en retraite. Je
rien conviens pas > dit-il p. 2 5 1 . Je riap-
percois point fur quoi cela efl fondé.
EJt-il ïmpoffible qu'ils ayent fait cette
demande ? Rien n'oblige de croire. Il ri y
a rien qui nous empêche de croire j &c*
Dissertation XXIX. 4^9
p. 25 5 , 161 , 2^3. Ce n'eft pas là allé-
guer des preuves ; c'efl: éluder des ob-
jections} ce n'eft pas attaquer fes ad-
verfaires , c'efl: fe mettre comme ou
peut à couvert de leurs attaques. Eu
effet , les fens forcés qu'il donne aux
Evangéliftes , ne fouffroient pas d'autres
expreiîions. Mais avant que de les re-
préfenter , il eft bon de développer les
îuppofîtions fur lefquelles ils font fon-
des. J'appelle cela développer ; car
comme fans prefque affurer rien , il ne
fait que répondre & fe défendre , il eft
affez difficile de fixer ce qu'il veut éta-
blir.
La I. fuppofition qui eft fondée fur
faim Luc , eft que lorfque les Difciples
parièrent à Jefus-Chrift touchant le lieu
où ils dévoient préparer la Pâque , elle
n'avoit pas encore été immolée par les
Juifs : In qua neceffe erat occidi Paf-
cha. p. 248. Rien n'eft plus raifonnable
que cette fuppofition \ car pourquoi lui
auroient-ils propofé de s'acquitter d'une
cérémonie de Religion après que le
tems en feroit paflé ?
La II. eft qu'ils en parlèrent le pro-
pre jour des Azymes, Primo autem die
A^ymorum , félon faint Matthieu 8c
faint Marc. Saint Luc dit encore plus
exDreffement en prétérit : Venu autem
T iv
44^ D IS SERT ATI ON XXIX.
elles A^ymarum , «àÔs. Que ce jour
des Azymes étoit le 14. du mois , de
que ce 14 commença le Jeudi au foir ,
où finiifoitle 13. Mais comme, félon
le Lévitique, c. 23 , v. ^iLa Pâque du
Seigneur fe célèbre le foir du 1 4. jour du
premier mois; & que le 15. du même
mois efi la fête folemnelle des Azymes :
il efl allez naturel d'expliquer par anti-
cipation avec faint Auguftin ce premier
jour des Azymes marqué par les Evan-
géhftes , comme nous difons le Samedi-
Saint à midi , qu'enfin la fête de Pâque
efl: arrivée : néanmoins l'Auteur n'y
confent pas. // eft encore plus naturel ^
dit-il p. 2 5 4. d'expliquer les paroles des
Evangélifles à la lettre. Quel intérêt
prend- il à cela ? Il paroîtra dans les
fuppofitions fuivantes.
» La III. Les Difciples ne parlèrent
s' à Jefus-Chrift de la préparation de la
» Pâque , que le foir après le coucher
3? du Soleil, ou fort avant dans l'aprcs-
j> midi vers les 3 ou 4 heures , p. 249.
» Ou plutôt rien n'oblige de penfer que
>j ce fur avant 6. heures du foir que \es
35 Difciples vinrent trouver Jefus-Chrift
»? pour ce fujet , p. 253. On dira peut-
are qu'ils s'y prenoient bien tard. 11 eft
vrai. Etoit-ce là le tems de préparer tou-
tes chofespour la Pâque ? C'étoitdonc
Dissertation XXIX. 441
apparemment pour fouper â minuit ?
N'importe. Ce contre-tems eft nécef-
faire au fyftême 'y un peu plus de dili-
gence gâteroit tout le myftere, C'eft que
ce foir prouve merveilleufement que
Jefus-Chrift n'a point fait la Pâque.
Car comme elle s'immoloit vers les
3 heures , fi à 6 heures du foir que
[qs Apôtres parloient à Notre-Sei-
gneur, elle ne l'avoit point encore été,
elle ne pouvoit donc l'être que le len-
demain, & par conféquent alors le
14 commençoit feulement, p. 149.
Que il on veut opiniâtrement que ce
foit la fin du 14 ôc le commencement
du 15, on doit donc auiîi avouer que la
Pâque étoit paffée, & qu'il n'étoit plus
tems de penfer a l'immoler, p. 250. Or
ce feroitune faute inexcu fable aux Apô-
tres de parler à Jefus-Chrift de faire la
Pâque lorfque le tems en feroit pafTé ;
il vaut donc mieux pour leur honneur
&■ pour le fyftëme , qu'ils ayent fait cet-
te propofition le foir qui commençoic
le 14 ou celui qui finilîbit le 13. Cela
eft d'autant plus fubtil , que de quel-
que côté que l'Auteur foit attaque , il
n!a rien â craindre. Car enfin â 6 heu-
res du foir , quelque jour que ce foit,
ce n'eft point le tems d'immoler la Pâ-
que. Si c'etoit le foir du 1 3 , le tems
T v
442. Dissertation XXîX.
n'en éroit encore pas venu ; fi c'étoit le
foir du 14 , il étoit déjà patte , 8c Ton
étoit dans le 15. Mais quelle étoit donc
cette Paque que les Difciples propofe-
rent a Jefus-Chrift ? Ne partaient- ils
pas du fouper qui fe devoit faire le
Jeudi ?
» 11 nous Tapprend dans la IV. fup-
35 pofition. Ils pouvoient parler 8c du
$* fouper de ce foir-là, & de la recher-
33 che du pain levé par où commençoit
33 la préparation de la Pâque , p. 251. 11
»> n'eft pas impoffible qu'ils lui ayent
>3 fait cette demande dans un tems où
33 l'on devoit effectivement penfer à
33 choifir un lieu , & à le nettoyer de
» tout levain , p. 2. 5 5 , à préparer un
33 agneau , des Azymes , 8c les autres
3> chofes nécefïaires à la folemnité de
33 Pâque , p. 2.56. Ainfi ces paroles : Où
voulez-vous que nous vous apprêtions la
Pâque? veulent dire _, Ou voulez-vous
que nous nous adrejfions pour avoir une
chambre à manger demain la Pâque ? p.
257. On dira que les Evangéliftes néan-
moins témoignent qu'ils préparèrent la
Pâque ce jour-là même j & paraverunt
Pafcha. 11 efl: vrai. Mais il faut favoir
ce que c'eft que cette Pâque , de en quoi
confifte cette préparation.
La V. fuppofition nous l'apprendra*
Dissertation XXIX. 445
» Les Apôtres n'arrêtèrent pas feule-
» ment une chambre 3 ils purent encore
» acheter des gâteaux azymes , un
» agneau , des herbes ameres , 8c de
«quoi compofer cette fauce nommée
» charojjet , qui fe fervoit le jour de la
» Pâque. Voilà la Pâque qu'ils préparè-
rent, p. 259. Au refte il ne paroîc
point qu'ils ayent été au Temple , Se
qu'ils y ayent immolé un Agneau Paf-
chal. Et pour leur en ôter le loifir , il
n'y a qu'à faire
La VI. fuppofition. Rien ne nous
empêche de croire que Notre-Sei-
gneur qui les avoit envoyés devant
quand le Soleil fut couché , ne partit
de Bethanie, ou de quelqu'autre lieu
plus proche de la ville , que lorfqu'il
fut entièrement nuit. p. 161. 11 paroît
qu'il vint peu de tems après , qu'il
trouva le fouper préparé , &c qu'il fe
mit à table , p. 2^3. Il y a de I appa-
rence que Notre-Seïgneur fuivit de
fort près Pierre & Jean ; & qu'étant
arrivé il y foupa. Let. p. -j6 j 1. 35.
Rien n'oblige néanmoins de croire
r
que cette préparation ne rut pas pour
le lendemain. Mais xromme Jefus-
Chrift témoigne qu'il avoit déhré
avec ardeur de manger cette Pâque
avec fes Difciples , ce qui fuppofe
Tvj
444 Dissertation XXIX.
'» qu'elle étoit préparée & préfente , il
j> faut remédier à cet inconvénient
» Par la VII. fuppofition. Ces paro-
» les : J'ai déjîré avec ardeur j &c.
» peuvent avoir ce fens , qu'il avoit at-
» tendu avec emprelfement le tems de
« cette tête & défiré de faire ce feftin
» Pafchal , parce qu'il alloit accomplir
» fon grand ouvrage , pag. 2.65.
§. XXIX.
Que toutes ces fuppofitions , excepté ta
première , font arbitraires , forcées y
& violentes _, f&uffzs j & contraires
au refpeci quon doit à Jefus-Chriji &
aux apôtres.
Voila l'explication qu'on donne aux
paroles des Ëvangéliftes , &: les fuppo-
fitions qu'on fait pour empêcher qu'ils
n'ayent écrit l'hiftoire delà dernière Pâ-
que de Jefus-Chrift. S'il eft permis de
faire l'horofcope de ce nouveau fyftême,
on peut prédire avec certitude qu'il ne;
paifera point , qu'il mourra dans fa
naiifance , & que s'il a impofé d'abord
-à quelques Théologiens parjla facilité
quJil fembîe donner de concilier faine
Jean avec les autres Ëvangéliftes , ils ne
\oudroient pas acheter ce léger avantage
Disse ktation XXIX. 445
par la brouillerie irréconciliable de ces
trois avec le bon fens & avec routes les
règles du langage. Car il eft aifé de
voir que toutes ces fuppofuions ont
deux grands, défauts , qui doivent leur
ôter toute créance dans refprit des fa-
ges. Elles font , 1. arbitraires , fondées
iur rien , elles fuppoient fans preuve
tout ce qui eft en queftion. Ce font de
pures pétitions de principe. 2. Elles fonc
forcées , elles font violence aux chofes
& aux paroles , elles donnent la gêne
ordinaire &c extraordinaire aux Hifto-
riens facrés , non pour leur faire dire
ce qu'ils ne difent pas , mais pour les
empêcher de penfer ôc de lignifier ce
qu'ils difent clairement. Ainfi elles ont
toutes les marques de fauifeté ; & il
fuffit de les avoir expofées , comme j'ai
fait dans les mêmes termes qu'elles font
conçues , pour les faire rejetterfans au-
tre difcuflion.
Elles font arbitraires 5 3c elles font
tournées en proportions conditionnel-
les : Sî ce ne fut que le foir _, dit l'Au-
teur , p. 249. après le coucher du Soleil
que les Difcïples parlèrent a Notre- Sel"
gneur de préparer la Pâque , c'étoit
trop tard pour le 14. Fait-il cette ré-
ponfe affirmativement , ou feulement
fous condition i Si c'elt dans le fécond
44^ Dissertation XXIX.
fens , il efl: fort aifé de le facisfaire. Il
n'y a qu'a envoyer plutôt les Difcipies
parler à Jefus ; & afin d'ôter tout lieu
de contefter , je les fais partir à une heu-
re de Bethanie avec fes ordres , pour
aller préparer chez un de fes Difcipies
tout ce qui étoit nécelfaire pour la Pâ-
que. Je me fonde en cela fur ce qu'ils
dévoient mefurer le tems avec la natu-
re &C la qualité des chofes qu'ils
avoient à faire, & principalement fur ce
que l'immolation de la Pâque étoit fixée
entre 3 heures après midi de 5 heures.
Ainfi cette fuppofition eftraifonnable ,
& elle eft appuyée fur Thiftoire même
qui porte qu'ils préparèrent la Pâque.
Mais par cette fuppofition condition-
nelle il veut dire positivement que les
Difcipies ne parlèrent de la Pâque , ÔC
qu'ils ne partirent pour l'apprêter que
le foir après le Soleil couché , afin d'a-
voir lieu de dire que fi c'étoit le foir du
1 3 c'étoit trop tôt pour la Pâque qui ne
devoir s'immoler que le lendemain à 3
heures. Que fi c'étoit le foir du 14 c'é-
toit trop tard , puifque la Pâque étoit
déjà faite. Sur cela il triomphe de fes
adverfaires , & les regardant en pitié ,
E toit il tems s dit-il p. 250 _, après que
la folemnïté de la Pâque s' étoit faite de
fonger à la faire ? Et ailleurs p. 252.
Dissertation XXIX. 447
Enfin le premier jour des Azymes y quel
qu'il foit 3 étoit venu. Si c'eft le 1 5 étoit-
il tems de fe préparer à faire la Pâque?
Cela eft encore répété plus bas j & ce
qui eft étrange , en attribuant même
cette fuppofition à fesadverfaires qui la
rejettent > Eft-H plus raifbnnable de
fuppofer , comme on le fait _, que ce ne
fut qu'à la fin du 14, c eft- à- dire y après
que la Pâque avoit été immolée , &
qu'il n étoit plus tems de s'y préparer ?
tr qui eft-ce qui fait une fi déraifon-
nable fuppofition ? Sont-ce ceux qui
foutiennent a l'Auteur , qu'on ne fau-
roit douter que ces paroles des Difci-
ples , ( Où voulez-vous que nous pré-
parions la Pâque ? ) n'ayent été dites3
■quelques heures avant le coucher du So-
leil ? p. 2 5 6. L'Auteur n'a point d'oreil-
les pour entendre cela. Ils ne les font
pas dire , comme lui , le foir du 1 3. Ils
veulent donc , dit-il , qu'elles ayent été
dites le foir du i4,lorfquela cérémonie
étoit paftee _, comme s'il n'y avoit point
de milieu entre ces deux foirs.
Mais lui qui les place au foir du 15
ou au commencement du 14 fans le
prouver , comment ne voit-il pas qu'il
fuppofe ce qui eft en queftion , par une
pure pétition de principe. Rien n'oblige,
448 Dissertation XXIX.
dit- il p. 25 3. de penfer que ce fut avant
6 heures du foir que les Difciples vin-
rent parler de la Paque à Jefus-Chrijl :
Er plus bas , p. 161 , en attribuant cette
conduite à Jefus-Chrift même. // n'y a
rien 5 dit-il 3 qui nous empêche de croire
que Notre- Seigneur qui les avoit en-
voyés devant , quand le Soleil fut cou-
che' , ne partît .... que lorfquil fut en-
tièrement nuit.
Il y a bien des raifons qui empêchent:
d'avoir cette penfée de JeAas-Chrifl Se
des Apôtres. 1. Le contre-tems que
l'Auteur attribue à ceux-ci de s'avifer
de propofer la Paque à leur Maître dans
un jour où l'on ne la falloir pas ; & qui
pis etr , où félon la Loi on ne la pou-
voit faire j foit que ce fut le 1 3 jour
'finiiïant , ou le 1 5 commencé. 11 die
qu\z l'entrée du 14 il falloit fe pourvoir
des chofes neceffaires pour folemnifer la.
Paque _, p. 16 1 . En répondant ainfi il ne
prévoyoir pas que quelques pages plus
bas il diroit, qu'il parait que Notre-
Seigneur vint peu de tems après > & qu'il
fe mit à table _, p. 1&I. Comme donc ce
n'étoit pas là le feftin de la Paque , il
ne leur donna pas le loifir de faire au-
cuns préparatifs pour cela \ mais ils ne
purent apprêter que le fouper de ce
jour-là qu'il trouva eu effet préparé.
Dissertation XXIX. 449
Il dit 2. p. 256 , qu'il falloit s'affurer
à Jérufalem d'une chambre ou l'on pût
faire le fejlin Pafchal. E toit- ce le tems
de faire cette recherche lorfque le 14 des
A\ymes étoit commencé ? Pourquoi at-
tribuer toujours à fes adverfaires une
faille fuppofition qu'ils ne font point,
ik la leur attribuer malgré qu'ils eu
ayent ; pour fe donner du jeu à leurs
dépens , & pour fe préparer la voie à
rejetter leur vraie fuppofition, ou même,
dit- il p. 257 j à la fin du 14 , quelques
heures avant le coucher du Soleil. H eft
fans doute que s'ils propoferent la chofe
vers le midi ou une heure , ils eurent
allez de tems pour trouver une cham-
bre , & pour faire l'appareil de la Pâ-
que.
Mais , dit-il , p. 258 _, l'on ne devoit
pas différer au lendemain le choix d'un
lieu y dans un tems ou il y avoit un nom-
bre prodigieux d'étrangers à Jérufalem.
Cela ne fe pouvoit pas retarder. Mais
cela fe pouvoit avancer dès le midi , 8c
on trouve étrange qu'ils ne s'en foient
pas avifés.
D'ailleurs cette réponfe fuppofe que
les deux Difciples promoteurs de la Pâ-
que , s'attendoient à parcourir une par-
tie de la ville pour découvrir quelque
chambre vuide à faire la Pâque. Mais
450 Dissertation XXIX.
ils réfutent affez cette fauflfe imagina-
non , par la manière dont ils s'expri-
ment : Ou vous plaît- il que nous allions
vous préparer ce qu'il faut pour manger
la Pâque ? Ils ne lui demandent pas
permiiîion d'aller par toute la ville cher-
cher un lieu propre pour cette cérémo-
nie , ce qui eût en effet demandé beau-
coup de tems ; mais quel étoit le lieu
qu'il avoit en vue pour cela, tres-per-
iuadés qu'il ne fe tromperoit pas dans
fes mefures , & qu'ils trouveroient tou-
res chofes comme il les leur auroit mar-
quées. AuiTi l'Auteur reconnoît, p. 161 ,
Que la chambre fe trouva toute prête _,
& qu'il ne leur fallut pas beaucoup de
tems pour préparer ce qui étoit néceffai-
re. Mais il dit cela pour prouver qu'ils
partirent après le Soleil couché. Car ,
quand il s'agit de les faire partir à la fin
du 1 5 ou au commencement du 14, il
ne le dit plus j il s'en fait même une
objection. Qu'on ne dife point que ce lieu
fe devoit trouver aifément , parce que
Notre-Seigneur le marqua \ les Difci-
ples ne s'y attendoient point _, p. 257. A
quoi ne s'attendoient-ils point f Éft-ce
que Jefus-Chrift leur dût marquer un
certain lieu tout prêt & allure ? Us par-
lent donc comme leur penfée ; car ils
lui demandent en termes exprès : Ou
Dissertation XXIX. 451
vous plait-il que nous allions ? Eft-ce
donc que Jefus-Chrift le leur ayant mar-
qué ^ ils le trouveroient déjà occupé par
d'autres, ou que le Maître ne le leur
prêtèrent pas .^ Ils fe défioient donc delà
Providence infaillible de Jefus-Chrift j
8c en ce cas même fans perdre tems à
courir par la ville ^ ils n'auroient eu qu'à
s'en revenir fur leurs pas rendre compte
à leur Maître de ce qui leur feroit arri-
vé. Ainfi je ne fçai à quoi les Difciples
ne s'attendoient point ; 8c il feroit peut-
être bien empêché de le dire.
La II. raifon eft un autre contre-tems
qu'on fait faire aux deux Difciples ;
lorfqu'au lieu de les faire parler de jour
à Jefus-Chrift , on leur fait juftement
choifir l'encrée de la nuit , pour propo-
fer la Pâque , 8c pour la préparer.
L'heure ne pouvoir être plus mal choi-
fie. Etoit-ce là un tems fort commode
pour chercher une maifon , pour en net-
toyer tous les coins & recoins de tour
le pain levé , à cheifir un agneau fans
défaut , à acheter des gâteaux azymes
&: des herbes ameres j 6c afin de poufler
la chofe à bout pour tenir tout prêt ce
qui devoit entrer dans la fauce du Cha-
rojjet , qui ne devoit fervir que plus de
26 heures après. Pour faire tout cela
ils avoientle choix du 1 5 qui étoit pa(Té,
45 * Dissertation XXIX.
ou de tout le 14 qui étoit le lende-
main : que ne prenoient-ils l'un ou l'au-
tre. Non , il faut qu'ils ne s'en avifenc
que le foir à l'entrée de la nuit ; celaeft
eilentiel au fyftême ; au'ïi cette pré-,
voyance fuperrluë n'eut-elle point d'ef-
fet. Il par oh , comme nous l'avons vu ,
p. 16 1 , que J efus-Chrift vint peu de tems
après qu'ils furent partis , & qu'il ne
leur donna le tems que d'apprêter le
fouper de ce foir- là , qu'il trouva pré-
paré.
Le III. motif eft que par un cettain
renversement de conduite ils parlent à
Jefus-Chrift de la Pâque qu'ils ne pré-
parèrent pas j &: ils préparèrent le lou-
per de ce foir-la , dont ils ne lui avoient
point patlé. Ce procédé eft un peu fur-
prenant , Se néanmoins c'eft une fuite
naturelle du fyftême. Car après qu'on a
repréfenté à l'Auteur, qu'o/z convenoit y
6V lui-même comme les autres , p. 251,
qu'ils par loient à Jefus-Chrijl du fouper
qui fe dev oit faire ce jour-là même Jeu-
di. Je tien conviens pas j dit l'Auteur,
en défavouant nettement celui qui fai-
foit cette avance pour lui. Les Apôtres
ne parlent donc point du fouper de ce
foit-làque Jefus-Chrift néanmoins trou-
va peu de tems après tout préparé. Ce-
pendant une ligne plus bas l'Auteur
Dissertation XXîX. 4 5 3
s'avife , je ne fçai comment , d'avouer
l'avance qu'on lui avoir prêtée. Ils pou-
vaient parler _, dir-il p. 151 , du fouper
de ce Jbir-là. Il convient donc mainte-
nant de ce qu'il venoitde nier une ligne
plus haut. 11 ajoute , <S' de la recherche
du pain levé par ou commençait la pré-
paration de la Pâque. Et par conféquent
de tout le refte \ car pourquoi Pauroient-
ils fupprimé , C\ ce nJeft peut- être, parce
qu'il eft atTez compris dans cette re-
cherche ? Quoiqu'il en Toit ,1a 2. par-
tie de ma proportion eft toujours véri-
table , parce qu'ayant à peine aiTez de
tems pour apprêter le fouper de ce foir-
là , ils n'eurent pas le loifir de chercher
le pain levé , & 1 hôte qui avoit mis fa
maifon en état de fervir pour la Pâque,
ne leur en donna pas la peine.
IV. Le refpecl: qu'on doit a Jefus-
Chrilt devoit empêcher de les faire par-
tir après le Soleil couché. Car ( j'ai de
la peine à le dire , mais je ne dois pas
le diflimuler ) tous les inconvéniensqui
s'en enfuivent retombent fur la fagelfe
de Jefus-Chrift. 11 les envoie a une
heure indue' travailler A 1? préparation
de la Pâque qu'il prévoyo ;> :i ou'ils
n'aïuoient pas le tems ni le m 1 en •':
préparer. Ec il leur fait acheter fort
inutilement un agneau qu'il favonbiea
454 Dissertation XXIX.
qui ne leur ferviroit pas. Cette dépenfe
fuperfluc n eft pas bien réparée par ces
deux excufes. La i. qu'il fe comportoit
comme fit fa mort n'eut pas encore été
proche \ car cette difiimulation eft con-
traire à ce qu'il leur avoir die pontive-
ment que dans deux jours il reroit la
Pâque \ &: qu'aufli-tôt le Fils de l'hom-
me feroit livré pour être crucifié : Sci-
tis quia pofi hïduum Pafcha fiet _, &
filïus hominis tradetur ut crucifigatur :
Or c'éroir alors le deuxième jour. Cette
Pâque étoit donc la marque de la pro-
ximité de fa mort. La i. qu'i/ laifje
penfer fies Difciples que cejl pour la
Pâque légale qui! les envoie ^ p. 258.
11 eft certain que ce mot parate , pré-
pare^-nous _, contient non une permif-
fion , mais un ordre exprès d'apprêter
quelque Pâque. Mais comme il ne la
fpécifie pas , il leur permet , félon
l'Auteur , de croire faunemenr que c'é-
roit la Pâque légale. Quelle Pâque donc
leur commande- 1 il poiitivement de
préparer dans ce mot parate ï L'Aureur
ne veut pas que ce foi: la Pâque légale,
le bon fens ne fouffre pas que ce foit la
Pâque Euchariftique. Quelle eft - elle
donc ? C'eft une Pâque imaginaire,
comme il paroîrra dans le § fuivant.
Enfin il fait dire de fa part à celui
Dissert ation XXIX. 45 5
qu'il avoir choiû pour ion hôte , qu'il
alloit faire la Paque chez lui avec Tes
Difciples , apud te facio Pafcha eu m
Difcipulis meis. S'il a tenu parole , il a
donc fait la Paque. S'il ne l'a pas faite ,
( j'ai horreur de le dire , ) il parloir
donc contre fa pen fée , & il trompoit
fon hôte par une fauGTe promelTe.
§. XXX.
Abus que fait l'Auteur du nom de Fa-
que. Que la Paque dejirée par Jefus-
Chrijl nefl ni la Paque mémoratïve _,
ni CEuchariJiie y ni le pain & le vin ,
mais ly Agneau PafihaL Grande dif-
férence entre l'objet du déjlr & le
motif,
V. Enfin l'abus qu'on fait du nom de
Paque , obligeoit de penfer autrement
qu'on n"a fait de toute cette matière.
L'Auteur de l'Harmonie le fait appli-
quer par Jefus Chrift , parles Apôtres,
par les Evangéliftes à des chofes aux-
quelles il ne convient point. Des gâ-
teaux _, des herbes ameres , & une cer-
taine fauce ne font point la Paque. Ce
nom convient proprement à l'Agneau
Pafchal , Ôc de-là il fe communique par
analogie à tout le relie; mais c'eft lorf-
45 6 Dissertation XXIX.
qu'on l'immoloit & qu'on l'appretoit
pour le manger j & tant quon le te-
noit lié au pic du lit , c'étoit un agneau,
mais cen'étoit point encore la Pâque.
Ce fur donc une grande fiuprife à
tous les Apôtres , lorfque fans voir d'a-
gneau fur la table , Jefus - Chtift leur
dit , félon l'Auteur , qu'il avoit dès long-
tems un grand defir de manger avec
eux cette Pâque qu'ils voyoient. Defi-
derio defideravi hoc Pafcha manducare
vobifcum. L'Auteur , Tr. Hift. p. 161
confidére ce paffage comme le principal
point de la difpute , & comme le feul
que puijfent alléguer ceux qui croy oient
que Jefus-Chrïji mangea la Pâque lé-
gale dans ce repas ; parce que les autres
ne regardent que la préparation qui fut
pour le lendemain , au lieu que celui-ci
parle de la manducation actuelle. Mais
il ne s^en incommode guère.
11 a le choix de trois réponfes. 1. Il
pourroit dire que Jefus-Chrift parloir
de la Pâque mémorative qu'on mangeoit
en mémoire de la vraie Pâque j & que
Grotius a imaginée fort a propos pour
répondre aux paflages des Evangéliftes.
Mais l'Auteur n'adopte point cette Pâ-
que de l'invention de Grotius , qui n'a-
voit lieu que dans les lieux éloignés de
Jérufalem, Pour les deux autres répen-
fes,
Dissertation XXIX. 4 5 7
Ces, il paroit que l'Auteur a varié; car
dans/à Lettre au R. P. F. il explique
cette Pâque du Saint-Sacrement , p. tf o.
&c dit' affirmativement : Je n'abandonne
pas ce paffœge' Je prétends que Notre-
Sei'gneur y parle de l'EuchariJlie qu'il
alloit inflituer. Ce préambule ^ Defi-
derio delideravi _, le démontre. Cepen-
dant dans fon Traité Hiftorique il fe
contente d'attribuer ce Commentaire à
plufieurs Pères de l'Eglife , dont il ne
cite que Tertullien j& fans l'avouer ex-
preflemenr. Il le confirme par cette rai-
ion que Jefus-Chrijl prononça ces paro-
les , J'ai defiré avec ardeur , &c. dans
le' tems qu'il inftitua l 'Eucharijlie , p.
263. & par cohféquent lorfqu'il nétoit
plus que/lion de la Pâque légale. J'en
attends la preuve. C'eft , ajoute-t-il _,
cpL après avoir pris le calice _, il rendit
grâces , & leur dit : Prene^ -le & le
di/lribue^ entre vous j car je vous dis
que je ne boirai plus du fruit de la vi-
gne jufquà ce que le règne de Dieu foit
arrivé. Puis il prit le pain , & ayant
tendu grâces _, il le rompit , & leur
donna , en difant : Ceci ejl mon Corps,
Comme ces dernières paroles regardent
conltamment la confécration du pain au
Corps deJefus-Chrift , il veut faire
croire que celles qui les précédent, con-
Tome IF. V
458 Dissertation XXIX.
tiennent la confécration du Calice Eu-
chariftique ; & c'eft pour cela qu'il a
fupprimé les paroles fuivantes où elle
cil contenue : II' prit de même après fou-
per le Calice , en difant : Ce Calice ejl
la nouvelle alliance 3 &c. Mais il eft
difficile qu'en cela il foie de bonne foi.
Car 1. faim Luc auroit renverfé l'ordre
des deux parties de l'Euchariftie , en
mettant la confécration du Calice avant
celle du pain. 1. 11 auroit rapporté deux
fois la confécration du Calice ; la pre-
mière avant celle du pain , & la féconde
après : deux fautes iignalées , dont on
ne peut foupçonner faint Luc le plus
élégant des Evangéliftes. 11 eft donc
certain que le premier Calice eft le Ca-
lice légal que le Père de famille diltri-
buoit à toute la troupe après la mandu-
cation de la Pâque ; ôc qu'ainfi ces pa-
roles , J'ai defiré avec ardeur de man-
ger la Pâque avec vous , qui précédent
immédiatement, ne peuvent s'entendre
que de l'Agneau Pafchal,& qu'elles fu-
rent prononcées pendant qu'on le man-
geoit. Après ces deux parties de la Pâ-
que ancienne , je dis après l'agneau ôc
le breuvage , Jefus-Chrift établit tout de
fuite les deux parties de la Pâque nou-
velle , fon Corps & fon Sang , fous les
efpeces du pain & du vin.
Dissertation XXIX. 459
Quant au pafïage de faint Matthieu :
Or je vous dis que je ne boirai plus
déformais de ce fruit de vigne , &c. que
l'Auteur nous produit comme étant la
même chofe que celui de faint Luc; il
eft vrai qu'il parle du fang de Jefus-
Chrift , aufli il fuit immédiatement la
confécration du Calice Euchariftique j
mais je nie que ce foit le même paftage
que celui de faint Luc : je foutiens au
contraire qu'il en eft tout différent , ÔC
par les paroles que l'on peut confronter,
ôc par les fujets ,, dont l'un eft le vin ,
&c l'autre le Sang de Jefus-Chrift ^ & par
les tems où ils ont été prononces _, l'un
devant, & l'autre après l'inftitution de
l'Euchariftie.
L'Auteur fans doute a vu tout cela ;
aufli ii ne paroît pas infifter davantage
fur l'Euchariftie , pour lui appliquer
cette Pâquedelirée ; en quoi il eft plus
raifonnable que dans fa Lettre au R. P.
F. Car 1 . on ne peut empêcher que cette
Pâque que Jefus-Chrift avoit defiré de
manger _, ne foit la même que les deux
difciples avoient préparée , comme il
eft bien difficile de feparer , celle qu'ils
préparèrent de celle qu'on avoit accou-
tumé de tuer. Que l'Auteur life cette
fuite avec un peu d'attention : Le jour
qu'an devoit Immoler la Pâque , les Dif-
Vij
4^0 Dissertation XXIX.
ciples dirent à Jejus : Où vous p lait- il
que nous vous préparions ce qu'il faut
pour manger la Pâque ? Alle-^ , leur dit-
il , che% un tel. Préparez-nous toutes
chofes , afin que nous mangions la Pâ-
que. Ils la préparèrent ; & Je/us s'y
étant rendu fur le foir , il leur dit : J'ai
défiré avec ardeur de manger cette Pâ-
que avec vous. Par quelles machines
peut- on empêcher que cette Pâque que
Jefus-Chrift mangea après l'avoir long-
rems fouhaitée, ne foitla même que les
Difcipies avoient préparée , 8c qu'on
devoit immoler ce jour- là. L'Auteur le
peut nier par l'engagement de fa caufe ;
mais je doute qu'il en foit (incéremenc
perfuadé. Cependant il eft confiant que
la Pâque qu'on étoit obligé d'immoler
ce jour- là, 6V que les Difcipies prépa-
rèrent n'étoit point l'Euchariftie. Ce
n'était donc pas de l'Euchariftie que
Jefus-Chrift parloit.
II. Cette Pâque defirée étoit préfenre
quand Jefus-Chrift dit ces paroles , hoc
Pafcha manducare vobifcum. On n'ap-
plique le pronom démonftratif , hoc ,
qu'à un objet qu'on a devant les yeux ,
ou qui n'eft pas éloigné. Or il paroît
par faim Luc qu'alors l'Euchariftie, bien
loin d'être trcfente , n'étoit pas encore
inftituée. L'hiftoire n'en eft rapportée
Dissertation XXIX. 461
que 4 verfets plus bas, après que Jefus-
Chrift eut protefté qu'il ne mangeroic
plus de la Pâque jufqu'à ce qu'elle
trouvât fon accompliirement dans le
Royaume de Dieu , c'eft-à-dire , dans
l'Euchariftie qu'il alloit inftituer , &
qu'il ne boiroit plus de vin juiqu'i l'a-
venemenr du Royaume de Dieu. Puis
donc que la Pâque écoit préfente & que
l'Euchariftie ne i'étoit pas , comment
peut-on alïurer que la Pâque étoit l'Eu-
chariftie ?
Mais, dit l'Auteur , p. 16$ , quel at-
trait Jef's-Chrijl trouv oit-il dans la
chair de C Agneau Pafchal qu'il avoit
mangée plufieurs fois , pour le déjirer
avec tant d'ardeur ? Nimirum verveci-,
na illum Judaica deleclaret , dit Tertul-
lien , cejl fans doute qu'il aimoit la
chair de mouton ? L'Auteur ne s'apper-
çoit pas que cette objection confond
l'objet du defir avec le motif qui le fait
délirer , qui fout des chofes toutes diftc-
rentes. Jefus-Chrift fouhaitoit dès long-
tems de manger cette année-là l'Agneau
Pafchal avec fes Difciples.C'étoit l'objet
de (es vœux; mais ce n'étoit pas le mo-
tif qui le lui faifoit fouhaiter. C'étoit
qu'après la manducation de cet Agneau
il devoit inftituer le Sacrement de fon
Corps 6c de fon Sangj qui étoit un des
V iij
461 D I SSERTATION XXIX.
plus illaftres monumens de fon amour
pour les hommes. 11 n'y a pas plus de
peine à diftinguer ces deux chofes,qu'à
comprendre que Jefus-Chrift regardoit
fon abfence de Bethanie pendant la ma-
ladie de Lazare comme un objet de joie,
dans la vue d'affermir la foi de (es Apô-
tres : Gaudco propter vos ut credatis ,
quia non eram ib'u Quel objet de joie ,
dira-t-on , pouvoit-il trouver dans cette
abfence qu'il lui étoit arrivée fi fouvent?
Ce n'étoit pas cette abfence même qu'il
avoir en vue , mais la foi des Difciples
qui devoit recevoir un nouvel accroifle-
menc de \x réfurre&ion de Lazare. Or
Fabfence de Jefus-Chrift lui donna le
loifirde mourir, & à Jefus-Chrift le
moyen de le refïufciter.
11 femble donc que l'Auteur lahTant
croire à qui le voudra, que l'Eucha-
riftie étoit cette Pâque defirée de Jefus-
Chrift, donne pour 3. réponfe au parta-
ge , Dejîderio dejideravi , ôVc. que
Jefus- Chrifl en dïfant ces paroles : J'ai
dejiré de manger cette Pâque , ceft-à-
dïre en avertijjant fes Dijciples , que
c étoit- là le dernier repas qu'il feroit avec
eux , regarda le pain & le vin dont il
ne devoit plus goûter qu après fa Paf-
Jion. C'ejl le fens naturel de ces paroles.
Et il ajoute qu'il y a cette commodité
Dissertât l on XXXI. ±<x,
dans cetre explication , que Us Pro\
tejlans n'en peuvent tirer aucun avan-
tage j comme s'il avoit appelle' l'Eucha-
rifeie encore après la confécration pain
& vin. C'en: tout le contraire j loin
d'ôter ce pafïage aux Proteitans, il leur
donne lieu contre fon intention de prou-
ver par ces paroles , que Jefus-Chrifl
donne à TEucharifrie les noms de pain
& de vin , même après la confécration.
Car félon lui , p. Z64 , faint Mathieu
témoin oculaire , & qui rapporte vrai-
femblablement les chofes dans le meme
ordre quelles s êtoient faites , met ces
paroles en que/lion - après Vinftitution
de l3 Eucharijlie : Or je vous dis que je
ne boirai plus du fruit de la vigne , &c.
D'ailleurs il eft vifible que Jefus-Chnft
parla de Ce Calice qu'il venoit de attri-
buer , en difant : Ceci ejl mon Sang , le
Sang de la nouvelle alliance , &c. Ce
qui paroit par le pronom démonftratif ,
qui a été fupprimé, je ne fçai pourquoi,
dans la citation de l'Auteur, de hoc ge-
nimine vitis } de ce fruit de la vigne.
Qui ne von pas la répétition de ce pro-
nom , hic fanguis , hoc genimen vitis ,
&c. qu'il qualifie maintenant de fruit
de la vigne , ce qu'il venoit d'appeller
fon Sang , ôc le fang de la nouvelle
alliance ? Si donc, félon l'Auteur , ce
V ir
464 Dissertation XXIX.
fruit de la vigne eft du vin naturel ,
comment enpèchera-t-il que le Sang
de la nouvelle alliance ne foit aulîî du
vin naturel ? Cette raifon eft d'autant
plus forte qu'il prétend que le partage
de faint Luc , qui certainement parle
du vin naturel ôc de la coupe légale ,
comme il paroît , parce qu'il porte abfo-
lument ôc fans pronom démonftrarif ,
de generatione vitis ; je ne boirai plus
du fruit de la vigne, il prétend , dis-je ,
que ce partage dit la même chofe que
celui de faint Matthieu , ôc par confé-
quent qu'ils parlent tous deux du vin
Euchanftique :, ce qui eft à la lettre le
compte des Proteftans. Mais on n'eft
pas en peine comment leur orer le parta-
ge de faint Matthieu, dont ils abufent.
On n'a qu'à foutenir au contraire que
le vin dont parle faint Luc , eft du vin
naturel : Je ne boirai plus du fruit de
la vigne , ôc que celui de faine Matthieu
eft un vin métaphorique : Je ne boirai
point de ce fruit de la vigne.
Je reviens feulement à l'application
que l'Auteur fait du nom de la Paque à
du pain ôc du vin. Je dis de cette Pa-
que que les Juifs immoloient , que les
Difciples propoferent à Jefus-Chrift ,
que Jefus-Chrift les envoya préparer
chez un de fes Difciples x qu'Us pré-
Dissertation XXIX. 465
parèrent en effet , & dont Jefus-Chrift
leur dit qu'il avoir une extrême envie
de la manger avec eux : Si on veut fça-
voir ce que c'eft que cette Pâque , l'Au-
teur répondra que c'eft du pain Ôc du
vin. Elt-il poilible qu'il ne fente pas la
violence de cette catachrefe f Mais au
moins je lui demande comment il ne
s'eft pas apperçu qu'on lui pouvoit allé-
guer contre le pain & le vin la même
raifon qu'il avance contre l'Agneau Paf-
chal. Quel grand attrait ., dit-il p. 2.65,
après Tertullien , trouvoit-il dans la
chair de l'Agneau Pafchal qu'il avoit
mangé plufieurs fois , pour le déjïrer avec
tant d'ardeur. Et moi je lui dis après
lui-même , en changeant feulement le
fujet de la propofition : S'il ne sagiffoit
que du pain & du vin , pourquoi ejt-ce
qu'il auroit eu cet emprejfement ? Let.
p. 80.
Mais n'efb-ce pas une chofe étrange
de fe fervir d'un Auteur, pour détruire
un fait qu'il fuppofe dans les paroles
mêmes qu'on lui emprunte ? Tertullien
pofe en fait que Jefus-Chrift: a mangé
la Pâque Judaïque félon le delir extrême
qu'il en avoit depuis long-tems \ non
par le defir de manger de la chair d'a-
J • T 1 *
gneau , ma1. 3 parce qu'il vouloir ace
il . Uni jC
\ 'A
àf66 Dissertation XXIX.
falutahe , & distribuera (es Difciples fe
pain qu'il avoit fait fon Corps : Profef
fus itaquc Je concupifeentia concupijfe
edere Pafcha ut fuum acceptum pa-
nem & dijlributum Difcipulis corpus
ïllum fuum fecit. Contr. Marcion. Et
l'Auteur au contraire , de ce que Jefus-
Chriit n'avoit point d'attrait pour man-
ger de la chair d'agneau , conclud
qu'il n'a point mangé l'Agneau Pafchal.
§. XXXI.
Abus du premier jour des Azymes , que
l'Auteur met tantôt au 14 du premier
mois , tantôt au 1 ^felon qu'il ejlprejjé
par f es adverf aires-
Après les violences que l'Auteur a
faites à la Pâque pour lui faire fignifier
route autre chofe que l'Agneau Pafchal,
il eft bon de voir les interprétations for-
cées qu'il a données au premier jour des
Azymes , dont les trois Evangéliftesont
parlé , comme ayant donné occafion à
la propoluion de la Pâque : Venit au-
tem d'us A-^ymorum. La difficulté eft
fur ce venit , au prétérit «Vô« , le jour
des Azymes ou des pains fans levain
arriva r & comment on peut accordée
avec se jour , qui écoit le 1$ du,moi&>
Dissertation XXIX. 467
ce qu'ajoutent les Evangéliftes , que
c'étoit alors qu'on immoloit la Pâque ,
qui néanmoins félon la Loi devoit s'im -
moler le 14. Venit autem dies A^ymo-
rum in qua neceffe erat occidï Pafcha,
Luc. 22. 7.
L'Auteur double avec les Rabbins ce
premier jour des Azymes ; il mec le
premier dans le 14 jour du mois 5 qu'il
fait commencer dès le foir du 1 3 , &c il
place le fécond ( il on peut parler ainfi
d'un premier jour , mais je ne puis
m'exprimer autrement fi je veux me
faire entendre ) il place , dis- je , le fé-
cond dans le 1 5 jour du mois , qui
commençoit dès la fin du 14. Le grand
jour folemnel des Azymes , dit-il p. 179,
étoit bien le quinzième , comme l'Ecri-
ture le dit , & cette folemnité duroit
fept jours.... mais puifque tout le 14
étoit employé à exterminer le pain levé...
que depuis une heure jufqu au foir la Loi
défendoit d'en manger fur peine de mort j
ce qui eft une idée des Rabbins j & que
les Docteurs ne le permettoient pas après
dix heures du matin ; ce jour pouvoit
fans doute p^ffer pour un jour d'Azy-
mes. Voilà deux premiers jours des Azy-
mes j l'un établi dans ces paroles du Lc-
vitique,c. 25, v. G. Le 1 5 jour du pre-
mier mois efl la feu des Axymts ; l'a a-
"* X'
Y v;
4^8 Dissertation XXIX.
tre fondé uniquement fur l'autorité des
Rabbins , & fur le fens chimérique
qu'ils donnent à cet endroit de l'Exod.
c. 1 1 , v. 15. In die primo non erit fer-
menturn In domibus vejlris : Des-le pre-
mier jour il ne fe trouvera point de le-
vain, dans vos maifons. Quiconque man-
gera du pain levé depuis le premier jour
jufquau fèprieme , périra du milieu
d'Ifra'èl. Car ce premier jour étoit le
1 5 du mois , comme il eft clair par le
Lévitique que j'ai cité. Ainfi il eft vrai
qu'il falloir avoir fait la recherche du
pain levé dès l'après-dinée du 14, & (i
Ton le veut ainfi , dès une heure après
midi. 11 eft vrai encore qu'il y avoit dé-
fenfe fous peine de mort d'en ufer dès
le foir qui ouvroit le premier jour des
Azymes , c'eft- à-dire dès le feftin Paf-
chal jufqu'au feptieme jour. Qu'a fait
l'Auteur ? Trop crédule aux préceptes
des Rabbins il a étendu la défenfe du
pain.levé jufqu'au tems de la recherche;
il veut,p. 179, que depuis une heure juf-
quau foir la Loi défende d'en manger
fur peine de mort ; parce que Maimo^-
nide y ce favant Rabbin , a entendu en-
ce fens l'ordonnance de l'Exode , In die
primo non erit fermentum. La Tradi-
diiion^ dit ce Rabbin , nous^ apprend, que
êfç grej/usr jour cjl le 1 4 de. Eifaru ak
Dissertation XXIX. 469
s'immoloit la Pâque. p. 175.
De-là l'Auteur ton conféquemment 1
£es principes p. 179 , compte huit jours
d'Azymes , ce qu'il tâche de confirmer
par Jofeph \Nous faifons , dit-il , la fête
des Azymes pendant huit jours, Antiq.
1. 2,c. 5. Et pour fauver la contradic-
tion avec un autre lieu où il dit que la
jeté des Azymes dure fept jours. Ântiq.
1. 3 j c. 10 _, l'Auteur dit que d«ms le pre-
mier paffage Jofeph parle félon la Tra-
dition , que dans le fécond où il parle
félon La Loi , il ne dit pas que la con.-
tume neùt pas augmenté le nombre des
jours Azymes, p. 1 80,
On demandera peut-être par quel in-
térêt l'Auteur quittant l'Ecriture qui
fixe fi expreiTement le premier jour des
Azymes au 1 5 5 l'avance d'un jour avec
les Rabbins ,&le transfère au 14. C'eft
qu'il prétend par là expliquer du 14 ce
jour des Azymes , dont parlent les
Evangéliftes , venit autem dies A^ymo-
rum : il le prouve par l'obligation qu'on
avoit d'y immoler la. Pâque, in qua
necejje erat occidi Pafcha ; & ce qui eft
admirable , il en conclud que Jefus-
Chrift n'a point fait la dernière Pâque.
Il demande feulement qu'on lui accor-
de en grâce que les Difciples , comme
cous, l'avons, vu 3 n'a vent parlé de la I ' i
47© Dissertation XXIX.
que 1 Jefus-Chnit qu'après lé Soleil
couché. C'eft-IA j dira-ton , route la
queition. N'importe , qu'on le lui ac-
corde ou non , il ne laiflera pas de rai-
fonner ain(i. Or ce foir étoit le com-
mencement du 14 & alors ce n'étoic
point encore le tems d'immoler la Pâ-
que; on nel'immoloit que le lendemain
entre 3 & 5 heures : ou ce foir- là en
étoit la fin , . & alors le 1 5 étant com-
mencé, la Pâqne étoit immolée, &: on
ne parloit plus que de la manger. Que
fi abfolument on ne veut pas lui accor-
der fa demande , & qu'on prétende que
Jefus Chrift envoya fes Difciples pré-
parer la Pâqne quarre ou cinq heures
avant le coucher du Soleil j alors quit-
tant les Rabbins , il prendra avec l'E-
criture le premier des Azymes des Evan-
géliftes pour le 1 5 du mois. Si on veut >
dit-il p. 25 1 , que Jefius-Chrijl en donna
Vordre avant le coucher du Soleil , il
faut aire que le 1 5 finififoit le Jeudi au
foir , & que par conféquent fi Notre-
Seigneur mangea l'Agneau P a fichai ^ ce
fût le fiei^ieme , ce qui ne fie peut pen-
fier. Et quelle néceflité y a-t-il que le
15 finiffe au foir du Jeudi f Pourquoi
ce foir ne pourra-t-il pas être la fin du
14 pour manger la Pâque au commen-
cement du 1 5 l C'eft^ dira-t-il ■> que les
Dissertation XXIX. 4-r
Evangéliftes appellent ce jour- là le pre-
mier des Azymes. Or il éroit fixé au
15 du mois. Oui félon l'Ecriture. Mais
ne nous avez-vous pas dit que les Rab-
bins avaient avancé le premier des Azy-
mes dans le 14 ? Je prends donc avec
vous au fens des Rabbins le premier
des Azymes marqué par les Evangé-
liftes \ 6c je prérensque le 14 entre midi
& une heure, Jefus-Chrift envoya fes
difciples préparer la Pâque qu'il man-
gea avec eux au commencement du 15.
Cela ne fe peut pas , dit-il , p. 2 5 iTcar
fui f que les apôtres ne fongeren-t à pré-
parer la Pâque que quand le premier
jour des Azymes fût commencé ; Venit ^
il faut dire l'une de ces deux c ho fes : ou
en prenant ce jour au fens R?bbinique
pour le 14, que Notre- Seigneur n or-
donna la préparation de la Pâque qu'a-
près que le jour de'fon immolation étoit
paffé , & dans le tems qu'il la falloir
manger , favoir à l'entrée du 1 5 ; ou ,fi
Von veut , qu'il en donna tordre avant
le coucher du Soleil , il faut dire , en
prenant le premier des Azymes au fens
de l'Ecriture pour le 1 5 , que le 15 fi-
niffoit y & que s'il mangea la Pâque y
ce fut le Jei^ieme. Mais l'Auteur ne
fourTrira jamais qu'en prenant avec les
Rabbins le premier jour des Azymes.
47* Dissertation XXIX.
pour le 14 j Jefus-Chrift aie ordonné la
préparation de la Pâque avant le cou-
cher du. Soleil j ni qu'en prenant ce jour
avec l'Ecriture pour le 1 5, Jeius-Cnrift
ait mangé la Pâque a l'entrée du 15.
Ainfi l'Auteur fuyant de foir en foir ,
& fe fauvant tantôt dans le premier jour
des Azymes au fens des Rabbins , ôç
tantôt dans celui de l'Ecriture , c'eft-à-
dire du 1 4 dans le 1 5 , & du 1 5 dans le
14 j il fe joue agréablement de fes ad-
verfaires , tk il échappe à toutes leurs
prifes. A ceux qui difent qu'0/2 etoit
dans le premier des Azymes félon les
Evangéliftes , quand les Difciples de-
mandèrent ou ils prépareraient la Pâque ,
p. 250 , il répond par le premier des
Azymes félon l'Ecriture , que Jl avant
le foir du Jeudi le 1 5 etoit commencé
quand le Soleil fut couché _, ce fut donc
le commencement du fei^ieme. Ainfi le
tems était paffé non-Jeulement d'immoler
la Pâque 5 mais même de la manger.
Mais à ceux qui fuppofent que les Apô-
tres s'adreflerent à Notre - Seigneur
avant l'heure où commençoit le 1 5 , il
répond félon le fens des Rabbins. Enfin^
dit-il , p. 252 , le premier jour des Azy-
mes j quel qu'il foit , étoit venu ; fi c'ejl
le 1 ^ étoït-il tems de fe préparer à faire:
la. Pa^ue î
Dissertation XXIX. 475
Tour ce jeu des paroles roule donc
fur l'équivoque de ce premier jour des
Azymes qu'il faut démêler ; & je m'en
vas faire voir aufli clair que le jour _, que
malgré les contes des Rabbins, il n'y
en a jamais eu d'autre que celui que l'E-
criture fixe au 15 du mois. Que les
Evangéliftes n'en ont parlé que dans le
fens de l'Ecriture , quoiqu'ils le défi-
gnent par l'immolation de la Pâque : Et
que Jofephn'en a point eu d'autre idée
que les Evangéliftes, quoiqu'il ait mar-
qué huit jours pour la fête des Azy-
mes.
§. XXXII.
Que les Juifs qui comptoient leurs jours
de fête d'un foira l'autre foir , comp-
toient les jours civils d'un minuit à
l'autre minuit.
On doit diftinguer avec les meilleurs
Interprêtes de l'Ecriture trois fortes de
jours parmi les Juifs j le 1 le jour na-
turel de 24 heures, qui dure depuis
un minuit jufqu'a l'autre j & c'eft celui
dont il eft dit dans la Génefe : Il fe
fit un jour du foir & du matin. Faclum
efl vefpere & mane dies unus. Le 2
eft le jour artificiel qui eft la durée du
474 Dissertation XXIX.
teins que le Soleil paroît fur l'horifon >
qui eft inégal ielon les lieux Se les fai-
lons. Le 3. eft le jour légal , ou le jour
de fête qui fe célébroit depuis un foir
jufqu'à l'autre \ Se c'eft touchant cette
forte de jours que Moïfea fait ce règle-
ment : A vefpera ufque ad vefperam
celebrabitis Sabbata veftra. Levit. c. 23 ,
v. 32. Dans le tems de l'Equinoxe le
jour artificiel duroit douze heures ; le
jour naturel commençoit 6 heures plu-
tôt , Se finifïbit 6 heures plus tard ; Se
le jour légal commençoit Se finilïoit 6
heures avant le jour naturel. Encore
donc que félon la Loi les Juifs célébraf-
fent leurs jours de fête d'un loir à l'au-
tre , néanmoins dans l'ufage public, Se
<%lnn [g J^n-aee commun , ilsfuivoient
la forme des Romains , qui commen-
çoient leurs jours à minuit j de les fi-
niffoient de même , comme nous i'ap-
prenons de Cenforin : J'expoferai , dit-
il , toutes les parties de la nuit & du
jour y & je commencerai par le munu'u ,
qui eft le commencement & la fin du jour
Romain : incipiam a noclc média _, quod
tempus piincipium & pojtremum eft diei
Romcnh Et il eft inoui dans toiue l'an-
tiquité Judaïque qu'ils ayent compté les
jours ordinaires ou naturels depuis le
coucher du Soleil jufqu'à l'autre. Cha-
Dissertation XXIX 475
que fête commencent dès le foir, mais
chaque foir ne commençoit pas un jour.
Pererius affure comme une chofe pref-
que indubitable , que ces trois fortes
de jours étoient en ufage parmi les Juifs}
& il fe vante 3 fi cela croit nécefTaire ,
qu'il en fourniroit plufîeurs exemples
& plufîeurs preuves tirées de l'Ecriture.
Il appelle jour naturel celui qui dure
d'un matin à l'autre ] & jour d'ufage,
celui qui dure d'une minuit à l'autre ,
quoique nous appellions aulîi jour na-
turel celui qui fe patte entre deux mi-
nuits. Prope certum efi , & j Jl id nunc
ageretur , multis ex empli s Scripturarum
multifque argumentis probari poffet^apud
Juddos fuiffe olim in ufu triplex genus
dicrum , dicm feilicet legalem à vefpera
ad vefperam , diem naturalem ab ortu
Solis ad ortum , diem ufualem à média
nocle ad medïam noclem. Peref. in Gen.
c. 1 , v. 5 . Voici quelques-unes dçs preu-
ves qu'il en pouvoit donner.
I. Si che% les Juifs . comme PAuteur
l'afïure p. 250, chaque foir eut toujours
commencé un nouveau jour , auili bien
les jours civils que les jours de fêtes _,
qu'étoit-il befoin de faire un règlement
pour faire commencer les jours de fete
dès le foir précédent , puifqu'il n'y au-
roit eu en cela rien de particulier y &
47^ Dissertation XXIX.
que tous les jours auroient toujours
commencé par le îoirr* Qui ne voit que
cette Loi j A vefpcra ad vefperam cele-
brabitis Sabbata vejlra , eft une excep-
tion à la forme ordinaire de compter
les jours , & qu'elle avertit les Ifraclites
de commencer les jours de fête par le
coucher du Soleil , & de les finir de
même , & non par le minuit comme les
jours ordinaires ? C'eft par cette raifon
que l'Eglife n'a point preferit d'autres
termes pour le commencement tk pour
la fin des jours de jeûne , parce qu'elle
fuit en cela la forme des jours ordinai-
res > qui commencent & finirent à mi-
nuit. 11 eût donc été aufli inutile de
dire : Vous célébrerez les fêtes d'un foir
à l'autre comme de dire : Vous jeu-
nere^ d'un minuit à l'autre minuit , fi
comme nos jours font bornés par deux
minuits , ceux des Hébreux l'eulTent été
par deux foirs.
II. Lorfqu'on comptoit les jours ,
foit par les nombres cardinaux un, deux,
trois , &c. foit par les ordinaux , le pre-
mier , le fécond , le troifieme , on ne
les comptoit pas d'un foir à l'autre \ ce
qui auroit fait fouvent un fens fort ridi-
cule. Quand Abraham alla immoler fon
fils fur une montagne, il partit de grand
matin , fummo marie j il marcha deux
Dissertation XXIX. 477
jours , & dès le 3 . jour , levant le yeux ,
il vit cfe loin le lieu du facrifice. Peut-
on prétendre avec quelque couleur que
ce commencement du 3. jour fut le cré-
pufcule du fécond , où les objets loin-
tains difparoillent de plus en plus & fe
perdent dans les ténèbres ? Moïfe aver-
tit les lfraclites de fe tenir prêts pour le
3. jour, parce que ce jour-là Dieu de-
voir defcendre à leurs yeux fur le Mont
Sinaï pour leur publier fa Loi. Auffi-
tôt que le 3 . jour fut venu , &c. Quel
étoit ce jour ? On s'imaginera peut-
être que cela fîgnifie , Auffi-tôt que le
Soleil fe fut coucké ', &c. mais on feroit
bien-tôt redreflfé parla fuite, qui porte,
& que l'aurore commença à paroître :
Jamque advenerat tertius aies & mane
inclaruerat.
1 1 1 . Les termes à* hier _, aujourd'hui
& demain , font des expreffions du jour
qui a précédé , du jour préfenr & du
jour fuivant : or ils font diftingués non
par les divers foirs \ ce qui feroit encore
un fens fort extravagant , mais par les
divers minuits , comme par leurs bor-
nes naturelles. Le jour d'hier eft celui
qui a précédé le dernier minuit. Au-
jourd'hui eft le jour qui depuis le der-
nier minuit durera jufqu'au minuit pro-
chain. Le jour de demain eft celui qui
478 Dissertation XXX..
commencera à minuit prochain & du-
rera jufqu'à l'autre. Un feul exemple
fuffira pour expliquer le premier & le
3. de ces termes. Moïfe ayant tué un
Egyptien qui maltraitoit un lfraëlite ,
fortit encore le lendemain pour vifiter
les frères ; Et egrejus die altero. Exod.
c. 2 , .1 2 , & ayant repris un Hébreu qui
en frappoit un autre , l'agrelTeur lui dit
infolemment : EJl-ce que tu me veux
tuer comme tu tuas hier F Egyptien ? Il
efl donc certain que la féconde fortie
de Moïfe &c cette réponfe infolente de
l'Hébreu arrivèrent le même jour , &
comme je le fuppofe dans l'efpace de la
première heure après le Soleil couché.
Peut- on s'imaginer férieufement que
cette fortie & cette réponfe fe puitTenc
rencontrer dans le même jour naturel
où Moïfe avoit tué l'Egyptien ? Que le
texte qui porte que Moïfe fortit le len-
demain , peut fignifier qu'il fortit après
le Soleil couché , deux ou trois heures
après avoir fait ce coup f Et qu'alors
l'Hébreu lui reprocha qu'hier il avoir
tué un Egyptien , c'eft-à-dire , à trois
ou quatre heures après midi ? Cela e(l Ci
chimérique , que j'aurois honte de l'at-
tribuer à l'Auteur. C'eft néanmoins une
fuite naturel! : de ce principe : On fait
que les Hébreux ccmmencoient leurs
Disse rtation XXIX. 479
jours au coucher du Soleil _, p. 3 1. Car,
félon lui , le crépufcule qui fuivit la
mort de l'Egyptien donna nai(Tance à
un nouveau jour. Ainfi ce crépufcule
pouvoit être ce lendemain oùMoïfefor-
tit pour la féconde fois ^ &c l'après-midi
précédent fut peut-être ce jour d'hier
où il tua l'Egyptien , ce qui eft du der-
nier ridicule.
IV. On ne peut fouhaiter de preuve
plus expreflfe de cette diftin&ion des
jours de Fête 5c des jours naturels, que
Tufage qu'on fuit en Italie j car encore
qu'on y commence à compter les heures
par le coucher du Soleil , les 6 heures
néanmoins devant minuit appartiennent
au jour précédent, & le jour fuivanc
ne commence qu'à minuit. Le Diman-
che de Pâque ne commence pas le Sa-
medi au foir à la première heure de
nuit , autrement on quittèroit le travail ,
8c on romproit le jeûne & l'abftinence
du Carême ) mais il commence à mi-
nuit , qui eit tantôt à la 4 heure de
nuit , tantôt à la 6 , & tantôt à la 8 ,
félon les diverfes faifons de l'année. Il
en étoit de même de l'ufage des Juifs ;
la Fête commençoit dès le foir , mais
les jours alloienc toujours leui rrain or-
dinaire, 6c fe comptoient d'un minuit
à l'autre. Ainfi c'eft un abus d.QS termes
4§o Dissertation XXIX.
de dire avec l'Auteur , p. 112. Le mois
Pafchal commence le foir du 10 Mars,
Cela eft: vrai de la Fête de la Néomenie,
qui étoit attachée au premier jour du
mois , parce que toutes les Fêtes avan-
çaient dans le jour de leur veille , de
tout le tems qui s'écoule entre le cou-
cher du Soleil & minuit j mais cela
n'eft pas vrai du premier jour du mois
Pafchal ; il commença à minuit comme
tous les autres , de on ne trouvera point
qu'aucun Auteur ait parlé autrement.
V. Les trois parties du jour naturel
font le matin , le midi & le foir j le
matin comprend les heures depuis mi-
nuit jufqu'au lever du Soleil. Nous di-
fons fort bien à deux ou trois heures du
matin. Le foir s'étend depuis le cou-
cher du Soleil jufqu'à minuit , & l'on
ditaufli à neuf, à dix , à onze heures
du foir. Le midi eft juftement le milieu
du jour également éloigné de l'un Se
de l'autre minuit ; cette diftinction eft
plus ancienne que la divifion du jour
en 12 heures j qui au rapport de Cen-
forin , a été ignorée à Rome pendant
trois cens ans depuis fa fondation , ÔC
n'a été connue , félon Calvifius , que
l'an du monde $666 & 282 avant Je-
fus Chnft. La première fois que l'Ecri-
ture en fait mention , c'eft dans IHi-
ftoire
Dissertation XXIX. 481
ftoire de la guérifon d'Ezéchias , lorf-
que l'ombre du ftyle de l'horloge d'A-
chas rétrograda de dix degrés ou de dix
lignes. Mais la diftintrion du joui eu
matin , midi & foir eft de tous les tems ,
de tous les Pays, de toutes les Nations.
Elle eft marquée dès la création : du
fuir qui fuccéda au jour , & du matin
qui fuccéda à la nuit , il fe fit le pre-
mier jour ; Faclus eft ve/pere & marie
dies primus. La Vulgate porte que Dieu
fe promenoit dans le Paradis terreftre
après midi : Audiverunt vocem ambu-
lantis ad auram poft meridiem. Le midi
eft marqué dans la Genefe, c. 43 , v. 16 ,
comme le tems du repas qui le fait au
milieu du jour; & c'eft ce que porte
rétymologie de Meridies quafi médium
dïci. Cependant on nous veut perfuader
que cela n'étoit point en ufage parmi les
Hébreux \ mais que par un renverfe-
ment fans exemple _, le foir étoit le
commencement du jour _, qu'ainfi le
matin en étoit le milieu; le midi le
troifieme quart, &: un fécond foir la
fin. Qui croira un Ci grand paradoxe ?
VI. Comme les Juifs du tems de
Jefus-Chrift étoient fournis aux Ro-
mains , ils ne pouvoient s'empêcher d'a-
voir commerce dans le Civil & dans la
Police avec des gens qui étoient conti-
Tome IV, X
482 Dissertation XXIX.
nuellement mêlés avec eux. Il falloit
donc que dans les actes publics ils comp-
taient les jours de la même manière.
Or les Romains comptoient les jours
d'un minuit à l'autre , les Juifs les comp-
toient donc ainfij & quand ils auroient
eu ( ce qui n'eft pas ) quelque autre ufa-
ge avant la conquête de leur Province
par les armes de Pompée , ils auroient
été contraints, par la néceflîté du com-
merce , de le quitter pour celui de leurs
vainqueurs : Car quelle brouillerie
eut-ce été, fi parlant par exemple à 8
heures du foir d'une action qui fe feroit
faite quatre heures entières auparavant,
un Romain & un Juif appelles en té-
moignage , euiTent rapporté ; le premier ,
qu'elle s'étoit faite ce jour -là même à
la dixième heure ; ôc le fécond, le jour
précédent à la vingt-deuxième heure ?
Qu'auroit-on pu penfer, finon qu'ils
euflent parlé de deux actions différentes ?
C'eut été introduire parmi les Juifs Se
les Romains une conrulion a peu près
femblable à celle qui arriva à la Tour
de Babel.
VII. Le nombre de l'heure où arrive
un fait hiftorique détermine infaillible-
ment la nature du jour ; parce que la
première heure en détermine le com-
mencement , que les autres eu font la
Dissertation XXîX. 48 5
durée ; & la dernière, la fin : Sur quoi
on peut faire ce raifonnement fur les
paroles de l'Auteur. Les Juifs ont pris
des Romains la manière de compter
les heures du jour. Car , dit-il , Traie
hi/i, p» 34, che\ les Juifs , comme che^
les Romains _, la première heure fe comp-
toit au lever du Soleil \ midi étoit la
fixieme , & la neuvième répondoit à
crois heures d'après midi. En effet tou-
tes les heures qui font marquées dans
faint Jean comme la dixième au c. 1 , v.
34, la fixieme du c. iv, v. 6, & du c.
xix , v. 1 4 , & la dixième du c. iv , v. 5 z ,
fe comptent depuis le lever du Soleil.
Les Juifs ont donc aufli emprunté des
Romains la manière de compter leurs
jours , c'eft- à-dire , de les commencer
& de les finir. Or les Romains divi-
foient la nuit en 4 veilles , & le jour
artificiel en 1 2 heures, dont la première
étoit au lever du Soleil , & la dernière
à fon couchant ; ce qui n'empêchoic
point que le jour naturel ne commençât
a minuit 3 &c ne finît de même. 11 en
étoit donc ainfi de l'ufage des Juifs , 8c
il n'y a point de raifon pourquoi ils au-
roient imité les Romains en un points
ôc les auroient abandonnés en l'autre.
VIII. L'Auteur de l'Harmonie pré-
tendra peut-are que les Juifs n'ont pris
Xij
484 Dissertation XXIX.
des Romains que les heures du jour ar-
tificiel ôc les veilles de la nuit , & nul-
lement les jours naturels qu'ils com-
mençoient toujours après le coucher du
Soleil. Que dira-t-il donc. Ci on lui
trouve un jour qui continue fous le mê-
me nom , non-feulement après le So-
leil couché , mais plufieurs heures dans
la nuit fuivante f C'eft le Dimanche de
la RéfurrecHon de Jefus-Chrift , que
faint Jean appelle le premier jour de la
femaine , au foir duquel Jefus-Chrifl:
s'apparut aux Apôtres : Cum ferb effet
die ïllo una Sabbaïorum.
Et afin que l'Auteur ne dife pas en
Tair que c'étoit le premier foir qui pré-
cède le coucher du Soleil , il en doit
juger par cette fuite d'actions qui fe
firent ce foir-là même. Les deux Difci-
ples qui allèrent à Emmaiis y arrivèrent
fî tard , qu'ils fe fervirent de cette rai-
fon pour y arrêter Jefus qu'ils prenoient
pour un voyageur inconnu , fuppofant
que la nuit qui approchoit ne lui per-
mettoit pas de palîet outre : Jam advef-
perafât & inclinata ejl elles. Ce qui
fait voir pour le moins que le Soleil
étoit tout prêt de fe coucher. Depuis
on leur prépara à manger, ils fe mirent
à table , &c après y avoir demeuré quel-
que tems , ils repaient le chemin de
Dissertation XXIX. 385
Jérufalem où il y avoit 60 ftades , c'eft-
à-dire , deux grandes lieues & demie y
que des gens de pied comme eux ne pou-
voient faire commodément qu'en plus
de deux heures. Lorfqu'ils arrivèrent,
quelques Difciples racontoient aux au-
tres l'apparition de Jefus-Chrift à Pier-
re : Enfuite ils firent le récit de tout ce
qui leur étoit arrivé dans le voyage
d'Emmaiis. Tous ces difcours deman-
doient du tems} & lorfqu'ils parloient
encore , dum h<zc loquuntur, Jefus-Chrift
s'apparut aux Apôtres.
En vérité, fi l'Auteur prétend encore
que tout cela fe fit dans le premier foir,
il faut que comme un autre Jofué il
arrête le Soleil pour l'empêcher de fe
coucher. Car dans le cours ordinaire il
étoit impofiible que cette longue fuite
d'actions fe pût palfer dans la duré du
premier foir, à le commencer au mo-
ment où les deux voyageurs dirent à Je-
fus-Chrift qu'/V étoit tard y & que le
jour étoit fur fon déclin. Cependant l'E-
vangélifte nous dit que cette apparition
de Jefus-Chrift qui arriva cette nuit-là,
commencée de deux ou trois heures , fe
fit le foir du premier jour de la femaine :
Cum fcro effet die illo una Sabbatorum
venït Jefus , &c. Alors donc ce premier
jour duroit encore 5 heures après le So-
X iij
4§t> Dissertation XXIX.
leil couché , & le fécond n'étoit pas
commencé j & par conséquent chaque
jour ne commençoit pas après le cou-
cher du Soleil j autrement faint Jean
auroit daté cette apparition du fécond
jour de la femaine : Cùm fero effet die
altero Sabbatorum. Si l'Auteur de l'Har-
monie ne fe rend pas à cette raiion , je
ne fais plus rien qui le pui(Te faire re-
venir de fes anciens préjugés.
§. XXX11I.
Conféquences des jours civils qui fe
comptent d'un minuit à l'autre. Nul"
lités de tout ce qu allègue V Auteur
pour les compter de foir en foir. /.
Conféqucnce,
On peut tirer de-la plufieurs confé-
quences, qui ferviront à démêler toutes
les équivoques qui fe mêlent dans cette
matière.
La première eft que tout ce qu'allègue
l'Auteur , p. 48 & 49 , pour fixer le com-
mencement des jours au coucher du So-
leil , eft nul de toute nullité & tombe de
foi- même. Dans tout le rejle de l'Ecri-
ture , dit-il , p. 49 , quand il eft queftion de
compter les jours l'on commence par le
foir. Les preuves qu'il en donne font
toutes tirées des jours légaux > du re-
Dissertation XXIX. 3 87
glement qu'en fair le Lévitique , c. 2 3 , v.
3 2 , & que j'ai cité ci-deiTus , du repos
du Sabbat , qui commencent le Ven-
dredi au foir ; de routes les autres céré-
monies Juives, où il failoit obferver un
certain nombre de jours. Et quoi n'y a-
t-il donc que les jours de fêtes ou de
cérémonies qui foient comptés dans l'E-
criture .? E(r ce qu'Abraham commença
après le Soleil couché Ton voyage de la
Montagne de Moria, & que ce fut dans
le 3 crépufcule qu'il la découvrit ? Je-
fus-Chrift partit pour la Galilée le len-
demain du jour qu'André lui amena fon
frère, & il arriva le 3 jour à Cana où
l'on l'invita à des Noces : Ce lendemain
jour de fon départ, étoit-ce encore l'en-
trée de la nuit? Goliath renouvella pen-
dant 40 jours fon défi à l'armée d'If-
racl : Voilà des jours bien comptés.
Faut - il croire qu'il le commença Ôc
qu'il le continua toujours au coucher
du Soleil , comme fi le tems de la nuit
étoit fort propre pour le combat , ou
qu'il eût voulu fe battre aux flambeaux.
Mais à quoi eft-ce que je m'amufe? Il
y a peut-être plus de cent paflages dans
l'Ecriture où les jours, je dis les jours
communs , font comptés , & je défie
l'Auteur d'en citer un feul où les jours
fe comptent de foir en foir.
X iv
4S8 Dissertation XXIX.
Il eit vrai que l'Auteur femble en-
core objecter le pafïage de la Genefe,
le foir & le matin firent un jour : com-
me li le foir marqué devant le matin
donnoit commencement à la journée ,
mais cela prouve tout le contraire; car
ils font marqués comme les deux bor-
nes du jour ôc de la nuit qui précédè-
rent , & le fens de ce partage efl: que
le foir qui termina le jour artificiel , &
le matin qui termina la nuir fuivante
firent le premier jour naturel.
Aufli la raifon fur laquelle il fonde
ce commencement du jour par le loir,
me paro:c incompréhensible , parce, dit-
il , après un Auteur Ai abe \ que les Ara-
bes & les Turcs comptent leurs mois de
la première Phafe ou apparition de la
Lune p. 48. Cefi le foir quelle p a-
TOit pour la première fois. Les Juifs qui
commencoient leurs mois comme les Ara-
bes à la première Phafe de la Lune , com-
mencoient auffi le jour au coucher du So-
leil. A ce compte les jours feronr lu-
naires aufiï-biep que les mois } car fi le
mois commence par la première appari-
rion de la Lune j il faut que le premier
jour y commence aufli , puifque chaque
mois commence par fon premier jour.
Autrement fi le mois commençant par
le premier croilTant vifible , le jour ne
Dissertation XXIX. 4S9
commençoir qu'après le Soleil couché,
il fe trouveroit que le mois commence-
roit plufieurs heures avant fon premier
jour, puifque le premier croiffant pa-
roit quelquefois une ou deux heures a-
vant le coucher du Soleil. Or qui a ja-
mais entendu parler de jours lunaires,
dont le premier commence le foir à la
première apparition du croiffant ? Les
autres commenceront-ils au même point
que le premier f Non , fans doute , mais
environ trois quarts d'heure plus tard
en fuivant le cours de la Lune. Seront-
ils chacun de 24 heures comme les
jours folaires , quoique le premier ait
commencé avant fon coucher? Toutes
ces idées font nouvelles 6c inouies dans
l'ulage public. 11 eft conftant que parmi
les Juifs les jours étoient folaires, c'eft-
à-dire, fe regloient par le cours du So-
leil de non par le cours de la Lune, qui
change toujours. Et lorfque la Loi
commandoit d'immoler la Pâque le 14
de Nifan au foir _, ces jours-là fe dé-
voient compter par le cours du Soleil,
ad vefperam Jup. Solis. Autrement
l'Auteur ne trouveroit pas fon compte
pour le jour où les Juifs firent la Pa-
que. Le mois Pafchal , dit-il , p. 1 1 2 , 1.
penult. &c p. 1 1 3 , commencera le foir du
zo j compte^ de-là 14 jours vous trou»
X v
490 Dissertation XXIX.
yere\ que le 14 commença le 1 Avril
au foir. Il fait tous ces jours folaires
de 24 heures, puifqu'il les fait com-
mencer au foir, ôc bien lui en prend j
car s'il les regloit par le mouvement de
la Lune , on trouveroit que fi le mois
Pafchal commença à la première Phafe
le 20 Mars à 6 heures & demie diï
foir, le 14 commença le Jeudi 2 Avril
à 5 heures du matin 42 minutes, & le
1 5 le Vendredi à 6 heures du matin
36 minutes. Ainfi contre fon fyftême
tout le Jeudi auroit été le 14, &c le foir
eût été le tems légitime d'immoler la
Pâque , comme firent les deux députés
de Jefus-Chrift , & tout le Vendredi
auroit été le 1 5 ou le jour de la Fête des
Azymes, qui commençant dès le Jeudi
après le coucher du Soleil , auroit été le
tems marqué par la Loi pour manger
la Pâque , comme il fit avec fes Difci-
ples.
Mais fi les jours , me dira-t-on , font
réglés par le cours du Soleil,, comment
les mois qui font compofés de jours
peuvent- ils être lunaires f C'eft que la
Lune qui ne fait pas les jours par fon.
mouvement, ne laiffe pas de leur don-
ner par fes diverfes Phafes ou appari-
tions le rang qu'ils doivent tenir dans
le mois depuis une nouvelle Lune juf;
Dissertation XXIX. 49 1
qu'à l'autre : le jour où elle arrive eu:
le premier , fauf à examiner (i elle fe
doit compter dès la conjonction de la
Lune avec le Soleil , ou dès la première
Phafe, ou li elle eft arrivée avant ou
après midi.
§. XXXIV.
Que le jour de Pâque & le premier jour
des Azymes entrant l'un dans Vautre ,
ils fe communiquoient mutuellement
leurs noms. Que le jour de Pâque né-
toit point Fête. Que le foir du 13 , le
pain levé n étant ni défendu ni dé-
truit j Jefus-Chrifl auroit pu s'en fer-
vir dans rEuchariflie. II. III. IV*
Conféquences.
La II. Conféquence qui fe tire de la
diftinction des jours de Fête ou légaux,
& des jours Civils de Tufage ordinaire,
eft que fans doubler avec les Rabbins
le premier jour des Azymes , on peut
expliquer dans un fens fort naturel le
texte des trois Evangcliftes , qui porte
que c'étoit le jour où fon immoloit la
Pâque _, & où félon la Loi il falloit im-
moler la Pâque. Je prétends avec l'Au-
reur, que ce jour de l'immolation ctoic
Je 14 du mois Nifan , & contre lui
Xvj
49 i Dissertation XXlX.
que ce premier jour des Azymes étoîc
le 1 5 , quoique l'immolation & les Azy-
me s (oient attribués au même jour par
leslivangéliites : Comment cela fe peut-
il accorder ? Je fuppofe donc , dira-
t-on , que le 14 & le 1 5 étoient le mê-
me jour. Cela paroît en effet tenir du
Paradoxe , Se rien cependant n'eft plus
aifé à comprendre. Si on vouloit fe fou-
venir de ce qu'on fait bien, il ne fe-
roit pas difficile d'en trouver la raifon :
mais puifqu'on n'en prend pas la peine,
je réponds que cela fe fait par la commu-
nication dçs noms entre deux jours qui
s'entrefuivent immédiatement, & qui,
félon divers termes , avancent l'un dans
l'autre; ôc cette communication eft fon-
dée fur cette figure très-familiere dans
le langage 'qui appelle un tout 3 comme
efl: un jour, du nom d'une de [qs parties
plus remarquable que les autres.
A proprement parler le 14 du mois
de Nifan eft le jour de Paque où Ton
immoloit l'Agneau, & le 15 eft le pre-
mier des Azymes où on le mangeoit :
mais comme le 1 5 étoit Fête , il com-
mençoit dès le foir du 14, après le So-
leil couché , & que c'étoit alors le tems
de la manducation : ainfi ces deux jours
avançoient l'un dans l'autre de fix heu-
re:. Le jour de Paque entroit dans 1»
Dissertation XXIX. 49*
Tète des Azymes depuis le coucher du
Soleil jufqu'à minuit , de le jour des
Azymes éroit, pour ainfi dire , enclavé
dans les fix dernières heures du jour de
Pâque. Faut - il donc s'étonner fi ces
deux jours fe communiquoient récipro-
quement leurs noms , & fi ce dernier
quart du 14 jour, célèbre par la man-
ducation de l'Agneau Pafchal & des
Azymes , & par le commencement de
la Fête, donnoit quelquefois par ana-
logie le nom de jour des Azymes à tout
le 14 jour ï L'abrègement des expref-
fions li naturel à toutes les langues y
demande cela néceiïairement, & on n'a
qu'à contidérer l'ufage de la nôtre pour
en trouver cent exemples.
En voici un tout femblable parmi
nous. Le jour qui précède une Fête fo-
lemnelle , s'appelle dès le matin la Vi-
gile : il n'y a pas grand rapport entre
ces deux termes de Vigile &c de jour r
puifqu'on ne veille proprement que pen-
dant le tems deftiné au fommeil, c'eft-
à-dire 5 pendant la nuit : cependant la
veille qu'on faifoit a Jtrefois pendant une
partie de la nuit , a fait donner le nom
de Vigile à tout le jour civil qui précè-
de quelque Fête. Y a-t-il rien qui ref-
femble mieux à un jour auquel l'ufage
des Azymes j qui commence à fou der-
^94 D ISSERT ATI O K XXlX*
nier quart , communique le nom du
jour des Azymes ?
Mais fouvent il nen faut pas tant,
une feule action remarquable , à quel-
qu'heure qu'elle fe fa (Te , fuffit pour
qualifier tout le jour. On dit le jour dut
Jugement, un jour de confeil , un jour
de fpectacle , un jour de Proceflion , Se
cent autres femblables , qui s'appellent
d'une action qui fe doit faire à quel-
qu'une de leurs heures. Pourquoi donc
les Evangéliftes n'auroient - ils pas pu
dire du 1 4 jour , que le premier jour des
Azymes arriva , ou il falloit immoler la
Pâque \ puifque l'immolation & la man*
ducation de la Pâque , Se Tufage des
Azymes arrivoient dans la durée du 14
jour, je dis de ce 14 jour qui duroic
jufqu'à minuit? Pourquoi Jofeph n'au-
roit-il pas pu dire : Nous faifons la Fê-
te des Azymes pendant huit jours ;
puifque le premier ufage s'en faifoit dès
la veille depuis fix heures du foir où
commençoit la Fête, jufqu'à minuit ? Or
cette veille jointe avec les fept jours
faifoit huit jours d'Azymes. Il pouvoir
aufli dire fans aucune contradiction : Le
lendemain de la Fête de Pâque _, fa-
voir le quinzième , on fait la Fête des
Azymes qui dure fept jours. Antiq. 1.
3 , c io; parce que dans, ce partage il ne
Dissertation XXIX. 495
confidere la Fête des Azymes que com-
me le lendemain de la Fête de Paque*
Ainfi il ne comprend pas celle-ci dans
celle-là; car certainement le lendemain
ne commence pas à 6 heures du foir 3
mais à minuit : or depuis minuit il n'y a
plus que fept jours d'Azymes. C'eft par
la même raifon qu'Origene compte le
jour qu'on immoloit l'Agneau Pafchal ,
pour un des fept jours où Ton uloic
des pains fans levain j parce que cet ufa-
ge commencent à la fin de ce jour-là.
Ce que l'Auteur lui impute à une
grande ignorance.
J'avoue donc fans peine à l'Auteur
p. 183, que les Ap 'êtres qui ont écrit
lorfque Jofeph vivoit , ne pouvoient pas
parler un autre langage que lui , & qu'ils
ont pu appeller le 14 du premier mois le
premier jour des Azymes : Mais ce n'eft
pas par ces raifons chimériques dts Rab-
bins, p. 179, que tout le i^étoit em-
ployé à exterminer le pain levé j que dès
le foir du 1 3 3 ou commencoit le 14, on
en f ai f oit la recherche _, qu'on le brûloit
à midi , que depuis une heure jufquau
foir , la Loi defendoit d'en manger fur
peine de mort ; qu enfin les Docteurs ne
le permettoient pas après dix heures du
matin» Ce font des imaginations creu-
(e§ & des rêveries dont il n'y a aucuQ
4ç)6 Dissertation XXIX.
vertige dans l'Ecriture ni dans l'Hiftoi-
re , & qui font nées pltifieurs fiecles
après les Apôtres dans la tète des Rab-
bins qui ont voulu fe donner à eux & aux
autres Juifs des airs de fainteté qui ne
leur coutoient guère. Les Apôtres n'ont
jamais confidéré le premier jour des
Azymes que dans le fens de l'Ecriture
qui l'attache au 1 5 du premier mois :
mais parce que la Fête en commence dès
la 1 9 heure du 1 4 , c'eft - à - dire , a 6
heures du foir , ils ont pu étendre à tout
le 14 le nom du premier jour des Azy-
mes, par cette figure qui donne à un
tout le nom de fa partie. Dénomination-
qui ne double point ce premier jour
comme les Rabbins font ridiculement,
mais qui en avançant la Fête dans la
dernière partie du jour précédent , fait
que cette partie de celui-ci en étend aufïl
le nom à celui-là tout entier.
La III. conféquence eft que le 1 4 jour
n'étant pas réellement le premier jour
des Azymes , mais feulement par une
extenfïon de nom , qui de fa quatrième
partie fe communiquoit à tout le jour;
ce 14 n'étoit point Fête dans fes trois
premières parties, c'eft- a-dire , depuis
minuit jufqu'à 6 heures du foir : ( Car,
comme je l'ai dit, depuis ces 6 heures
la grande Fête des Azymes cormnen-,
Dissertation XXIX. 497
çoir. ) Ainii on ne peut nullement dite
qu'il commençât dès le 13 au coucher
du Soleil ; mais il fuivoit la règle des
jours ouvriers ou ordinaires, qui com-
mencoient a un minuit &c tiniiïoient à
l'autre.
Il eft vrai que l'Auteur de l'Harmo-
nie met d'abord fans reitriction le 14
au rang des Fèces; cV ce qui eft merveil-
leux , après avoir cite le Livre des Nom-
bres, c. 28 , v. \G , qui attribue feule-
ment la Pâque au 14 du premier mois,
6v la Fête folemnelie au 15, pour infi-
nuer que le 1 4 riétoit point Fête : Men-
fc mit cm prhno , 14 die menfis _, Phafe
Domini erit & 1 5 die folemnitas. Tr.
Hift. p. 186, il ne laifte pas d'aiTurer
que le 14 ctoit Fête. Dieu le dît dans
V Exode _, dit- il j Vhoftie de la Fcte fo^
lemnelle de Pâque ne demeurera point
che^ vous jufqu'au matin. 11 cite encore
Ezcchiel ck Jofeph, qui appellent la Pâ-
que une Fcte : mais pour l'Exode il ne
parle de la Pâque que dans le tems où
l'on mangeoit la victime , puifqu'il dé-
rend d'en garder aucun refte pour le len-
demain. Or il eft confiant que ce tems
de la manducation de l'Agneau Pafchal
ctoit Fcte; c'eft alors que commençoic
la Fcte des Azvmes. Ce palfage donc
ne touche feulement pas la queftion qui
498 Dissertation XXÎX.
eft, fi tout le 14 étoit Fête : De plus
cette dernière partie du 14 qui étoit Fê-
te , fufïit encore pour juftirler les ex-
preflions d'Ezéchiel &c de Jofeph , com-
me il eft aifé de voir.
L'Auteur s'objecte le filence de l'E-
criture touchant la Fête du 14, & la
défenfe du travail reftrainte au 1 5 , mais
1. fa réponfe ne fatisfait pas. Etoit- il
néceffaire , dit-il , que Dieu défendit les
œuvres ferviles dans le tems que les Juifs
étoient occupés de la folemnité de la Fâ-
que ? Si j'entens bien cette réponfe j elle
fuppofe que la Pâque étoit une Fête
folemnelle indépendamment de la dé-
fenfe des œuvres ferviles : cependant
c'eft cette défenfe même en partie qui
établit la Fête j c'eft donc comme s'il
difoit, p. 187, Etoit-il néceffaire que
Dieu fit la Pâque une Fête folemnelle ,
dans un tems où les Juifs étoient occupés
de la folemnité de la Pâque ? Ce qui fup-
pofe la queftion.
2. Je répons que, félon l'Auteur mê-
me, il n'y avoit que la 1 5 ou 20 par-
tie du peuple qui fût occupée l'après-
midi dans le Temple à la folemnité de
la Pâque. N'ctoit-il donc pas néce(Taire
de régler (i le refte du peuple pouvoit
ou non faire alors des œuvres ferviles ?
L'Ecriture ne le défend point j niais au
Dissertation XXIX. 490
défaut de l'Ecriture les Rabbins n'y ont
pas manqué. Ils ont excommunié par
toute la Judée ceux qui auroient fait
cet après-midi aucune œuvre fer vile. A
Dieu ne plaife qu'il eût ratifié dans le
Ciel ces cenfures téméraires , qui con-
damnoient ce qu'il ne condamnoit point:
il les faut ranger parmi ces fardeaux in-
fupporrables , dont Jefus - Chrift die
qu'ils chargeoient les épaules des hom-
mes.
3. Ceux même qui travailloient dans
le Temple à l'immolation de la Paque
ne reconnoifïoient point cette Fête pré-
tendue j ou ils la violoient (i elle étoit
effective j puifqu'ils y faifoient plusieurs
œuvres ferviles & incompatibles avec la
Fête. Jefus-Chrift l'a afïuré des Prêtres
qui facrifioient le jour du Sabbat, avec
cette différence que ce violement ne leur
étoit point imputé à péché : Sacerdotes
in Templo Sabbatum violant _, & Jine
cri mine funt.
4. Enfin l'Auteur avoue, que comme
cette folemnité ne fe faifoit que Vaprcs-
midi du 14, la matinée pouvoit être li-
bre. Je voudrois bien qu'il nous mar-
quât dans l'Ecriture quelque exemple
ou quelque ordonnance de ces demi-
Fêtes , qui ne commençoient qu'à midi :
car aujourd'hui on n'elt guère d'hu-
500 Dissertation XXIX.
meur à fe payer de l'autorité chancel-
lante des Rabbins. Je ne vois pas mê-
me qu'en cela il foit bon ménager de
fes intérêts, puifqu'en mettant le 14
au Vendredi , il objecte à ceux qui en^
font le 1 5 , c'eft-à-dire la Fête des Azy-
mes, tous les travaux 6V toutes les œu-
vres fervilès qui fe firent par les Juifs
pendant la Palîion de Jefus-Chrift , lui
qui tombe dans le même inconvénient.
11 lui eCt donc avantaeeux que tout le
14 ne foit point Fête, afin que les Juirs
ayent pu le 14 crucifier Jefus-Chrift
fans violer aucune Fête : mais enfin je
me contente de ce qu'il nous accorde
de ion bon gré , qui eft qu'il n'étoit
point Fête le matin _, ni à plus forte rai-
fon dès le foir du 1 3 , & j'efpere en dé-
cider toute cette queftion à l'avantage
de la dernière Pâque de Jefus-Chrift.
La IV. conféquence eft que le 14
n'ayant commencé qu'à minuit &c non
dès le foir précédent, parce que, de l'a-
veu même de l'Auteur > il n'étoit pas
encore Fête, ce foir-là précédent le pain
levé n'avoit point encore été ni recher-
ché ni détruit. Il étoit permis à tout le
monde d'en manger impunément à fou-
per y Jefus-Chrifl en mangea donc ci la
dernière Cène, parce qu'il n'y avoir
point encore de pain Azyme , & il celé-
Dissertation XXIX. 501
bra l'Euchariftie en pain levé _, contre
le fentiment de l'Eghfe Latine qui cé-
lèbre les iaintsMvfteres en pain Azyme,
parce qu'elle croie que Jefus-Chrill les
y a célébrés la première rois. Pourquoi
abandonner ainfi de gaieté de cœur aux
Schifmatiques un point dont nous dis-
putons avec eux , qui pour n'être pas
une matière de fchifme , ne lailTe pas
d'être très-important. On me dira que
ce point n'eft qu'un rite qui ne touche
point la foi : & comme du le Cardinal
Bona , La différence des rîtes ne peut
caufer de différence dans la doctrine. Je
l'avoue , mais cela ne regarde point la
queftion que nous agitons. Il y a bien
de ia différence entre condamner de
fchifme les Grecs , parce qu'ils em-
ployent le pain levé dans les Myfteres,
qui eft ce que ce Cardinal défend ; &
réfuter le fondement de cet ufage, qui
eft la fuppodrion que Jefus-Chrift s'eft
fervi de pain levé en inftituant l'Eu-
chariftie : Et c'eft ce que font tous les
jours les Docteurs Catholiques.
On m'avouera peut-être que Jefus-
Chrilf a pu fe fervir de pain Azyme.
Il ne fu Mît pas qu'il ait pu s'en fervir
pour jultiher la pratique de l'Eglife, qui
en cela n'imite pas ce que Jefus-Chiilt
a pu faire 3 mais ce qu'il a fait actuelle-
joi Dissertation XXIX.
ment. Voici donc comme l'Auteur dé-
montre ce fait : C'eft que ceux qui man~
geoient du pain levé lorfquc le 14
commencoit _, ne le faifoient que dans un
coin de la chambre _, prenant garde qu'il
nen tombât quelque miette _, p. 32.6, de
peur , fans doute 3 que les fouris ne
ï'emportafTent. Or nous ne voyons point
que Notre Seigneur ait inftitué l'Eu-
charifiie dans un coin de la chambre ;
mais il fe mit à table _, & il prit le pain
qui y étoit expofé. On ne peut pas rai-
sonner plus julte pour le compte des
Grecs. Cette raifon ne prouve pas feu-
lement que Jefus-Chrift n'a point infti-
tué l'Euchariftie en pain Azyme ; elle
convainc encore qu'il ne l'a pu faire ,
puifqu'il auroit dû pour cela s'alïujettir
au plus extravagant précepte qui foit ja-
mais forti de l'Ecole des Rabbins j ce
qui étoit impoflible à la Sagefle incar-
née.
Car fur quoi étoit fondée cette obli-
gation à tous ceux qui mangeoient du
pain levé le 13 après le Soleil couché,
de ne le manger pas au milieu de la
chambre ni à table, mais dans un coin
de la chambre , dans l'obfcurité , Se
comme à la dérobée. Etoit-ce pour n'a-
voir pas les yeux fouillés par la vue du
pain levé f Mais il étoit permis de voiç
Dissertation XXIX. 505
ce que la Loi permetcoit de manger : Si
les yeux euflent contracté quelque fouii-
lure par cette vue; combien plus les
mains, la bouche & l'eftomach enflent-
ils été fouillés par l'ufage ? D'ailleurs
cette précaution étoit fort inutile, puif-
que dans les coins aufli-bien qu'au mi-
lieu de la chambre , on foupoit à la clar-
té des flambeaux.
Etoit-ce donc pour empêcher qu'il
ne tombât des miettes de pain levé, ou
qu'étant tombées elles ne fuflent apper-
çues dans l'obfcurité par les fouris, qui
les auroient emportées dans leurs trous ,
inacceflibles à toute la fagacité des ex-
terminateurs ? Mais on voit au contraire
que rien n'étoit plus fur pour prévenir
ce funefte malheur , que de manger à
table le pain levé , fur laquelle il efl:
aifé de ramafler les miettes , ou s'il en
tombe quelques-unes, de les apperce*
voir dans le milieu , qui efl: l'endroit
le plus éclairé de la chambre , 6c de les
jetter dans le feu après les avoir balayées}
au lieu que dans des recoins obfcurs on
nepouvoit ni les voir ni les balayer exac-
tement , ni empêcher les fouris de les
emporter. S'il y a quelqu'autre raifon
de ce précepte Rabbinique , c'efl; à l'Au-
teur à nous la marquer ; car je fais de
bonne foi tout ce que je puis pour le^
504 Dissertation XXIX.
deviner routes : mais un Grec lui fou-
tiendra par avance que rien n'eu: plus
ridicule que ce précepte j que c'eft avoir
bien oublié tout ce qu'on fait des
mœurs & de la conduite de Jefus-Chriit,
pour s'imaginer qu'il y ait pu avoir
aucun égard , &: que il l'inftitution de
l'Euchariitie en Pain Azyme dépend du
poids cV de la valeur de cette raifon , qui
eft que le Pain qu il prit & qu'il bénit ^
nepouvoit pas être levé, parce qu'à cette
heure-là , c'eit-à-dire 24 heures avant
que Dieu défendît d'en ufer , & 16
heures avant la défenfe des Rabbins ,
on n'expofoit pas le Pain qui étoit levé ^
on le tenoit caché , p. 327. Non-feule-
ment Jefus Chriit n'a point célébré l'Eu-
chariitie en Pain Azyme, mais cela lui
a été impoiîible, parce qu'il n'eût pu
éviter le Pain levé que par une honteufe
fuperftition.
§. XXXV.
Qu'il s'enfuit que Jefus - Chrift a célébré
la dernière Pâque , puifquil Vavoit
exprejfément commandée. Providence
de Dieu dans la différence de la Tra-
dition d'avec la Loi touchant la der-
nière Pâque,
11 eft tems de conclure de tout ce
que
Disse rtation XXIX. 505
que nous avons établi jufques ici que
Jefus-Chrift a mangé la dernière Pâque
avec (es Difciples , une Pâque qu'il a-
voit fi exprehément commandée. On
me dira que la préparation qu'il com-
manda le Jeudi , n'étoit que pour le
lendemain, & qu'il ne l'anticipa d'un
jour que pour s'accommoder à l'igno-
rance de îes Difciples , qui ne fâchant
pas que le lendemain il devoit être atta-
ché à la Croix à l'heure qu'on immoloit
la Paque , & être couché dans le tom-
beau lorsqu'on la mangeroit , lui en
firent dès la veille la propofition.
Je réponds, comme j'ai déjà fait,
que les ordres exprès Se pofiufs qu'il
leur donna d'apprêter le fouper Palchai ,
ne peuvent s'accorder avec cette difli-
mulation qu'on lui attribue. Dire , allâr9
prépare^ - nous toutes chofes j afin que
nous mangions la Pâque : ce n'eft pas
feulement permertre aux Difciples de la
préparer , c'eft témoigner qu'on veut
la manger d'une volonté réelle £c effec-
tive \ & h on n'a pas cette volonté ,
on ne parle pas comme on penfe ; &
c'en: un défaut contre la fîncérité , dont
Jefus-Chrift la fouveraine Vérité étoit
incapable. Si donc les Difciples apprê-
tèrent la Paque, je demande qui em-
pêcha Jefus-Chrift de la manger avec
Tome IK Y
506 Dissertation XXIX.
€ux y ou s'ils ne l'apprêtèrent pas , je
demande qui les empêcha de lui obéir.
Je fuis très-perluadé qu'on ne peut rien
répondre a cela qui ne foit de la der-
nière foi'olefle, & qui ne tombe de foi-
même. Combien de fois, dit l'Auteur ,
avoit-il tenu un langage dont les Apô-
tres ne pénétrèrent le fens qu'après fa
mort ? Cela eft indubitable du dogme ,
6c des prédirions , dont fouvent les
métaphores obfcurciftoient le fens : mais
il ne leur a jamais fait de commande-
ment qu'il ne leur fût aifé d'entendre ,
ou qu'il ne leur ait expliqué au même
tems. Or qu'y a-t-il d'obfcur ou de fi-
guré dans celui - ci : Parate nobis Paf-
cha ut manducemus ? On ne dira pas ,
fans doute 5 que cette Pâque eft méta-
phoriquement l'Euchariftie ; car com-
me c'ell: la même dont il eft dit tout de
fuite : Et paraverunt Pafcha ; ce feroic
une grande abfurdité de dire que Je-
fus-Chrift leur commanda de préparer
l'Euchariftie , & qu'ils la. préparèrent.
Cette Pâque eft donc littéralement l'A-
gneau Pafchal.
Avant que de finir je ne puis omettre
ici une railon remarquée par Janfenius
de Gand , que c'a été une providence
particulière de Dieu , que l'année où
Jefus-Chrift devoit être immolé^ il fc
Dissertation XXIX. 507
foie trouvé deux jours de Paque , 8c
félon divers comptes, deux 14 jours
de la Lune ., un véritable j &: l'autre lé-
gitime félon la Tradition. Par ce moyen
Jefus-Chrift accomplit dans le premier
le facrifice de la Paque légale, & infti-
tua un nouveau facrifice 'y &c dans le
fécond il s'offrit foi-mème à Dieu , com-
me étant le vrai Agneau Pafchal. Ainfi
d'un coté l'immolation du vrai Agneau
répondit au figuratif, & de Pau are celle
de l'Agneau figuratif précéda le vérita-
ble. Or ces deux chofes ne pouvoient
s'accomplir que dans deux jours 14 de
la Lune , qui fe fuivoient immédiate-
ment : Les trois premiers Evangéliires
ont écrit ce qui arriva le premier , &
faint Jean ce qui fe paffa dans le fécond ,
pour répondre aux objections qu'on
pouvoit tirer des trois autres contre ion
Hiftoire.
Car on pouvoit lui demander com-
ment il fe pouvoit faire que Jefus-Chriit
ayant fait la Paque avec fes Difciples le
14 jour , conformément au rapport de
trois Evangéliftes, les Juifs l'eullènt pu
crucifier le lendemain 1 5 qui étoit la
plus grande Fête de l'année. Cela trouve
fa réponfe dans ce que faint Jean re-
marque , que c'étoit alors le jour de Li
vréfaration de la Pâque ; c'eft-a-dke
508 Dissertation XXIX.
pour les Juifs : Erat autem parafceve
Pafchii, Ce qu'il paroîr n'avoir remar-
qué que pour répondre à la difficulté
qu'on pouvoit tirer des autres Evangé-
liiles.
§. XXXVI.
Conclujîon. Combien il eft dangereux
de troubler les fentimens que FEglife
tient par tradition. Deux conditions
des nouvelles découvertes, La certi-
tude & V utilité.
Je finirai cette Differtation , qui n'eft
que trop longue , par cette réflexion ,
qu'il n'efl: pas avantageux de troubler
la porTeflion où elt l'Eglife depuis les
premiers fîecles , de certains fentimens
conformes aux expreffions de l'Ecriture,
8c qui font une partie de la créance des
peuples. On me dira que fi ces points
n'appartiennent point à la foi , de qu'ils
ne touchent point les mœurs, il a tou-
jours été permis d'en rechercher la véri-
té , ôc de propofer au public les nou-
velles découvertes qu'on y auroit pu
faire j parce qu'on ne preferit jamais
contre la vérité, & qu'étant un bien pu-
blic , on fait tort à la fociété civile ,
lorf qu'on la retient dans les ténèbres*
Dissert ati on XXIX. 5 09
Or la queftion Ci Jefus-Chrift: a fait la
dernière Pâque eft de ce caractère.
je ne fais déjà fi des pa(Tages de l'E-
criture 5 qui regardent une matière fort
importance , ne font pas une partie de
la foi , lorfqu'ils font expliques uni-
ment & en un même fens par toute la
Tradition des Pères de l'Eglife : Mais
quoi qu'il en foit , je voudrois mettre
deux conditions à cette recherche.
La 1. efb qu'il y ait quelque utilité dans
cette découverte qui récompenfe le trou-
ble que caufe la nouveauté. Or a quoi
fert d'apprendre fi tard, contre ce qu'on
a toujours cru , qu? Je fus - Chrift n'a
point fait la dernière Pâque/ Cela 11'eft
capable que de troubler des âmes foi-
bles qui croyent simplement que tout
ce que l'Eglife chanre eft vrai comme
i 'Evangile , ni que de donner lieu à des
efprits téméraires de fufpendre leur
créance pour des dogmes bien plus im-
portans , puifqu'on a découvert la fauf-
feté de ce qui avoit toujours pafle pour
véritable.
Cela fert , me dira-t-on encore , à
concilier faim Jean , qui nie cette der-
nière Pâque, avec les trois Evangéliftes,
qui femblent l'aifurer.
Mais comment faint Jean nieroit-il
une chofe dont il ne parle point : Or
Y lij
510 Dissertation XXIX.
quand la contradiction apparente con-
jifte en ce que trois Evangéiiftes aiTu-
rent formellement un point que le qua-
trième a iupprimé : ce n'eft pas une
conciliation recevable de donner la gène
aux trois pour les faire parler comme
le quatrième } mais c'eft ce que nous
examinerons ailleurs.
La i. condition eft, que cette nouvelle
découverte foit fi certaine & fi évidente ,
qu'elle accable, pour ainfi dire, l'efprit
de lumière. Car alors on peut dire qu'on
n'eft pas en état de fufpendre fon ju-
gement fur cette vérité , & qu'on en parle
farce qu'on a été perfuadé , Credidi
propter quod locutus fum : Mais lors
qu'on n'a pour l'appuyer que des conjec-
tures probables, la prudence & la cha-
rité obligent à fupprimer ce qu'on en
croit favoir ; & félon la règle que faint
Paul a faite pour ceux qui parlent des
Langues étrangères fans Interprète, on
n'en doit parler que pour Dieu 8c pour
foi -même : Si autcm non fuerit inter-
pres _, taccat in Fcclefia , fibi autcm lo-
quatur & Deo. i. Cor. c. 14. v. 28.
Les démonftrations font les interprè-
tes naturels des vérités inconnues ; fi
on'en manque, il vaut mieux les diiîî-
mnîer que de les produire. Car enfin ,
probabilités pour probabilités, les an-
Dissertation XXIX. ^ 1 1
ciennes qui font en poflelîïon de la
créance du public , valent mieux que les
nouvelles, qui n'étant pas plus certai-
nes, font plus^odieufes & plus choquan-
tes. Que fera -ce donc fi elles ne font
appuvées que fur de foibles conjectures ,
fur des fens de l'Ecriture forcés &: arbi-
traires, Cm de taux raifonncmens? Mais
qui en fera le juge ? Chacun croit avoir
fa raifon de fon coté f Aucun ne fe don-
nre le tort : Les deux partis font les
mes plaintes contre la préoccupation
des préjugés _, qui ferment l'efprit à
toutes les raifons contraires j 6c il n'y
en a point qui foient plus éloquens en
cette matière que ceux qui font le plus
entêtés de leur fyftême.
DISSERTATION XXX.
Joan. C. XIII. v. i. Antè diem
fejiwn Pafckce, &c. Concord.
c. cxxix.
A Près avoir établi le fait de la der-
nière Paque de Jefus-Chrilt , il
s'agit maintenant d'examiner en quel
tems il l'a faite *, C\ c'a été le mcme
tour que fgs Juifs , ou le jour précé-
Y iv
512 Dissertation XXX.
dent y enfin fi l'un anticipa la Fête ou
fi [qs autres la différèrent : & fur tour
cela le partage des opinions eft encore
plus grand que fur le fait , foit qu'on
ait égard aux motifs , qui d'abord pa-
roiffent à peu- près de même force j foie
qu'on regarde le nombre des opinans
qui fe trouve prefque égal de part &
d'autre. Car au lieu que dans la queftion
du fait, toute l-Egli(e,ou plutôt toutes
les Sociétés Chrétiennes font d'un côté,
& un petit nombre d'Auteurs de l'au-
tre , la plupart inconnus &: mal renom-
més j ici tout au contraire , les Auteurs
Catholiques font tellement partagés,
qu'à ne fuivre que l'autorité, on feroit
affez en peine à prendre parti. Les uns
enfeignent que Jefus-Chrifl: & les Juifs
firent la Pâque le même jour du Jeudi
au foir , & que le lendemain Vendredi ,
qui étoit la grande Fête des Azymes ,
Jefus-Chrift rut attaché à la Croix. En-
tre ceux qui les féparent ou qui met-
tent leurs Pâques en des jours différens,
les uns la font anticiper d'un jour par
Jefus-Chrift & par les Apôtres , & ils la
lui font célébrer a la fin du 1 3 jour de
la Lune 6v au commencement du 14; les
autres au contraire veulent que cette
année- là les Juifs pour profiter incef-
famment de l'occafion favorable qu'ils
Dissertation XXX. 5 1 3
avoient de faire mourir Jefus-Chrift ,
Payent différée jufqu'au jour du 15, &
qu'ils ayenr de même transféré au 16 la
folemnité des Azymes.
Toutes ces idées font fauffes j parce
qu'elles fuppofent que Jefus-Chrift 6c
les Juifs s'accordoient à compter de
même manière les jours de la Lune , Se
que par exemple fur la même nouvelle
Lune ils prirent le Jeudi pour le 1 3 , le
Vendredi pour le 14, & le Samedi pour
le 15. 11 n'en eft pas néanmoins ainn* ;
Jefus-Chrift tk les Juifs firent leur Pâ-
que , chacun dans le 14 qui répondoic
à lanouvelle Lune Pafchale qu'ils avoient
comptée. Le Jeudi fut le 14 pour Jefus-
Chrift & le Vendredi pour les Juifs,
parce qu'ils avoient compté diverfement
le premier jour du mois , Jefus-Chrifl
par la conjonction de la Lune avec le
Soleil , de les Juifs par la tranflation.
Ainfi on peut dire que Jefus Chrift an-
ticipa la Pâque à l'égard des Juifs _, Se
que les Juifs la différèrent à l'égard de
Jefus-Chrilt _, parce qu'ils la tirent en
divers jours qui s'einrefuivoient ; mais
à l'égard de la Ncomenie qu'ils avoient
prife , il n'y eut ni délai d'une part> ni
anriciparion de l'autre.
En effet , quel fens y a-t-il de dire que
Jefus- Chrift ht par avance la Pâque , dès
Y Y
I
514 Dissertation XXX.
le foir du 13, parce que c'étoit le com-
mencement du 14 qui eft le jour où elle
étoit fixée/ Ces Auteurs , par un cer-
tain équivoque , n'ont point entendu la
Loi de la Pâque, Exod. u, v. 6. Elle
ordonne d'immoler l'Agneau le foir du
1 4 , & de le manger à l'entrée de la nuit
fuivante , qui commençoit le ^.C'eft
ce que porte l'Hébreu j lntcr duas vef-
peras , c'eft-à-dire j entre le foir du So-
leil couchant & le foir du Soleil cou-
ché. Cette immolation devoit donc fe
faire le fécond foir du 14, avant que le
Soleil fût couché. Qu'ont-ils fait ? Ils
ont, contre l'Ecriture, placé l'immola-
tion de l'Agneau dans l'entrée de la nuit
qui commençoit le 14, pour le manger
fans doute 14 heures après, à l'entrée
de la nuit qui ouvroit le 1 5.
Quel fens y a-t-il encore à dire que
les Prêtres & les Pharifiens pour ne
manquer pas l'occafion qui fe préfentoit
de faire mourir Jefus-Chrift, différèrent
la Pâque au lendemain Vendredi, qui
étoit pour eux le 1 5 . Etoient-ils fi peu
zélés pour l'obfervation des Loix de
Moïfe f Oui, dira-t-on , quand il s'a-
gilfoit de fatisfaire leur haine Se leur
vengeance contre Jefus-Chrift. Mais ce
grand peuple a(Temblé de toute la Judée
4 Jérufalem , qui n'avoir pas les me-
Dissertation XXX. 5 1 5
rues engagemens qu'eux, transféra-t-il
aufli la Pâque au lendemain.^ Quelle
brouillerie de quel défordre cela devoir-»
il caufer dans la ville ? Ces Auteurs ne
comptent cela pour rien , pourvu qu'ils
fe tirent d'affaire aux dépens de qui il
appartiendra , tant les engagemens 8c
les préjuges ont de force dans le choix
des opinions.
Il s'agit dans cette difpute de conci*
lier faint Jean avec les trois Evangé-
liftes qui l'ont précédé ; Ôc les divers
moyens qu'on a pris pour en venir à
bout , font voir combien certe entre-
prife eft difficile. Le premier femblô
nier que Jefus-Crrrift ait fait la dernière»
Pique ; les trois autres au contraire ferrv»
blenr l'alfurer très pofirivement. Les uns
pour les accorder réduifent les trois an
texte du quatrième , & ils font tous les
efforts pour empêcher qu'ils ne difent
que Jefus-Chrift a fait la dernière Pi-
que. C'eft lé' parti qu'a pris l'Auteur de
l'Harmonie avec le fuxcès qu'on a ptl
voir dans la DitTertation précédente.
Les autres qui font le plus grand nom-
bre réduifent fainr Jean aux trois autres
Evangéhftes , & ils prétendent, quoi
qu'il puilfe dire , que Jefus-Chrift ayant
célébré le Jeudi la dernière Pâque, les
Juifs la firent le même jour que lui.
Yvj
506 Dissertation XXIX.
«ux ; ou s'ils ne l'apprêtèrent pas , je
demande qui les empêcha de lui obéir.
Je fuis très-perfuadé qu'on ne peut rien
répondre a cela qui ne fait de la der-
nière foiblefTe, & qui ne tombe de foi-
même. Combien de fois, dit l'Auteur ,
a\ oit-il tenu un langage dont les Apô-
tres ne pénétrèrent le jens qu après fa
mort ? Cela eft indubitable du dogme ,
de des prédictions , dont fouvent les
métaphores obfcurcifToient le fens : mais
il ne leur a jamais fait de commande-
ment qu'il ne leur fût aifé d'entendre ,
ou qu'il ne leur ait expliqué au même
tems. Or qu'y a-t-il d'obfcur ou de fi-
guré dans celui - ci : Parate nobis Paf-
cha ut manducemus ? On ne dira pas ,
fans doute , que cette Pâque eft méta-
phoriquement l'Euchariftie j car com-
me c'eft la même dont il eft dit tout de
fuite : Et paraverunt Pafcha ; ce feroic
une grande abfurdité de dire que Je-
fus-Chrift leur commanda de préparer
l'Euchariftie , & qu'ils la. préparèrent.
Cette Pâque eft donc littéralement l'A-
gneau Pafchal.
Avant que de finir je ne puis omettre
ici une railon remarquée par Janfenius
de Gand , que c'a été une providence
particulière de Dieu , que l'année où.
Jefus-Chrift devoit être immolé ^ il &
Dissertation XXIX. 507
foie trouvé deux jours de Paque , 8c
félon divers comptes, deux 14 jours
de la Lune j un véritable j de l'autre lé-
gitime félon la Tradition. Par ce moyen
Jeius-Chrift: accomplit dans le premier
le facrifice de la Paque légale, & infti-
tua un nouveau facrifice 'y &c dans le
fécond il s'offrit fo i-mème à Dieu , com-
me étant le vrai Agneau Pafchal. Ainil
d'un coté l'immolation du vrai Agneau
répondit au figuratif, & de l'autre celle
de l'Agneau figuratif précéda le vérita-
ble. Or ces deux chofes ne pouvoient
s'accomplir que dans deux jours 14 de
la Lune , qui fe fuivoient immédiate-
ment : Les trois premiers Evangclilles
ont écrit ce qui arriva le premier , &
faint Jean ce qui fe paifa dans le fécond ,
pour répondre aux objections qu'on
pouvoit tirer des trois autres contre ion
Hiftoire.
Car on pouvoit lui demander com-
ment il fe pouvoit faire que Jefus-Chriit
ayant fait la Paque avec fes Difciples le
14 jour , conformément au rapport de
trois Evangéliftes, les Juifs l'eulfent pu
crucifier le lendemain 1 5 qui étoit la
plus grande Fête de l'année. Cela trouve
fa réponfe dans ce que faint Jean re-
marque , que c'étoit alors le jour de la.
préparation du la Paque ^ c'eft- à-dure
508 Dissertation XXIX.
pour les Juifs : Erat autem parafcevc
Pafchd. Ce qu'il paroîc n'avoir remar-
qué que pour répondre à la difficulté
qu'on pouvoit tirer des autres Evangé-
liiles.
§. XXXVI.
Concîujion. Combien il ejl dangereux
de troubler les fentimens que FEglife
tient par tradition. JDeux conditions
des nouvelles découvertes. La certi-
tude & futilité.
Je finirai cette Differtation , qui n'eu:
que trop longue , par cette réflexion ,
qu'il n'eft pas avanrageux de troubler
la porTeflïon où elt l'Egiife depuis les
premiers fiecles , de certains fentimens
conformes aux expreffions de l'Ecriture ,
êc qui font une partie de la créance des
peuples. On me dira que fi ces points
n'appartiennent point à la foi , 6c qu'ils
ne touchent point les mœurs, il a tou-
jours été permis d'en rechercher la véri-
té , 6c de propofer au public les nou-
velles découvertes qu'on y auroit pu
faire > parce qu'on ne preferit jamais
contre la vérité, 6c qu'étant un bien pu-
blic , on fait tort à la fociété civile ,
lorfqu'on la retient dans les ténèbres»
Dissertation XXIX.
Or la fefus-Chrift a tau la
dernière Pâque eu de ce c
s l'ai; déjà ii îles pafl
criture , qui regardent une 'orc
tont pas une partie de
la . r {qu'ils font expliqua . uni-
fens par toute 1 1
IVad des Pères de 1*1 : Mais
i qu'il en fc voudrais me.
.x conduit tte recherche.
La i. eft qu'il y ai:
cet: . ;tequ
ble que s li nou |uoi
fert d'app; ud , contre c. i
a toujours cr I Je as Chrift n'.i
point raie la j? Cela n*eft
:ble que de tr. 51 des auie^ foi-
» qui croyant fimplement que tout
jue l'I . eft vrai comi
îonner lien
de fui Ire ler.c
es bien plus im-
porta ns , ; rauf-
toujours pafle pour
le.
( ra-r-on encore
, qui nie ier-
I
l'allui
M i. comment laine Jean niecoir-il
:u il : point : Or
î iij
5io Dissertation XXIX.
quand la contradiction apparente con-
jifte en ce que trois Evangélifles aiïu-
rent formellement un point que le qua-
trième a fupprimé : ce n'eft pas une
conciliation recevable de donner la gêne
aux trois pour les faire parler comme
le quatrième ; mais c'en: ce que nous
examinerons ailleurs.
La 2. condition eft, que cette nouvelle
découverte foit fi certaine & fi évidente ,
qu'elle accable, pour ainfi dire, l'efprit
dé lumière. Car alors on peut dire qu'on
n'eft pas en état de fufpendre fon ju-
gement fur cette vérité , & qu'on en parle
f>arce qu'on a été perfuadé , Crcdidi
propter quod locutus fum ; Mais lors
qu'on n'a pour l'appuyer que des conjec-
tures probables, la prudence & la cha-
rité obligent à fupprimer ce qu'on en,
croit favoir \ & félon la règle que faint
Paul a faite pour ceux qui parlent des
Langues étrangères fans Interprète, on
n'en doit parler que pour Dieu Se pour
foi-même : Si autem non fuerit inter-
pres _, taccat in Fcclefia , Jibi autem lo-
quatur & Deo. i. Cor. c. 14. v. 28.
Les démonftrations font les interprè-
tes naturels des vérités inconnues ; (1
on'en manque, il vaut mieux les difli-
mttler que de les produire. Car enfin ,
probabilités pour probabilités, les an-
Dissertation XXIX. ^ 1 1
ciennes qui font en pofleflïon de Li
:nce du public , valent mieux qu_
nouvelles, qui n'étant pas plus certai-
nes, font plurodieufes & plus choquan-
Que fera -ce donc li elles ne (ont
appv j fur de roibles conjectures ,
Ecrituce forc< Boi-
res, lurd- :aifonncmens ? Mais
qui ci: '
_ don-
•
_, qui ferment ic à
es les . \s contraii il n'y
en a point qui foient plus éloquens en
cette matière que ceux qui lom le plus
entêtés de leur
DISSERTATION XXX.
Jonn. C. XIII. v. i. Antè diem
■'c. Coiicord.
C. CXXIX.
APt i ' ! i d
] i il
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s il 1 uume
l Ri J . >ui pi,.
Y
512 Dissertation XXX.
dent y enfin fi l'un anticipa la Fête ou
fî les autres la différèrent : & fur tout
cela le partage des opinions eft encore
plus grand que fur le fait, foit qu'on
ait égard aux motifs , qui d'abord pa-
roiiïent à peu-près de même force j foie
qu'on regarde le nombre des opinans
qui fe trouve prefque égal de part ÔC
d'autre. Car au lieu que dans la queftion
du fait , toute l 'Eglife , ou plutôt toutes
les Sociétés Chrétiennes font d'un côté,
3c un petit nombre d'Auteurs de l'au-
tre , la plupart inconnus &: mal renom-
més ; ici tout au contraire , les Auteurs
Catholiques font tellement partagés,
qu'à ne iuivre que L'autorité* on feroic
affez en peine a prendre parti. Les uns
enfeignent que Jefus-Chrift & les Juifs
firent la Pâque le même jour du Jeudi
au foir , & que le lendemain Vendredi ,
qui étoit la grande Fête des Azymes ,
Jefus-Chrift fut attaché à la Croix. En-
tre ceux qui les féparent ou qui met-
tent leurs Pâques en des jours dirTérens,
les uns la font anticiper d'un jour par
Jefus-Chrift Se par les Apôtres , & ils la
lui font célébrer à la fin du i 3 jour de
la Lune de au commencement du 14; les
autres au contraire veulent que cette
année- là les Juifs pour profiter incef-
famment de l'occafion favorable qu'ils
Dissertation XXX. 11$
avoient de hure mourir Jelus-Chriit >
l'a) e jtrfqu'aq joue da 1 5 ,
qu'ils ayenr de même transfère au 16 L
des Azymes.
Toutes ces 1 lées font faiilTes^ parce
qu'elles fuppofent 1 ùis-Chrilt êv
.1 compter de
même manière les jours de b Lune , >c
que pai - la même nouv
Lune ils prirent le Jeudi pour le 1 5 , le.
idredi pour le 14» & le Samedi pour
le 1 $. Il 1 ^ néanmoins ainli ;
.luilt ce. les Juifs firent leur Pa-
, chacun d.ms le : 4 qui ioic
à la no U ! une Pafchale qu'ils avoienC
com| tce.1 J idi tu: le 14 pour Jt
Chi . \ . 1 pour les Ju. ,
Îiptc* diverfem
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Ainfi on peu:
pa la P ;ard des J lifi , Se
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l'tls la fii rai
fui voient; mus
'.voient
part, ni
! t
I
514 Dissertation XXX.
le foir du 13, parce que c'étoit le com-
mencement du 14 qui eft le jour où elle
étoit fixée/* Ces Auteurs , par un cer-
tain équivoque 5 n'ont point entendu la
Loi de la Pâque , Exod. 12, v. 6. Elle
ordonne d'immoler l'Agneau le foir du
14 , & de le manger à l'entrée de la nuit
fuivante , qui commençoit le 1 5. C'eft
ce que porte l'Hébreu j lnter duas vef-
peras , c'eft-à-dire _, entre le foir du So-
leil couchant & le foir du Soleil cou-
ché. Cette immolation devoir donc fe
faire le fécond foir du 14, avant que le
Soleil fut couché. Qu'ont-ils fait ? Ils
ont, contre l'Ecriture, placé l'immola-
tion de l'Agneau dans l'entrée de la nuit
qui commençoit le 14, pour le manger
fans doute 14 heures après, à" l'entrée
de la nuit qui ouvroit le 1 5.
Quel fens y a-t-il encore à dire que
les Prêtres & les Pharifiens pour ne
manquer pas l'occafion qui fe préfentoic
de faite mourir Jefus-Chrift, différèrent
la Pâque au lendemain Vendredi , qui
étoir pour eux le 1 5. Etoient-ils fi peu
zélés pour l'obfervation des Loix de
Moïfe ? Oui, dira-t-on , quand il s'a-
giiïbit de fatisfaire leur haine & leur
vengeance contre Jefus-Chrift. Mais ce
grand peuple aiïemblé de toute la Judée
a Jérufalem , qui n'avoir pas les mè-
Dissertation XXX. 5 1 <
tries _;emens qu'eux , transfcra-t il
aulli la Pâque au lendemain' (^aelle
brouillerie êc quel dcfordre cela devoir-
il caufer dans la ville ? Ces A tueurs ne
comptent cela pour rien , pourvu qu'ils
fe tirent d'affaire aux dépens de qui il
appartiendra , tant les engagernens c\:
les préjuges ont (té force dans le choix
des ris.
Il dans ce:te difpure de conci-
lier faint Jean avec les trois Evifl
! .s qui l'ont précédé; <5c les divers
1 a pris pour en venir a*
bout mbien cette entre-
ficile. le premier femblc
que Jefus Chrift ait fait la derniers
LU contraire fertv
irlalfu rmetti. Les uns
.. les accordée réduifent les trois aa
c\: Us font tous les
:rs poui ils ne di'
] I . L dernière Pi-
: qu'a -enr de
rmoni - n a pa
1 d.ins la 1 1 Jtnte.
;i fout le plus grand nom-
aurref
i nr , quoi
me
1 ie, les
c lui.
$\G Dissertation XXX.
Mais comme les uns Se les autres»
font violence aux paroles des Evangé-
liftes , pour leur faire figniher toute au-
tre cliofe que ce qu'elles expriment , je
prendrai le milieu entre ces deux extré-
mités, ou plutôt je fuivrai le tempéra-
ment dont je me luis déjà fervi. J'ai
prouvé le fait de la dernière Pâque par
les textes formels des trois premiers
Evangéliftes j & je vais montrer que
Jefus-Chrift & les Juifs ont fait chacun
la leur en des jours dirférens _, Jefus-
Chrift le Jeudi , & les Juifs le Vendre-
di. C'en:, ce me femble , la feule voie
de concilier les contrariétés apparentes
qui fe trouvent entre faint Jean &: les
autres Evangéliftes ; cettQ voie eft d'au-
tant plus raifonnable qu'elle garde à
leurs exprelîions le fens naturel qu'elles
portent, au lieu que les autres leur don-
nent la gène , en leur fubftituant des fens
qu'elles n'ont prefque jamais eus dans
l'Eenture. Elle eft encore d'autant plus
aifée , qu elle fait évanouir tout d'un
coup toute cette contrariété prétendue.
Car les trois Evangéliftes attirent que
Jefus-Chrift a fait la dernière Pâque.
Saint Jean qui n'a rien écrit de cette
Pâque de. Jefus - Chrift , n'a garde de
le nier. Celui ci fait entendre que le
matin du Vendredi les Juifs n'avoient
Di$«i*TÀfion xxix ht
encore point rait la P
auti i pais ,
n'ont point pa I
Où elt donc la contrariété ? Eft - ce
qu'on nie ou qu'on aifure une chofc donc
on ne f.ik i tention? Elle n'èft pas
dans les tern s s Evan
coir . n'-j'l ;
livoque ; elle n\
dans Ls a ans
poui e ries autres» je dis qu'on
tire de faim ' que
• lit n'a point taie [ne , cV
our prouver que
ns que
lui \ au heu qu'il faut i
, que Jefu l It la
nie , c< ians la
rertatioo : de faint
1 j ,i qu'il ne our
que ' cenfé-
queu, '.> faut n ablir.
I. A I que
it , il
odeotq
çi8 Dissertation XXX.
la Pâque le Jeudi au foir comme Jefus-
Chrift, il paroît néanmoins de cela
même que c'eft un avis qu'il donne à
fes Apôtres, qu'il ne parle point de la
Pâque des Juifs. Car à quel propos leur
donne-t-il cet avis ? £ft>ce que les Apô-
tres ne favoient pas une chofe qui au-
ïoit été connue de tout le monde ?
D'ailleurs quelle néceflité y auroit-il
de les en avertir, puifqu'ii ne leur com-
mande rien ? Le moins qu'on en pui(Te
dire elt que cet avis auroit été inutile ,
Se n'auroit eu aucun but. Dieu nous
garde de penfer que Jefus-Chrift ait ja-
mais dit des paroles perdues.' 11 ajoute,
& le Fils de f homme fera livré pour
être crucifié. On ne voit point quel
rapport ou quelle dépendance il y a de
la Pâque des Juifs à ia Paflion de J3fus-
Chrift j foit que l'une & l'autre foient
arrivées en deux jours confécutifs, félon
quelques Auteurs , ou dans le même
jour félon les autres.
11 faut donc rapporter ces paroles de
Jefus-Chrift à la Pâque qu'il devoit cé-
lébrer , pour y trouver une jufte né-
ceflité & une liaifon naturelle de la Pâ-
que avec fa Paflion. C'eft un avis qu'il
donne à fes Difciples , que dans deux
jours il fera la Pique avec eux, parce
que le troifieme il fera attache à te
DlÇÇFRTÀTIOtf XX\'. Çî£
1 : ' mme, félon l'Ecriture, il d
ctre immole, lorfque les Juifs immo-
\ , 1! I Ati
e d'un en
mourir au tems no-
Pour m cerre liaifoti , on
doir rc fonction 6V: comme
lonl'ufagedes
Hél té la ^riode
•n. A. a que
? </<: tHontn
Ce fera
ufs t
Il vis de Jefus Chrilt aux A:
as 2 un autre I);
•ie m i qui coi îrc-
ns que ; B lui .ii donné. 11 lui
envoya 1 .
ut ion au: '
vous c:. - s ejl proche 9
aujourd'hui la P
mes D l I ro-
t.iic
ie de 1
•
menr qui v cft
il pour | ift de faire !a
I
dire le
c li f
Il \ en a qui n'y crt >! .: d'an-
520 Dissertation XXX.
tre liaifon que la familiarité de Jefus-
Chrift avec ce Difciple chez qui il s'in-
vitoit foi -même de faire fon dernier
fouper , & la liberté avec laquelle il
alloic à la mort, dont il prévoyoit le
tems & les autres circonftances. Quel-
ques autres ajoutent feulement à ce
Commentaire cette liaifon , qu'étant fur
le point de partir du monde, il vouloit
lui donner cette dernière marque de fon
amitié, comme pour lui dire adieu; que
fans attendre d'en être prié , il iroic
prendre chez lui fon dernier repas.
Selon les autres , c'eft une excufe que
Jefus-Chrift fait à" ce difciple inconnu ,
de l'importunité ou de la dépenfe qu'il
lui caufe en faifant- toujours la Pâque
chez lui : Je ne vous lerai guère plus
incommode pour ce fujet ni à vous ni a
mes autres Difciples : Moi qui fuis fur
le point de quitter le monde ; avant
néanmoins que je m'en aille , j'ai réfolu
de célébrer ma dernière Pâque chez
vous. Le tems de mon départ qui me
preife vous doit adoucir ce commande-
ment j fi vous n'êtes un Difciple in-
grat j vois ne devez rien faire de moins
pour votre Maître avant qu'il vous foie
ravi. On voit déjà que la proximité
dii départ ne faifoit rien pour confoler
ce Difciple de la dépenfe de la Pâque,
Dissertation XXX
:oit feulement qu'elle dev * la
demie: o cçtte conjecture
fus-Chnlt lui devoil dire : Âpttà
-n.
I explications (ont fort hu-
maine* , ev il n'y a gr.
que Jefus-Chrifl
biei m-
- ! nous eulieut app
Difciple , on jugeroii avec plus d
de b valeur de ce ( îommenraire. ( 9
qu'on en peut de-, i.'ier i elquc pro-
babilité , eft que c'etoit un b s ri-
. commode: , chez qui JefttS-
Chrifi av( ii déj 1 tait les Paquej
dentés j & i'il eft permis d M
:01c li Mai fou d'Al-
phee & de Marie, père es: mère d
ques le Mineur. Or on ne trouve ail—
me m 1
i
fondei. : il s'afi
II cil 1! que
ii liai ion entre la célébrai
nie
I i.tns
te fa
Dtfcipu
il ; afl famine D
par i -jx Dil qui
52i Disse rtaîion XXX.
alloient actuellement préparer la Pâque.
Selon cette idée , c'eft une excufe que
Jefus-Chrift: lui fait, de ce qu'ayant juf-
qu'ici célébré les autres Pâques le mê-
me jour que les Juifs , il la prévenoit
maintenant d'un jour à caufe de la pro-
ximité du tems de fa mort , comme s'il
difoit : Je fuis prelïé du tems de mon
départ hors de ce monde, & je ne dois
pas partir fans avoir fatisfait au devoir
de Pâque, qui doit être fi cher a toute
notre nation. Mais comme les Juifs ,
félon la coutume, la différeront jufqu'à
demain , je n'ai pas le loifir d'attendre
fi long -tems; je veux, conformément
à la Loi_, la célébrer dès aujourd'hui :
comme j'ai choifi votre maifon pour
cette cérémonie , voila deux de mes
Difciples que je vous envoie pour nous
préparer toutes les chofes néceftaires.
Voilà le vrai fens de ce pafTage de
faint Matthieu , qui fait voir d'un côté
que les Juifs n'ont point fait leur Pâque
le même jour que Jefus-Chrifl; , & de
l'autre que ce jour des Azymes, où
félon le même Evangélifte , & félon
faint Marc & faint Luc , on immoîoit la
Pâque & oh Von devoit l'immoler, c'é-
toit le jour où la Loi obligeoit de l'im-
moler, Se où Jefus-Chrift l'immola pac
les mains de fes Apôtres.
DlSSB&TATtO
î I l. Saint ]
prelîions, «5c qui n'a parte de la P.ique
Îue comme elle ctoir ccL pat les
uirs , a rtionrqaé q fa Peu de
:ue y Antc dicmjejlum I , JefdS
Ce ion venant qu. >on retour
■ ■■ . ■
>ut aux fien - pal l de
Jeu:
charifti
Eju'il v.
rer le Je .idi au foii m-
5 dèl les fil h jures du loir, c'eîl-
i-dire , depûb detlt heures, puifqu'il
la bah il initr
charifti j. Si donc 1 :s ont fait
h Pâque en même rems que lui , on
peut dire au(Yi qu'ils l'ont : : la
/ de Pâque, On l'a pu cott-
. - . I ■ nies que les Juif> ont
Jamais v ' la jarr
dire qu'on fait avant One 1 - iofl
ii commence 8t qu leal
I
Les 1 u à
Ion le ■
jonc j i ;ue
1 Mit cor,
a ur oient I
Riumoi ;
524 Dissertation XXX.
de Pâque ? Cette exprelïîon eft inouïe
dans l'ufage de l'Eglife , & elle Peft
d'autant plus dans le ftyle de l'Ecriture,
qu'on n'y en trouvera pas un feul autre
exemple que celui qui eft en queftion.
Je dis plus : Elle eft contraire à la Loi
Pafchale. Exod. 23. 5. 6. Le premier mois
le 1 4 jour au foir Je fait la Pâque du
Seigneur , & le 15 jour du même mois
eft la Fête des Azymes. Or cette Fête
commençoit dès la veille au Soleil
couchant, toute la nuit fuivante étoit
donc une partie de la Fête : Ainli faine
Jean ne pouvoit pas dire que l'Eucha-
riftie , qui avoit été inftituée environ
deux heures dans cette nuit-là j l'eût été
avant la Fête de Pâque.
Cela répond par avance à toutes les
défaites qu'on allègue pour éluder la
force & la clarté de ces paroles. Les uns
les expliquent avant le poinç du jour ou
le lever du Soleil de la Fête de Pâque ;
antè lucem fejlivitatis Pafchalis. Les
autres avouent que dès le foir du Jeudi
la Fête étoit commencée ; mais ils pré-
tendent qu'elle devoit être aujfi - tôt en
quelque forte interrompue par la nuit
fuivante. Je n'ai jamais oui dire que les
ténèbres de la nuit interrompiftent les
Fêtes , comme fi en cachant le travail
elles en ôtoient la défenfe. Les autres
Dissertation XX 525
cnhn , comme donat , difent, c^ue
'cil fj.1-
jour de la ! is-Chrift, fi on.
entend le jour naturel , «S: ;• nr,
fi on l'en:. ici.
Tour lis- je , a déjà fa réponfc j
parce que l'Original ne porre point,
comme a tivuiuic 1 ; Interprète ,
t.: me d:cm fcjlun: r:t U jour de /a
mais amplement ,:r.u fejlum
PjJl' £ Vil J; TU fi Txya.
!
vuK]ue,c. lis les jours de I
: naturels, &:
. , qui :u de-
puis un foir jufqo'i l'autre , j vefpcra
S
e donc des jours
rifici
ige,
rf , que
J e f il s -
D u trois he
qae 1 1
ju'il
:1 eu: maii-
. agneau 1 1 \ & de dire
; par u:
il! des A;
idunfti u la Fctc de
516 Dissertation XXX.
Pâque , antè dictn fejlum Pafch&.
Puis donc qu'on ne peut pas dire fans
abfurdité que Jefus-Chrift ait prévenu
la Fête de Pâque , à l'égard de celle
qu'il avoit déjà célébrée j il faut.nécef-
fairement féparet la Pâque des Juifs de
celle de Jefus-Chrift, en les plaçant en
des jours difFérens , 8c expliquer ce
paflage de faint Jean par ce Commen-
taire qui n'y laifte pas la moindre obs-
curité : Que Jefus-Chrift fe fou venant
qu'il devoit mourir le jour même où
les Juifs célébroient leur Pâque , la pré-
vint par la tienne 8c par l'inftitution
de l'Euchariftie. Et avant ta Fête de
Pâque qu'ils dévoient célébrer le foir
du lendemain , il lava les pieds à (es
Apôtres pour les difpofer à recevoir
fbn Corps 8c {on Sang. Cela fuppofe
ce qui fera foutenu dans la fuite , que
faint Jean ne parle ici de la Pâque que
d'une manière populaire , 8c félon l'or-
dre public ^ qui avoir transféré la Pâ-
que de fon jour naturel , qui étoit le
Jeudi , au lendemain Vendredi , & la
Fête des Azymes du Vendredi au Sa-
medi.
IV. Avant que de propofer les preu-
ves personnelles que nous fournirent les
Prêtres , les Pharifiens 8c Judas , il eft
bon de remarquer qu'il y a des demonf-
Dissertation } j : -
(rations , t coru
auiîi certaines Se iuffi infaillibles que
celles - |ue. Elles I ■■.: :
> lur l'amour néced
que clucun fe pori -
ices les • qui nous
fur 5 n le degré de leur
proximité , :
que nous nous portons. 1
(ait le poids qui r.ur E
de 1 nomme , on ne m; nais
d'en découvrir tous II ms ,
par, le ccrur : ou joui s à
ce qu'il aime oc aux
der. El cotr tù un principe de
Phyfique , n ne Je
un d<
fait ru que toutes
ons d rappoi I ce
que nous 'n.
Or il y a trois ou quatre amours qni
dépendent de cec amoi;
qui font les
de la vie- I OUI
reconnoiilcnc quclq raie on
faufle. I i i. m l'asnoa our
tous les hommes. Le ;. l'amour de nos
ches qui I i toute la pal
NU qui ont quelque loin de leur
IiJiineur. Le 4. eti l'amour d. ;lû-
52.8 Dissertation XXX.
modités 8c de fes intérêts particuliers.
Et dans l'égalité des circonftances , les
hommes ne manquent jamais de fe dé-
terminer au parti le plus favorable à ces
trois ou quatre panchans j 8c les Hifto-
riens même comptent fur ces princi-
pes , lorfqu'iis expliquent à quoi fe
îbnt portés les hommes dans les occa-
fions où ils font engagés par ces grands
intérêts.
Cela fuppofé , je vais faire voir que
Judas , les Prêtres 8c les Pharifiens
étoient engagés par tout ce qu'ils avoient
de plus cher au monde à ne pas choiiir
le jour de la grande Fête des Azymes
pour prendre 8c faire mourir Jefus-
Chrift. Ils y étoient obligés par l'a-
mour qu'ils avoient pour leur Judaïfme,
pour leur patrie, pour leur honneur,
pour leur vie même. Chacun de ces
intérêts étoit capable de les en détour-
ner j quel pouvoir donc leur jonction
devoit-elle avoir fur leurs efprits ?
V. Les Prêtres 8c les Phanfiens, ou-
trés de la liberté avec laquelle Jefus-
Chriifc le Mardi leur avoit reproché
leurs vices ; 8c voyant que le lendemain
il n'avoit point paru au Temple ni dans
la ville , ils s'arfemblerent ce jour là en
Sanhédrin pour délibérer enfemble com-
ment ils pourroient fe faifir de lui 8c le
faire
D I S S t A t A 1
Ils cm; .: qu\
émotion populaire :
Tau: !
i. lh troarerent -la deux r.
ces a
regardoit la capture , do Pari
adroitement , en la ant qa
!
! .
conde , qu
fur : e la fi
de peur q le ind
ir fie
/77ù. A
le i ( rift
. m.iis q
du Gouverneur ,
cv : la
vi 1 1 I de l.i
craindre de la y.\
.duiroi
I
530 Dissertation XXX.
teroit les Juifs amis ou ennemis de Je-
fus-Chrift , à toutes les extrémités , au
péril même de leurs vies.
Dieu voulut que le fuccès répondît à
leur attente. Du Mercredi jour de leur
confultation jufqu'au Samedi le jour des
Azymes , ils n'avoient que deux jours
en leur difpofition j le tems preftbitjÔC
ils craignoient que Jefus-Chrift ayant
fait fa Pâque avec fes difciples ne re-
tournât auiîi-tôt en Galilée , 6c ne leur
échapât jufqu'à la Fête prochaine. Mais
lorfqu'ils étoient encore atfemblés > Ju-
das leur vint offrir fon fervice , & il fe
chargea de le remettre fans bruit entre
leurs mains , moyennant une honnête
récompenfe. Ravis d'une fî heureufe
rencontre , ils lui promirent tout ce qu'il
leur demanda. Pour lui il s'acquitta fore
à leur gré de fa promette : il le fit pren-
dre hors de la ville & en pleine nuit ,
ôc lorfqu'on étoit déjà couché , com-
me il paroît par faint Marc , 14, 5 1, Le
lendemain Vendredi , qui étoit la veille
de la Fête , ils le firent condamner par
le Gouverneur 6c exécuter par les Sol-
dats , fans qu'aucun témoignât être
blefle d'une îi criante injuftice. Ainfl
Dieu leur applanit toutes les difficultés,
3c ménagea toutes chofes pour faire
tomber la mort de fon Fils au mêm$
DlSSïRTATION XXX J ; T
jour & a la mime heure ou ils îmr.
loient les 11 de Ij Puquc , afin que
cette concurrence de facn
nèfne jour leur ouvrit les
Dans cette fap| te fond
fur l'Ecriture , il eft clair que le Vi
li eu Jelus Clintr. fut crue.
des Azymes, m. îs la veille
ou lei Jmtb dévoient immolet b Ptqnes
&: paiconfcquent Jeius Clinlt qui l'a
immole des le Jeudi précédent j i
5uitta de ce ci _ . .>ir un jour avant les
uifs.
Que peut-on oppoferù une il grande
leoce f ( ;i mettent a,.
U P ft , cv au Vendredi li
mes ,
.:1a première vue c
Pharifiens fui d c foin de raire
' .huit le jour même de
la 1 ;r ne I pas lieu au
peuple de s émouvoir : m.
itioo de Judas , 6ù la | r\ nielle de le
rre lans 1 leUTl mans, ' :
fit changer de mefurc , qu'une occaiïon
lit. le dulipa en an moment toote
la crainte du ,
qui vouloir que J »!t mourût le
jour même de la 1 été | es , fit
vo; Juifs que I à lui Se non
.... UI , 1 heure , le
^
532. Dissertation XXX.
lieu j ôc la manière donc cette fainte Vic-
time lui devoit être immolée.
Nous venons de voir que la veille de
la Fête étoit un jour d'autant plus pro-
pre à cette exécution , qu'il étoit de la
fageife de Dieu de faire immoler la
vraie Pâque , le véritable Agneau , le
même jour &c à la même heure que les
Juifs immoloient tous les Agneaux de la
Pâque figurative , afin de faire éclater
plus vivement la vérité par Foppoiuion
de la figure.
Mais , i °. L'amour qu'on ne peut leur
difputer pour tout l'extérieur de leur
Religion , ne leur permettoit pas de
choifir pour cette exécution le jour des
Azymes* On n'a qu'à fefouvenir a quels
excès les a portés l'amour de leur Re-
ligion ^ félon l'idée qu'ils s'en étoient
formée. Ils ne pouvoient fouffrir que
les Aigles Romaines futfent déployées
dans toute la Judée , parce que c'étoienc
des figures. C'eft même ce zélé mal en-
tendu qui lesavoient foulevés contre Je-
fus-Chrift , parce qu'ils s'imaginoient
fautfement qu'il étoit oppofé à la Loi
de Moïfe ; 8c que fi tous les Juifs
croyoient en lui, il ne rçfteroir plus
perfonne pour défendre la Ville & le
Temple contre les Romains.
Ils lui avoiçnt fait un crime des gué-
D'il M 1 HT A T I G
riions miraculeul-js qu'il i
du Sabbat , p net U
i hideux du fàpi
1 >il leur z^le pour la ! de
I
olemei i
i.i dep
I
.
en dv
-
■
de |
ent
1 plait a ce*
: com-
•
i amoi : leur R i ,
oient ;
.
tjuel redore peuc rc :r hu*
iij
554 Dissertation XXX.
main, fi celui-ci ne le fait agir. Les
Juifs avoient reçu cTÀugufte le privilè-
ge de ne pouvoir être cités en Jugement
le jour du Sabbat ^ ni d'aucune autre
Fête. Tibère qui lui fuccéda ne changea
lien dans cette conceflion , non plus que
dans fes autres Actes qu'il révéroit com-
me des oracles; & Tite long-temsaprès,
pariant aux Juifs j leur reprocha que
les Empereurs Romains , n'avoient don-
né aucune atteinte à leurs Loix,& qu'ils
leur avoient permis de vivre félon leurs
Coutumes. C'eft Grotius qui fait cette
remarque. Peut- on s'imaginer après cela
que le Sanhédrin , la plus noble partie
«les Juifs y eut été aiTez lâche pour tra-
hir l'intérêt & la caufe commune de leur
nation , de pour donner eux-mêmes aux
Romains l'exemple de violer leurs pri-
vilèges , en traînant Jefus-Chrift au Tri-
bunal de Pilate le jour même des Azy-
mes , ôc en obligeant ce Gouverneur
malgré lui à le condamner à la mort
par des inftances & des crieries impor-
tunes depuis le matin j ufqu'à midi f Si
on me l'avoue y c'eft que rien ne coûte
pour foutenir ce qu'on a une fois avan-
cé. Qu'importe en effet à ces Auteurs
que les Pharifiens foient perhd^s^ a. leur
Nation, gens brutaux & bourrus jufqu'à
la folie ? Ces Juifs ne font pas ici poux
Dissertation XXX. 5 j 5
k détendre & pour les démentir. Mais
ces Auteurs devroient fe fouvenir que
dans l'Hiftoire,au défaut de la vente qui
nous eft fouvent inconnue , il faut
ICI àcequieft le plus vrailembi.tble ,
& faire agir les gens fcl >n leur caractère.
FtatC de cette obfervation j leur (!om-
uaire n'auroit pas même l'autorité
d'un Roman dont la première condition
eft la vraisemblance.
11 e't vrai qu'ils crovenr trouver dans
l'Ecriture quelque exemple fembUble &
certe précipitation des Pharifiens* Ils
ut le Livre des Nombres , c . 1 | ,
} :i prouver que le jour du S.ibb.u on
les criminel > ils fop-
pléent du leur ce qui m i l'Hr.
re , que cet homme , qui fut furpris le
jour du S.ibbar , ranuilant du bois, tut
lapide le même jour qu'il C arrêté.
( :it ce que k : 1 •• I Nombres
dit pas.
30. 11 falloit au moins quclqu'autrc
motif pins puilîant fur L I que
l'amour de leur honneur cV: de leur pa-
v)ir iU
Ç telle nécelfité do». I leur.
>fotl il par 1
les mefures qu'ils .. Ils
nanquerci lui dé<
c qu'ils >iDr
Z
5$£ Dissertation XXX.
me une condition à la prife de Jefus,
Car pourquoi la lui auroient-ils difli-
mulée ? 11 paroît par les Evangéliftes
qu'il s'engagea à l'obferver , parce que
fans limiter aucun tems fixe pour s'ac-
quiter de fa prome(Te , il fe chargea feu-
lement de le leur livrer fans tumulte Se
fans bruit, & par conféquent hors du
jour de la fête où l'émotion étoit inévi-
table. 1/ le promit , dit faint Luc; &
dès lors il ne cherchoit plus quune occa*
Jion favorable de le leur livrer fans tu-
multe. Les deux autres Evangéliftes
difent la même chofe ; Se on peut dire
que Jefus-Çhrift voyoit cette inquiétude
dans i'cfprit de Judas , lorfque pour le
déterminer au jour fuivant , il le preffa
d'achever au plutôt ce qu'il avoit com-
mencé : Quod facis j fac citius.
Comment donc peut-on fe perfuader,
que Judas qui avoit le choix de tous les
jours qui lui feroient les plus commo-
des pour exécuter fa promette j c'eft-à-
dire , pour faire tomber Jefus- Chrift
fans bruit entre les mains de fes enne-
mis , ait juftement choifi pour cela le
jour de fête qu'ils avoient excepté dans
leur convention , Se où la fédition ne
pouvoit s'éviter r1 Comment cet homme
avare quifavoit que fon payement dé-
pendoit du fucecs de fa trahifon , fe fe-
DlS SERT ATI \'.
roic-il expulc au luzard d
trei
ie eu un ten . oie croire
raifonoablemem qu'ell -
que
Jih,
le Jeudi i
im-
Au moins il n i peiroi
con ir l'amour que les Plmu
jiî-
iû >
il efi vrai. Ibancoieni acheté fa n
le i enraplc ,
1 ir le leur livrer , je
immoh
ce , ils ai.
leui ils
[uc le peu
! leur d
, que leur
-
5jS! Dr s s e il t a t ra n XXX.
pUbem. Je cherche donc fur quoi fie*
fondée cette nouvelle aifurance du San-
hédrin , ou quelle nouvelle raifon il
avoir après fon pacie avec Judas de ne
craindre plus le peuple , & je ne la
trouve point. Le peuple n'étoit-il pas-
toujours enclin aux féditions y fur-tout
dans le tems de Pâques _, où toute la Ju-
dée écoit ralfemblée dans les murs de
Jérufalem , &; où toutes les Galieries
du Temple étoient remplies de foldats
Romains pour retenir les Juifs dans le
devoir ? Prompts& enclins à fe révol-
ter pour des fujets de rien , étoient-ils
d'humeur quels qu'ils fulTent ^ amis ou
ennemis , ou indifïerens , à voir fans
émotion & de fang froid la profana- ,
tionde leur grande fête par la condam-
nation ôc par le fnpplice de trois per-
fonnes ? Il faut bien que les Auteurs
que je réfute trouvent moyen de les ap*
paifer , jufqu'à fourTrir paisiblement ce
vilain fpecracle.
Mais empêcheront-ils que les Prêtres
& les Pharifiens ne foient toujours les
mêmes. Des long-tems ils avoient cons-
eil le delfein de faire mourir Jefus-
Chrift, mais la crainte du peuple leur
avoit toujours lié les mains. Celaparoît,
Mat th. c. n 3 46. Marc 11 ,, %&.Imc~
j>q i 19, Jodh, 7 j jQ. ÔC Gtt plufieuxf
D I S S E R T A T 1 C H XXX.
Autres endroits. Ils n\
félon leur créance 3 que I . de
une invention h . de
peur d erre lapid le *, Ôc
on s'n; ue devenus plus tiers
ex plus hardis , ils taraient ofc conduire
Jelas-Chriftaafappl midi ,
le pro[ te des
bien t I Tes
i omment donc , dira-t on , purent-
ils impunément, irde la veille
faire a:- U)J qr. -
; i e (a aifi
: bien difl ird de
] . ( Ihrift 2 1 de roat c< qui
rdoii la Religh m. I es
i ntoient .
:enc
vec joie ,
nt aucun inii . ; .. ! Uir-
*
racfani ip
qiu de le .drc
avcL | hrift dans le fopplice , afin
?|lle :C pen-
crainte de fauver a \
ncls qui i la mort. Aucun
voulu:
*-. : I -. k plus f-iinc & le I tK>
S 40 Dissertation XXX.
cent de tous les hommes.
Mais tous les Juifs étoient zélés jus-
qu'à la fureur quand il s'agifïoit de dé-
fendre le Temple , leurs Loix , leurs
Coutumes , la fainteté de leurs Fêtes ,
& généralement- tout ce qui regardoit
la Religion de Moïfe. Ainfi la veille
de Pâque ils n'eurent à craindre que les
Difciples de Jefus-Chrift , parti peu
nombreux 6c peu formidable. Mais le
jour même de la fête ils auroienteu fur
les bras toute la Nation Juive. Com-
me donc il eft certain par la Tradition
qu'ils firent mourir Jefus-Chrift le Ven-
dredi , il s'enfuit que ce n'étoit point
le jour de la fête des Azymes , mais
feulement la veille qui n'étoit point fête.
On doit compter pour autant de dé-
monstrations ces preuves fondées d'un
côté fur l'Ecriture , de de l'autre fur les
relïbrts qui font agir le cœur humain.
On ne peut leur oppofer que des pro-
babilités languifTantes , ou plutôt qu.e
des poflibilités en l'air qui ne font ca-
pables de leur ôter ni la certitude ni
l'évidence.
6°. Ce jour-là où Jefus-Chrift fut
crucifié , les Juifs tant ennemis que fi-
dèles, firent quantité d'œuvres ferviles
que les uns ni les autres n'auroient point
été capables défaire un jour de fête, &c
DlfliaTATIO ' . .41
:c moins le l -i" jour
la plus -• lcurb
1 . La nuit
furent ta 1 avec n
îdre Je
Oli > y
mdanc au
qui |
Chriû a t ne li I
de Pâque [Qc la fete ne
comme qu'à minuit ^ '^uc ce
qui uiCj
•
la d
Il auroii le droic ci
iuic , ( uuoic |
. Mais en allceuam , il
f.illoit qu'il et >k foa-
I
I
un J
■
1
. 1
54i Dissertation XXX.
devant Hérode ; ils le firent condam-
ner à la mort juridiquement , 8c avec
toutes les formalités ordinaires , ils le
firent attacher à la Croix , toutes œu-
vres plus que ferviles , ôc qui auroient
violé toute la faintété de la Fête. L'Ab-
bé que j'ai déjà cité , avoue que les
Grands-Prêtres furent certainement cou-
pables de la profanation de la fête f.
mais il ne s'en met guère en peine. Que
veut-on qu'on y fane? Et que lui im-
porte que les Grands-Prêtres ayent violé
la fête des Azymes ? tant pis pour eux \
ce n'efi: pas là fon affaire 3 Se il n'en
doit pas répondre.
3. Mais que dira- t-il donc au viole-
ment que les Difciples , qu'il n'aban-
donnera pas fans doute , en auroient
fait félon fon fyftême/* Ce jour- là Jo-
feph d'Arimathie acheta un linceul , Se
Nicodeme cent livres de myrrhe Se
d'Alocs ; ils détachèrent de la Croix
le Corps de Jefus-Chrift , ils le portèrent
dans le tombeau de Jofeph , ils l'em-
baumèrent , ils Tenfevelirent 3 ils en
fermèrent l'entrée par une grotte pierre
ou'ils y roulèrent : Se ils fe hâtèrent de
faire toutes ces actions , parce qu'ils
étoient prêtés par la fête du Sabbat qui
commençoit à fix heures du foir % Se
tjui auroit rendu tous ces devoir* ilii;
Disse:
, Q ..: • . ir que ce
pis ftte, paifqtTits auraient tour
. pal 1 du
Que dira- 1- il .uix offi js
femmes , qui du Calvaii ur-
chez 1 nt l.i fin du
joui, itèrent oa préparèrent les par-
fums q •
baamei le ( le Jefu . ifin
que dira- 1- il i la a
, qui voyant qu<
1 .das de t
quY , crurent qu'il lui donnoit
iicrer le
pOOf h ftre. (
qui
Il répond fur !a foi du Rabbin Jacob
i Juda , les oc..
morts
tr,
mettre en terre ,
ient des œuvres permil de
jues, v u tenir
au tén itUte , qu'au rap-
poi ■ » Rabbins. hl!c porte
exprclicmenr qi. iet & le I
mes or.
cane cruv
préparation du i
t.r op fis j txi
544 DISSERTATION XXX,
qu<& ad vefcendum pertinent, Exod. 1 1 J
16.
J'infère de tous ces exemples que le
Vendredi-Saint n'étoit point fête cette
année- là, ni par conféquent la grande
fête des Azymes, mais qu'elle fut tranf-
ferée au lendemain Samedi.
VI. Il ne faut pas oublier que dans
faint Jean ce lendemain efl: appelle , le
grand jour du Sabbat ; hrat eriim ma-
gnus dies ille Sabbati \ ce qu'il donne
pour le motif de l'emprefiement avec
lequel les Juifs demandèrent à Pilate
qu'on avançât la mort aux crucifiés ,
afin que leurs corps ne demeuraient pas
fur la croix un jour fi faint & fi folem-
nel , où il ne feroit pas permis de les
dépofer. Or ce jour-là ne pouvoit être
plus faint ni plus folemnel que les au-
tres , que par la concurrence de la fête
du Sabbat , avec celle de la Pâque dans
"un même jour.
Les Auteurs de l'opinion contraire
n'en demeurent pas d'accord j mais ils
croyent que ce jour du Sabbat eft appel-
lé grand ,, parce qu'il fe trouvoit dans
la Semaine des Azymes. Mais ils ne
confiderent pas que cette raifon étoit
inutile pour prefter la mort des Patiens.
Il étoit défendu de les dépofer un jour
<ie Sabbat ordinaire , au lieu que cela
I S SB A, X AT 1 )M XXX. 543
.nuis plulieurs autr.
ne
:ion d'un de ces jours avec la I âe
bac pour emp 'J-poû-
-!i du tout : cV elle eut
.u l'E-
Lcdeur , comme la :
ton de leur denu au-
jours nés
m-
:r rail
I
du
la 1 loit donc
ron >ur
Us
:ion , j
VII. S I : OÙ
de 1
Ui [ midi i
54^ Dissertation XXX.
Pafch& hora quafi fexta. Les Juifs
donc n'avoient pas encore fait leur Pâ-
que. C'étoit néanmoins le lendemain
du jour que Jefus-Chrift avoit fait la
iienne avec fes Difciples. 11 n'en fau-
droit pas davantage pour être perfuadé
que Jefus-Chnft & les Juifs firent cha-
cun leur Pâque en deux jours difterens,
mais qui £e fuivoient immédiatement
l'un l'autre ., c'eft- à-dire > le Jeudi & le
Vendredi.
On répond que fi ce jour s'appelle
Parafceve Pajcha _, ce n'eft pas parce
qu'on y préparoit les chofes néceûaires
pour la Pâque , qui fans doute étoit
alors paffée pour les Juifs j mais parce
qu'étant aufîi la veille du Sabbat ou Ton
apprêtoit les vivres pour le lendemain ,
il fe trouva cette année-là que la Pâque
tomba dans cette veille. Maldonat ré-
plique agréablemenr que c'elr la même
chofe que il la Fête de faint Jean Bap-
tifte étant arrivée un jour avant la Fête
Dieu , quelqu'un appelloit la première
la veille de faint Jean : non parce que
ce feroitla veille même de faint Jean ,
mais parce que la veille delà Fête-Dieu
feroit tombée dans cette Fête. Qui ne
riroit, dit-il, d'un fi nouveau diction-
naire ? Quis ita loquentem non déride-
nt f En effet l'Evangélifte par une &-
Dissertation XXX, $47
gure un peu extraordinaire , au lien do
dire , cr^t autem Pii/cha in parai
c'etoie alors la Pique qui tomba au jour
de la préparation du Sabbat , auroitren-
! exprellion > en difant que
c'etoit la préparation de la Pique : trot
autem pdr.jfy.cvc Paj^ht.
Ylll. Ce qui convainc que le Ven-
dredi au matin les Juin n'avoiem point
encore (ail la PaqtM que le manu
ayant traduit Jelus-Ouilt au Tribunal
de Pilace , la contrairr 1 outra,
quelque fouillure légale qui les mie
hors d'état de m la Pique vers le
foir , les empêcha d'en .'ré-
toire , parce que l'impureu ! duroic
un jour tout entier , BC qu'entre I
commerce avec Pilate <3c le tems d'im-
moler ou de manger la Pique , il n'y
avoir pas alfezde tems pour Lur donner
I de Te purifier. 11 eftdooc viiibleoue
les Juifs n'avoient pas encore céleb:
Va ]uc dans un jour ou JefttJ C 21>riil s'é-
toir d de la 11
On répond te raifbu palpai'
. la Pique en
ma r préa ;'oui
d'autres Victinu
dint toute la femai: aux-
quelles l'on ne pouvoit participer I
548 Dissertation XXX.
qu'on avoit contracté quelque fouillure.
Ces Victimes font marquées. Deut. c.
10 , 2. & il en eft fait mention dans la
Pâque de Jofias , Parai ip. c. 35,8.
Mais i.il n'y a point d'apparence que
faint Jean , écrivant pour les Grecs fi-
dèles , eût voulu donner par équivoque
le nom de Pâque à d'autres Victimes.
qu\i l'Agneau Pafchal , connu par tout
fous ce nom-là , fous prétexte que dans
quelque endroit écarté , Moïfe n tiroir,
donné en palfant le nom de Pâque à
ces Victimes. Que fera- ce donc, (i l'en-
droit même du Deutéronome qu'on cite
pour cela ne le dit point clairement ^
félon l'Original ? Car au lieu de dire
comme la Vulgate : Immoiabifque Phafe
Domino Deo tuo de ovibus & de hobus :
Vous prendre^ des brebis & des bœufs
pour en faire la Pâque _, que vous immo~
lere% au Seigneur ; l'Hébreu porte .•
Vous facrifiere^ au Seigneur votre Dieu
la Pâque , des brebis & des bœufs j c'eft-
à-dire , pour accompagner la Pâque.
Sacrificabis Phafe Domino Deo tuo j
oves & boves j &c\
Il y a plus encore que tout cela., Se
on ne peut qu'on n'admire ici le peu
d'attention de ces Auteurs à examiner
les paffages qu'ils citent pour eux ; ils
prennent avidemment tout ce qui leur
Dissertation* XXX. <
ie croyént Les Ju
qui n'entrèrent p
pouvoi.
oui on
fut donc pas i
mai • . cv
-
C. mon fe c!
deux niions ; ie. La
i - -. . .
jour ci
comptées , qu'on ne pou
bœufs , ui
.
:ion du I i
?uelle qualité* ces J
.
de j
de d
au.
j5o Dissertation XXX.
quand on eft prelTé ? Mais je foutiens
que tous ceux qui le diront n'en croiront
rien. C'eft ici où les Rabbins ne man-
queroient pas d'admettre le miracle de
la multiplication : autrement on pour-
voit dire ce que faint André dit à Jefus-
Chrift touchant les cinq pains : Queji-
ce que cela pour tant de monde ? Quid
h&cfunt inter tantos ?
11 n'importe, il fe trouvera peut-être
quelque Philofophe qui prétendra par
la divifibilité du continu à l'infini , que
plufieuis millions d'hommes pouvoienc
participer à onze victimes : Mais la fé-
conde raifon ne laiiïe aucun lieu à cette
nouvelle relïburce. C'eft qu'excepté le
chevreau qui s'offroit pour le péché , les
dix autres Victimes étoient des holo-
cauftes qui fe confumoient tout entiers
par le feu. L'Ecriture y eft expreffe :
Vous offrirez en holocaujle au Seigneur
deux jeunes bœufs tirés du troupeau ^
un bélier , & fept agneaux fans défaut ,
de lamente année : Offeretifque inçenfum
holocaufium Domino 3 vitulos de armento
duos j arietem unum j agnos anniculos
immaculatos feptem. Je ne vois pas com-
ment , fans un grand miracle, tout un
peuple auroit pu participer à des Victi-
mes que le feu auroit dévorées ', & je
yojs encore moins comment, fans blefler
DlSSîRTÀTIOV XXX. < Ç t
le refpeU qu'on doit à un ;clilte ,
on oie attribuer a laine Jean d'à.
donne une caule null'i chimérique de la
rapuleufe des Juifs à l'ég
du Prétoire , que l'e .1 l'obligation
de participe! a de* Vi.mr.es réduites en
cendre.
Lod aux igneam 6c aux boeufs ,
que le H ; | ; 9 les Oficieri do Iun-
ple 6c quelques Princes des Lévites
fournirent pour ! I. Parai ip.
plicarion la plus coron I , que
les ;x Servirent pour le lacri
de 1 5c les bcsnri p >ui le Feftin
Palcnal, parce qu'un agneau nefofil
fiai pour le fouper de dix hommes pour
e moins , ex: quelquefois de quin/.e 6V:
de vingt.
11 v .1 des Affrcurs qui fe défunt de
ces \ ies Pafchales , expliquent an
hasard :uc de faint Jean , 1
j rain , dont l'ofage regnoit
Îate la ne des
'avoue maintenant que las Juif
t : je craindi le-
comme les impuretés I
étoieni longuet 6c fori
Auteurs fins y pen'er &
I
luflj mcomn
eu 11 o*. .-iU daus IL
'5 5* Dissertation XXX.
nouvelle Loi cérémoniale, que les Juifs
atteints de quelque impureté légale > ne
pouvoient manger du pain fans levain
dans une femaine où il n'y en avoic
point d'autre ?
IX. La Loi commandoit que le len-
demain de la Fête de Pâques ou des Azy-
mes on offrît à Dieu la première gerbe.
Qui ( Sacerdos ) elevabit fafciculum
coram Domino altero die Sabbatu
Que depuis ce lendemain de Pâque in-
clufivement, on comptât fept femaines
entières , ou quarante-neuf jours juf-
qu'au lendemain de la feptieme inclufî-
vement , qui fera le cinquantième. Nu-
merabitis ergo ab altero die Sabbati in
quo obtulijlis manipulum primitiarum ,
ftptem hebdomadas plenqs ufque ad al-
térant diem expleticnis nebdomadœ, fep-
tim& , id ejl quinepuaginta dies. Et
qu'enfin dans ce cinquantième jour, qui
eft celui de la Pentecôte , on offriroit
au Seigneur un facriflce nouveau rire des
nouveaux fruits de Tannée ; & fie offle~
retis facrificium novum Domino. Levir.
c. 2? , 10, 1 5 3 16. Ainfi il eft vifibleque
le premier éc le dernier de cette cin-
quantaine de jours retombent dans le
même jour de la femaine.
Or la Tradition confiante de l'Eglife
éotte , que l'année de la mort de Jefus-
Chrift
D I s c F R T A T : .' X . |
Chrift le cinquantième joui ,
■
tenu - 1
. - .
qu'elle
le
lei
ces cinquante ! H-
l
il cira
fon-li . I ». un-
' uf-
Chrift,
bc l tuf-
■
h 1 des
Azymes :
A/ i le
I
V adredi pi de
1
au'
1 ■ .: 1 / '. Ai
554 Dissertation XXX.
admettant l'Ecriture, avouent aufîi la
Tradition , qui porte que la defcente
du faint-Efprit & la Réfurrection du
Seigneur tombèrent cette année-là au
Dimanche : mais ils en nient cette par-
tie j que la Pentecôte Judaïque foie
arrivée le même jour que la defcente du
Saint-Efprit ou la Pentecôte Chrétienne.
Ils prétendent au contraire, que la Fête
des Azymes ayant été célébrée le Ven-
dredi , on commença le lendemain jour
du Sabbat, à compter cinquante jours ,
qui fe terminèrent aufti à un jour de
Sabbat j qui fut pour les Juifs le jour
de la Pentecôte , ôc que le lendemain
Dimanche le Saint-Efprit defeendit , ÔC
ce fut la Pentecôte Chrétienne , le cin-
quantième jour après laRéfurrettion du
Seigneur. Que cfeft-là précifément ce
que faint Luc a voulu dire par ces pa-
roles : Cum complercntur dies Pente-
cojles , faclus eft repente , &c. Adb. c.
2. i. Lorfque les jours de la Pentecôte
furent accomplis & paffés , il fe fit
tout d'un coup le lendemain un grand
bruit , &c.
Tout dépend donc de favoir quelle
eft la force des Verbes , compleri & con-
fummari j tjvp.mh.^fov çBat , tzKnQiçQcLi ,
auxquels ils donnent en cette occasion
le fens d'un cems fini ;-révolu de même
Dissertation XXX
entièrement
con: qu'en matière d de
:ant au préfent ,
enk dans ! us la d , _• la
pli. Ainli , (
oclo , veut dire y le hà
am\ -. Cum c,
: Lorfqut Je
quel il dt
•
: Cum i es:
I les /«
i le de: \ t un ji-
l s le r.
chofe qu ic dit l'Abbé Barcoli i
ai pi m < jouis de la
icniîblcnicm que d.;ns Pcra-
bl: I
en qu te la w-
rit< j< ur ,
Il a \ oolu que
ne heure qu on
le la l iqoe ,
5 $6 Dissertation XXX.
par fon Sang nous délivre du glaive de
l'Ange exterminateur : Qu'il retïuicitâc
le même jour qu'on élevoit devant Dieu
la première gerbe des fruits nouveaux j
pour nous apprendre qu'il eft les prémi-
ces de la Réfurrection gloneufe : Que
le Saint- Efprit defcendît fur l'Eglife le
jour de la Pentecôte Judaïque j pour
faire voir qu'il imprimoit au fond des
cœurs cette Loi que Dieu avoit gravée
ce jour- là pour les Juifs dans la pierre,
ôc qu'il leur avoit publiée au fon des
trompettes.
Mais que devîendroit alors le fyftême
de ces Auteurs? Comme il ne s'accorde
point avec cette conduite de Dieu j il
leur a plu de féparer la Vérité d'avec la
figure, au hafard d'ôter à la figure fa
lignification , 8c de dépouiller la vérité
de (qs preuves. Si nous les en croyons,
Dieu a établi les Myfteres le lendemain
de leurs repréfentations; &" par ce délai
il a obfcurci les rapports que les uns
avoient avec les autres.
Après cela il ne fera pas difficile d'é-
claircir les difficultés dont on veut em-
brouiller cette matière ou décrier ce
fyftême. On lui reproche i. qu'il re*-
tombe dans l'opinion des Grecs , qui
fondés fur les paffkges- de faint Jean
Croyenc que, Jefu§-Cluift aflûc-ipo/d-UJi
Dissertation XXX
jour la
I
1 bruit contre
ire.
1 e que
; mine
i au
monde pour la détruire
•
poi:
'.
doni
prochet èV
•
is. Que CL
ticipafion
, auî p Je-
ce j
du 14
dors qu
ob!
1
.
:jU-
A ■ nj
5$3 Dissertation XXX.
chant le pain qu'on doit offrir à la Mef-
fe , &c qu'ils prétendent devoir être du
pain levé.
Mais toutes ces allégations odieufes
font d'autant plus inutiles , qu'elles ne
touchent feulement pas le point de la
queftion. Elles fuppofent que Jefus-
Chrift & les Juifs comptaient le même
jour pour le 14 , par exemple le Ven-
dredi : qu'ai n fî Jefus-Chrift ne pouvoir
le prévenir d'un jour, qu'il ne fît laPâ-
que le 1 3 , contre l'ordonnance exprefte
de la Loi. Et pour réfuter cette erreur ,
nos Auteurs triomphent à peu de frais
par l'obéiffance de Jefus - Chrift aux
Loix de fon Père. A quel propos objec-
ter cette obéifFance à ceux qui enfei-
gnent que Jefus - Chrift n'a prévenu la
Pâque des Juifs que pour obéir aux ter-
mes de la Loi ? L'objedfcion tombe donc
de foi- même. Le 14 du mois dépend
du premier. Or Jefus-Chrift & les Juifs
ayant fixé le premier ou la néomenie
en divers jours, l'un au jour de la con-
jonction de la Lune avec le Soleil ; les
autres au lendemain ou à la première
apparition du Croiftant ; cette diverfité
de compte leur donnoir le 14 en deux
jours confécutifs j pour Jefus-Chrift le
Jeudi 2 Avril, parce que le jour de la
nouvelle Lune étoit tombé le Vendredi
Dis s sut ATi < c.j
v .rs : m.ns parce que I
.ne transfère b nouvel!.- Lune au
tain 11 Macs i cett
1, un jour
ni que
1
i s 1 1 ;
, ni
qu'il a : la
Loi p 14.
To, . 8c ne :
: , ni !•-
le fait
rir \ chacun a I ]ue dans .
14 , âme il
nedemor:
chai , h
fus
| tant le
1.
O re que ] i(l
: r que fi
•
quer en
•; pour d
l'il lem me
1
Ce de lit
j 6b Disse rtation XXX.
Or, pourfuit-on, Barrabas fut déli-
vré, félon la coutume, le grand jour
de la Fête de Pâque ou des Azymes. Ce
font les trois premiers Evangéliftes qui
l'affûtent : Per diem folemnem , per diern
feftum : Et par conséquent ce fut ce
jour-là que Jefus-Chrift fut attaché à
la Croix.
Je réponds déjà que ce diem n'efr.
peint de l'Original , qui porte feulement
xctre/' JV t«c ijçiw.Per fejlum. Il faut
donc juger du tems de cette délivrance
par la nature de la propofirion kclto!
qui étant jointe à l'accufatif j marque
d'ordinaire quelque rapport de proxi-
mité ou de convenance avec le mot
qu'elle gouverne. Ainfi cette expreflion
ne f gnifie pas pendant la durée de la
Fête, mais à caufe ou à raifon de la
Fête , ainfi qu'on dit ^a,7et rowvç fé-
lon la nature ou la Jltuatïon des lieux.
Comme cette délivrance pouvoit être
accompagnée de conteftations Se de dif-
putes, les uns fe déclarant pour un cri-
minel, cV les autres pour un autre; elle
demandoit des informations _, ou des
procédures que la Fête ne fouffroit pas.
D'ailleurs on faifoit fans doute le pro-
cès au criminel , & on le condamnoit
par les formes , afin que fon élargitfe-
ment parût une véritable grâce, comme
Dl^ERTATION X] <G\
on en ufe en qu~ ice,
où de pareils pr;
plu >our touu
que la 1 h
DISSERTATION XXXI.
Luc XXII. v. 19. Hoc c(l Cor-
t m eu m qh l vobis da-
•. Concord. ( K.
APrèl avoir traire la pr, de
ichariftie dans b Différai 1
fur le Ch. m de (aim ' afte
JirtU : (
obliei . > Se
ton: tirutioQ
L El U
e l'ordre
i ;>0-
1 I tire
1
Le doaaé
À a v
5(^2 Dissertation XXXI.
qu'une figure pour une autre, cet ordrg
n'étoit nullement néceflaire , & il fem-
ble que la nouvelle qu'il avoit en vue
devoit naturellement palTer devant l'an-
cienne.
Jefus-Chrift prit du pain de du vin
pour la matière de ce Sacrement, com-
me étant très-propres à marquer les vé-
rités qu'il contient. Le pain fignifie, i.
par fa diftinction d'avec le vin la répa-
ration du Corps de Jefus-Chrift d'avec
fon Sang dans fa Paiîion future, i. Par
la vertu qu'il a avec le vin de nourrir
l'homme , il femble nous dire que le
Corps & le Sang de Jefus Chrift fonc
l'aliment de nos âmes pour la vie éter-
nelle, & la refîource de nos corps con-
tre la mort 3'. Par leurs fubftances com-
pofées, Tune de plufieurs grains, l'au-
tre de plufieurs grappes ., ils marquent
l'étroite union que ce Sacrement doit
opérer entre les Fidèles par le lien de
la charité. 4. Jefus-Chrift a choifi les
alimens qui nous font les plus familiers,
pour s'accommoder à notre foiblefie , &C
pour nous épargner l'horreur naturelle
que nous aurions à manger de la chair
ôc à boire du fang fous leur propre ef-
1>ece. 5. Enfin il choifit du pain fans
evain , pour fignifier la fincérné & la
vérité qu'y doivent apporter ceux qui
DftS lut ation XaX! ;6}
participent à un fi pan 1 m
11. 11 rendit grâces il» m Paie
qu'il lui a • '
de v : are
k il ilomu la
ion au pain & ta fia, poilf y
e par un i
nmi il bénit
multipliée
I
.n s un erre in
prie , d
ou
pour le île.
:
gnarion, uc
iir Je l'homme,
uni
pui
. . .
ze
i
>rp$ de
UIC1*
A
5 ^4 Dissertation XXXI.
nature que le pain ordinaire , & que la
bénédiction y avoir fait un changement
réel &: indépendant de l'efpnt. Car il
ce n'eût éré qu'un être repréientatif, il
n'eût point été néceffaire de Te fervir du
même pnin rompu en plufieurs parties.
Tous les pains ou les morceaux de pain
qui refroient fur la table du louper pré-
cédent pouvoient avoir la même repré-
fentation. Si donc la fraction du même
pain apparent étoit nécelfaire , c'elt une
conviction que ce pain apparent étoit
d'une nature & d'une dignité qui n'é-
toit pas commune aux autres pains.
IV. Après en avoir pris une portion
pour lui-même, Ipfe conviva & con-
yiyïum _, ipfe comedens & qui comedi-
îur , dit faint Jérôme, Ep. ad Hedib.
il le donna à Tes Difciples en leur di-
fant : Prene^ & mange\. Or fi ce n'eût
été qu'un pain figuratif de fon Corps j
cette msnducation d'une fimple fleure
par celui qui en etoit la vente, auroit
eu quelque chofe de peu férieux ck gra-
ve ; au lieu que fi c'étoit (on propre
Corps fous une efpece étrangère , il re-
joignoit la vérité à la vérité. A l'égard
des Difciples, il n'y avoit gueres moins
d'incongruité. Qne pouvoir ajouter la
manducation d'un figne , d'un corps
fyrribolique à la polfeiîion qu'avoieoc
I ) | S S E R T A T ' ,\i. |
du \ I Chrifl ceux qui
>yoicm de le
.irs 01 . u-
choîeni de leoi s mains , comm inc
] - ' us , quod vidimu s
cuiiâ noftris , qitod pt
•
| ic iU h
t'en toutes ces maniei
l'en lifani fa parole ai m Af-
cenhor.
mai iu Patch \\ qui 1 (cn«
toir , rien n'étoii \ de
lui lui . ;ns.
Fie re , I A .'lus
i \ me
d «t , plus nourri
(impie p.im -,
ardeni
du
fuii ! vm , - b dam
t r id i
fui lui ar-
me.
\ . N
| ( luilr dans
1 i i de
h
1 .
oui uu
$£<> Dissertation XXXI.
lubftantif qui fe réfout par h&c res, cette
chofey ou ceci ; &c enfuite il a fallu dif-
purer avec eux de ce qu'on devoit en-
tendre par cette chofe. Les Docteurs Ca-
tholiques font demeures dans cette dé-
signation vaçue &c indéterminée d'une
fubftance commune au pain &" au corps.
Les Miniftres au contraire l'ont déter-
minée à fignifier , les uns le pain que
Jefus-Chrift tenoit entre fes mains _, les
autres toute l'action &c route la cérémo-
nie : Et fur cela ils entalfenr des argu-
mens fans nombre & fans fin contre la
préfence réelle, toujours fondés fur ce
que Hoc fe prend pour un fubftanrif.
Cependant il eft étrange qu'ils ne s'ap-
perçoivenr jamais que tous les raifonne-
inens qu'ils font fur ces paroles _, Hoc
ejl corpus meum, n'ont aucun lieu dans
celles - ci , Hic eft fanguis meus , qui
néanmoins dans le Grec & par confé-
quent dans le Latin ont la même conf-
trudhon 8c la même analogie : leur
Grammaire les a abandonnés en ce
point capital , eux , dis- je , les meilleurs
Grammairiens du monde j ou plutôt ils
l'ont abandonnée volontairement en
cette occafion , parce qu'ils ont bien vu
que l'explication des Docteurs Catholi-
ques qui prenoienr comme eux Hoc pour
un pronom fubiianuf j leur ouvriroiï
Dissertation XXXI. < T7
un plus 1 champ pour li difpute.
tombei *.ip
tour :ire
en c. nt par i . ms
?o 3 û u x ust, 7 * ; s i r t 7 3 *.i' p* uov9
le pi ;*t>c(Ï un ad;
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T« 7
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-77 ^ Ao*. n
; ! il
:
(
Jliû j hir. 5.
$68 Dissertation XXXI.
Il y en a mille exemples dans l'Ecri-
ture. Hic ejl panls de cœlo defcendens ,
h<zc ejl vita dterna , Hic ejl h&res j hic
ejl omnium Dominus. Dans tous ces
paffages l'ancien Auteur n'a jamais tra-
duit le pronom ktc? par le fubftantif
neutre hoc, ceci : mais par le pronom
adjectif dans le même genre que le nom
auquel il eft joint. Comment donc n'au-
roit-il pas rendu, félon la même ana-
logie, cette propoilrion Hoc efi Corpus
meum f h au lieu de Corps , Jelus-
Chrift eut employé celui de chair, com-
me il le fait fouvent, en faint Jean Ch.
VI. &: qu'il eût dit dans les trois autres
Evangéliftes a?vm <£<ri » <rctp%. Peut-
on feulement s'imaginer que l'Interprè-
te eût rendu cet endroit par ce folécif-
me , Hoc ejl caro mea ? Si quelqu'un
étoit tenté de lui attribuer une Ci étran-
ge verfion , il n'auroit qu'à fe fouvenir
qu'il devoit donc mettre auffi Hoc ejl
Sanguis meus , ce qu'il n'a pas fair.
Ces propositions étant réciproques,
ont cette propriété de n'attribuer au fu-
jet que le fujet même, qui en cette oc-
casion tient lieu d'attribut. Il en efl: de
même, que lorfque Jefus-Chnft: mar-
chant fur les eaux , & après fa Réfurrec-
tion j dit à fes Difciples , qui le pre-
noient pour un fantôme ou pour un
Df S S 1 * T A T 10 N XXXI 5 G)
cfpnt : / m : C'cfl m ne ,
nonftratÎTC rV récipro-
donc le 1 9 attribue
ne.
Or eil cela il n*l int de r.rutolo-
.1 dire .
, conr
. eft plus obfi , «5c
at , il ci: plasc
a'il pai : fqa*on
firion : ^.ir hoc cjl t meum doit fe
cette d
meum. II gu:s mou ,
ejî meus. B rro mca , h*c
ces proposions
rifl foppofe potti lujet que ce
qu'il tient c\\ Ml , de H chair &
du f.ir. pour attribut que
ce corps ou ce î m , 6c que
cette chair eft U * I i ;^s >
cette cluir &: ce (kng font quelque chofe
de pi non corps , ma chair
.luire un exemple ,
clair, il en efl B la
ou-
ur ,
ienc les
uns -
i île la
ce une de
|70 Dissertation XXXÏ.
graine de coriandre ? Moïfe leur répon-
dit : IJle efi panis quem dédit vobis Do-
minus ad vefcendum : C'ejl ici le vain
que le Seigneur vous donne à manger.
Cela fe doit réfoudre j hic panis ejî is
quem dédit vobis Dominus, Propor-
tion qui fuppofe pour (on fujec que ce
qu'ils voyoient éroit du pain , & qui
énonce pour (on attribut qu'il étoit don-
né aux Juifs pour leur fervir de nour-
riture. Ce pain ejî celui que le Seigneur
vous donne,
Ain{î lorfque les Apôtres fe deman-
doient les uns aux autres , ou qu'ils dou-
toient chacun en foi-même ce que c'é-
toit que ce que Jefus-Chrift tenoit entre
{es mains, ce qu'il avoit béni après l'a-
ction de grâces , ce qu'il avoit rompu
en autant de parties qu'ils étoient de
perfonnes , & ce qu'il leur préfentoit à
manger comme quelque chofe de fingu-
lier : Quid efi hoc ? Eft - ce du pain
comme il le paroît ou quelque autre
chofe, Jefus-Chrift leur répondit : Hoc
efi corpus meum : C'ejl mon propre corps.
Cette réponfe réfute déjà l'apparence ÔC
la fépare d'avec la vérité. Elle fuppofe
de plus que c'eft un corps humain indi-
viduel , de elle attribue ce corps humain
à Jefus- Chrift. Elle fait enfin le même
{qiis que fi Jefus-Chrift fe montrant &
I) I S < P R T A T I ON JCXXl.
fe touchant loi même pre ef-
pece , eût dit aux Dii
mor. que je touche , hoc cj:
: ce que Cari
pris pour ni de i les. U
an * >llement,
ne ilu Ion
Coi
fen nier qu'il ter, i
cor. . main ex qu'il le le.
toit a mai.
ions démonf-
: leur iujet que
I un vrai v ;r , de
nfuit *.
ou',
de Jefus C luiit ii [œ
11e-
t le I le Jcfus-
I
qui ci
nmfl le
•
cv i u'il Inint le p
in , y
pa-
role I les p on
, qu'il avoit rompu ffpt
pout le diftnbuei -
572 Dissertation XXXï.
Corps étoit donc déjà produit avant
qu'il le rompît en plufieurs parties : Se
par conféquent il fut produit par la bé-
nédiction qui précéda la fraction. Jefus-
Chrift voulut montrer en cette confé-
cration qu'il ne dépendoit point des for-
mes; quoique i'Eglife , inftruite par la
tradition des Apôtres , ait appris à fes
Ivliniftres d'attacher la confécration aux
paroles. Je fais auiîi, comme je l'ai dit,
que pluiîeurs Théologiens Catholi-
ques prennent Hoc pour un fubftantif ,
qui lignifie cette chofe indéterminément.
Mais en cela ils ne fuivent point la
Grammaire : Se comme cette analogie
n'a point de lieu dans la confécration
du Calice , Se que d'ailleurs c'eft la four-
ce inépuifable 6qs chicanneries éternel-
les des Miniftres , rien n'empêche que
nous ne fuivions l'expofition des autres ,
qui étant fondée fur les principes de la
Grammaire, les retranche dès la racine.
Car que s'enfuit-il de cette expofîtion ?
C'eft que cette foule de fens bizarres Se
forcés que les Proteftans ont donnés à
cette proposition hoc ejt corpus meum j
s'évanouit Se fe diîfipe d'elle - même.
On ne la traduira plus avec Luther : Ce
pain contient mon Corps ; avec Bucer,
cette action , cette cérémonie repréfente
mon Cor/ttjavecZuingle, cepainjfïgni-
I); SERT ATI [XXI.
I
77 mé r v.
m cft en figure n
C JTXC
eff: i pré fente mon c i .
a qu'i apphq
tion
l'abfurdité palpabl
iét-
les pu .2 Jefu I
n i 1 1
la
deux proposition* , ils
d'une ma
: coiiv
s du [
qu'ils prennent ici pour un fui
ut l'ul
. heu q
hoc
i [Ht l'attribue t
( mr
[UC la
574 Dissertation XXXI.
d'eux-mêmes par terre. Ils n'allégueront
plus ces proportions métaphoriques : La
Circoncifwn ejl P Alliance ; l'Agneau
Pafchal ejl le pcijfage ; la pierre étoit
Chrijl. Les fept vaches font fept années ,
lafemence ejl la parole de Dieu. Je fuis
la porte _, je fuis la vraie vigne. Tout
cela feroitfauiTement allégué, pour prou-
ver que Hoc ejl corpus meum eft auflî
métaphorique j parce que cette dernière
eft réciproque , ce que ne font pas les
autres , dont le fujet ôc i'attribur, bien
loin d'être la même chofe, font telle-
ment incompatibles entr'eux , qu'ils ne
peuvent être attribués l'un à l'autre que
par métaphore. Car qui peut dire qu'un
tel corps & un tel fang ne peuvent être
le Corps & le Sang de Jefus-Chrift que
par figure \ c'eft la même chofe que (1
on prétendoit que Jefus-Chrift parloir
par figure <k métaphore, lorfqu'il difoic
aux Apôtres , qui le prenoient tantôt
pour un fantôme , & tantôt pour un
efprit : C'eji moi - même , ne craigne-^
point : Ego fum : Ego ipfe fum.
Tout cela eft fi évident , que Pafor ha-
bile Grammairien a reconnu , in voce
rfuToz/pag. cji. que dans t«to art to
ç-u'fj.et jaov , tkto n'eft pas feulement
démonftratif, mais encore un relatif qui
doit s'accorder, en nombre & en gciuç
i
Dlf SIHTÀTÎO r 57J
ave m auquel ilferapp< m-
i le voir pi ?o-
t\\ or-
re .i un peu plus h.
«5c i im-
Sur quoi il it cette
objection fans réplique â que (î 7«"t«
le rappor: au-
roit ifcûlin .
lilS il if ,
en difant que c'eft un
genre, an.
des . du N
ent , donc il s i ::rc
.1 \'i Ufltf
ÀûtaTOLTU Kl i C Six T&'JJA
Six t*7«
enc
ih , fui
. ni <f liTK x< & il IC tr.l-
'crmoi.
. -. 11 a bien vu
.
il eût etc
d'atuibuerauidifcouti saillie inutile*»
57^ Dissertation XXXÏ.
d'attirer la colère de Dieu fur les inn-
delles , ôc non aux fornications & aux
autres crimes que faint Paul avoit mar-
qués dans le verfet précédent. Pafor
a donc tronqué le paffage , afin que
«T/ct TdvTct , propter h&c , pût être rap-
porté ZKivoTi k oyoïçinanibusfermonibus.
Mais pour lui rendre inutile cet arti-
fice de mauvaile foi , il n'y a qu'à rap-
porter tout entiers les verfers 5. & 6.
Sache^ que nul fornicateur , nul impu-
dique y nul avare , ce qui ejl une idolâ-
trie _, ne fera héritier du Royaume de Je~
fus-Chrift & de Dieu. Que perfonne ne
yous féduife par de vains difcours \ car
ç ejl pour ces chofes-là mêmes £1 cl recv ta
que la colère de Dieu tombe fur les hom-
mes rebelles à la vérité. Qui eft le petit
Ecolier qui ne voie que ces chofes qui
ont fait tomber la colère de Dieu fur les
infidelles , ne font pas ces vains dif-
cours , dont ils ne font pas coupables ,
3c que l'Apôtre ne leur attribue pas ,
mais ces fornications, ces impudicités,
ces avarices , ces idolâtries qu'ils ont
commifes ? Cet exemple eft donc fort
mal propre à établir l'irrégularité de
genre que Pafor trouve dans ces paroles
hoc eft corpus meum. Mais on ne doit
plus s'étonner de rien, après que dans
cette proportion de faint Marc t«Vo'
Dm ht atiow XXxl jTf
r t« *r p« p«v, il rapp
pas à */V* qui eft fcnt, mais à
twoTiipiot qui n'cft point
& qui n que d.. I uc.
redonner i
pour faire ports de l'ad-
jectif , qui cit d.ms on Auteur, aufub-
iiantir , qui fi
Le II. .:n
folccifme dans 1 . . • , e!t ce que die
Jefiis-(.hrirt e « i «'*>.«< i;e^i'ctr
/xiror <ti '.9«r , pour <T«J e^/irr , ilil-il ,
parce qu'il le rapporte à t ;«//*.
.. Auîli il n'y a q
que à il cukrzt i.
a * comme il prétend , nuis i ?£t#f ,
la m, n'ifi dejuyer :
ette c\
danslc Nouveau! ettarnen: um
•th.
ii./ «m c(l
ut in cum i
L » :p.
VI l afin rien ne prot :c plus
d'évidence h Ile que
fuit les paroles hoc tfl
:tc , félon î nal ,
lib
578 Dissertation XXXI.
quod pro vobis frangitur j & faint Luc,
quod pro vobis datur : Jefus-Chrift a
die l'un ÔC l'autre , parce qu'il a faic
l'un & l'autre. Après la bénédiction il
rompit ce qu'il avoit béni , &c après la
fraction il le donna à (es Difciples : Le
premier a été exprimé par faint Paul ,
8c le fécond par faint Luc fans aucune
contradiction. Je dis qu'il n'y a rien de
plus exprès pour la préfence réelle : car
puifque Jefus-Chrift déclare que ce qu'il
venoit de rompre étoit fon Corps : Quod
pro vobis frangitur , il eft vilible que
la fraction ne tombe pas fur le pain ,
mais fur le Corps. Or il diftribua aux
Apôtres ce qu'il venoit de rompre; c'eft
donc fon Corps Ôc non du pain qu'il
leur diftribua. Si on agifïoit de bonne
foi , cette raifon perfuaderoit tous les
efprits raifonnables. On l'a touchée ail-
leurs en peu de mots , mais il eft bon
de la remettre ici en état de convaincre
les plus incrédules.
Les Miniftresn'ofent pas nier la fra-
ction du Corps contre des paroles fi clai-
res ; mais ils la lui attribuent à la Croix
Ôc non pas dans la Cène, parce qu'il fut
attaché à la Croix avec des clous par les
mains &: par les pieds , 8c que fon côté
fut ouvert par un coup de lance.
Mais comment n'onc-ils pas de honre^
DlSSERTATlo \ 1 .
non-feulement d'ajouté
ils OTOJ i
bien davantage , d
de l'aci I
allure p i
lat-Chriftne tue poiai ron
Afin dont , ci i r il , çtti (es i
mw. (
r<MJ Pi lace de Uur f.
rompre les jambes & de les ôiet
I i romvir<.
. |
lui.
Enfin
a mon . rent
:[ les jambes , mais un des Ji Idats lui
ouvrit le i
/
i
point les os de
après cela les Minifti nt-ilsp
i piller!
ntre 11
Croix le ( I
cr.i ini qu'ils n'avent traite
< : : loni ils
ont rompu par leur f< l'unité &
l'i:
lemancîera p<. tie quel-
le < ;x>ur eux
. . . raôu L..c i
b.
580 Dissertation XXXÏ.
y va de tout pour eux. Ils ont voulu
éviter l'absurdité infupportable , qui ,
félon leur Commentaire , s'enfuivroit
de la fraction de la Cène , qui eft que
le Corps de Jefus-Chrift y étoit rompu,
parce qu'on y rompoit du pain qu'on
prenoit pour fa figure, à peu près com-
me Ci en rompant une porte , on difoit
qu'on rompt le Corps de Jefus-Chrift,
parce qu'il a dit ., Je fuis la porte. Mais
quoiqu'ils faftent , ils ne peuvent éviter
la fraction du Corps de Jefus-Chrift
dans la Cène , qui eft (1 distinctement
marquée par trois Evangéliftes & par
faint Paul. Voici les paroles du dernier
félon l'Original : Je/us prit du pain , &
ayant rendu grâces , il le rompit : Pre-
nez , leur dit- il _, & mange^ , ceci ejl
mon Corps , qui efl rompu pour vous.
Qui ne voit que ce terme , ejl rompu , fe
rapporte à ce qu'il venoit de dire un
peu plus bas , il le rompit ? Que s'il
eut parlé de la fraction prétendue qui
fe devoit faire à la Croix , Jefus-Chrift
l'auroit exprimée par le futur , qui fera
rompu pour vous. Mais ce futur même
n'eût point été conforme à la vérité ;
puifqu'attacher un corps par les pieds
& par les mains avec des clous , cV y
faire une ouverture entre deux cotes ,
n'eft point ce qu'on appelle en François,
DltS lit TÂTIO \'ï. 581
ni en aucu
s , bnjcr Us os 1 ys , félon la
tomrnr.
ne .ui moi
fâtnt Paul dans un autre endr
par
24. Lt que nous rompons , ritj
Je*
,
• . ?
comme nous U //
é/? \ Croix i
■
Tt a dit : l'ous ne
■ 1
fouffer:
. I.
mer qu'on .
•
chaq M
que U le voile
le.
\ 1 1 . 1 1 i i c i p 1 u
Mi-
5 Si Dissertation XXXI.
niftres comme étant femblables à celui
dont il s'agit , Hoc ejl corpus meum ;
Se dans lefquels le verbe fubftantif ejl
fe prend vifiblement pour jignifier ou
repréfenter ; corn m e , Je fuis la porte j La
fémence ejl la parole de Dieu»
Lorfqu'ils font cette objection , ils
font voir qu'ils n'ont jamais bien com-
pris la nature des proportions figurées
ou métaphoriques. Il y en a de deux
fortes. La première eft de celles où la
ligure eft attribuée à la vérité , comme ,
Je fuis le pain vivant. La i. eft de celles
où la vérité eft attribuée à la figure ,
comme , La fémence ejl la parole de
.Dieu, Les Moiffonnenrs font les An-
ges, La pierre étoit Chrijl. L* Agneau,
ejl la Phafe ou le paffage du Seigneur.
La Circoncifon ejl l'alliance. Les fept
bxufs font fept années. 11 y a cette diffé-
rence entre ces deux fortes de propor-
tions , que dans la première où la figu-
re eft attribuée a la vérité _, le verbe fub-
ftantif fe prend pour rejfembler , avoir
quelque chofz de femblable. Jefus-Chrijl
ejl l'Agneau de Dieu> veut dire Jefus-
Chrift eft femblable à un Agneau 3 &c.
an lieu que dans les fécondes où la vérité
eft attribuée à la figure , le Verbe fub-
ftantif fe prend pour être jigne j figni-
fier , repréfenter ; la pierre étoit Chrijl ,
Dissertation' SOOtL
veut dire , / Jejus-
Cknjl.
Sous 1 1 • deux c î .1 1 Te s de
r-il maintenant r.inger
[ueftton , ; pus
■
1 .1 | ' : .
;lt n'eft
pas la >:t une
ride in< de h réfoadre en
termes : Ce . ou ejl
' ifiil Luit que
les Minières retranchent du nombre de
leurs r ■ ou la . cft
attribuée a la vente op~
pofcnr fans ce L- , comme ce
fuir. :e. Je J v. Je-
le lion
de lu Tribu à ' . Il fautt d HK i
, //, . e/0 d r | Ions la fé-
conde c l.i (le , où li •
à la figWt ^ comme , / 'pierre
Ch' . ■: l'expliquer aii Ce
^wr je tiens cfl le de
1
ces n
lieu q '.:
it cn-
run de ihn
i ,11 y a une grau
Bb iv
584 Dissertation XXXI.
entre une pierre & Jefus-Chrift : on a
donc pu dire métaphoriquement , La
pierre étoit Chriji. Mais cette figure n'a
aucun lieu dans les proportions récipro-
ques & démonftratives , où le fujet ÔC
l'attribut font la même chofe. Ce n'efl:
pas une métaphore que de dire fimple-
ment : C'ejl ici le pain que Dieu vous
donne à manger. C'ejï ici mon Sang que
je vous donne à boire ; ni par confé-
q,uent celle dont nous parlons : Ceft ici
mon Corps que je romps pour vous. La
raifon de celaeft: , que rien ne s'attribue
a foi-même par métaphore, mais dans
un icns propre de littéral. Cette régie
fejuftifle dans toutes les proportions
figurées., &c même dans celle où la fi-
gure efl: attribuée à la vérité.
2. Pour détruire fans reflburce cette
««explication , Ce pain figure ou repréfente
mon Corps j que les Miniftres s'obftinent
de donner à Hoc eji Corpus meum , cotv-
tre l'analogie des autres proportions du
même genre ; il faut établir cette fé-
conde différence , que les proportions
métaphoriques du premier genre , c'eft-
à-dire , qui attribuent la figure à la vé-
rité , ou font expliquées par ce qui fuit
immédiatement , ou bien on en laiiïe
l'explication à chercher au Lecteur ju-
dicieux : Je fuis la porte , eft expliqué
Dissertation XXXI. 585
b fuite : Si que/qu'un entre par moi 9
il Jl Je fûts la vraie vigne ,
mot: cjl le vigneron , trouvent
explication dans ce qui fou ; h
ihera toutes les hanches qui ne portent
:t de fruit en me: ; ex plus bas : Je
la. vigne > & :es les branches,
11 v en I d'au .renr (ans
Aciiion y parce qu'elles font aifées i
1
Dieu par l'immolation qui l'en doic
us fon te
Mais il 1 le même des pro-
pofitions du fécond :ri-
QC le nom de la vc
Elles font tOOJOnrs tn contraire l'es
\encc tfi i ' :mp
ejl le m les
es y expl
La L eft le figne de
fi le pajjû
s mtnao-
i'immola-
•'
Ch -rtc
Mébreai , &
.m y il Ci
ainh
Si d ( une
. v
i'
586 Dissertation XXXÎ.
proportion figurée , où la vérité eft at-
tribuée à la figure , cJeft-à-dire le corps
au pain , quelle eft cette parabole pré-
cédente dont elle eft l'explication r Si
Jefus-Chrift ayant pris du pain eût dit
à fes Difcipies : Voyez-vous ce pain qui
a été femé dans la terre j battu dans la
grange , moulu &: réduit en farine , pétri
par la main des Boulangers , 8c cuit
dans le four, ceft-là mon Corps , ou ce
pain repréfente mon Corps , qui doit en
fa manière recevoir toutes les façons du
pain : Je n'aurois rien à dire pour em-
pêcher que cette proportion ne fût mé-
raphorique , & que la vérité n'y fût at-
tribuée à la figure. Mais il n'y a ici rien
de femblable. Jefus-Chrift prend du
pain , & après l'avoir béni, il déclare
que c'eft fon Corps. C'eft donc un chan-
gement d'une fubftance dans une autre ,
& non l'explication d'une Parabole.
Dissertait XXII. 587
1)1 RTATIO N X XX I I.
Matth. X\\ [. v. 2S. Hic
enim :is novi 1
■;;: , qui pro mal ils cffundc-
in remijUoriem lorum.
Concord. 1
Jintinuerri pir la ce :ion du
1 qui
la pré-
nçé la
i ini 1 1 un.
I. ' \rijt prit -vc U (
a prêt fouper. Le
îftic fui
•ûre
1
rite .il. '
ne it que du vin qui
ir , en : il
du d b <ii< de li ^Ue
qu'il .1
I
ir cou
gui
IL // rendu grdca Perc |
15 b
588 Dissertation XXXII.
qui enferme auflî la bénédi6tion. II y
produifît donc un changement réel. Ce
ne fut pas dans la quantité par la mul-
tiplication , ni dans la qualité par l'a-
mélioration du goût. Ce fut donc dans
la fubftance par une vraie converfion de
la fubftance du vin en celle de fon Sang.
Si on met le changement dans la ligni-
fication , c'eft un changement imagi-
naire &c arbitraire, qui dépend du bon
plaidr de l'homme , & qui ne demande
pas une puiflance infinie.
III. Buve^-en tous , car c'eft ici
mon Sang j hic eft enim fanguis meus. Il
paroît claitement , comme je l'ai die
dans la Di(Tertation précédente, que Hic
eft l'adjectif de Sanguis ; ce qui fait cet-
te proportion réciproque, hic fanguis
eft fanguis meus : Cefangeft mon pro-
pre Sang : & que par conféquent Hoc
eft aufli Tadjeàif de Corpus : parce que
la même conftrudHon fe trouvant dans
les deux proportions , fi le pronom eft
fubftanrif dans l'une , il ne peut pas être
adjectif dans l'autre.
On n'en peut mieux juger que par les
paroles de Moïfe , d'où celles de Jefus-
Chrift ont été empruntées. Ce Prophète
établiftant l'ancienne alliance de Dieu
avec les Juifs prit du fang dans une
coupe j & en les arrofant , il leur dit :
l)l Ifl JLTATtOM XXXII. jtf?
1 ici le fang de l'alliance c. Dieu M
faite avec vous. 11 eft viiiblc «que cela fe
doit tcloudte par ces paroles : Ce /
ejl le jang de l'alliance , 6c, Un y
luppole que le (angen eft le fujec , éc
on affirme que c'efl le ; ! l'alliai
11 Faut donc rcioudte en i >rte
la propolîuon de J< Chrifl H., cft
^uis rr.c I ejlamcnti. Ce fan g cft
monpropn ,Jur lequel je Jonde la.
nou\ icc,
IV . Un peur encorerirer decetteallu-
fionauxparo iié , un argument
:.i dern nce pour 1 :kc
le. Le (ang du vieux I ( . nr ,
dont Moile atrola 11 peuple un
\ . A plus fb«C raifon
le fane de la nouvelle alliance , d
1 I :oic la i (es
Dii pas un fang iymholicjue
ou figurât il
d'une vîâime rcelie. (le
du vin qui figure du i ai
! [ mê-
me lu a la y
■
ne. in Qui
.au .i la ( JOUI , ••
lefus-Çipin : c
59^ DlSSERTÀTTON XXXI.
vrai fang qu'il donne à boire dans la
Cène , & non pas du vin.
VI. LaConfécration du Calice, félon
faine Luc , ne marque pas feulement la
préfence réelle , elle démontre encore
le facriflce dans l'action de la Cène :
mais il faut auparavant remarquer , que
félon les Evangéliftes , elle fe lit en deux
manières. Saint Matthieu & faint Marc
la conçoivent ainii : Hic efl fan guis
meus novi Tejlamenti , qui pro multis
effunditur. Cejl ici mon fang , le fang
de la nouvelle alliance , qui efl répandu
pour plufîeurs. Saint Matthieu feul
ajoute : In remiffionem peccatorum , en
la remiffion des péchés : ni l'un ni l'au-
tre ne font aucune mention du Calice.
Mais faint Paul & fon Evangélifte
fàint Luc l'ont écrite en ces termes :
Hic efl Calix novum Tejlamentum in
meo fanguine : Ce Calice efl, la nouvelle
Alliance en mon Sang. Saint Luc ajoute
feul: Qui pro v obis ejfunditur : Lequel
Calice efl répandu pour vous. Il ne fe
fait ici aucune mention, de la rémillion
des péchés. Ainfi ces deux confécrations
différent entr'elles , en ce que la féconde
fait mention du Calice dont la première
ne parle point: & que la première étend
* plufîeurs , pour la rémiiîîon des pé-
chés, l'efFufi on du fang que la féconde
Dissertation XXXII.
traîne iimplement aux Apôtres. I
diri -les ; ex fan*
donner l.i ces deux co..
expliquer l'une par
1 icrc » rien lus naturel que
due que Jetus-( Juilt les a pronorK
touces deux comme elles font rappor-
tées vains qu'il a
vou lec deu | cft niions
(ba la: fur la Crois , U
feint int Marc, q
ten pluheurs pour la remit:
de leurs pécnéf : l'aa ni la Ceœj
félon faim Paul 6c ftini l oc , q li en
failanr .'ion du ( . ilice ,
ce le U du
fang ■HZ fi la eij
mec i eth,
lellement dans le Calice ,
fled icedaoi 11 boache des A
ire* pal la (. 'ommur.
il v a erhilion de m les l.om-
I , il y a un vrai
peut c menr I
Luc, qui i
ilice, <
l'Ori •...! 1 l nda
r nous t il n I ;
qu ce qu il t
s'il croit vuide , on lue
qu'il tut répandu. ( raifon
'592 Dissertation XXXIT.
du vin dont il feroit plein. Ce feroit
une folie de dire que le vin a éré ré-
pandu pour nous. C'eft donc à caufe du
Sang de Jefus-Chrift _, & par confé-
quent le Sang de Jefus-Chrift eft réelle-
ment dans le Calice , ce qui fuffit pour
la préfence réelle ; Se ce fang eft répan-
du pour nous , ce qui eft nécefTaire pour
le facrifice. C'eft le même fang , qui
félon les Evangéliftes j a été répandu à
la Croix & dans la Cène ; avec cette
différence , qu'à la Croix il a été ré-
pandu fur la terre pour la rémiflion des
péchés; & que dans la Cène il eft ré-
pandu dans le Calice par la tranfubftan-
tiation du vin , & du Calice dans la
bouche des Apôtres par la Communion >
pour leur donner part à la nouvelle al-
liance dans ce gage facré.
On voit clairement que Jefus-Chrift
dans route cette action fait allufion à
celle de Moife , qui remplit une coupe
non du vin , mais du fang des animaux >
Ôc qu'il répandit fur le peuple , en di-
fant : C'efl ici le fang de l'alliance ou
du Teftament que Dieu a fait pour vous.
Comme fi Jefus-Chrift difoit : Autrefois
Moife a célébré l'ancienne alliance de
Dieu avec vos Pères , lorfqu'il répan-
dit fur eux des coupes pleines du fang
des animaux, Et moi je fais la nouvelle
Disserta tion XXXII. 5 9 j
alliance avec vous, en répandant
fur vos Imbus , mais dans vos corps ce
Calice plein , non du 1. animaux,
mais de mon propre Sang. L'allufion
tt I rre les coupes de Moïfe c\: le
Calice du v ;ir , entre l'cfluiion |
s & l'efl :eure , entre
le fang des animaux foj-
Chnft j cri-
de Moïfe & le (acrifice de Jefus-
ilt. Que ii au lien 1 Sang
tàCté les Miniït: ltituent du vin ,
qu'.ls an Eu iboliqoet
2 en 6g .; j , q
a-t-il de plus fioul !
fane que toi: :e allai
que Moïfe aura établi l'ancien Telta-
ment avec de vr . ; , & que Jefus-
( hrilt n'aura : m'avec
du vin qui n'clt du lang qu'en pein-
ture & par fuppolition?
(^uq répondent à cela les Minières ?
Ils n'ofenc pas rap; au
vin, qui M fe rroir. e ni
ni dan ; au
1 de la rapporter au ( toit
: & ci 1 mains de Je!
( ni pal le tutur au
■
! i fernbfa uic
. tiaduu amii l'Ç
594 Dissertation XXXII.
ginal , In meo fanguine qui pro vobis
Jundetur , où le pronom qui femble fe
rapporter à fanguine , qui précède im-
médiatement, ck le futur fundetur ne
paroît fîgmfier que l'efrufion future à la
Croix.
Pour commencer par ce futur , rien
n'empêche qu'on n'entende FefFufion
Sacramentelle qui ne fe faifoit pas en-
core au moment où Jefus-Chrift par-
loir , mais quil ailoit faire incontinent
après par la Communion des Apôtres,
Mais comme lavulgate n'a point d'au-
torité parmi les Proteftans , il efl: éton-
nant qu'ils l'appellent à leur fecours ,
lorfque l'Original , lequel feul efl: leur
Ecriture Canonique, les condamne vi(î-
blement. 11 le faut donc confulter pour
terminer ce différend.
Il porte tovtq <&o'ansipioVy » Katvti' «T/-
<&9h ki) iv Ta ai [aati ^tou, ra> t/«"*p vfxav
iK-^wofxîvov. Ce que l'ancien Interprè-
te , en exprimant le verbe qui efl: fous-
entendu, atournéen cette forte : Hic eft
Calix , novum Teftamentum in fanguine
tneo j qui pro vobis fundetur» lia rendu
le préfent i*y^vvôpivov par le futur fun-
detur ^ qui peut fe traduire par un tems
qui tienne le milieu entre l'un & l'autre ,
qui va être répandu pour vous : Mais
ce n'eft pas la plus grande difficulté.
Dissertation XXXII. < 9 f
Celle! uioi le rapporte
«c pronom cV: ce verbe qui jundit:.
jtofAtrzv. On avoue , qu 1 le
Latin, il fe peut coaftruin CaltM
ou avec Sanguine, Selon le premier
rapport ,1 .iro-
pour les traduire : Hu I
pro vobis fund;i ur y no vu m
m mec uuu. Selon le fécond ,
que les Mimihes foutiennent , il hu-
droit lire ,//'.. C l eftan:
tum ejl in mco J. 1 oèis
fundstur. 11 n'y a que l*( il qui
puille déterminer leqi.
rapi . cV l'on voie
d'abord que c'clt le premier , parce que
I Movîtot fe rapporte à wot *ip/or,quî
eft au même cas t Bc DC le peut conftruirc
: &i* y.*i 1 , on D vec un Z-
blatif. Ainfi il faut traduire, ic t\:fic€
qui vj être repandu 1 us efl le nou-
cjlcrm s mon S
Quelque icre que loit cette com
s qui s'en font
ics ne la 1
hir. I! ntironc jamais que le
( du Sang idu dam la
( j pour i , ili
plui 1 UC , le plus ^
ir un i
nie- qu'ils font , l< tique
59<> Dissertation XXXII.
pour empêcher l'efFufion du Calice , ils
fe fauvenc encore ridiculement dans le
foiecifme iv t& df(j.a,Tt iv.yyvoiJ.ivov ,
c'eft- à-dire , dans la conftruclrion d'un a-
blarif avec un nominatif, Infanguinemeo
effundendus. 11 eft vrai que pour excufer
un peu cet Evangélifte , ils lui cherchent
des exemples femblables. Mais par
malheur pour eux , ils n'ont rien de
commun avec celui-ci. Ce font des fo-
lécifmes apparens , où l'on fous-entend
toujours quelque chofe qui empêche le
vrai folécifme. Centauro invehitur man-
gna , fup. Nave. In Eunuchium fuam ,
fup. Comœdiam : Comme nous difons ,
au terme de lafaint Martin , de la faint
Jean , de lafaint Michel, en fous-enten-
dant la Fête. Mais dans le folécifme
prétendu de faint Luc , il n'y auroit
rien de fous-entendu , & le nominatif
iv.yyvott.ivov fe conftruiroit crûment a-
vec l'ablatif af^cnt : faute groflîere con-
tre la Grammaire, dont faint Luc n'étoic
point capable ; ou plutôt infortunés
Grammairiens , qui ne fe laiflTent point
d'autre reffource pour le faiut que dans
la prétention que le plus élégant de tous
les Evangélifles a fait un vilain folé-
cifme.
De plus ils allèguent de faux folécif-
mes dans le genre j pour en excufer un
Dissertation XXXII. < 97
le dans le cas. Ils CICCDI
la l'Apocalyplc c. 1 . v. /. at' u-. rvl't#«
Xpi<« 0' 'wapTup 0' *w/f :< , poarairc
t2 ;■ » Mais cela n
plus preflànr, parce que l'ai prend
bavent la
ex' (ans aiîei plus loin on 1;
plus bas , Kat) t« ô «r, K«t; 0 nt , **/ •*
11 a. A mil la t: .qui
emploie un cal pOBJ un aut; roit
une (on 1 ine dans le livle d'un
I rirain aulli pu tuflS coxreâ que
faim lue.
Puis donc que pour déterminer
ex prenions équivoques dune veriion
comme eft la \
cour^ .1 l'Original , où la mèmeambi*
pur : , il efl 1 lair que
ces mots : Q qui
ibleni fe rapp 5 , com-
•Q pli;
efte |uoique plus
parce que; (,vr«ptM< ne le peut
conftruire qu'avec -woTHp/or.
Il 1 luteui qui attribuant
.nt au
i.uilent pas de la rapp
celle qui s Mail j.
il d'une extrême duretc i car
ore qu lans le ( .dite
a la CCOÎS , ou M ptttl
598 Dissertation XXX1Ï.
néanmoins dire de bon fens : Ce Calice
fe verfa à la Croix , puifqu'il n'y fera
pas porté. C'eft comme Ci un Pourvo-
yeur du Roi difoit à un de (es amis ,
cette bouteille de vin que je vous donne
fera verfée à la table du Roi, parce que
c'eft du même vin qui y fera fervi.
Les Miniftres objectent que lorfque
Jefus-Chrift difoit aux Apôtres : Bibite
ex eo omîtes : Buve^-en tous ; il ne
montroit encore que du vin qui étoic
dans le Calice , & il les invitoit par ces
paroles à en boire , parce qu'alors les
paroles de la confécration n'étant pas
encore prononcées , le fang n'étoit pas
encore produit. Les Apôtres donc ne
burent que du vin _, parce qu'ils ne bu-
rent que de ce qu'il les avoit invités de
boire , c'eft-à-dire , du vin. Ils peuvent
dire,, & ils difent en effet la même
chofe de la confécration du pain. Les
Apôtres mangèrent ce que Jefus-Chrift
les invita de prendre &: de manger _, par
ces paroles : Accipite & comedite. Or
il ne tenoit alors que du pain en fes
mains , ôc il ne les invitoit à manger
que ce qu'il tenoit. Ils ne mangèrent
donc que du pain.
Mais ces deux argumens ne prouvent
rien dans la fuppofition que Jefus-Chrift
a confacré le pain & le vin par fa bé+
DlSSFRT ATION XXXiî. < f)f
ncdi ( ue l'invitation a man
a boire tue pofterieure à cette b
ce ; & par conféqaooi le
lin
itation. )
pain j il h & le romy
à Je s 4 P-cr.
de m [ lice y il rendit v il
leu' en to..
11 faut donc recon ;ns la
confécration da Calicejefa
île une nouvelle tlli dont il prend
fon
ou L i , cV le C !
poi::
que l'un ex l'autre cil le
l'ail. unerc
comme de la Circon
ic un '
allianc s entre I Do
alliance était cou
horooM » Du îles
n pli lie;
cor. elle exigeoit d'eux,
me donc 1 d'une
ni 1 1 naturels , la
ne.
11 en cil dis je , lie nu me en cette
occalîon. | blff IVCÇ lc9
lumuuv* unealluiiwC ;vu il lau M lm*
&oo Dissertation XXXII.
faveur un Teftament , dont le fceau efl:
fbn Sang , & dont l'inftrument eft le
Calice plein de ce Sang précieux. C'eft
en ce fens que Jefus Chrift dit à {es
Difciples : Ce Calice qui efl répandu
pour vous ejl la nouvelle alliance en mon
Sang, La condition du coté de Jefus-
Chrift eft l'erïufion de fon Sang dans
le Calice. Celle qui regarde les Fidèles,
c'eft d'en boire \ de ainfî le Calice eft un
infiniment commun aux deux parties
qui contractent , pour accomplir chacun
fa condition , & en tout cela il n'y a ni
figure ni métaphore.
DISSERTATION XXXIII.
Matth. C. XXVI. v. 29. Dico
autem vobis : non bibam amodo
de hoc genimine vitis , ufque in
die m illum , ciim illud bibam
vobifeum novum in regnoPatris
mei. Concord. C. CXXX.
J'Expliquerai en mème-tems avec ce
partage de faint Matthieu deux autres
de faint Luc j qui y ont du rapport ,
Chap. XXII. v. 16 & 18. Le premier
regarde l'Agneau PaJfchal que Jeius-
Chrift
DlSSF RT A TION MI. 60 1
Cluiit ; ir ird< m fou-
han i pies , |
ce qu'il n'en i ii j Lis jufqu1 1
que ims le
K . . 1
/ . !
1 us-Ci
l.i cal
:
tour , pari Ju
fruit de l.i
de Dieu ! i
que
ium I) I ^ur
_ j'ai mil a lu tète ii
i.
II v .i i!c rident
le p lui
i un Se
gale qui le du
comme bint Matthieu l'.i placi
.i élOll pleine
du v ;it j il leur plaie
qu'il .. cela une récapitulai
ai: tancer.
ivanc l'écablifleroem c:
l
l onu il
<i02 D I SSERTATION XXXIIL
On voit déjà combien ce dérange-
ment eft violent. Qui pourroit fouftrir
cette fuite qu'ils attribuent à faint Mat*
thieu l Buve% tous de ce Calice. Car
c'ejl mon fan g y le fang de la nouvelle
alliance qui fera répandu pour plufîeurs
pour la rémiffion des péchés. Je vous
afjure que je ne boirai plus du vin de la
coupe légale , dont fai bu tantôt _, juf-
quà ce jour> &c. Qui ne feroit , dis-
je , choqué de ce changement de dif-
cours qui pa(Te tout d'un coup du Sang
de Jefus-Chrift au vin de la coupe lé-
gale qui étoit paffé il y avoir du tems ,
ôc dont il n'étoit plus queftion l Ce
n'eft pas ainfi qu'il faut attribuer des
récapitulations aux Evangéliftes. Mais
pourvu qu'on fe tire d'un mauvais pas ,
on ne fe met guère en peine des confé-
quences , & fi le bon iens n'y eft point
intérefTé.
Ce n'eft pas ici la feule difficulté
que ces Auteurs ont à dévorer. Il faut
encore qu'ils paftent par-deiïus toutes les
différences qui féparent ces deux pafta-
gçs & les empêchent de fe confondre.
Saint Luc dit en général : Je ne boirai
plus du fruit de la vigne. Non bibam
de peneratione vitis. Saint Matthieu au
contraire, ajoute le pronom demonltra-
tif pour marquer un vin particulier. Jc>
Dissertation XXXIII, i
ne boirai plus de ce (t..
Selon le p: : inn-
plemenc «S: ablolumcnr qu'il n'en boi-
ra plus jufqu'a CC que le règne df 1 )
Del reniât. ( !c qui I U*il
en ait bu après ce4
île donc, i le
iriftmarqu oncrai-
re un : .1 il allure q
boira : Non è i
m illud bit dm. Enfin ,
uini Matthieu r lu'il le boira noo-
fd 1 < Jans le
91 /7/W /•.
. • • - ••. . . s.
Luc ne dit nui d
pour confondie cnlemble ces deux |
s on u*a ( -s deux mots
qui leur (bienc communs. Je m
I , B0A , CC qui B*eû p.is confi-
dcrable. Au lieu qu'on a tffoîl on qua-
tre différences pour tes distinguer, fans
compter l'interruption à contre tems du
diL Ifucfa ui efi la
choie du monde la plus choquante.
P faire donc un fens commode H
une fu n n'a q
laitier chaque pafTage en la place
ont mis les I liftes. 1 r de
iiuu Lu* | avant la manducai
( .
£04 Dissertation XXXÎIT.
l'Agneau Pafch.il. Le fécond du même
Evangélifle , à la fin du fouper ou de la
Cène légale. Le troisième qui eft de
faint Matthieu , après la Cène Eucha-
riftique. Et ces 3 palTages ainfi difpofés
fe communiqueront une lumière mu-
tuelle. Ce qu'ils ont de commun , qui
éd. que Jefus - Chrift déclare qu'il ne
inaugura plus, ck qu'il ne boira plus j
c'étoit pour difpofer de plus en plus fes
Difciples à la féparation prochaine qu'ils
n'avoient jamais voulu comprendre.
Mais les deux premiers qui regardent la
Cène légale , les préparent particulière-
ment au Myftere de l'Eucharistie qu'il
alloit établir immédiatement après; &C
ils préviennent leur efprit , fur tout le
fécond , contre le rapport des iens , qui
n'y dévoient appercevoir aucun change-
ment fenfible.
Dejiderio dejideravi hoc Pafcha mari'
ducare vob/fcum. 11 témoigne qu'il avoit
toujours fouhaité avec ardeur de man-
ger cette dernière Pâque avec eux, non
précifément parce que c'étoit la dernière,
ce qui n'étoit pas une matière de ïou-
hait \ mais parce qu'étant une figure il
devoit l'accomplir par l'ufage de la tou-
te-puiiîance & de la fouveraineté que
Dieu lui donnoit fur les créatures , eu
les changeant jufques dans le fond de
DlSSFRT ATIO
le ii (t ce q le It
plu
m rè-
gne :uc je n'en
qu\ de
l
:
S p Trie qui
eft
liftinû
l eft a
. :ie , que I
gne.ui Pu' fur \\
cres
orc
a coup
inter v\ s quod
nec
Dt ! i ?cte
i
je ne , i <ta /^u/V </<-
^a<r /* fcgnc de !
( nme il n
j , il . ilumeoc le
Ei il . J
ni
6oS Dissertation XXXlIl.
boira plus du tout jufqu'à l'avènement
du règne de Dieu, c'eft-à-dire jufqu'à
rétabliflfement de l'Euchariltie où il de-
voit changer le vin en fon Sang. Parce
que la coupe légale dont les Apôtres
buvoient l'un après l'autre _, étoit la
dernière circonftance de la Cène Paf-
chale , Se qu'elle fut immédiatement
fuivie de TEuchariftie.
Qu'y a-t-il donc de plus exprès que
cet avis qu'il ne boiroit plus de vin ,
pour prouver la préfence réelle de fon
fang , Se pour prévenir £es Apôttes con-
tre les apparences fenfibles du vin? De-
puis cette déclaration ils lui virent ver-
fer. du vin dans la même coupe j il en
but le premier , Se enfuite il la leur pré-
fenta à boire. Mais ils étoient avertis
que déformais jufqu'au règne de Dieu
il ne boiroit plus du fruit de la vigne.
Ainfi ils étoient perfuadés que ce qu'il
alloit boire dans la coupe Euçharifti-
que j & ce qu'ils alloient boire après
lui, n'étoit point du vin comme il l'y
avoit verfé _, quoiqu'il en gardât encore
toutes les apparences, mais que c'étoit
fon propre Sang, ain(i qu'il l'appella :
Hic eflfanguis meus. Et cette particule
jufques , donec , n'efl: pas une preuve qu'il
a bu du vin dans ce qu'il appelle le rè-
gne de Dieu, On fait que parmi les
STATION XXXIII.
Hébreux elle marque la continuai I
d'une achun ne ounllion
un certain ternie , nie l'une ou
l autre continue tp it qu'elle foie
interrompue , parce qu'on n*a
qu' .me qui naturellement au;
pu l'inccffompi
itin après ces deux préparations j
l'une par I pour la pro-
liotl d ( >rps j i : la
coupe légale, | de
(on . il inftitlli l'Eu i< lan$
tvoii bu de
.
ex hoc
cmnes ; il leur déclara dans le
h ,:, que d is il ne c
plus ce Mvlk-re avec > fa
réfane&ion. Je \ .s affure , ! • il ,
que je ne plus jV : la
\ igné y jmfqttà ce
nouveau «: dans le
de mon Père. Dico auten:
bibam amodo de hoc genim
in diem illum , cùm
cum novum in regno Partis met.
Dans ce
en f>>nt toute la difficulté > c ont
>in dexp
I premier
I s'il a n le la cou-
£08 Dissertation XXXIII.
pe légale , pourquoi ,. dira-t-on, chan-
geroit - il cette expreflion littérale en
métaphore, pour l'attribuer à Ion Sang?
Ce feroit une pure équivoque. C'eft
donc une marque ou qu'il n'y avoit à la
lettre que du vin dans la Coupe Eu-
chariftique , comme le prétendent les
Pioreftans , ou comme croyent des Au-
teurs Catholiques , que ce partage de
faim Matrhieu ne regarde point la cou-
pe Euchariftique, mais la coupe légale 3
& qu'il dit la même chofe que celui de
iaint Luc , qui avec quelques différen-
ces regarde uniquement la coupe lé-
gale.
Mais comme ces différences font ef-
fentielles, il n'y a pas moyen de con-
fondre ces deux partages. Et fans fortir
du terme que nous expliquons j Jefus-
Chriit. appelle fon Sang du même nom
métaphorique dont il avoit littérale-
ment exprimé le vin matériel. Mais il
y a une grande différence entre le fruit
de la vigne en général , non bibam de
generatione vitis , Se ce fruit de la vi-
gne en particulier, non bibam de hoe
genimine vitis. Le premier fans reftric-
tion ne peut être que du vin matériel
& littéral; mais le fécond qui eft déter-
miné i. Par le pronom démonftratif, de
lioc genimine vitis ; i. Par un certain
:SSERTA7I0N XXXIII. 609
jour prcrlx , où il en doit boire encore
avec le u/aue l:l &*m '//-
ran\ •: illud . novum. 1 ut ce-
la, [ue un certain fin par-
ticulier d it au:r
eft pas de
véritable vin. 11 ci iicule de dire
cjue Jefas-Cbrift la vin n
&tour - dupreToir dans le Ro\
n a vin mé-
:]uc. On n'en peut marquer que
les
«
'1rs de la rcli I
: plus bas que I irift n'a point
. bue ce fruit lîrs
été: Il ne refte donc
| . quoi -tte
exp.
ChriOlui
.
.s la fuite la réruai -
féconde f
ic :
/
l
ns le I
6io Dissertation XXX1IL
il eft refTufcité immortel , glorieux , fpi-
rituel : & l'on peut dire que c'eft ce vin
nouveau de l'Evangile, dont les Chré-
tiens étant enyvrés par la communion
avant que de s'engager dans la carrière
du Martyre , n'ont point fenti les plus
cruels tourmens. La réfurrection géné-
rale rendra le Ciel & la terre tout nou-
veaux, & celui que Saint Jean vit aflls
fur le trône , déclara qu'il alloit faire
toutes chofes nouvelles : Ecce nova fa-
cio omnia. 11 ne faut donc pas trouver
étrange que Jefus - Chrift repréfente
comme du vin nouveau , fon Sang re-
nouvelle par fa réfurreétion.
La troifieme difficulté regarde ces
mots : dans le règne de mon Père , in
regno Patris mel. Mais après ce que
nous venons de dire, il eft aifé de ju-
ger que c'eft l'état glorieux où Jefus-
Çhrift eft entré par fa réfurrection. Le
règne de Dieu ejl l'ufage & l'exercice
que Dieu fait de fa toute puiflance & de
fa fouveraineté abfolue fur les hommes
Se fur les créatures, dans la nature par
les miracles & les prodiges j dans la
grâce par la converïion des âmes , ôc
dans la gloire par la communication
immuable defoi même,, félon laquelle
Dieu fera tout en toutes chofes. Les
exemples de ce fens du règne de Dieu
Dissertation XXXIII. tu
fe trouvent par-tout dans le nou%
:atnenr. Pour la nature , .nts
dans l'Apocalvpfe rendent grâces
de ce qu'enfin il a voit \ ion
de fa gnnde pui
c tmmençou a :
te m tu a m :m & rei
Chrift appelle b u! LKre&l ■ ::
la gloire de Dieu. / I
! choft que 1- Pour
la B la coi .unes e(t
ouj lins tout 1 El
! que Jclus-
Chnit <it la proximité du re
de Dieu , t 'tgnur:
parce au'al !> Dieu règne lur
I I ; t i , fur le ccrur >S: !
i'aino-.: : l'homme m
&' extérieur par 1'. Poui la
5.1
, !.i J
gurarion qui n'était qu'il >u-
Ôc qui le cru
iae & nnmenfe j
tm <Pei ver.
il. ^ W-
* "G
^fîguri*
don ^loticuf»- de Jefu -
6n Dissertation XXXI1Ï.
gne de Dieu _, combien plus Te fera fa
réfurrection , dont la Transfiguration
n'éroit qu'un léger elîai ? Et n la con-
verfion du pain & du vin en fon Corps
& en fon Sang , eft un des plus grands
effets de l'empire de Dieu fur les Créa-
tures , pourquoi l'Euchariftie ne fera-
t-elle pas en ce fens le règne de Dieu?
Et pourquoi Jefus - Chnft . n'aura-- 1- il
pas pu dire en parlant d'elle, qu'il ne
mangera plus de l'agneau Pafchal , &
qu'il ne boira plus de la coupe légale
jufqu'à ce que l'un & l'autre trouvent
dans le règne de Dieu ( je dis dans l'Eu-
chariftie ) la vérité qui les accomplira.
Donec ïmpleatur in regno Del _, donec
reonum Dei reniât. Il elt au moins très-
a
probable que c'eft le vrai fens de ces
trois palTages j & il eût été à fouhaiter
que nos Interprètes n'euffent pas privé
la préfence réelle d'une preuve fi confi-
dérable, en fe déclarant pour un autre
fens aufli forcé que celui-ci eft naturel.
Ils prennent ce fruit de la vigne dans
faint Matthieu pour le vin de la coupe
légale dont parle Saint Luc. Mais com-
me Jefus- Chrift déclare qu'il n'en boira
plus jufqu'à ce qu'il foit dans le Royau-
me ou dans le règne de fon Père, c'eft-
u-dire félon eux dans le Ciel \ il paroît
déjà que cette déclaration eft fauffe,
^ERTATION XXX'III. 6\)
puiiqu'au rapport de Sauu 1 il a bu
& mai .
furrection , àc avant qu'il montât au
Ciel : Qui -:us
Ces ÀuCCUfl \ : bien nier qu'il
eût bu du vin. Mais au pis aller ils i
pondent que Je lu s Chri n*â
; bu comme a s pour ire
a l.i la nature , mais en pal-
fant , a \\ d ns en tenu ,
pour prou. >n,
•
Ain nie q lut de
la ne ou d\.
à la 1 du Tour. Il
I la
ne raifi n qu j il n'a
poinr bu a is-Chrift a
I
finis
e ( loiquM en ait bu depuis a
i. J, « l ire que dam le
ne il de bo (
u'il n
I
2
6i4 Dis sut atiok XXXIII.
le boira tour nouveau , en îniinuant
qu'il l'avoit bu vieux dans la Cène,
deux circonfbnces auiîi faufTes quelles
font vaines & frivoles.
Pour éviter cette idée ridicule, nos
Auteurs laiflfent- là le vin de la coupe lé-
gale, qui ne fe pourroit plus foutenir.
Ils rapportent ce fruit de la vigne à la
vie heureufe du Ciel ; Ôc pour juftifier
ce fens , ils allèguent que lorfque l'E-
criture parle du Royaume de Dieu fous
l'idée d'un feftin ou d'un grand louper,
elle entend toujours la félicité du Ciel.
Mais il efl aifé de leur répondre que
cela n'eu: vrai que lorsqu'elle le propofe
fous l'idée d'un grand repas ou du boi-
re & du manger en général , comme il
paroît dans Saint Luc , quelques ff. plus
bas. Je vous de/Une, je vous prépare le
Royaume , comme mcnPcreme l 'a prépa-
réj afin que dans mon hoyaume vous
tfiahgie\ & luvie% à ma table. Luc,
cap. xxii. 19. Mais que cela n'a point
de heu lorfqu'il s ogit d'un mets ou d'un
breuv.ige particulier & individuel com-
me étoit cette coupe légale , parce que
les pronoms démonfcra» ifs hoc & illud9
qui fe rapportent au même vin de la
coupe légale, empêchent qu'on ne la
puilTe expliquer d'aucune autre chofe.
Sur cette fuppoiîrion on peut faire cet;
Dissertation XXXîlî. C\)
argument très - abfurde &: n ms
uns réplique. Le vin dont Jefus Ciuilt
tém qu'il boita da ici elt le
me me vin individuel ou fpécihque donc
il déclare qu'il ne boira plus julqu'a ce
qu'il y ioit arrive. Or le vin donr il ne
boira plus jufqu'alors elt le vin de la
coupe légale. C'e.t don^ le vin même
de la cou. .le dont Jefus - Chrift
boira dans le Royaume de Ion Père , ce
qui elt de la dernière abCuidicé. (^
qu'on : m ne peut l'éviter qu
h - Ckf i ce
R . i Père pour l'tuclu-
js Auteurs n'ont ai ré-
pondre lii. le rap-
porte à hv au
•
ns ne Te rapportent p -me
lividuel
h v - de
vjn mera-
ph
vin n'a point de lieu ici , puifque Je-
fus < 1 h r 1 1 : MM de vi
tenr pot Joat
pendant to..
i
ri£ Dissertation XXXÏÎÎ.
C5eft difpofer fouvèrainement du fens
des termes que de répondre en cette for-
te j mais pour en voir la nullité, on n'a
qu'à considérer que Jefus Chrift dévoie
donc faire la même application de l'A-
gneau Pafchal , qu'il avoit faite félon ces
Auteurs de la coupe légale , & aiïiirer
fes Difciples que déformais il ne man-
geroit plus de l'Agneau Pafchal , jufqua.
ce jour ou il le mangeroit avec eux tout
nouveau dans le Royaume de fon Père 3
entendant par cet Agneau la poffeflion
de tous les biens de Dieu, 8c Taccom-
plifTement de tous leurs deilrs. Ces Au-
teurs accorderont peut-être qu'il pou-
voit l'aiïurer , par la même raifon qu'il
Ta fait de la coupe légale. Cependant
il ne l'a pas fait , 8c on peut au con-
traire les alîurer eux-mêmes qu'il ne le
pouvoit faire, parce qu'il n'y auroit pas
de bon fens dans cette proportion.
Mais que feront-ils de cette qualité de
nouveau que Jefus-Chnll donne au vin
qu'il doit boire ? En quel fens la gloire
eft elle un vin nouveau.^ ils répondent
que félon le langage des Hébreux c'eft
la même chofe qu'un vin excellent 8c
précieux , & ce terme marque la per-
fection 8c le bonheur incomparable de
la vie à venir. Mais on peut aiTurer que
ce fens n'a aucun fondement dans l'E-
Dissertation XX XI II. C\y
encore i & qu'elle n'employé le terme
m , que p r ce
qui t & parfi
ont des idees rterentes. Cir il efl
i qu'il j s excellent
I nivelles, comu . 1. < lanri
veau, le nouveau reftamenc, n-
mandement i ivel ho
me. Mais ce n'eft i
leur nouveauté : Car r
non excellence
mo l)it/.\
. it pal M rcccntt)
venerw. non .
lui.
Enfin on n'a qu'a traduire tout ce
pa(Tage en ex: tiquant les r
Auteurs leur
dor.
«. licatio: I
bu le premier de la coupe légale :
\ ■ : , dit - il à Ci
rlus du vin .
tbttu le
c / des
Au-
ucl
t ? Avec queli
fquel i quelle
lai n de 1..
t On
*i8 Dissertation XXXIV.
ble lui attribuer rien qui fou plus in-
digne de fa divine fagefle.
DISSERTATION XXXIV.
Joan. Cap. XIII. v. 23. Erat
ergo recumbens unus ex difcipu-
lis ejus infinu Jefu^ &c. v. 25. *
Itaque cîim recubuijfet Me fit-
prà pecîus Jefu. Concord.
Cap. CXXXI.
L'Explication de ces deux ff. dé-
pend de favoir la pofture que les
anciens tenoienr à rable. Ils éroient
couchés fur des lirs qui renoient d'or-
dinaire trois perfonnes, & dont la pla-
ce du milieu étoit la plus honorable.
Celui qui l'occupoit étoit couché fur le
coté gauche , êc tournoit le vifage vers
celui qui étoit à fa droite. Cette place à
droite s'appelloit le fein du Père de fa-
mille ou de celui qui étoit au milieu ; &
c'eft par cette analogie que dans Saint
Luc le pauvre Lazare eft porté dans le
fein d'Abraham , c'eft-à-dire dans le lieu
le plus proche, & fous les yeux de ce
Patriarche.
Dans le dernier fouper il paroît que
D : T A T ! \IV.
faine Jean fur p! mmen
ai i l.i droite de J i ce
* ûa'il nomme le fcïn de Je/us , qui
fur le COU I roui né
vers lui. S une Pierre croit à (
cV } brift lui tournoie le ors
donc que J. Chrift < lire qu'un
des douze le tr.ihiroit, cV que tous
irdoienc les uns les autres d'etor.
m , la nu Pierre fe
- en (on féant derrière Je fus Chi
1 i de lai dem
r.Ce D
i nt placé p fur
rtch cle (on Mait; n dît tout
Seigneur , qui efl-ce? Et il ne
deil ifture qu'autant de
I qu'il en fallut pn
la reponfe : cir
il leva lafE-tÔt la : r celui
] 1 ::nft lui dcfignerQÎI par le
morceau rren.
C'efl ainfi qu'on peur très-vrai'
blahiement fe repre : _rre luitoire,
fans dérèrmin inmoini q i il la
.erre ou de
r Jean;
elle même , pourvu
' en-
tre
]
6iç> Dissertation XXXÎV.
Nos Interprètes n'en ont pas eu cette
idée. Ils ont pris pour la même chofe
ce qui eft rapporté , v. 23. Erat ergo re-
cumbens unus in Jinu Jefu , & ce que
porte le v. 25. Cum recubuiffet ille fupra
pecius Jefu. Ils traduifent l'un & l'autre
dans le même fens. L'un d'eux ....
étoit couché fur le fe'in de Jefus. Et le
Difciple donc qui fe repofoit fur le fein
de Jefus. Car être couché Se fe repofer
font alfez équivalens & fynonimes. Ce-
pendant les verbes Grecs qui leur ré-
pondent ne le font pas. Ils font auflî
difîérens que le peuvent être deux ac-
tions , dont l'une dure allez long-tems,
& l'autre eft pafïagere. Dans le ir. 23 ,
on lit nv «T« ctv'eiKîi '[xévoç a rcov ^cl-
6> av cLvtk zv T» ko Kt)G> e?» i'mo*«. Cequi
fîgnfie, l'un deux étoit couché dans le fein
de Jefus , en prenant le fein de Jefus
pour îe coté vers lequel il étoit tourné.
Ej le ir. 25 porte (<j^in7H(râv «Ts z<7isi to
cQyi&oç <rk I'»tr«j ce qui veutdire à la let-
tre incumbens ou inclinans fe Ce Difciple
donc fe panchant ou s3 appuyant la tête
fur la poitrine de Jefus. Ainfi a.v'*Kii(j.ivoç
recumbens , marque la pofture dans la-
quelle Saint Jean fut pendant tout le
fouper , & Ko\<&oç le rang ou la place
qu'il tenoit auprès de Jefus. Au lieu
quW/irefl-iyV incidens > incumbens , fi-
DlS<FRTÀTÎON 'V. <! I
gnil
fur l'eftomath d
11 f.uir :r certc
I
-
«S: enc
«t/x Tut
de don
bes v in ver - que l'an-
: prere a empl ex-
Mi-
tonniirej qui
dlfl it leur» malgré la l
■
1 '. fort i - celui de
■ c.
1. On ' ( rid une
dant tour le
mme *r ■ rc-
ous
qu'on renoic ju-
|*f T» 0 i><w* 1
. de
| • lit , cV 11 *r*« jh/ tm
\fim%0m\ « ** 1 té»' c
•
1 r le fein de
M it le repii 1 ce <jui
le.
6 2i Dissertation XXXI V.
3. On fait commettre à ce Difciple
fi refpe&ueux une incivilité fort inutile.
Car il paroît par le texte qu'il ne repofa
fa tête fur le fein de Jefus que pour
obéir au %ne que lui avoit fait Saint
Pierre de lui demander fecrettement qui
étoit le traître : Innuit ergo hulc Simon
Pecrus ..... Itaque cîim recubuiffet illc
fuprà pecîus Jefu , dicit ei , cVc. Cette
action étoit inutile avant ce (igné : com-
ment donc la lui fait- on faire pendant
tout le fouper qui fut affez long/*
4. Ce qui augmente cette difficulté efl:
que Saint Pierre ne lui fit figne de de-
mander qui étoit le traître , que parce
qu'il étoit couché dans le fein de Jefus.
C'eft le fens du texte, Erat rccumbens
unus ex Difcipulis in finu Jefu, Innuit
ergo huic Simon Petrus , &c. Cet ergo
marque manifeitement cette raifon à
ceux qui connoiiïent le ftyle de S. Jean.
Et cependant félon le texte même, Saint
Jean ne fe coucha dans le fein de Jefus
que pour fatisfaire au defir de S. Pierre;
Innuit ergo huic Simon Petrus .... Ita-
que cîim recubuijjet die fuprà peclus Je-
fu j dicit ei , Domine quis efl ? Cet ita-
que exprime clairement cette fuite. Ainfî
le fîgne de Saint Pierre & l'action de
Saint Jean auroient été caufe l'un de
l'autre. Saint Pierre auroic fait figne à
Dlf SERT ATI ON X '. olj
un
ont
I
resG - r < «/ %
-JW13 1 ynir comme deux ..
diti. .. El ii -• l*a ta b i«i ■ rit-
comn \ chol
O; «r'^fti/Vl
^^rcf m fi/m, de la place honorable
i rem pi ni
que Jefus Chrift r.nfou i.
n é , 8c lue le 1
Ciplc : r*-
Scns un us ex Di^iyai i
/J I , que-
1CÔ
i dans le fein I l la
nelle d
du
*/r/z ' n fin
l' • 1) . i Dci
y l //-
/z/i , T.- cd in fi'.
Il la c -• encore .i l'cuMidc-r.
de I dans le fein d'Abr.dn
& il louuenr ce qu'il en .uoit dit ail-
«contre l* Critique d'un in taon
qu'il rapporte en ces termes : ô: L.i
6*4 Dissertation XXXIV.
étoït couché dans le fein d'Abraham , &
s'il avoit fuccédé à quelque autre > il
s'enfuit que lors qu'un autre Jujle mour-
ra , le pauvre à fon tour lui cédera la
place. 11 répond que parler ainfi , c'eft
ne favoir pas qu'une infinité de Juftes
peuvent fe repofer enfemble dans le fein
d'Abraham. Tout cela repréfente non
une action palTagere , comme eft sJ 'ap-
puyer , s'incliner, Je pancher , mais un
létar durable comme eft d'être couché.
Saint Chryfoftome demande pour-
quoi Saint Jean n'eft pas feulement cou-
ché dans le fein de Jefus , mais qu'il
s'appuie encore & fe panche fur fon
eftomach. Illud autem qu&fitu dignum
fuerit , quid fit quod Joannes in finu
Jefu recumhit , & non rccumbit folum ,
fed & illius peclori incumbit & inniti*
tur. On voit qu'il diftingue ces deux
actions comme des chofes dont la fé-
conde ajoute 8c enchérit fur la pre-
mière.
11 continue cV il amure que ce Difci-
pîe n'eût point rapporté dans fon Evan-
gile une circonftance auili glorieufe pour
lui qu'eft d'avoir été couché dans le
fein de Jefus , s'il n'y eût été obligé par
la néceilité de nous expliquer pourquoi
Saint Pierre s'étoit plutôt adreiré à lui
par un figne qu'à un autre , pour de-
mander
DlSSERTAT!»' \!V. 615
mail lit qui
cre. Xcjuc '
\ cnim .
rci Pctrum J (de
\orc ) 1/
I
■
»r que
Clin! Pi :inr J.
I hriil |e
ir l'entendre corn m ir ,
que in Si
fur
' ns lu p
>ltomc qu
couché penduic tout le foui
ut Jefus -( Mi\\\ qu 1.
•uitant 1
I
que en CCI
C^hnlt av. ir lui , P
■' . .
.ire cène ilifiï-
cultc , efl que t
.
1 •:. ir. ' 1) d
6i6 Dissertation XXXIV.
ciple s'appuie , ou fe panche fur le pro-
pre fein de Jefus. Cur autem etiam in-
cumbit peclori ? Il diftingue manifefte-
ment ii<m>rxi tsthv réf o-foôs/ , d'avec
ctvcLKa<rQcLi iiç Ko'h<œoV) par les ques-
tions différentes qu'il en propofe ; autre-
ment il retourneroit fur fes pas , Ôc traite-
roit deux fois les mêmes chofes.
Il répond que ce panchement iW^ri^
nsTitv y venoit d'un excès de familiarité
qui ne répondoit pas peut-être affez à
la haute opinion que les Apôtres dé-
voient avoir pour Jefus-Chrift; ce qu'il
ne dit pas d'* cLKiî'ibcti _, puifqu'il fal-
loit bien que quelqu'un fut couché à.
côté de Jefus-Chrift. Nondum de Mo
magnifiée fentiebant. Il en donne pour
2 raifon que Jefus-Chrift permit à S.
Jean d'appuyer fa tête fur fa poitrine ,
ïçwitûi emriiv Tsôa TffnSe/, pour adoucir
un peu la profonde triftefte qui lui faifoit
pancher la tête : Pr&terea ira mœrorem
Lenit. Nam admodum confèntaneum eji
tune vultuprdt tnjlitia demi ffb ae prono
fuiffe. Igitur eos verbis demulcens per-
mittit Joanni _, & quajî viam aperit ut
peclori fuo incumbat. Or cette triftelTe
n'avoit pa's de heu quand on fe mit à
table , ce qui lignifie a,v'a.KirçQcti. Mais
elle ne commença que loifque Jefus-
Chrift leur découvrit la trahifon qu'un
Dissertation XXXIV. 6%j
d'cntr'eux lui falloir.
I hcjphiljÉre propofe auîTî aprî
Ma \ deux aueftiom : meut ,
tl tourne ainli la i. 7Îro< <Ti l'rtfttf»
>r «i«nif • <-»/ 7* fuju T.
Pourquoi cjî - ic que J.: onfejctU
le fem de Jej..
II : ; eque recumbe
in fi nu a rAKî'iff^aLt %r 7* xc/.««
îicitic r:
I
hrill dans la place \
relie il étoit r >n-
Q I) : .■ foi rc-
:• infinujeju , quia ad iatus cjus
in men
qui
m ad
fur in fir.u précède •
•Sfervc encore parmi n
.es exprtllions. Cet homme
mo ri s de Jj • r f-
K uhcl difoit en parlant de fa |
vante , *// pana: genua mca. Au
lieu qiû(»»Tit T«fr t»~ fur!/, que
l'ancien Interprète a traduit par le même
vcihe recum: 0fc qtM I oler a t
aufl» p mecholc qu'at * '«>6«#
/ fignitie r, ou pamher fit
ic r Icindejcj
DJ i.
6i$ Dissertation XXXV.
DISSERTATION XXXV.
Joan. C. XIV. v. 31. Surgite ,
eamus hinc. Concord.
C. CXXXIII.
AVant ces mots on met ordinaire*
ment un point qui ferme la pério-
de à. fie facio. Cette ponctuation eft
d'autant plus mauvaife qu'elle laifTe la
première partie de ce t. imparfaite de
fufpendue , & qu'elle rend la IL fans
liaifon & fans fuite, comme îlparoît par
cette Traduction : Mais afin que le mon-
de connoijfe que j'aime mon Père , & que
je fais ce que mon Père m'a ordonné.
L'efprit du Lecteur attend là quelque
chofe qui ferve de moyen à cette fin- là.
On ajoute , leve^-vous , fortons d'ici.
On ne fait pourquoi Jefus-Chrift die
cela en ce lieu plutôt qu'en un autre ,
de on le fait d'autant moins que félon
plufieurs Auteurs , Jefus-Chrift ni fes
Apôtres ne fortirent point alors de la
falle du fouper, mais feulement à la fin
du ch. XVII.
Mais qu'on joigne enfemble ces deux
parties en changeant le point en une fin>.
DlSSl R TA TIOI XV
pie virgule , la I. trou-.
fon appui dans la 11. & I.i IL c:
ù railou dans la I. «S: toutes
ht un fens admirable qui fait voir la
(
obc n'a l.i
que 11 .
de t ide qui v:
ne lui lai formais !
leur p.. s cju'il' ail au
;: fur 1 , ni qu'il v ail t ien en
lui qui lu lit-
il y q^c U moi. me mon
Pcre julqu'a fuufinr Li d .'il m'a
ne meurs , ni
ice comme étant coupable , ni p.ir la
violence de Satan cV: de mes is ,
ni par furprife comme i
à l'improvise, ni enfin par foiblcfiV
ombint ma ou
au DOmtx ie je meurs
ement , avec une pleine nce,
& par le mont de mon amour 6c de mon
obeiiTance envers monP ust
Allons au Prirt-
. .
dansle lieu où ils fe d
une Auguftin fur le
!
Dd
?$o Dissertation XXXVI.
DISSERTATION XXXVI.
Marc. C XV. v. 25. Et erat
hora tertia, &crucifixzrunteum.
Concord. C. CXLIII.
L y a ici une grande difficulté pour
concilier faint Marc avec faine Jean.
Le premier témoigne que Jefus-Chrift
fut crucifié à la troifîeme heure. Le fé-
cond au contraire , porte qu'il fut con-
damné par Pilate à la fixieme. Erat
ûiUcrn parfeeve hora quaji fexta* Il
fembleroit , félon ces deux fuppofitions>
que Jefus-Chrift auroit été crucifié trois
heures avant que d'être condamné. Mais
comme cela eft contraire au rapport de
tous les Evangéliftes , qui mettent la con-
damnation avant le crucifiement ; il
femble qu'il ne refte plus , finon que
faint Marc ait avancé l'heure du cruci-
fiement jufqu'a la 3. heure du jour ,• qui
dans l'équinoxe où arriva la Pafiion de
Jefus-Chriit , repondoit , félon notre
ufage, a l'heure depuis 8 jufqu'a 9, ou
que faint Jean ait retardé la condamna-
tion jufqu'a la 6. heure _, qui duroit de-
puis nos il heures jufqu'a midi. Mais
Dissertation XXXVI. 6$t
le rapport délai: i elt entiérenu
aux autres Evanj . , fans
en excepter n .in: M.iv. 1,, mer-
a la 6
clçvc
en croix y il paroîtpar leur u âge
qu'il y tut attache un pc : le point
de midi , qui elt la rin Je la
place la condamnation •©■
heure auparavant , Liiqu'il
dit qu'il ctoi: re j
:-a-dire, qu'ellecommenym lorfquc
Pilate livra Jefus Chrift aux Juifs, r.
?'l fexti. Ainli iaint Jean s'acco:
ort bien avec les autres, <3c toute la diffi-
culté retombe iur laint Marc.
Pour concilier cette contradiction ap-
parente , < rtde p rs moyens.
. > expliquent ce crucifiement de
violence &: de I 3
>ur fui virent la mort de :
M IMate d' heure du
jour : tems facre , ou ils dévoient etre
occupés aux fonctions du I cmple dam
une rient cn-
. de la précip avec laquelle ils
it >
des ment de l-.-ar .îllemblcc
à la j
le pi ont etreexe-
Dd 1.
'6$i Dissertation XXXVI.
curés que vers la fin , & lorfqu'ils étoient
fur le point de fe lever. 11 n'y a point de
fens a cela , puifque ce fut Pilate qui
Condamna Jefus-Chrift à être attaché à
la Croix , &: que les Juifs n'y eurentque
la part de furieux accufateurs ou de par-
ties implacables.
Les autres foupçonnent que le pre-
mier Copifte de l'Original de faint Mare
a mis tJYth pour î%t« : mais les cara-
ctères ne fe refTemblent gueres , pouf
avoir donné lieu a cette méprife ; & pour
la commettre il falloir être terriblement
âbftrair.
Le moyen le plus ordinaire eft de fup-
pofer que les anciens , tant Juifs que
Romains , divifoient le jour artificiel en
quatre parties égales , dont par confé-
quent chacune contenoit trois heures
communes : que la première commùn-
çoit au leyer du Soleil , c'eft-à-dire , à
nos fix heures pendant l'équinoxe , 8c
finKToit à nos neuf heures. La féconde
s'étendoit depuis neuf heures jufquM
midi. La rroifieme depuis midijufquxà
trois heures ; de la quatrième depuis
trois heures jufqu'à fix ou au coucher
du Soleil. Que ces quatre parties du jour
s'appelloient des heures , quoique cha-
cune en comprît trois communes , &
qu'elles ne fe nommoient pas , félon h
D 1 1 i 1 a T A T I O N XXXVI. ' y $
g oa l'ordre qo'c .: ta*
le,lar
.; laquarricm
la rroifieme > la Gxieme , oc la ir-u .
me : Parce que chacune ( hormis la pre-
:e ) tiroir Ton nom de l'heure com-
mune tprès laquelle elle commencoir*
Que ci • '• I \ heures-li étoiemde
ruelles revenaient tou-
i ours, e\: i par*
prefqtie point des heures communes;
cV qu'ainh lorfque les heures lont mar-
quées dans l'Ecriture , ce forr in-
des ex non les communes qu'il faut
tendre. Q >ient les quatre
heures de prière ieni en u!
parmi les Jtlift,
f >ns de ' qui
B au
i'C publiq
I lela loi le partage de faint Marc
s'explique d .. 1 l me
gra' uis no ieu-
julqa'i midi. Jel
fie un peu avant n 'ans
l'efpace de la troificmc heure avant
qu'on eût donne au Tcmpl 1 de
xicme 1k are de pn
.n(i le | en qu< La
ne hcw filêti
tri. .:.
n d t
634 Dissertation XXXVI.
En vérité , c'eft dommage qae tout ce
fyftème n'eft autîî folide qu'il eft heu-
reux Se commode pour concilier cette
contrariété apparente. Mais par malheur
il n'a pas l'autorité d'un feul ancien.
C'eft un ouvrage en l'air Se une machi-
ne faite à plainr fur le modèle des qua-
tre veilles militaires, pour démêler l'em-
barras de ces deux partages. 11 eft inoui
dans toute l'antiquité Eccléflaftique ôc
prophane , qu'aucun Auteur ait feule-
ment fait mention de ces grandes heu-
res , dont il n'en falloit que quatre pour
faire un jour. Il eft inoui qu'aucun Père
& qu'aucun ancien Interprête ait em-
ployé cette explication pour accorder ces
deux Evangéliftes,& qu'ils avent jamais
parlé des heures, foit canoniques ou de
prière, foit populaires & civiles, que
comme d'heures communes , dont il en
falloit douze pour le jour & douze pour
la nuit. C'eft le fentiment de plufieurs
favans Auteurs , comme de Tolet ., de
Janfenius d'Ipre , &c. En effet fi on le
regarde de près , on verra qu'il n'y a
îien de plus mal concerté.
Car 1. Pourquoi ne les a-ton pas di-
stinguées .comme les quatre veilles de la
nuit par Tordre qu'elles obfervent en-
truelles; & qu'après la première on ne
les a pas nommées la féconde > l& uqî~
DlSSU TATl : <
la quatrième do jair.
divilc un I . e par:; ; le
comptaient comme celle- l1 , don; la
première étante: ^ompree pour la
, les trois autre >uc
tou: iqIç ' i onde pour la
rroi fc la hxieme ,
& la quatrième pour la ncuvic ela
le.
( ii-pn , qv. une tire Ton
nom de li de: ommunequi
la I : P . , h premier f
grande lie me heure
commune. Donc la i
• îcure.
cft d'au-
tant moins raifonnabtc qu'il valoir bi
er chaque grande heure par
roiscomi
nés qu'elk r , que pjr une
-
Cp| : s . I ) ' •. , i v c pas
DC £tandc
ôc qu'au contraire
e dan.
Vis
a ne
la pre-
a Uquc - ûc dontic poinr le
l>d I
C^G Dissertation XXXVI.
De plus cette étymologie fe trouvera
fauife dans la première , qui ne tiroit
point fon nom de celle qui l'avoit pré-
cédée ypuifque c'étoit celle de l'Auteur.
Elle fe trouvera encore faulTe dans la 9 ,
dont la dernière heure étoit l'heure du
foir ou des Vêpres. Enfin on ne peut
mieux réfuter cette imagination que par
les veilles même de la nuit ^ dont îa
première commençoit à la première
heure de la nuit ou au coucher du So-
leil ; la 2. au commencement de la 4.
heure, la 3. au commencement de la 7.
■& la 4. au commencement de la 1 o. Ce-
pendant on ne s'eft jamais avifé de nom-
mer ces 4 veilles du nom de ces 4. heu-
res avec lefquelles elles commençoienr,
la 1. la 4. la 7. la 10. veille de la nuit ;
ni du nom des 4. heures ^ à la fin def-
quelles elles commençoient,en les nom-
mant la 1. la 3. la 6. la 9. veille de la
nuit. Pourquoi n'en a-t-on pas ufé ainfi
en faifant ce partage prétendu du jour
en 4 parties égales ?
11. On dit qu'on ne faifoit prefque
mention que de ces 4 grandes heures
célèbres ; ce qu'on prétend prouver par
l'Ecriture. 11 n'y a qu'à s'en rapporter
à fes yeux pour fe convaincre du con-
traire. On lit en faint Jean,Ch. 1. v. 39^
qu'il étoit environ la io, heure du jour >
DlSSÎRTAT IC
lorfque deux Difciples de faine J
B.ipnrte iuivircnt Jefus - CJhriil : /
l. IV. $.
Que la fièvre qu fils dv
•ment 1 la 7. Il Q icri
hora Je quit cum fch-
Match. Ch. > X 6. Que . de
fan: < la 11. heure , &: que
erj de la 11. heure fur<
compenlcs comme les | rs : C
undcamjr
cïrnam /n encrant. Si L îgc-
tic par.
tendu du jour en 4 grandes h. il*
aur autem erat q
herï hora ftxta rei
ht pour la féconde i\ no-
111. Ol »U moins que c<
les rois qu'on crouve dans ire Ao-
horâfi
-andes heures qu
Amlï v
■ t(i fuc cru juf-
qn li.
cet
Ai.
M . plitl l I
•'
1 .. \curx
€$% Dis$|rtation 5JXXVL
étant accomplie ( c'eft le fens defacîa )
les ténèbres Je répandirent par tout.
Cette 6. heure étoit-elle l'heure com-
mune qui dure depuis nos 11 jufqu'à
midi , ou une des grandes heures , qui
s'étendoit depuis midi jufqu'à nos $ heu-
res f ils ne balancent pas à dire que c'é-
toit une (Impie heure commune. Autre-
ment les ténèbres n'auroient commencé
qu'à 5. heures après midi , & auroienc
duré jufqu'à G heures du foir. Ils doi-
vent dire la même chofe de cette 9. heu-
re dont parlent trois Evangélifres : De-
puis la 6. heure jufqu'à la 9. les ténè-
bres fe répandirent par toute la terre. Ils
font obligés d'avouer que Tune & l'autre
font des heures communes, fous peine
de fe brouiller avec toute la Tradition,
qui porte que Jefus-Chrift expira à la 9.
heure j c'eft- à- dire, à nos 5 heures après
midi. Pourquoi donc prennent-ils la £♦
heure de faint Marc comme une grande
heure qui en comprend trois , lorfqu'ils
font contraints de prendre la 6. & la 9.
du même faint Marc & des deux autres
Evangéliftes pour des heures communes?
Qui ne voit que cette différence n'ed
fondée fur aucune raifon , & qu'ils ï}fi
fe déterminent à ce parti que par l'en-
gagement de leurs principes , 8c en fuj>
jpofam ce qui ,eft en queftion ?
DlSSlUTATXON XXXVI.
I\r. Il ert vilïble que ces 4. hc.
brouillent & confondent tous les tems
rmtcju; heure
uni Jeaq , ("h. IV : hora.
, en comprend 5 au-
\ quelle heu,
I a^ ob f
!u: ou le croit d'or-
dm
Tout cela eft compris dans la grande
C. heure , &c on en a le choix. (
danr oq n'a j.im . ,:c que ce
idi. On 11 : des 4 gran-
itc lorfqu'il s'agit cjeiplî-
; le pj ini Marc que nous
is.
BC ailleurs elles (on: furannees
ex hors >re un exe
■
velle ima
dir des
Juif
dit : Ces gens tmi
la 3. 4
\ - J •
heure la 1
.
n'arToi'; w feulement la r.uiun de
rulra entier 6»
640 Dissertation XXXVï.
re grande heure duroit , comme on pré-
tend , depuis 9 heures jufqu'à midi , qui
cft le tems où l'on dîne , & où le dîné
même finit : eft-ce qu'il ne pouvoit pas
fe trouver des gens qui s'enyvrafTent en
dînant avant midi ? 11 y en a eu des
exemples dans tous les fiécles & dans
tous les païs. Mais fi l'on prend cette 3.
heure pour une heure commune , qui
dure depuis nos 8 heures jufqu'à 9 , la
raifon de cet Apôtre fautoit aux yeux de
tout le monde , & ne fourTroit pas la
moindre chicanerie.
V. On me dira peut-être qu'il y a
une grande différence entre les heures du
jour & les heures de Prière. Les premiè-
res ont été divifées en douze, & chacu-
ne tire fon nom du rang ou du nombre
où elle fe rencontre. Mais il n'y avoir
que 4 heures de Prière; chacune en
contenoit 3 du jour, & duroit jufqu'au
commencement de la fuivante.
Je répons que fi on fe contentoit de
dire avec les Pères de l'Eglife , que les
anciens Hébreux , de après eux l'Eglife ,
ont choid entre les douze heures du jour
les quatre plus célèbres pour les confa-
crer à la Prière, qui font la 1 , la 3 ,1a 6 *
& la 9 , on ne diroit rien que de vrai Se
de raifonnable : mais en donnant 3 heu-
res d étendue à chaque heure de Prière ^
Dissertât: XXXVI.
comment ne voit-on pas que cecre d.
fion fe dérruit ell ju'cllede-
vient ablolument muni
4 font i i , tes 4 heures de Pnete
comprv h tour le jour. Auili les 11
du jour écoieoi s à la.
Pn lent le partage du
ar-
quer le tems |
il une pure illuti n , puifqu'il
avoir point d'heure dans le jour9<ni
Ion ce partage même ne fut une heure
de prière , parce q appartenoit i
quelqu'une desquarre. 11 n'y a donc rien
déplus chimérique en foi que ce i
tendu partage du jour en 4 grandes heu-
res , ni de plus inutile pour cclaircir la
dirheu. [arc, ou pour le con-
cilier avec les autres Ev..
Il n'v a, ce me femble, qu'un moven
pour en venir a bout; c'elt deretonnoi-
;ne faute de Copifte dans ce pacage,
& de lire , / Se
d.\i: .il ft i % m'fë et te
err i i pu fe glulcr dans le texte
Ii. le Copille avant lu au
:*pé
de ce que plus bas au \v
COte yirauirt Xi mf*t »«T*. I
6^1 Dissertation XXXVI.
horâfextâ tenebr& facb& funt , &c. II
crut que cette répétition de la même
datte j fi près l'une de l'autre ^ n'étoit
point naturelle , & qu'il falloit qu'il y
eût faute dans l'une des deux. Il connut
d'ailleurs que la féconde étoit conforme
au rapport de faint Matthieu &: de faine
Luc , qui mettent les ténèbres à la 6,
heure : il crut donc ne pouvoir mieux
faire que de corriger la première > & de
mettre tcT'/tm , au lieu de s'xtw.
Cette raifon eft fi fpécieufe , qu'il y
a des Auteurs qui fe fervent de la 6.
heure du f. 33 , pour confirmer la 3.
keure du $. 2^, par la différence des datâ-
tes. 11 ya,difent-ils, une fuite naturelle
à dire que Jefus-Chrift fut crucifié à la
troifieme heure , & que les ténèbres fe
répandirent à la 6. Mais de dire qu'il
fut crucifié à la 6. heure , félon cette
nouvelle correction , & un peu plus bas,
que les ténèbres fe répandirent encore à
la 6. heure, c'eft répéter inutilement la
même datte j car après l'avoir marquée
une fois pour le crucifiemenr , il n'y
avoit qu'à écrire tout de fuite les ténè-
bres ci le refte qui étoit arrivé depuis.
Puis donc que laint Marc a mis deux
dattes , ce ne peut être la même j mais il
faut qu'elles ioient différentes.
Mais ces Auteurs j non plus que le
Dissertation XVI. 64)
Copiée , n'ont pas conhderc qu'il v a
ifie* de différence entre la dette do %
15. Et erat horâ fextà , ôc celle du tf.
3$. 1: ■ koréj , pouf donner
heu à un \ : ï d*en turc deux
dattes 1 nés ; l'une pour le
fiemeni , ex' l'autre pour les ténèbres.
I .i peemîei 1 de la 6.
heure commencé , Se elle fe doit tour-
ner air.;: : / .r alors la 6. h<ur< ; ce
cjui fera vrai depuis nos 1 1 heures juf-
cju'a midi. La 1. defigne fa fin , & l 'ex-
prime comme paflee par cette tradu-
ction : La 6. heure étant acke\<e j ce
qui eit vrai précilcment a midi &c de-
puis. Ainfi on voit que ces deux dattes
peuvent être éloignées d'une heure en-
tière \ quoique cela ne foit pas nécelTai-
re , puifque la 6. heure aura pu I
entamée de $ quarts d'heure » qu
pourra toujours dire / fûê horâ fextà :
II etoit alors la 6. heure.
La 11. voie de c »rion cft celle
que nous fournir fauu Jérôme ou l'Au-
reur du Commentaire fur les Pfeaumes
qui lui cft unSbmii 1 • ns la Prcfjce fur
le Pfc. - :e cette faute 1 -
r la reircmblance entre
>ics qui lervent de
1er $ cV • Li pie-
QD ; , & la lc«.onde un ,
^44 Dissertation XXXVI.
qui comme on voit ont beaucoup de rap-
port l'un à l'autre ; & que S. Marc
ayant écrit la féconde m £* «'pet * , le
Copifte l'avoit prife pour la première ;
ôc ayant écrit nv cN. a ça. ï dans la
première copie , la faute s'étoit répan-
due dans toutes les autres.
Quoi qu'il en. foit , on peut faire ainfi
la concorde de toutes ces dattes. Selon
faint Jean j Jefus-Chrift fut condamné
hora quajifextâ , environ la 6. heure
commençante, ou un peu avant qu'elle
commençât j ce qui répond à nos 10
heures crois quarts.
Selon faint Marc, rétabli par le Com-
mentaire attribué à faint Jérôme, il fut
Crucifié à la 6, heure courante & fort
avancée : Et erat hora fexta & cruci-
fixerunt eum \ ce qui peut répondre à
nos ii heures trois quarts.
Selon faint Matthieu , faint Marc Se
faint Luc , les ténèbres commencèrent
à la 6. heure complette & achevée ,
facla hora fexta , c'eft-à-dire , juge-
ment à midi. Ils ont tous eu foin de
marquer ce moment précis des ténèbres,
pour marquer qu'elles avoient commen-
cé au moment où le Soleil eft le plus
élevé fur l'horifon. Et c'efl: apparem-
ment cette exactitude qui a obligé faint
Marc à diftinguer le tems du crucifie-
Dissertation XXXVI.
ment , du iqu'ill
ruiîentc îvuondun quart
d'heure.
Lestcnebrcs durèrent ja nde
la 9. heure ou fafqa'api
après midi. 1
i eft alors que Jelus l tarai ;
Ainii il a iqi a i .
trois heures .1 mort
I . d'Arimathie a!
bêta un linceul ,
t de la Myrre ex , ce
qui emporta s : Lt ils le
mirent dani 1 ;ue , félon
faur I . , le SaboatalloU commencer:
Et Sa
un peu environ 6 1 V.nh
H fut 6 heu i la
ir.
646 Dissertation XXXVII.
DISSERTATION XXXVII.
Joan. C. XX. v. i. Una au-
tem Sabbati Maria Magdalene
venitmanè, ciim adhuc tenebros
effent , ad monumentum.
Concord. Cap. CXLV.
L'Embarras qui paroît dans l'hiftoi-
re de la Réfurrection a partagé
les Interprêtes en plusieurs opinions, ÔC
une Difïertation ne fufriroit pas à qui
voudroit concilier toutes les contrariétés
apparentes qui fe trouvent fur ce poinc
entre tous les Evangéliftes. Il y en a
dans le nombre des femmes qui vinrent
au Sépulcre de Jefus-Chrift : Saint Jean
n'en nomme qu'une , qui eft Marie
Magdelaine : Saint Matthieu fait men-
tion de deux , qui font la même Marie
Magdelaine , 3c une autre Marie, qui
ne peut être que la mère de Jacques ÔC
de Jude. Saint Marc en marque trois.
A ces deux Maries il joint encore Sa-
lomé. Enfin faint Luc ne les compte
point j & il n'en nomme aucune au
commencement. Il attribue feulement
cette pieufe vifite aux femmes qui
Dissertation Xa.WII. £4)
IcpuiS la Galilée :
r leur : rc» il Ici lit t >ue par •
, par Jeanne
M nu n.'w-re ik- Jacquet le - nr , fie
autres qui I a
cou int
u marquer p a nom
que celle « .ce
pieux i ers Jcfus - Chrtlt. 1
lun dévoient aiitU
: faine
Lu, Luc l'honneur à routes de
marquer nu n
11 y ptroit des contrariétés dans le
rei7: , nui
ini M mlueu
ble di; il le foif n
me du ^ ibbat
i . n f après que .
Saint Jean témoigne que Marie
laine '. nu 1U Sé| Llla S i : i '
•lttc
I :ide
, valdc nutic : Lr lam: Marc
feul a; ; icllcs arrivci le le
Soleil (e levou , t : il a
en tout cela a rrane-
on cherc! G d'une fi
«Bande diligence > d . de
648 Dissertation XXXVII.
voir qu'elles n'avoient rien fçu de la
garde qu'on faifoit au Sépulcre. Ainiï
rien ne les arrêtoit de ce côté- là. De
plus en partant avant le jour elles ne
voulurent être apperçucs de perfonne ,
pour ne donner aucun lieu aux Juifs de
dire qu'on avoit enlevé le Corps de Je-
fus-Chrift , quoiqu'alors elles n'eurent
pas le moindre foupçon de fa Réfur-
redtion.
Il y paroît des contrariétés dans le
nombre des Anges que ces pieu Tes fem-
mes rencontrèrent. Saint Matthieu &
faint Marc n'en mettent qu'un. Saint
Luc au contraire & faint Jean en mar-
quent deux , en laiflant en doute fi ce
font les mêmes , ou du moins s'ils pa-
roiffent dans les mêmes occasions. Cela
fe doit régler par l'examen de toutes les
circonftances. Il eil plus probable qu'il
y eut deux Anges, dont l'un feulement
parla aux femmes. Saint Matthieu 8c
faint Marc n'ont fait mention que de
celui qui leur parla. Et faint Luc ainfi
que faint Jean attribue à tous deux ce
qu'un feui leut dit touchant la Réfur-
rection du Seigneur.
Enfin il y paroît des contrariétés dans
les actions & dans les voyages de ces
pieufes Dames. Ce que fait Magdelaine
n'a prefque rien de commun avec les
autres
OlSSERTATï
autres. Scion faim Jeta il îcmblequ
le va tout. en
rev: • avec
(tint Pi
lui parlent :
dans le }à-
i
femmes. I
Chriil in qui le
|
I 0-
: I
à l'en:
, .S: 1 I
I
i,eV rrou .
l.i ro< me v
faii. I ! cette •
rut vers le
avo
beau , & qa
1Y
M nepe- 'ie
i
1 - •
II
<>5o Dissertation XXXVU.
fouviennenc-elles pas que le premier
Ange leur a annoncé laRéfurrec-tion du
Seigneur , Se que cette nouvelle leur a
été confirmée par deux autres ? C'en: ,
difent ces Auteurs , pour les exeufer un
peu , qu'elles ne crurent point le rapport
des Anges, & qu'elles eurent moins d'é-
gard à tout ce qu'ils leur dirent tou-
chant fa Réfurrection _, qu'au vuide du
Sépulcre , pour juger qu'on l'avoit dé-
robé.
Voilà une étrange exeufe : On les
rend obftinément incrédules pour les
difculper de l'infidélité de leur mémoi-
re. Elles dévoient au moins rapporter
aux Apôtres cette vifion & cet avis des
Anges : & leur en lailTer le jugement:
mais on ne peut leur pardonner qu'elles
ne leur ayent communiqué que leurs foi-
blés conjectures touchant ce larcin pré-
tendu, en fupprimant ce que les Anges
leur avoient commandé de leur rappor-
ter , je dis la nouvelle de la Réfurre-
ction. Elles n'y ont pas manqué fans
doute j répondent ces Interprêtes ; mais
elles infifterent plus fur l'enlèvement
qu'elles croyoient , que fur la Réfurre-
ction qu'elles ne croyoient pas : Quoi-
que le texte n'en parle nullement , il le
faut fuppofer , puifque ces Auteurs l'af-
furent. Voyons la fuite.
Dissertation XX i
partir aulli-tor pour alL Je
tour pal leurs
dcrc mpccf
f>our rien ni la vifion ni
cur •
s'en retouri
I
:ncs qui II i dein-
ne autour du ScpuL
cIk: une r. ht mu-
dans le Jardin , ians IVOII i . ni
•Dp ent le
min i! le. M
qui s'etoie toujours at: I m-
is lieu:
le Sépulcre deux An • i lui c
ce qu en fc
limant , elU
la nou
Elle rc
qui r..
ble eurent la
parut a elles. Voil i le ;
■
îut remarquer que ti
on : îvcra i
excei - M
.
1
t
6$i Dissertation XXXVIÏ.
en trouve regarde le premier. Or il n'y
a rien qui ne démontre clairement , i.
qu'elles rapportèrent aux Apôtres lesvi-
iions des Anges , 2. la nouvelle de la
Réfurrection qu'ils leur avoient annon-
cée , 3. la perfuation où elles étoient de
fa Réfurre6tion. On n'a qu'à lire ce que
dit faint Luc., Ch. XXIV. v. 10. Celles
qui témoignoient tout cela aux Apôtres
étoïent Marie Magdelaine j Jeanne y
Marie mère de Jacques , & les autres qui
étoient avec elles. Or ce qu'elles rappor-
taient c'étoit l'apparition des Anges &
l'afîurance de la Réfurreclion de Jefus-
Chrift , qui précèdent depuis le v. 5
jufqu'au v. 8. Cela eft confirmé par le
rapport de Cléophas, v. 22 & 23 , qui
déclare , fans faire aucune mention du
larcin prétendu , que les femmes leur
avoient dit feulement qu'elles avoient
eu une vifîon d'Anges qui ajjuroient que
Je fus étoit vivant.
Après cette a(Turance , fur quoi peut-
on fonder l'imagination qu'on leur at-
tribue que fon corps avoit été dérobé,
de cette fan (Te allarme qu'elles en por-
tèrent aux Apôtres ? Ce ne pourroitêtre
que fur une incrédulité opiniâtre , non
feulement à l'égard des Anges , mais ce
qui eft incroyable, à l'égard de Jefus-
Chrift même. Cac un des moyens donc
D XXXVII.
1 A ir leur peifuadc
Fui de ! !.i prc-
i il leui
i i c il, de quelle ntàr.
encore en
. Il I que
le 1
ns des hommes ; « rj y q .
\emc
Saint La ire , |u
I 1 : /
ver. . v. ( h : •
tinfi P tel
la i
ave
i fe
.
Ou ilt '. enc
é\o
m en croît ce? loi
!
■
: I
les
i lui il.
Bi h j
6 54 Dissirtation XXXVII.
douleur , ne lui reprochent-ils pas Tin-
crédulité qu'elle avoir pour leur témoi-
gnage ? Comment Jefus-Chrift qui l'a
reprochée aux Voyageurs d'Emaiis &
aux Apôtres aflemblés , ne l'en blâme-
t-il point , non plus que les autres fem-
mes qu'il rencontra en chemin r'il n'y a
point de vrai-femblance dans toute cette
difpofition : & toute cette brouillerie
ne vient que de ce qu'on a joint mal à
propos les femmes avec Magdelaine dans
les deux voyages , & Magdelaine avec
les femmes dans l'entretien des Anges.
Les autres Auteurs les joignant tou-
jours enfemble , ont cru remédier à tous
ces inconvéniens , en retranchant un
des voyages & en ne faifant aller qu'une
fois Magdelaine au Sépulcre non plus
que les autres : mais c'eft encore pis. Ils
difent que les Anges ayant déclaré à
toutes la Réfurrection de Jefus-Chrift,
&: que dans leur retour Jefus-Chrift
leur ayant apparu, ôc leur ayant confir-
me par fa préfence ce que les Anges
-leur avoient annoncé, avec ordre de dire
de fa part a fes frères d'aller l'attendre
en Galilée , 6V que c'éroit-là qu'ils le
verroientj au lieu d'obéir a cet ordre
de Jefus-Chrift, elles donnèrent cette
fauife alarme aux Difciples: On a enlè-
ve le Seigneur hors du Sépulcre y &
DfSSIATATlOM XXXVII.
. f ne /avons Qqq
.1
fans être fui t 1 d'au-
cune aiicr. revim
lit ûinc
-5 y
I
-
que
: cela
:c ,
rtc par récapicolâ-
tion. On ne prouve tous ces paradoxes
iut mieux ex-
plique: | les rrois mitres
tv. ces tr me
confid
fupj • cri
que , & qu
fl
.
tre
rico!
■
:
iv
Ctf Dissertation XXXVIÏ.
peut dire que fon Evangile peut fervir
de flambeau pour porter le jour dans les
obfcurités des autres, de de règle pour
fixer l'incertitude de leurs dattes.
Mais qui peut feulement entendre ,
fans fe foulever,que de pieufes femmes
qui ontappris des Anges la Réfurrection
de Jefus-Chrift, qui l'ont vu , entendu
Se touché lui-même , foient allé trom-
per les Apôtres par la faillie nouvelle
de fon enlèvement. Ou étoit leur fin-
cérité & leur pudeur ? Où étoit du
moins l'obéiflance qu'elles dévoient ren-
dre à" leur divin Maître , fi les Anges,
qui leur avoient commandé la même
chofe , n'avoient pas aiTez d'autorité
pour s'en faire obéir ?
On leur fournit deux exeufes. La
première eft , qu'auiîi-tôt que Pierre ÔC
Jean eurent ouï la première parole de
leur rapport, ils ne fe donnèrent pas le
loifir d'entendre le reile de ce qu'elles
avoient à leur dire, mais qu'ils étoient
partis de la main pour courir au Sépul-
cre , 3c voir par eux-mêmes l'état des
chofes. Qu'après leur départ elles avoient
achevé leur difeours _, ôc conté aux au-
tres Difciples la viilon des Anges , l'ap-
parition de Jefus - Chrift ôc tout ce
qu'elles favoient de fa Réfurrection.
Cette première exeufene difculpenul-
DlSSIRT A TIOV XXXVII
lemenc les f< s. 11 n'y a dam
condur
fiocérifé m charité. Elle ne par
paroles : Oh .: cmti vt U S
il f.illoic au mu Pierre 6c
fauu Jean cullent eoiei I prenueis
,ar harangue a .Icc
i elles ne I no-
rjrc
vol ne les A e qui
.
: aofli peu de chai
CSy jul • • elles l
I à*
ne appris des
An. ur-
eux ce faux :
; i il leii. llf-
Cectc (
i , on leur i
ne vaur gu un
pot
lies
:nmc h elles
CTO pul-
6-58 Dissertation XXXVlï.
cre , afin de les exciter à y aller eux-
mêmes & à chercher ce faint Corps
mieux qu'elles n 'avoient fait. Elles les y
portèrent daas la croyance qu'ils ver-
roient comme elles les Anges ôc Jefus-
Chrift j ôc qu'ainfi petfuadés par leurs
proptes yeux ils n'auroient plus befoin
de leur témoignage. Mais par malheur
Cléophas brouille & déconcerte tout cet
artifice; car il témoigne dans faint Luc
que les femmes leut avoient rapporté
l'apparition des Anges qui aifuroient la
Réfurreâion de Jefus-Chnft. On ré-
pond donc que les autres Difciples ne
s'en étant pas remués pour cela , les
femmes après la fortie de Pierre & de
Jean achevèrent de dire tout ce qu'elles
iavoient de fa Réfurrection ; C'eft-à-
dire qu'elles fe rétractèrent du menfon-
ge qu'elles avoient avancé d'abord , en
leur faifant accroire qu'on avoit dérobé
ce faint Corps.
Rien n'eft plus arbitraire ni plus fri-
vole que toutes ces conjectures. Car,
eft-il permis de mentir pout une bonne
fin , comme étoit à leur gré d'obliger
tous les Apôtres d'aller voir eux mêmes
le Sépulcre ? i. 11 falloit qu'elles euf-
fent confpiré toutes enfemble en che-
min de faire cette tromperie aux Apô-
tces , Ôc de leur cacher cette heureufe
DtSSlfcTATfOM XXXVII. r,\0
aveHeqn'etlei
drc
i 6e li piété de es?
fct c -lies ne
ne s
ce qu'un d( 1 K de Sai
;u'ils trouve:
hui un
I .ne ne
.ue leur
qu'il lai
ment cor 11'il a'éroil
ble que d'< i 1er
voir un fcpuLre on a-
voit enlevé le corps. A k-i.ip-
;ue let
deui foc*
fe pai
& t qu'il nv
avoir U n r eux , ne l'cÉ
ucren- ' .nt au c
que le nlus
1 le tranf-
>ut ce qu'cl-
I 11 vu , } ili au-
ne ap-
i. c
66o Dissertation XXXV1L
pantion de Jefus-Chrift Se des Anges ?
11 ne refterien à répondre à cela , finon
que c'étoient de bonnes femmes qui ne
raifonnoient pas bien.
Mais d'autres Auteurs ont trouvé ce
menfonge fi groiîier qu'ils leur ont fait
commencer leur rapport par les nou-
velles de la Réiurrecîion , Se par les
preuves démonftratives qu'elles en a-
voient. Mais ils ajoutent que trouvant
les efprits des Apôtres fermés à cette
merveille furprenante , elles avoient
changé de ton j Se qu'elles leur avoient
débité l'enlèvement du Corps de Jefus-
Chrift pour fe conformer à leur opi-
nion.
11 y a toujours pour elles dans cette
explication un menfonge de moins que
dans la précédente : Se je fais bon gré à
ces Auteurs de le leur avoir épargné.
Mais à cela près il n'y a pas plus de
probabilité. Eft-il croyable qu'elles euf-
fent renoncé à tout ce qu'elles avoient
vu Se entendu touchant la Réfurrection
de Jefus-Chrift , Se à l'épreuve même
Apôtres qi
voient rien ? Se peut-il faire qu'elles
ayent préféré cette injufte défiance à tant
de preuves fenfibles Se palpables dont
Dissertation WXVII.
elles a'. icnc y
lu loilir &c
eursquc lire
J'ajouterai 1- ~nt qu'on n
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jrs
aucun .
j. i
Uut di
^i Dissertation XXXVll.
de ce qui Te palfoit , les priant de l'at-
tendre là de pied ferme jnfqu'à ce qu'elle
fût de retour. Elle y courut , elle leur
expofa qu'ellesn'avoient point crouvéle
Corps du Seigneur Jefus j & qu'on Ta-
voit fans doute tranfporté ailleurs , qui
eft la première penfée qui leur en étoic
venue dans l'efprit j & la feule qu'elles
en dévoient naturellement avoir. Jean.
C.XX.v.i.
4. Pierre & Jean partirent aulîl-tôt
fuivis deMagdelaine, &: ayant confidéré
Fétatdu fépulcre conforme à ce qu'elle
leur en avoit dit, ils ylaiîfcrent les fem-
mes & s'en retournèrent chez eux pleins
de l'idée de fon enlèvement 8c de l'ad-
miration comment on avoit eu la har-
dielfe & le bonheur d'exécuter une fi
périlleufe entreprife. Jean. C. XX. v.
5. Les femmes demeurèrent là tou-
jours concernées de cet accident} mais
s'étanr féparées pour chercher ce pré-
cieux dépôt , Magdelaine fortit la pre-
mière du fépulcre , & s'avança plus loin
dans le jardin , pour voir fi on ne Tau-
roit point caché dans quelque lieu écar-
te , en attendant qu'on pût l'emporter
plus commodément quand il feroit jour.
6. Les autres fortirent peu après Mag-
delaine pour faire aulîi cette recherche
chacune de leur côté. Mais elles furenc
/
DtSSlfcTATI XXXYIt tfj
I dans . : dans la pi
miere g par deux A [uifen
.:U II d JCS
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in d'eux , le B qui s'ctoit
(ur L . prit la parole , il les
ralïura de leur t , leur témoig
l
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qui ut roucc la grotte : il leur
mon uns le
Co: ir tour ii h-
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Ai rH appaiç^Uiinenc lc\
ient a} , iux auucv icuv
fcr4 Dissertation XXXVII.
mes. Elle les prit pour des gens incon-
nus qui eroient entres la, par ordre y de-
puis qu'elle en étoit fortie. Elle les quit*
ta,&fe retournant elle vit Jefus-Chrift
qu'elle prit d'abord pour le Jardinier. Il
l'envoya porter à fes frères la nouvelle
de (on Afcenfion prochaine , parce que
celle de la Réfutrection leur devoit être
portée la première par fes compagnes
qui l'avoient précédée.
9. Jefus leur apparut lorfqu'elles
étoient encore en chemin pour s'en re-
tourner j il leur commanda de dire de
fa part à (es frères qu'ils fe rendirent en
Galilée, ôc que c'eft-là qu'ils le verroient:
cet ordre regardoit toute la troupe des
70 Diiciples.
10. Elles firent aux Apôtres le rap-
port de tout ce qui leur étoit arrivé ,
Magdelaine fuivenant fe joignit à elles
pour confirmer leur témoignage par le
iien, & ils eurent la dureté de rejetter
l'un & l'autre.
Il n'y a rien qui fe démente dans cette
Concorde. La brouillerie vient de ce
qu'on s'efl: trop hâté de faire paroître
les Anges aux femmes, Se de ce qu'on a
mêlé par-tout Magdelaine avec elles. Il
n'y a qu'à attendre fon retour au fépul-
cre , & toutes chofes fe développeront
d'elles-mêmes.
Dissertation XXXVIII. 66)
DIS SE RI A T ION X UL
Joan. I X . V. 1 7. DU îi ci
J . A // me tangere ; non-
du m enim a\\ P rcm
meurn. ( onL ( I \ 1 -\ •
CEttc l< fcnfe que J l hrift f.u't
le toucher , &
la raifoa lie-
nt obf<
de loi
Apôtres,
chc\
qu'il le i 1 M
1 ) ...
snd« il - ( du il y M
wersn
VCC
I
1 ni les A le le coucher. Il
le
Il cit
bra qu'il cil
ikâxiofieûd'u
CSG Dissertation XXXVIII.
quis'eft imaginé que ces paroles regar-
dèrent la million du faint-Efpric ,, & la
promette que Jefus-Chrift avoic faite à
les Difciples qu'il ne les laifleroit point
orphelins. Que c'eft-là probablement
que fe portoit l'intention ôc l'efprit de
Magdelaine lorfqu'elle embranoit {es
pieds, c'eft-à-dire qu'elle lui demandoit
le faint Efprit. Mais lui répondit-il, il
faut que je remonte vers mon Père avant
que je vous donne ce que je vous ai pro-
mis. Ne m'arrêtez donc point fi vous
êtes dans cette attente ; mais attendez
plutôt mon Afcenfion , 6c faites à mes
frères pour leur confolation le rapport
de ce que je viens de vous dire.
Ainfi, au conte de cet Auteur,Magde-
laine étant allée porter aux Apôtres la
nouvelle de rAfcenfion future de Jefus-
Chrift , elle avoit dans l'efprit une pro-
mette qu'il avoit faite trois jours aupara-
vant à fes Apôtres : qui très-apparem-
ment n'y fongeoient pas eux-mêmes dans
l'accablement de douleur où ils étoient
depuis j bien loin d'en avoir parlé à
Magdelaine ou à quelqu'autre que ce
fut. Cela ne mérite point qu'on s'amufe
à le réfuter. 11 fe réfute alTez de foi-
même.
La IL explication eft que Magdelai-
ne croyant que Jefus-Chrift étoit reiTiu-
Dissertation XXXVIIÏ. CCy
, a peu près comir .re , y
converfer familièrement l i
ciples comme auparavant > elle I
SI pieds pour .1 le
lui permit ahn qu'elle ne doutât nulle-
ment de là \
;s comme ell. » quitroil point ,
U l'en reprit, 6t il rue ol de lui
e qu'ell il p.is , e autre-
rois s'atra
voir de leçon, ce
: encore un (
rourne
vers ion Père. Mais qu'elle devoir fa-
voir qu'il croit r . condi-
tions plus excellent. . ÔC
ni peu il mo s le C
le tri
plus avec cette familial
ordinaire , elle <k le quiti
îrumci
: rl"
;
On B I ne
Ique défaut ,
*
fur cet en S* cette avidité
avec laquelle elle en de
H le rej us
cette cxpl. M ..i»
66% Dissertation XXXVIII.
commode eft que la vraie réponfe de
Jefus-Chrift : Je dois dans peu remon-
ter vers mon Père _, eft fupprimée & fous-
entendue : & que ce qu'il répond , car
je ne fuis pas encore remonté vers mon
Père j n'eft qu'une difficulté & comme
une objection contre fa défenfe & fa
vraie réponfe. Car qui ne voie qu'il ne
paroît pas de fuite à dire yje ne fuis pas
encore monté vers mon Père , vous ne de-
rqr donc pas me tenir les pieds embraf
fés \ puifqu'ii étoit aifé à Magdelaine
de tourner cette raifon contre lui-même.
C'eft tout le contraire. Je vous dois te-
nir \çs pieds embraftes pendant que nous
vous polfedons , & que vous n'êtes pas
encore monté vers votre Père.
La III. explication eft encore moins
naturelle. D'abord Magdelaine crut que
c'étoit le Jardinier. Mais aufli-tôt que
Jefus-Chrift l'eûr appellée par fon nom
elle le reconnut pour le Seigneur. Elle
fe défioit néanmoins de fes yeux, en le
croyant un phantôme. Elle voulut donc,
en le touchant des mains, effayerfi c'é-
toit véritablement le Seigneur. Mais il
lui dit, Ne me touchez pas. C'eft-à-
dire , ne m'éprouvez point en me tou-
chant. C'eft moi-même. Car je ne fuis
pas encore monté vers mon Père , de je
fuis encore fur la terre. Cette explica-
Dl^F RTATIO
: qui paroii d'abord tort plauiîbU
;
i . S 1 M
I huit avant qu
pcll M iicre , ce I
que couleur. Car on diroit qtl'ell
roit reconnu | v .1'-
ellc
uchant île (es in.un
Chntt lui m. il D
ainli : Elle l*ap
ou du
en iiu-i
1s. Car J huit ne lui
me (ou,
cette exel . : V
tencen ni ainli
r
Chrilt : ii I
cju'v avoir il de plus conn uic
I
i i elle croie i r J ' uit
ulunr
doute , par un
u luoi Jefui (
le le Koochec poui i
lui 1
1 que Map Icta i-li le
ntr ur un
■c , Se celle-, i I HM
€yoD I S S E R T A T I O N XXXVIII.
explication le prend pour un phantôme.
Cependant Jefus-Chrift , ainfi que je
l'ai dit plus haut, ne permet pas feule-
ment aux Apôtres de le toucher pour
fe guérir de leur erreur : mais il les y
exhorte , il les en prie , palpate & vi-
dete. Et lorfque Magdelaine veut d'elle-
même s'apurer de la vérité par cette
voie, Jefus-Chrift la rejette & lui dé-
fend de le toucher. C'eft une autre con-
tradiction dans la conduite de Jefus-
Chrift.
3. La première idée que ce qu'on voit
eft un phantôme , frappe tout d'un coup
Tefpritde crainte & d'horreur. Les Apô-
tres Féprouverenfjfelon faint Luc : Alors
tout troublés & effrayes ils s'imagi-
noient voir un efprit. Voici cependant
une femme qui fe jette fur un objet
qu'elle foupçonne un phantôme , pour
éprouver en le touchant fi c'eft un corps
folide ou non. Cette femme devoit être
bien hardie.
4. On ne comprend pas la raifon de
Jefus-Chrift pour empêcher Magdelai-
ne de le roucher. N'éprouvez pas en me
touchant fi c'eft moi que vous voyez.
C'eft moi-même. Car je fuis encore fur
la terre , & je ne fuis pas remonté vers
mon Père. Mais cette raifon fuppofoic
déjà ce qui ctoit en queftion. Car ce
F R T A T
dont M
va mort I
îve du I
me
■
la < qui
pour ce qu'il
; lune pour y
c'ej' , .jue je j ■
la un , I i
■
nature le.
La
ne lui tenu pas le
prc. t la joie de le
revoir i q Til n
cor^ i terounicr
corc plufk
où clic aurou le loiûl de le voir , mm
r6yi Dissertation XXXIX.
qu'elle le quittât pour aller porter à fes
Difciples l'heureufe nouvelle de fa Ré-
furreétion. Un des fens de «tV-rêfô*/
eft fe lier étroitement , s'attacher avec
ardeur , avec avidité.
DISSE R T AT I O N XXXIX.
Joan. XXL v. 22. Dicit ei Jefus:
Sic enim volo manere donecve-
niamy quid ad te ? Tu me fe-
quere. Concord. C. CXLVIIL
AVant que de nous engager dans
les difficultés de ce paftage , il eft
bon d'en fixer la leçon 3 & de convenir
de la lignification des termes. Au lieu
de Jlc le Grec porte ia.vs Jî j ce qui fait
une proportion conditionnelle : & il eft
vifible que cette leçon eft la meilleure,
non-feulement parce qu'elle fe trouve
fans variation dans tous les exemplaires
Grecs , & même en quelques manuf-
crits Latins \ mais parce qu'il paroît
aufli difficile que le Grec ait pu être
altéré par la diftradtion , ou par la té-
mérité des Copiftes , qu'il étoit aifé que
le latin put l'être par les mêmes caufes.
Rien n'eft plus facile que de faire^/fc de
A
D I S S r R T A T :
i'unei
dremêoie enfeml
Bcore quelques cxci
.rnver par la hardi
d'un Copiite ,
Niyfc dans les au: do
ces particules
pour taire un : mplet , & q
ajourer celle qui maoquoic a celle
qu'il trouvoir dan xempi ir-
troi.
I importe r El
i de manere. Il n'y a rien en cela
Mus il n'étoic pas aitc de même de
changer 1*. trou cni*w , t :s deux
mo: ifl (truie Itttrf
mu air pu ravonler le ;c-
M de l'une
D'ailleurs , l.i ; |/f, ne
s'accorde guère bien avec qu
qu'v a-r-il île pi
je V€k v «;
la
un liommc qui it de
toutes fes rift
vouloir q ' Mais
fai c,ir
cqu'i. I
pu
/ ull
674 Dissertation XXXIX.
bien éloigné de cette mauvaife difpo-
fïtion _, & il ne méritoit point cette du-
reté. La conditionnelle y? répond mieux
à fa demande , Jï je veux qu'il demeure
ainji , que vous importe ?
Enfin, comme Janfeniusde Gand Ta
fort bien remarqué _, la particuleyfc ,
ainji , falfirie la réflexion que fait faint
Jean fur l'opinion que les autres Difci-
ples fe formèrent touchant fa mort. Car
la proportion étant affirmative , Jefus-
Chrift auroit allure pofitivement que
Jean demeureroit en vie jufqu'à ion
avènement , & c'elt en effet ce que les
Difciples en conçurent. Or c'eft cette
opinion que faint Jean réfute dans la
fuite , lorfqu'en lui oppofant les pro-
pres paroles de Jefus-Chrift , il dit qu'il
navoit pas dit que Jean ne mourroit
point. Il n'a donc pas dit comme porte
cette leçon, je veux qu'il demeure ainji _,
oà dans l'état où il ^ j ce qui eft une
expreiîion fynonime à celle de ne mou-
rir point.
11 faut venir maintenant au fens des
termes & de toute la période. La prin-
cipale difficulté connue dans le fens de
mantre &c donec veniam , qui étant di-
verfement expliqués produifentdes fens
dtfFerens ; & il faut avouer que de quel-
que coté qu'on fe tourne on ne peut
SS F R T A T 10
prefque her de (e brouill -
avec is , ou avec l'hii-
la nature > ou enhn avec la
;re.
On a forme (ur ce e deux o:
uirraires i '
I qu'il n'elt point mon fe
prou r le verbe v.n il
Je nom . . . J 'ianie:
venc pour demeurer en vie , r
/<r /• inc en afe f
Philip, rn«
~r>C
. /. - . • i •
que je C et
; & dans cette
a(ju- e de m . j t
Mail .rcurs de ce fenriment fe
fonr c! en deux parties. I es
: que les anciens raifoienc meni
du tombeau de fa il ' ren-
•
commoder la lettre de l'Ecr. vec
l'hiftoire , que de dire qu'il i:ok c
plein de vie dans fotl :
meil y
ferott înrcîiompu que par la d
trompeté de 1 A ; cV: ils donnent
pour marque de e que dans
676 Dissertation XXXIX.
cet endroit la terre fe levé & s'abbailïe
par intervalles , ce qu'on ne peut attri-
buer qu'à la refpiration de cet Apôtre.
11 faut avoir l'imagination bien déréglée
pour lui avoir fait une récompenfe ôc
un effet de l'amour de Jefus-Chrift en-
vers lui , d'avoir été enterré tout vif
jufqu'au jour du Jugement , pendant
que faint Pierre & fes autres Collègues
dépouillés de leurs corps jouiffent dans
le Ciel de la gloire de Jefus-Chrift jc'eft
au moins le fupplice le plus affreux que
les Poètes ayent pu inventer pour punir
le Chef de la révolte des Géans contre
les Dieux de la Fable,
Les autres difent au contraire , qu'il
avoit été tranfporté dans le Paradis ter-
reftre où il demeure avec Enoch & Elie
jufqu'au fécond avènement de Jefus-
Chrift. Qu'alors il reviendra avec eux
dans le monde pour en être le Précur-
feur ( qualité honorable que lui donne
faint Grégoire de Nazianze , Verbi Pr&-
curfor) Se qu'il fouffrira comme eux le
Martyre fous l'Antechrift. 11 y a feule-
ment cetzQ différence entre les Auteurs
de cette opinion, que les uns pour fau-
ver le manere de la prédiction de Jefus-
Chrift , le font enfermer tout vivant
dans fon tombeau ., Se en fortir de mê-
me qu'il y étoit entré j parce qu'ils riQ
Dit SIH T AT f OH XX
peuvent pas concilier avec un * *
n
unit lui
Au lie les aur en-
core moins accorder
i eu-
lerr - mort 'r</r
me
on le croît de 1 1 •
ex les autres a
\ , ; le :on tombeau :
on n'y ave • m-
CUr.
( :
- des a
k.
iur ce1
rem , de 1 hnus , An
mtnor
(
en
il i
678 Dissertation XXXIX.
6tion de Jefus-Chrift touchant fon cher
Difciple , de quelque manière qu'on la
life. Si on Wtjtc eum voio manere _, &c.
pat une propoiition abfolue,, cette leçon
convient fort jufte à l'événement : la
volonté que Jefus-Chrift avoit que faint
Jean demeurât comme il étoit Jfc,c'eft-
à-due plein de vie jufqu'à fon fécond
avènement , nepouvoit pas s'accomplir
plus littéralement qu'en t*e transportant
dans le Paradis, & l'y faifant demeurer
avec Elie& Enoch, jufqu'à ce qu'il en
forte pour fouffrir la mort fous le règne
de l'Antechrift.
Si on fuit la leçon Jl eum volo , &c.
ce changement de la propoiition abfolue
en conditionelle ne met aucune diffé-
rence dans le fens } car cette condition-
nelle eft à peu près équivalente a cette
abfolue. Dans celle-ci Jefus-Chrift dé-
clare qu'il le veut biffer en vie jufqu'au
tems de fon retour _, ôc dans celle- là il
demande à faint Pierre, que lui importe
s'il le veut laiffer dans cet état jufqu'à
ce terme. Cela n'auroit point de fens fi
Jefus-Chrift n'avoit la volonté abfolue
de l'y laiffer ;&fi l'on fuppofe qu'il avoit
deifein de lui envoyer la mort com-
me aux autres fes Collègues , ôc qu'en
effet il la lui ait envoyée , on ne voit pas
pourquoi il demanderoit à faint Pierre
D'.^FRTATI^-.- XXXIX.
quel 1 il prcnoit àU vi ifl ,
qu'il n'avoir :
* :c ?
marqu iremeni
y ris 1.1 pi
fl •
le lort
blable au lien . que
la le contrait
lui juloit le en
:it U durec d . |ui
l.i fia , ce n'étoii .
& qu'il de fui-
•
coûte un peu d.
i exempec:
1 .. la mon a van: que de le
; dans ït l'ar.idis, on reproche
ils fe brouillent avec h
i , i»
"»ofc q
Forme en le
I
un
|
;icrc d..
6%o Dissertation XXXIX.
Tranflation , on reproche qu'ils ne jufti»
fient pas le mancre donec vcniam ; car
enfin ce n'eft pas demeurer en vie juf-
qu/a l'avènement du Seigneur que de
mourir auparavant , quand ce ne feroit
que d'une mort pafTagere & pour quel-
ques momens. A moins qu'on ne pré-
tende qu'une fi courte interruption de la
vie ne doit pas paffer pour une mort \
tout de même que faint Paul nous ap-
prend que les Elus qui fe trouveront à
la fin du monde feront emportes tous
vivans en l'air au-devant deJefus-Chiift
qui defeendra pour juger les hommes :
Simul rapiemur cum illïs in nubibus ob-
yiam Chrïfto in aéra \ quoique félon la
penfée des plusfavans Interprêtes, leurs
âmes feront féparées de leurs corps dans
ce même ravilfement ^ tk que dans le
même moment eiies leur feront réunies
pour continuer leur courfe.
A ceux qui après avoir fait mourir S.
Jean , ôc l'avoir fait entrer mort dans le
tombeau, l'en font fortir vivant pour le
mettre en état de fourrrir le martyre fous
l'Antechrift , on peut reprocher qu'ils
lui donnent une réfurrection mortelle Ôc
iemblable à celle de Lazare , quoique
ceux qui refïufciterent avec le Seigneur
eutFent repris une vie incorruptible ôc
glorieufe comme la Tienne. Puifque cet
I ) 19 S \ KTATIOV
. devoir récoavi d
te vie coure pareille à cell
avoir r
,ns,qi.
tire m>
nr t Pourquoi lai
à li nature Sur indil; .e que
I aurres hommes ne fonr <
ju'une pourquoi le
iem qu ; qui
(ans pt(] mbeau furent traaf-
s dans le P i .lis |
retire ou ils continuent leur % ; ir-
qu'clle doir h
le mar en pan.
qu | îliir ni
B
s inutile y m plu gné
I pre-
mière moi
i'!(e înllance.
1 i 1 r.n:î.
I
du
clivant aui V
68i Dissertation XXXIX.
quelques Evêques venus d'Orient à ce
même Concile , qui fe plaignoient qu'on
les avoit empêchés de baifer les tom-
beaux des Martyrs , & en particulier
celui de faint Jean l'Evangéiifte. 11 eft:
vrai que ce fécond témoignage eft d'au-
tant moins preiïànt , que le tombeau de
ce faint Apôtre pouvoit toujours con-
ferver fon nom , quoique fon Corps n'y
fut plus ; comme le faint Sépulcre après
la Rédirrection a toujours été nommé le
fépulcre du Seigneur.
Enfin à ceux qui font mourir faint
Jean avec Enoch & Elie fous l'Ante-
chrift , on reproche qu'ils ajoutent aux
deux témoins de l'Apocalypie un troi-
fieme témoin dont û n'y eft fait aucune
mention. Car encore qu'une Ange l'a-
vertiife à la fin du Chapitre 10. qu'il
dey oit encore prêcher l 'Evangile aux
peuples , aux Nations j aux hommes de
diverfes langues , & à plujieurs Rois _, il
ne dit rien néanmoins de fon martyre ,
quoiqu'on puifle répondre que l'Ange
par un fage ménagement de fa foiblefîe,
lui a voulu peut-être diflimuler une nou-
velle dont il auroit eu peine à porter le
poids.
11 femble que pour fe fauver de tant
d'inconvéniens qui font attachés à la vie
& à la réfurre&ion de faint Jean, il n'y
D I FRT\- XXXIX
a point de n ru a prendre que
Fphefe , fie
ne en cet cr.it jufq ..
fenriment
1 1 - is les ans le
fecours
de (es prie i faim qu
I pour
-a m de ^es des
;ccurs laftiqu
roit n-
e,qu.-
un hasard in ce ne le
parti le plus véritable , parce q Ton ne
|ue ce ne fou le pu.
>table.
11 ulcment averrirque ce pai
^reen d
l'une mon
T»ii ne lui
. fie naturelle.
<ue Jel t lui S
i '■
! • un - >ui : n < '• - t
•
I
■
:
I
684 Dissertation XXXIX.
leur annoncer une morr avancée de vio-
lente: Et comme la prédiction a déjà été
accomplie en ce fens dans la perfonne
de Jacques _, à qui Hérode fit couper la
tète à caufe de Jefus-Chrift j qui peut
douter qu'elle n'ait reçu le même ac-
complilfement dans fon frère ?
On pourroit peut-être alléguer qu'il a
bu le Calice du Seigneur lors qu'il fut
plongé dans l'huile bouillante , &: qu'il
fut banni dans Flfle de Patmos. IvJais
cela s'appelle feulement goûter , & non
pas boire jufqu'au fond; & quand Je-
fus-Chrift exigea des deux frères un té-
moignage authentique de leur amour &
de leur courage , il ne leur demanda pas
s'ils pouvoient goûter de fon Calice ,
mais s'ils le pouvoient boire : Potejlis
bibere caliccm quem ego bïbiturus fum ?
C'eft-à-dire , qu'il ne leur demanda pas
s'ils pouvoient foufFrir pour fon nom,
mais s'ils avoient le courage de mourir.
Au moins l'occafion ne leur en a pas
manqué. Saint Jacques , comme je l'ai
dit., l'a trouvée dans la haine des Juifs ^
& dans la perfécution qu'Hérode fit à
TEglife pour leur plaire ; elle ne pou-
voit non plus manquer à fon frère qui
eft mort au commencement de l'empire
de Trajan , & dans la perfécution qu'il
excita dès lors contre les Cruéciens.
Dissert a tiov
Les autres en p nbre ne
utfnr a tain: '
paiilble , «S: c'<
qui fe tire de blanc le
■
marque de Maldoiur , que fai;
i.
f\u il ne m
u ( pan du
. 6c L
[a'il n'croit A ;
qu wid
il i
m immoi
Il ne relie plusqua jult
te mort de 1 arriva l'an
de Jefus-ChriB .$ les :
cet
tui
de
qu'il marque pour i
ffirti L
nenc
616 Dissertation XXXIX.
jan le faffe mourir , que vous importe ?
Cette réponfe fuppofe que faint Pierre
♦ demandoit à Jefus-Chriit fi faint Jean
ne mourroit pas aufli-tôt que lui. Mais
c'eft à quoi cet Apôtre ne fongeoit pas,
lui qui ne favoit pas quand il mour-
roit iui-jnême. 11 paroît qu'il demande
feulement à Jefus-Chrift quel fera le
fort de fon ami en général , Se s'il finira
d'une mort violente comme lui , félon
l'intelligence qu'il avoit eue de la pré-
diction énigmatique qui le regardoit >
c'eft le fens naturel de ces mots hic au-
tem quid f Vous me prophétifez que je
mourrai les bras étendus en Croix. Et
celui-ci y Seigneur, que deviendra-t-il ?
Cependant un Proteftanr a cru que
toute la curiofité de Pierre , & la ré-
ponfe de Jefus - Chrift , concernoient
le tems où faint Jean devoit mourir.
Quant à ce que vous voulez favoir >
lui dit Jefus-Chrift félon cet Auteur, &
que vous me demandez avec tant d'em-
preiïement, ne vous en mettez pas en
peine. Il demeurera clans le monde juf-
qu'à ce que je vienne. Mais de favoir
quand cela arrivera , cela ne vous re-
garde point. Sur cela il fait cette réfle-
xion : 11 n'a donc pas dit que Jean ne
mourroit point , mais il a caché au con-
traire ce que Pierre lui demandoit , je
D I SSE R T A T l | $g7
ou Jean n:.
ie àoi. !icu
. de I
que cet A me
ii 1
a i nourri ce 1 >: .^ iplc qu
i donner
M Cil dl
i: de
tachée I uni
i pml-
fan :
ir la dernière dclolation i\
-
ius
veux que mon DiitipL
i fqu'a Ii ruine ^u remple de
I : . route 1.
impori
M us ponra : rrne
de 1 une Je
le m (i
ccque famt Picrt
manière qu'il mourut uip
lui , c ie Jean
. quelque année*
911 pas qu il dut uijuiii
633 Dissertation XXXIX.
avant le fiége de Jérufalem j & d'ail-
leurs ces vues timides & intérelTées font
•entièrement indignes de l'amitié qu'il
avoit pour fon Collègue. Ajoutez à cela
que faint Jean , qui eft mort l'an 99 , a
vécu 29 ans après la prife de Jérufa-
lem par les Romains , qui arriva Tan
70. Comment donc peut-on s 'imaginée
que Jefus-Chrift eût marqué cette prife
pour le terme de fa vie ?
11 y en a qui donnent à quoad reniant
le fens hyperbolique du jour du juge-
ment , non pour marquer précifement
le tems de fa mort , mais pour expri-
mer par cette manière de parler fa lon-
gue vie. Comme nous difons quelque-
fois pour exprimer une longue difptue:
Je crois qu ils difputeront jufqu3 au jour
du jugement. Ainfi Jefus-Chrift diroit
à faint Pierre , Si je veux que mon Dis-
ciple vive _, pour ainfi dire , jufqu à ce
que je vienne dans le monde _, que vous
importe ? Il fuffit de propoferce fens
pour le rejetter. C'eft mal garder, la
bienféance, que de mettre dans la bou-
che de Jefus Chriit une hyperbole autîi
outrée que de comparer environ 94 ans
que faint Jean a vécu , avec toute la fui-
te des fiécles jufqu'à la fan du monde.
Quelques-uns le prennent encore d'u-
ne aime manière pour le fécond ayéne-
Dissertation XXXI X. 69$
ment , non pour y tixcr la mort d.
Jeanj ir en exclure au contrai
julqu'a la fin des tems , Se tant que
durera le monde , la mon
Si je veux , | us-
Chrift , qu'il ne meur is dune
mort
fens il équivalent a un aune
que les atll renc , parce qu'il
iffirmai x qu'il demeure
:nh , cV dans
quel intérêt v prenez-vou*
Mus il raai pom ]ue ces Auteurs
fe réconcilient malgré bu la par-
ient IK
avec bien du il.
Jcius C hnlt au heu de c
Ton cmenr , ne s'cxpnrne-
t il pas hmpl
jan: .!c proportion v a : il
îondc,
Il exduit de cette d une ch
qu'il veut feulement exclu
\2 \ :nic pr
dre le m* le temj ck
rce q.
ft île d
cun ei"
Petite cet -Ht.
6ç)o Dissertation XXXIX.
Mais il eft vifible qu'ils l'ont évitée
comme un écueil , de peur de retomber
dans cette proportion qui tient du ri-
dicule : Si je veux qu'il demeure en vie
jufqu'à ce qu il meure , cela vous regar-
de-^ il?
Un autre inconvénient de ces expli-
cations eft que les Auteurs n'y ont au-
cun égard à ce qui fervit de fondement
aux Apôtres pour juger que ce Difciple
ne mourroit point. Car s'ils comprirent
que ce jour du jugement (îgnifioit feu-
lement jamais ou toujours _, bornés par
la durée de la vie de faint Jean , com-
ment demeurerent-ils dans la fauffe opi-
nion de fon immortalité jufqu'à en ré-
pandre le bruit parmi les Fidèles ? S'ils
n'y virent pas ce fens , eux qui étoient
accoutumés au langage de Jefus-Chrift,
quelle afîurance ont ces Auteurs d'avoir
mieux pénétré qu'eux le fens de fes pa-
roles.
Enfin un autre Auteur regarde ces pa-
roles de Jefus-Chrift, non comme une
proportion conditionnelle qu'il veuille
en effet accomplir , mais comme une
fuppoiirionfauife dont il fe fert unique-
ment pour mortifier la curiofitéde faine
Pierre. Quand je voudrois , dit- il , félon
cette idée , quilne mourut jamais j de
DlSSFRTATION XXXIX. <*1
qu'il demeurai c
^ur du jugement , de que
} ( l
ne dût mourir qu'alors s nuis il cxJut
lement la more pendant COU le tenu
ou elle ar
n feni de l'adverbe
aV.\ ians 1 ; e ,
comme elle dit que Samuel ne vit plus
Saul ju (qu'au jo
die m morcis j:. . ÔC
je ne a .avoue.,
de Jei
( .i:t y «\ (km pie dans l'Ev
gile, qu'il aiejamai me par
lappoficion, une proportion rauffe , 5c
ii n'an lie ,
itl'elle .venir.
le fuites mcommo-
:nk parablea de 1 opini m de la
mort léhielU Jenr La
probabil il .(qu'au
ne île l'Ame,
î'en jupe que
I i 1 I • : : '
li »'il viendra un ■ il
ire , «S: OÙ il M finira
:
que 1
6 \)i Dissertation XXXIX.
c'eft-à-dire, par le fupplice de la Croix.
Pierre jugeant que ion ami feroit bien-
aife de favoir aufli fa dernière avanrure,
de quoi il n'ofoit peut-être pas s'infor-
mer , demanda à Jefus-Chrift ce qu'il
deviendroit , c'eft-à-dire , s'il finiroit
auMi en fon tems fa courfe par le mar-
tyre. Jefus-Chrift lui répondit qu'il
vouloit qu'il demeurât en viejufqu'au
tems de fon fécond avènement. Mais
parce que cette volonté ain(i exprimée
d'une manière abfolue eut étonné faint
Pierre j il la tourna conditionnellement.
Se il lui dit que s'il faifoit ce deftein fur
faine Jean , ce n'écoit pas là fes af-
faires , & qu'il devoit fe contenter de
le fuivre , c'eft à-dire d'imiter jufqu'au
fupplice de la Croix l'exemple de pa-
tience Se de générofité qu'il lui avoit
donné.
Saint Pierre néanmoins Se tous les
autres Difciples prirent cette volonté
comme abfolue , Se ils répandirent dans
l'Eglife le bruit que Jean ne fouffriroit
point la mort , fondés fur l'équivoque
de Ja particule donec , jufquà ce que ,
qui tantôt enferme le terme dans le fens
de la proportion , Se tantôt l'en exclud j
Se ils crurent , non fans quelque raifon,
que la vie de leur Collègue dureroitbieu
DitsfJiTJ XXXIX
econda icnr, maisqu
, au lie
rifi lui raarquoii en i s-11
fin cV: le terme d
|u i
lcu.
ne mour-
!ir ,
iu*il d<
ten. uuii qu
alors qu'il doit i
faini Pi l'a fourl r la
iupplice d pal un a.
gC:
11 n'y aui aux
inc
n impomble. Que ii cm »n-
rencoii pi
fou
;i rein.
dans tous les aurr mes ,
lui
à (aine I
nplati-
fai:. it la h
parfaite comme elle ctoit ptodintcfm
pai (où
il 1m donnât dam . i
11 lui Au
6^4 DlSSERTATI ON XXXIX.
lieu que la vie a&ive que faint Pierre
répreientoit ne doit pas demeurer ici
imparfaite , ni attendre du fécond avè-
nement ce qui lui manque : mais qu'elle
doit dès ce monde tendre & parvenir à
fa dernière perfection.
FI N.
TABLE
T A B L E
DES CHAPITRES
Uticles du quatriem
\
IP. ( \ XVIII. /Il M
Chap.CX 6
CflAP. ( l <;
i. c
l. C
Ch ci. d
& 1 1
i . Traître ma» :ué.
L. «S 16
OCX IL Comttftûtiom \ Rcnon-
ment y 17
1 . S .i<r difpmc
ma Un
I 90*rIafoi de 1
Commundcmcr.t no . JO
4. /
5. ire fon
I CUL 5!mi
TABLE
i . Confolation des Apôtres. Ibid.
i. Efprlt de vérité. Amour obéifi
faut. 42
5. Efprit enfeignant toutes cho-
fes. 46
Chap. CXXXIV. Continuation du fer-
mon, 49
1 . /. C. véritable vigne , & nous [es
branches. Ibid.
2. Perféverer dans la charité. 52
3 . Monde ennemi des Fidèles. 5 5
4. Prédiclion des perfécutions. 5 8
Chap. CXXXV. Seconde fuite du fer-
mon. 5 9
1. Confolateur promis. Ibid.
2. Promejfe de la joie éternelle. 61
3. Promejfes des faveurs du Père. 64
Chap. CXXXV1. Prière de Jefus avant
fa Pajfon. 6 y
1 . Pour fa propre glorification. Ibid.
2. Pour le falut de fes Apôtres. 69
3. Pour le falut de tous les Elus. 74
Chap. CXXXV1I. Jardin des Oli-
viers, yj
1. Trijlejfc de Jefus. Ibid.
2. Jefus priant & agonifant. 8 1
3. Apôtres endormis. 83
4. A proche & baifer de Judas. 8 5
§. Juifs renverf es par terre* 87
6. Oreille coupée. 89
7. Reproches de Jefus aux Juifs. 92
Chap,
ITR?
me-
■
fi
1 de
I. 1
î i i
( ' .
i. . . '
4-
T A B l E
Jcfus . ta Cm 14?
Chap. CXLill. Cru dfiemem &
" : n. 151
E. 1 . *nent de la . Ibid.
I. L y regrets des femmes. 1 \ 5
3. Premier Breuvage. Cr^cifiemc
P. 1 56
j.. Titre de la Croix. 157
5 . Vêt en: znsaujbrt. 1 j 9
6. BUsfphemes y infultcs. 160
7. PoUars. 161
8. Paroles de Je fus à fa Mère. 165
9. 7"c E/L i6 5
i: P ?rr. 167
II. Prodiges, d - renier. Femme, 169
Chap. CXL1V. Côté percé. Sépul-
ture. 172.
1 . R t q u été des Ja ifs. I nd.
2. Jofeph d' A rimât i"3
5 . Qirye t u rc du côté. 1 7 4
4. ZV/a tVme. Sépulture» 177
kP. CXLV. Réfurreclion. 184
1. T dri Femmes au fcpul-
ckre. Ibid.
2. Courfe de Pierre & de Jean. 187
3. Premie-e A Jn de Jefus à
189
4. Femmes :es de la Réfurre-
m de Jefus. 192
5. Seconde Apparition de Jefus c
z 94
DES ChAP I TRIS.
G. Confeil des Juifs pour étouffer le
bruit de la Refurreclion. i 96
Chap. CXLVI. Troijleme & quatrième
apparition. ico
1. Quatrième Apparition à Emmaùs,
lbid.
2. Troijieme Apparition à Pierre. 207
Chap. CXLVII. Cinquième & fixieme
Apparition. : I
1. Cinquième Apparition aux on^e,
lbid.
2. Sixième Apparition aux mêmes
Apôtres avec Thomas. 214
Chap. CXLV1II. Septième Apparition
fur le tord de la mer. 2 1 %
1 . Seconde pêche miraculeufe. lbid.
2. Je fus confie fe s brebis à Pierre. 222
3. Prcdiclion du Martyre de Pierre.
1x6
Chap. CXLIX. Huitième , neuvième &
dixiem e Appariti on. 229
1. Huitième Apparition en Gali.
lbid.
2. Lr :me à Jacques. La di.\
rr.e dans la ville de Jerujalem. 230
3 . Prcmeffe du Saim-I jj 2 3 3
Chap. CL. Afccnf.on. 2; 5
de la Table des Chapitres.
; TABLE
DES DISSERTATIONS
du Tome quatrième
Dissertât. XXIX. T Uc. Cap»
JL XXII. y.
15. Dejîderio dejîderavi hoc Pafiha
manducarc vohifcum , antequam pa-
tiar. Concord. Cap. CXXVI1I. 1^9
Dissertât. XXX. Joan. Cap. XIII.
y. 1. Ante diem fejlum Pafckœ , 6'c.
Concord. Cap* CXXiX. 5 1 1
Dissertât. XXXI. Luc, XXII. y.
19. Hoc efi corpus meum quod pro
vobïs datur. Concord. Cap. CXXX.
Dissertât. XXXII. Matth. XXVI.
y. 2 S. Hic efi enim fanguis meus
Novi Tejlàmenti^qui pro multis effun-
detur in remijjlonem peccatorum. Con-
cord. Cap. CXXX. 587
Dissertât. XXXIIÏ. Matth. Cap.
• XXVI. y. 29. Dico autem vobïs :
non bibam amodode, hoc gerii mine vi-
ns y ufque in diem illum _, cùm ïllud
bibam y obi fi um novum in regno pa-
tris me'u Concord. Cap. CXXX. 600
..s Jcfu. C< \p.
XL
I. I
cor
DlSSfRT
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LTvangile analyse. v( (
T.
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